Dane, dans une prison inconnue : 00h50

Trois jours que je suis retenue dans ce sinistre lieu. Le silence morne et sinistre qui m'entoure me fout vraiment les jetons. Elle, grande citadelle, soumettant une armée rebelle de plus de mille hommes face à elle.

Cette mère, postée là, face à moi, m'est étrangère. Ce n'est pas celle que j'ai connu autrefois. Ce n'est pas la mère protectrice et attentionnée qui m'a éduqué. C'est une tout autre personne, l'inverse même de celle d'avant.

Ses sbires, comme je les appelle pour être à son service, l'encadrent fermement. Elles sont toutes droites comme des piquets, mais prêtes à se jeter sur la personne qui osera faire un pas fatal.

– Comme vous le savez, votre liberté a un prix. Chaque mois, nous organisons un tirage au sort des bienheureux prétendant à l'indépendance. Ces chanceux auront tout une semaine pour nous convaincre par de multiples moyens qu'ils méritent leur liberté. Mais attention, au moindre faux pas, je ne tergiverserai pas, ce sera fini à jamais. Des épreuves vous seront soumises, à vous de peser le pour et le contre afin de choisir au mieux ce qui vous semble le plus judicieux pour vous-même. Il n'y aura pas de retour en arrière. Ce sera la seule et unique chance qui vous sera fournit. Une seule. Saisissez-la.

Je n'étais absolument pas au courant de ce genre de pratique trompeuse qu'elles proposaient. D'où cette idée est-elle sortie ? Donne-t-elle vraiment la liberté à ceux qui se soumettent à tous les tests ? Je n'y crois guère.

Une chose est sûre, c'est que je veux sortir d'ici, mais pas par ce moyen-là, c'est beaucoup trop risqué.

– Des numéros vont vous êtres confiés, gardez-les précieusement jusqu'au jour voulu, jette-t-elle avant de disparaître hautainement, comme si elle marchait sur un tapis rouge.

C'est navrant.

On doit rester planté sur place en attendant la distribution des coupons. Mes yeux me piquent, mes paupières sont lourdes, je n'arrive plus à tenir, ça fait un bon moment maintenant que je n'ai pas eu le plaisir de me reposer. Impossible. Et ce n'est surtout pas ici que je dormirai le mieux.

Une femme arrive enfin à moi, ce n'est pas trop tôt ! Elle me tend un vulgaire bout de papier chiffonné, avec la combinaison suivante :

-336669-

Pas très difficile à retenir, mais pas non plus de bonne augure pour moi. Je viens à peine d'arriver, je ne vais quand même pas déjà être trimbalé ailleurs pour faire le bouffon devant la Reine ! Quel sacrilège ! Déjà qu'être son fils je le ressens comme une honte bien que la plupart des gens ne savent pas que la vraie Reine a des enfants, encore moins un garçon.

On est tous priés de rejoindre nos cellules, j'y vais le pied traînant. Je ne sais pas ce que cette proposition de liberté veut dire, mais en tout cas ce qui est sûr, ce n'est certainement pas pour y ressortir vivant et libre. C'est impensable !

Plus tard dans ma pièce exiguë, je remarque que la nuit est tombée dans une fissure du mur, déjà plusieurs jours que je suis retenu ici sans avoir de nouvelles de mes amis. Ça commence à être très dur de tenir dans des conditions humiliantes.

Je m'allonge l'esprit lourd, le corps fatigué mais assouvi de toute faim, qualité qui me permet de surmonter la malnutrition comme la mauvaise bouffe qu'on nous donne ici.

J'espère seulement que mes potes s'en sortent mieux que moi. Je prie pour qu'il ne leur soit rien arrivé de pire, car je suis le seul fautif de tout ça.
Ma soif de vengeance m'aveugle tellement, que je ne me rends plus compte qu'il y a d'autres pions autour de moi, prêts à payer le prix cher aux moindre de mes faux pas.

Cette vengeance, cette envie de vaincre ceux qui m'ont trahi est plus forte que tout, mais mes amis qui m'ont aidé jusqu'ici doivent aussi rester ma priorité, sans eux je n'y serais jamais arriver à moins de les avoir forcés. C'est pour ça que je me dois de sortir de cet endroit nauséabond, qui n'est pas un assez bon terrain de jeu pour s'amuser.

Je dois prendre les devant, avoir un coup de plus qu'eux, même plusieurs si je pouvais, or, dans les conditions actuelles, cela s'avère très compliqué de mettre au point une stratégie digne de ce nom. Le plus simple aurait été d'avoir une aide extérieur, mais je ne l'ai pas et il va falloir faire avec. Il va falloir que je me torture l'esprit.