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♞ Chapitre 5 - Poudre et poussière ♞

I'm a coyote, a lone wolf.



            Wiley fut réveillé au beau milieu de la nuit par des images macabres, qui tournoyaient sans discontinuer dans son esprit tourmenté. Il voyait une maison, en proie aux flammes. Il entendait le cri d'un bébé. Le martèlement des sabots sur le sol poussiéreux du désert. Les rires funestes de ceux qui avaient brisé tant de vies en une seule nuit. Il avait beau s'agiter dans son sommeil et tenter d'éloigner ces mauvais rêves le plus possible, ils étaient toujours là, prêts à ressurgir et à le tourmenter, nuit après nuit.

Le jeune cowboy passa une main tremblante dans ses cheveux blonds trempés de sueur. Même son oreiller était humide. Il prit de grandes inspirations pour tenter de calmer sa respiration, bien trop rapide. S'il avait pu disposer d'un miroir pour observer son reflet au travers, il était persuadé qu'il y aurait trouvé celui d'un garçon effrayé, loin de l'apparente assurance qu'il affichait toujours. Il était sûr qu'il n'aurait pas reconnu l'étranger qui se serait dressé face à lui.

Pleinement conscient qu'il ne retrouverait pas le sommeil après cela, il se glissa hors de son petit lit de fortune et sortit de la chambre, les jambes encore tremblantes. Il veilla à se faire le plus discret possible lorsqu'il entra dans le salon. Les murs étaient tellement fins dans la cabane étroite que le moindre grincement de parquet risquait de réveiller ses colocataires d'une nuit. Or, il ne voulait pas leur faire de frayeur et risquer de réveiller les enfants, qui semblaient suffisamment éprouvés par leur périple jusque-ici.

Il ne s'attendait pas à trouver Herald devant le feu. Le grand gaillard était installé sur une chaise en bois, les jambes étendues devant lui et le regard perdu dans les flammes encore hautes qui se dressaient devant lui dans la cheminée. En avançant, Wiley mit le pied sur une vieille planche du parquet, qui craqua légèrement. Aussitôt, Chuck et Herald tournèrent la tête dans sa direction d'un même mouvement.

Wiley évita délibérément le regard interrogateur d'Herald tandis qu'il venait s'asseoir non loin de lui, après avoir tiré une chaise devant la cheminée. Il n'avait aucune envie de parler de son insomnie. Herald sembla parfaitement le comprendre puisqu'il ne fit aucune remarque et se contenta de reporter son regard devant lui. Même Chuck reposa la tête sur ses pattes, épuisé après leur longue journée de marche.

-          Cette maison t'appartenait, pas vrai ?

Wiley poussa un long soupir. Il ne répondit pas tout de suite, si bien que le silence qui s'était instauré entre eux s'éternisa. Finalement, il croisa une jambe par-dessus l'autre et prit la parole, sans quitter les flammes des yeux.

-          Elle appartenait à mes parents.

Il sentait le regard pesant d'Herald sur lui et ne tourna pas la tête pour ne pas avoir à le croiser. Evoquer ces souvenirs était déjà suffisamment pénible pour lui, sans qu'il n'ait en plus à affronter la pitié dans le regard de l'homme à la peau noire. Il lui fallut plusieurs minutes avant de se sentir enfin prêt à reprendre la parole.

-          Ils sont morts lorsque j'avais trois ans. Je n'ai aucun souvenir d'eux, ou même de ma grande sœur. Tout ce dont je me souviens, c'est de leurs cris, ainsi que des miens. Et des flammes.

-          Comment as-tu pu survivre, tout seul et aussi jeune ?

-          J'ai eu beaucoup de chance. Certains parleront de destinée, d'autres de miracle. Pour moi, c'était juste de la chance, dans un sens. Si l'homme qui m'a recueilli ne m'avait pas entendu pleurer, je serais mort, moi aussi.

Le silence retomba entre eux. Wiley entendit la chaise d'Herald grincer légèrement lorsqu'il se laissa retomber contre le dossier. Le Traqueur lui jeta un discret coup d'œil. A la lueur du feu dansant dans la cheminée, les traits de l'homme paraissaient plus durs encore. Ils étaient tirés, signe de sa fatigue et du souci qu'il se faisait pour sa famille. Les flammes se reflétaient sur son crâne entièrement chauve et dans ses yeux sombres, où brillait une détermination farouche.

-          C'est lui qui les a tués, pas vrai ? Le Fléau, précisa-t-il en tournant la tête vers lui.

Wiley hocha la tête. Une boule lui obstruait la gorge, l'empêchant de déglutir. Il était tout simplement incapable de parler, en cet instant. Les années écoulées depuis le tragique événement qu'il avait vécu auraient dû faire disparaître les stigmates du passé et le rendre plus fort. Pourtant, malgré tous ses efforts pour chasser son passé, celui-ci revenait toujours à la charge, comme une sangsue dont il serait impossible de se débarrasser.

Pendant des années, les souvenirs de cette nuit avaient troublé son sommeil. Il avait tout essayé : plantes médicinales, attrape-rêves, hypnose chez un sorcier réputé... Rien n'avait fonctionné. Du moins, pas totalement. Il s'était rapidement rendu compte que lorsqu'il chevauchait et qu'il traquait quelque bête sauvage ou brigand sans pitié, ses soucis s'évaporaient brièvement, et ses mauvais rêves avec. Lorsqu'il avait l'esprit occupé par une traque, il n'avait pas le temps de penser au passé, seulement au présent et à l'avenir.

Mais malheureusement pour lui, dans le cas présent, sa Traque avait croisé la route du Fléau. Même s'il ne l'avait pas croisé en personne, en entendre parler à travers le récit de ces gens avait ravivé en lui de vieux souvenirs qu'il pensait avoir enfouis suffisamment profondément pour dormir sur ses deux oreilles. Il s'était visiblement fourvoyé.

-          Je ne le laisserai pas détruire ma famille, poursuivit Herald d'une voix grave.

-          Il ne vous laissera pas le choix.

Pour la première fois depuis le début de leur conversation, Wiley osa enfin croiser le regard du quadragénaire. Ce dernier le fixait sans rien dire, mais il n'avait pas besoin de parler pour lui faire ressentir sa détermination. Il était bien décidé à protéger sa famille, coûte que coûte, et Wiley savait, sans même le connaître, que l'homme serait prêt à donner sa vie pour sa famille. Une dévotion qu'il ne connaîtrait peut-être jamais.

-          Moi non plus, je ne lui laisserai pas le choix.

Wiley haussa simplement les épaules. Cette détermination farouche qu'affichait Herald était touchante et impressionnante, mais bien naïve. Il aurait beau se préparer au mieux à sa rencontre avec le Fléau, il n'échapperait pas au sort qu'il lui réservait. Herald sembla lire dans ses pensées car il haussa un sourcil et lâcha :

-          Tu es bien pessimiste, pour un jeune de ton âge...

-          Réaliste. Se faire de faux espoirs n'arrangera pas la situation.

-          Ce ne sont pas de faux espoirs. Je parviendrais à les sauver. Tu verras.

Une nouvelle fois, le Traqueur haussa les épaules, sceptique. Il se laissa choir au fond de son siège et se remit à fixer les flammes. Parfois, l'espoir était une bonne chose : elle permettait de tenir bon, de se raccrocher à quelque chose. Mais, dans la plupart des cas, elle était aussi dévastatrice. Une lueur aussi douce que mortelle. Une lueur qu'il avait bannie depuis bien longtemps de sa vie.

* * *

            Le renâclement des chevaux et le martèlement des sabots réveillèrent Wiley en sursaut. L'esprit encore un peu embrumé, le jeune cowboy se redressa en grimaçant. Il s'était endormi sur la chaise en bois et le regrettait amèrement. Son dos le faisait souffrir et craqua lorsqu'il s'étira. Il se passa une main sur les yeux puis regarda autour de lui et fronça aussitôt les sourcils. Herald se tenait derrière l'une des fenêtres de la petite cabane, son fusil en main. Il semblait plus tendu que jamais.

De nouveaux bruits de sabots se firent entendre à l'extérieur. Désormais bien réveillé, Wiley se leva et vint rejoindre le quadragénaire, qui tourna alors la tête vers lui. Wiley fut stupéfait par la terreur qu'il lut au fond de son regard. Alors, curieux, il s'avança pour regarder lui aussi à l'extérieur. Dès que son regard se posa sur les silhouettes qui se dessinaient dans la clarté encore toute relative de l'aube, il comprit pourquoi Herald était dans un tel état.

Avec leurs longs manteaux en cuir et leurs dagues, qui dépassaient de leurs vêtements, les brigands étaient bien reconnaissables. Les sbires du Fléau. Même s'ils étaient moins féroces que celui-ci, ils n'en restaient pas moins dangereux. Wiley le savait pour en avoir entendu parler à plusieurs reprises. Aucune cible de ces hommes ne restait vivante suffisamment longtemps pour en parler, bien sûr, mais les rares personnes qui avaient pu assister à leurs attaques étaient inflexibles : nul n'en réchappait vivant.

Souvent, ces cow-boys sans âme et sans cœur torturaient, mutilaient et violaient leurs victimes avant de les achever, d'une manière tout aussi barbare. S'ils étaient là, aujourd'hui, c'était un très mauvais présage. Herald le savait tout aussi bien que lui. Malgré tout, le père de famille restait déterminé à protéger sa femme et ses enfants, le fusil en joue. Même s'il ne le dirait pas de vive voix, Wiley l'admirait pour cela. Dans ce monde cruel, où chaque jour était plus difficile que le précédent, chacun avait déjà fort à faire avec sa propre survie pour s'occuper de celle de son prochain. Pourtant, Herald semblait plus déterminé encore à sauver la vie de sa famille que la sienne.

Wiley ne savait pas si c'était pour cette raison qu'il avait changé d'avis, mais il était sûr d'une chose : il ne laisserait pas ces innocents se faire massacrer sans rien dire. De toute façon, maintenant qu'il était coincé dans cette maison, encerclée par les hommes du Fléau, il n'avait pas vraiment le choix : s'il voulait survivre, il devrait les aider, et se montrer plus courageux que jamais.

C'est ainsi qu'il se retrouva aux côtés d'Herald, posté près de la fenêtre, son propre fusil en joue. Le quadragénaire sembla surpris, puisqu'il l'observa longuement sans rien dire, se détournant momentanément de ses cibles au dehors. Des bruits de pas dans son dos le forcèrent à se détourner pour observer sa femme et ses enfants, eux aussi tirés du lit par l'agitation qui régnait au-dehors.

-          Papa ? Qu'est-ce qui se passe ? demanda la petite fille d'une voix encore un peu endormie.

-          Ce n'est rien, ma chérie. Reste avec ta mère et ton frère.

-          Ils nous ont retrouvés ? demanda le petit garçon.

Ses grands yeux alertes trahissaient sa vivacité d'esprit, pour son jeune âge. Contrairement à sa petite sœur, à l'innocence encore bien présente, il avait compris ce qui se tramait. Et il avait peur, Wiley pouvait le lire dans ses yeux. Alors, dans un pur réflexe qui le surprit lui-même, Wiley posa son fusil contre le mur et s'éloigna de la fenêtre pour rejoindre l'enfant, devant lequel il s'accroupit. Il avait bien remarqué que l'enfant ne lui faisait pas confiance et était intimidé par sa présence. S'il se mettait à sa hauteur, cela pourrait sans doute l'aider à se sentir plus à l'aise.

-          Comment tu t'appelles, petit ?

L'enfant le regarda d'un œil méfiant, avant d'échanger des regards incertains avec ses parents. Ceux-ci l'encouragèrent d'un petit geste à répondre, et l'enfant replongea son regard apeuré dans le sien.

-          Emerik.

-          Emerik, répéta Wiley d'une voix douce. J'ai une faveur à te demander.

Le Traqueur vit une lueur nouvelle briller dans le regard de l'enfant. Il sut alors qu'il avait éveillé sa curiosité et poursuivit :

-          Je veux que tu aides ta mère à barricader toutes les issues. Tu peux faire ça pour moi ?

Emerik sembla hésiter quelques secondes, mais sa réponse ne se fit pas entendre : il bomba le torse et hocha la tête d'un air décidé. Wiley retint un sourire en voyant briller la même férocité que son père dans son regard. Il tapota son épaule puis se redressa. Il croisa le regard de la mère, qui hocha la tête avec reconnaissance. Elle savait tout aussi bien que lui qu'occuper l'esprit de son fils l'aiderait à penser à autre chose qu'au danger qui les guettait tous, à l'extérieur.

Le Traqueur rejoignit le père de famille à son poste, près de la fenêtre. Herald ne le quittait pas des yeux, ce qui le fit soupirer alors qu'il regardait par la lunette de son arme.

-          Quoi ?

-          Merci.

Wiley lui jeta un bref coup d'œil mais déjà, Herald s'était détourné pour se concentrer sur ce qui se passait dehors. Entendre les remerciements d'Herald de vive voix fit du bien à Wiley : il avait l'impression d'être quelqu'un de bien, d'avoir fait quelque chose de bien, de presque héroïque. Et cela gonflait son égo, lui faisait du bien au moral après la dure nuit qu'il avait passée.

Il ne s'attarda pas trop longtemps sur ce sentiment pour se concentrer sur leurs ennemis, qui avaient mis pied à terre et commencé à s'approcher lentement de la cabane. Ils étaient sept, tous armés jusqu'aux dents. Sept contre deux. Wiley n'était pas idiot : il y avait très peu de chances qu'ils s'en sortent, surtout face à des hommes aussi bien entraînés. Ils ne rataient jamais leur cible. Mais lui non plus.

-          Il va falloir ruser.

-          Ruser ? s'étonna Herald, dubitatif.

-          Si on ne les prend pas par surprise, on n'a aucune chance.

Herald ne répondit rien. Il savait qu'il avait raison. Dès que les premiers coups de feu seraient échangés, tout s'enchaînerait très vite et ils n'auraient plus le temps de réfléchir. Il fallait qu'ils le fassent maintenant, ou jamais. Soudain, une idée saugrenue germa dans l'esprit du jeune cow-boy, qui grimaça. Ce n'était clairement pas l'idée du siècle, et il n'en était absolument pas fier, mais il ne voyait pas d'autre solution à leur problème.

-          Il va me falloir les petits.

-          Quoi ? s'étrangla Herald en le regardant avec de grands yeux.

Wiley tourna la tête vers lui d'un air désolé et désigna les enfants, qui étaient revenus après avoir tout barricadé et se tenaient en retrait, près de leur mère, loin de la porte et des fenêtres pour éviter d'être blessés en cas d'échanges de tirs.

-          Le Fléau les veut, non ? C'est ce que vous m'avez dit. Si ses sbires ont fait le trajet jusque-ici pour les retrouver, je suis prêt à parier mon chapeau qu'ils les veulent vivants.

-          N'y pense même pas, gamin.

-          C'est le seul moyen.

Le bruit d'un cran de sûreté qu'on retirait résonna soudain à ses oreilles. Il baissa brièvement les yeux pour voir le canon qu'Herald pointait sur son ventre, son fusil toujours dans son autre main. Ses yeux lançaient des éclairs.

-          Et moi, si j'ai fait le trajet jusque-ici, ce n'est pas pour voir mes enfants se faire trouer comme des passoires.

-          Il ne leur arrivera rien. Faites-moi confiance.

Herald partit d'un rire gras qui vexa le Traqueur plus encore que son manque de confiance en lui. Le rire d'Herald se stoppa bien vite et Wiley sentit le canon de son colt s'enfoncer dans son ventre.

-          Te faire confiance ? T'as failli me plomber, hier soir.

-          Mais je ne l'ai pas fait. Et vous non plus.

Herald ne répondit pas. Non loin de lui, Wiley entendit Chuck grogner. Herald lui jeta un bref coup d'œil inquiet, avant de reposer son regard sombre sur Wiley, qui leva les mains en signe d'apaisement.

-          Ces hommes ne me connaissent pas. Si je fais semblant d'avoir pris vos enfants en otage, ils n'y verront que du feu.

-          Ils te plomberont dès que tu auras mis un pied dehors.

-          Je ne suis pas fou. Je ferai en sorte qu'ils n'en fassent rien. Mais je vais avoir besoin de votre aide.

Herald le dévisagea longuement. Wiley sentit une goutte de sueur glisser le long de son dos. Il faisait déjà chaud dans la petite cabane malgré l'heure matinale, mais ce n'était pas pour cette raison qu'il était en sueur : ils n'avaient que peu de temps avant que les hommes du Fléau n'entrent, et le canon froid de l'arme d'Herald appuyait douloureusement sur son estomac. Au bout d'un temps qui lui sembla durer une éternité, l'homme abaissa son colt et hocha la tête.

-          Qu'est-ce que tu attends de moi ?

* * *

            Wiley sentait les enfants trembler contre lui. Il leur adressa un énième regard rassurant, qu'ils ne remarquèrent même pas, le regard figé vers la porte qu'ils étaient sur le point de franchir. Le jeune cow-boy pressa alors gentiment leurs épaules, alors que les siennes étaient tout aussi tendues.

Son plan était loin d'être glorieux, et même plutôt risqué. Il savait d'expérience que jamais rien ne se passait comme prévu. Or, en l'occurrence, si le début de son plan échouait, il était un homme mort. Même s'il n'aimait pas cela et qu'il ne comptait jamais sur personne d'autre que lui-même, cette fois, il devrait se fier à Herald et sa femme s'il voulait avoir la moindre chance de survivre.

La femme, qui portait le nom d'Elise, d'après ce qu'elle lui avait dit, tenait fermement un fusil qu'il lui avait déniché dans un placard de la maison. L'arme était vieille et un peu rouillée, mais Wiley espérait qu'elle ferait l'affaire. Il avait glissé un peu d'huile dans le canon et sur le cran de sûreté pour les décrasser, en espérant que ce serait suffisant pour ce qui allait suivre.

Il échangea un hochement de tête entendu avec Elise avant de se tourner vers Herald, qu'il interrogea silencieusement du regard. Même s'il était toujours sceptique quant à son plan, il n'en montra rien et se contenta de s'approcher de la porte d'entrée d'un pas décidé, les mains vides. Herald ne portait plus aucune arme sur lui, Wiley s'en était assuré. S'ils voulaient surprendre les hommes du Fléau, mieux valait jouer franc jeu.

-          Prêts ? questionna Wiley en regardant tour à tour mari et femme.

Les deux époux hochèrent une nouvelle fois la tête. Wiley leur fit signe de se reculer puis attrapa la fillette d'un bras. Il la serra contre lui et la décala légèrement sur le côté, de sorte que son corps masque le haut du sien. Ce geste le dégoutait, mais il n'avait pas le choix s'il voulait rester en vie. Se servir de l'enfant comme d'un bouclier humain était sa seule chance de survivre.

De son autre main, il dégaina son colt et le plaça dans le dos de l'enfant, qu'il poussa en avant. Emerik restait tétanisé. Mal à l'aise, ne sachant pas vraiment comment agir, Wiley jeta un regard en arrière, en direction des deux parents, qui s'étaient reculés dans l'ombre. Elise s'avança alors pour venir s'accroupir juste devant son fils. Elle lâcha momentanément son fusil pour placer ses mains sur les joues de son fils, auquel elle sourit. Néanmoins, son regard trahissait sa peur, tout comme ses enfants. Même s'il faisait tout pour ne pas le montrer, Wiley avait peur, lui aussi. Il avait peur d'échouer. Peur de mettre inutilement la vie de cette famille, de ces enfants, en danger. Peur de mourir, aussi.

-          Emerik, mon chéri... Tu dois faire ce que Wiley te demande. Ça va aller. Papa et moi restons derrière.

Le petit garçon respirait vite, Wiley pouvait le voir à ses épaules et son dos, qui se levaient et s'affaissaient plus rapidement qu'à la normale. Ses grands yeux sombres étaient écarquillés. Son langage corporel rappelait à Wiley celui de ses chevaux lorsqu'un prédateur rôdait près de l'écurie : il traduisait l'effarouchement. Ne voulant pas brusquer l'enfant et l'effrayer davantage, il recula le canon de son arme.

-          J'ai peur, maman...

-          Je sais, mon chéri. Moi aussi. Mais nous devons faire confiance à Wiley. C'est un excellent Traqueur, et un survivant. Comme nous.

Le concerné déglutit, mal à l'aise. S'il avait survécu au Fléau, des années auparavant, ce n'était pas grâce à ses talents. Il était bien trop jeune pour s'en sortir seul. Comme il l'avait expliqué à Herald la veille, seule sa bonne étoile l'avait sauvé et lui avait épargné une mort certaine, douloureuse et affreusement lente. Néanmoins, il ne releva pas. Si cette idée qu'il avait réchappé au Fléau pouvait réconfortait les enfants et leur donner plus de force, alors il ne ferait rien pour infirmer les propos de leur mère. Il voulait qu'ils aient de l'espoir, aussi infime soit-il.

Lorsqu'il fut certain que les enfants étaient prêts, il replaça son arme dans le dos d'Emerik, en veillant à ne pas y exercer une trop forte pression. Il fallait simplement que les hommes du Fléau croient à la menace. L'air véritablement terrifié d'Emerik serait un atout : peut-être qu'ainsi, les hommes du Fléau tomberaient plus facilement dans le panneau.

D'un brusque coup de pied, Wiley ouvrit la porte d'entrée. Le vieux bois grinça et le jeune cow-boy pensa qu'il allait se fissurer, l'espace d'un instant. Il n'en fut rien, et il fit quelques pas en avant. Dès qu'il fut dehors, la lueur naissante du soleil levant l'éblouit, venant éclairer son visage crasseux. Il plissa les yeux pour s'en protéger et laissa son regard se promener sur les environs et sur les cavaliers qui se dressaient devant lui, à quelques mètres à peine. Même à cette distance, il pouvait percevoir leurs épaules tendues, leurs mains posées sur leur colt ou leur fusil, leurs lèvres pincées. Avec un petit sourire narquois, il s'avança encore, jusqu'au bord des marches.

-          Bonjour, messieurs !

-          Qui t'es, toi ? grogna l'un des cavaliers avec mépris.

-          Vous ne savez pas qui je suis ? J'en serais presque vexé, fit semblant de s'offusquer Wiley. Parce que moi, je sais qui vous êtes. Et ce que vous voulez. Ou plutôt, qui.

Sur ce, il poussa légèrement Emerik dans le dos à l'aide de son arme. Le garçon descendit lentement les marches, le regard rivé sur les cow-boys, qui ne les quittaient pas des yeux. La petite fille, Amalia, avait quant à elle le visage enfoui au creux du cou de Wiley, refusant obstinément de regarder les hommes qui leur faisaient face. Wiley sentit une larme s'écraser dans sa nuque et resserra doucement sa prise sur le corps frêle de l'enfant. Il aurait voulu la rassurer à l'aide de paroles apaisantes, comme sa mère l'aurait fait, mais il ne le pouvait pas. S'il le faisait, les autres trouveraient ça louche. Aucun hors-la-loi ne s'attendrissait, que ce soit face à des femmes ou des enfants. Il devait jouer son rôle à la perfection s'il voulait que ces enfants aient une chance d'être épargnés.

Le cavalier qui se tenait juste en face de lui, au centre du groupe, était en train de le jauger du regard. Tout comme sa monture, qui n'arrêtait pas de s'agiter sous lui, il semblait nerveux : un tic agitait le coin droit de sa bouche et sa veine ressortait sur son large front, en partie dissimulé par son stetson. Néanmoins, ses mains étaient nonchalamment croisées sur le pommeau de sa selle, et son visage ne trahissait aucune émotion. Une autorité indiscutable se dégageait de sa personne. D'ailleurs, les autres cavaliers lui jetaient de furtifs regards en coin, comme pour guetter son approbation. Wiley en conclut qu'il devait s'agir du chef de la bande. Le bras droit du Fléau, certainement.

-          Où tu les as trouvés ? demanda-t-il d'une voix grave et basse.

-          Ici même. Ils se cachaient avec leurs parents.

-          Et comment les as-tu trouvés ?

-          Je suis un Traqueur. Ce n'était pas difficile.

Comme si cette réponse suffisait, Wiley haussa nonchalamment les épaules. Le plus souvent, les Traqueurs faisaient équipe avec les autorités et remettaient entre les mains du shérif toutes sortes de criminels, plus ou moins dangereux. Mais parfois, il arrive que certains Traqueurs s'éloignent du droit chemin pour marchander avec des hors-la-loi tels que le Fléau. L'appât du gain était parfois bien plus fort que la justice... Le jeune homme espérait donc qu'il réussirait à se faire passer pour l'un de ces « déviants », qu'il avait déjà pu côtoyer par le passé.

Le regard du cow-boy en face de lui le transperçait. Un long frisson parcourut son dos, mais il se força à garder la tête haute et le regard dans celui de son interlocuteur. Après un temps qui lui sembla interminable, celui-ci descendit de son cheval, se laissant glisser à terre avec souplesse. Wiley le regarda s'approcher sans broncher. Lorsque l'autre s'arrêta en face de lui, il put enfin cesser de plisser les yeux, le soleil étant dissimulé par la haute stature du cow-boy.

Lorsque son regard glissa sur les enfants, Emerik eut un mouvement de recul, mais Wiley le rappela à l'ordre en appuyant un peu plus fort dans son dos avec son arme. La petite fille se cramponna quant à elle encore plus fermement à lui, sentant très probablement la présence de l'ennemi, au sens propre comme au figuré : Wiley ne savait pas combien de jours ils avaient chevauché, mais ils ne sentaient pas la rose fraîche, c'était une évidence.

-          Pourquoi les avoir traqués ? demanda finalement celui que Wiley supposait être le second du Fléau.

-          J'ai entendu dire que le Fléau les recherchait. Pour un paquet d'or, à ce qu'il paraît.

-          Le Fléau ne paye personne.

-          Moi, si.

Le ton de Wiley s'était fait plus ferme, son regard plus dur. Il vit son interlocuteur contracter la mâchoire, contrarié. Il n'en fit pas cas et poursuivit, s'efforçant de paraître le plus sûr de lui que possible.

-          Il va me payer. Sinon, il ne récupérera jamais ces enfants.

Le hors-la-loi le dévisagea longuement. Puis il éclata de rire. Un rire si bruyant qu'un vautour, en train de dépecer une carcasse non loin, s'envola. Bientôt, l'homme fut rejoint par le reste de la bande, que Wiley évita de regarder. Il savait qu'ils étaient nombreux, il l'avait vu depuis l'intérieur de la cabane. Il n'avait pas besoin de s'en assurer.

Lorsque le cow-boy cessa enfin de rire et reposa son regard sombre sur lui, Wiley se crispa. En cet instant, plus que jamais, l'homme qui lui faisait face avait l'air d'un tueur, un vrai. Pas de ceux comme Cecil, qui tuaient de temps en temps, lorsqu'ils n'avaient pas le choix, non : c'était le regard d'un tueur-né, un homme qui tuait non pas par dépit, mais par plaisir. Lorsqu'il se pencha vers lui, Wiley fit appel à tout son sang-froid pour ne pas reculer. Leurs deux visages se touchaient presque, désormais, si bien que lorsqu'il reprit la parole, Wiley sentit son haleine fétide, qui le fit grimacer.

-          Et tu crois qu'il a besoin de ta permission pour les récupérer ? demanda l'homme d'une voix doucereuse. Sais-tu au moins qui est le Fléau, mon garçon ?

-          Vous me prenez pour un idiot ? cracha-t-il en retour.

-          Tu te présentes devant mes hommes et moi sans défense, tu menaces notre patron, et tu as l'audace de te penser intelligent ?

-          Oui. Parce que si vos hommes tentent quoi que ce soit, ils exploseront dans la seconde qui suivra. Parce qu'ils ont actuellement les pieds sur un champ de mines.

Le sourire moqueur du bras droit du Fléau disparut aussi brusquement qu'il était apparu. Wiley sourit à son tour, fièrement. Du coin de l'œil, il vit les cavaliers échanger des regards inquiets, tandis que leurs montures s'affolaient sous leurs selles. L'homme qu'il avait en face de lui le jaugea longuement, cherchant à savoir s'il bluffait.

-          Tu mens.

-          Très bien. Dites à l'un de vos hommes de bouger, dans ce cas.

Les deux hommes se fixaient. Ni l'un ni l'autre ne voulait baisser les yeux, attendant que l'autre cède en premier. Mais aucun ne céda. Même s'il s'efforçait de rester de marbre, Wiley vit bien une lueur de doute passer dans le regard de son adversaire, qui avait par ailleurs pâli.

-          Je suis un coyote, un loup solitaire, déclara finalement le plus jeune d'une voix posée. J'ai plus d'un tour dans mon sac, vous savez. Il faut savoir se défendre, par les temps qui courent.

Ces paroles semblèrent mettre son adversaire plus en rage encore. Wiley vit la veine sur son front tressaillir, ses poings se serrer. Il savait qu'il ne devait pas le contrarier, mais c'était plus fort que lui. Savoir qu'il avait une emprise sur les hommes du Fléau le faisait exulter. Soudain, il perdit son sourire et retira son arme de derrière le dos d'Emerik pour la pointer sur sa gauche. Le coup partit presque immédiatement et le chapeau du cow-boy vola, troué en son centre. Surpris, l'homme resta bouche bée, le colt toujours en main.

-          Et je sais tirer, au cas où vous auriez le moindre doute. Alors dites à votre homme de baisser son arme. Sinon, la prochaine fois, c'est dans sa tête que ma balle viendra se loger.

Son interlocuteur le jaugea encore quelques instants du regard, puis fit un geste en direction de l'homme qui avait pointé son arme sur Wiley, lui demandant de la baisser.

-          Fitz, tu déconnes ! Laisse-nous lui tirer une balle en pleine tête, qu'on en finisse, protesta l'un de ses hommes.

-          La ferme ! aboya l'autre avant de se reconcentrer sur Wiley. Comment tu expliques que je n'ai pas sauté en descendant de cheval, s'il y a bien un champ de mines ?

-          Je n'ai juste pas appuyé sur le bouton.

En parlant, Wiley tapota la poche de son pantalon, où se trouvait un petit renflement. Il vit le dénommé Fitz y jeter un bref coup d'œil, avant qu'il ne reporte son attention sur lui. Percevant son air méfiant, Wiley soupira et désigna la cabane derrière lui d'un petit signe de tête.

-          Les parents sont à l'intérieur. Je les ai ligotés. Pour vous prouver ma bonne foi. Vous pouvez aller y jeter un œil, si vous voulez.

-          Parce que tu crois vraiment que je suis assez bête pour me jeter dans un piège comme ça ? ricana l'autre en le regardant d'un air méprisant.

-          Bien évidemment que non. Je comprends que vous ayez peur d'y aller, c'est vrai, ça pourrait être un piège, comme vous dites. Ou pas.

Wiley vit le doute s'immiscer chez son ennemi. Son regard alternait entre lui et la cabane devant laquelle il se tenait. Wiley attendit patiemment. Jusqu'à ce qu'enfin, son adversaire ne cède.

-          Elmut, va inspecter cette fichue cabane.

-          Et pourquoi ce serait à moi d'y aller ? s'offusqua l'homme qui avait tenté de tirer sur Wiley, quelques instants plus tôt.

-          Parce que c'est moi qui te l'ordonne !

Fitz commençait à perdre patience. Wiley avait vu son expression assurée s'effacer peu à peu, pour finir par totalement disparaître. Le bref regard qu'il lança à son sous-fifre suffit à persuader celui-ci de lui obéir. Dans un marmonnement résigné, il mit pied à terre et fit signe à l'un de ses camarades de le suivre à l'intérieur. Bien que réticent, l'homme descendit à son tour de cheval et le suivit. Lorsqu'ils passèrent près de lui, Wiley sentit leurs regards meurtriers le dévisager, mais il s'efforça de les ignorer. Fitz choisit ce moment pour se pencher en avant, si près que Wiley sentit son souffle lui caresser la nuque.

-          J'espère pour toi que tu ne t'es pas payé ma tête, mon garçon...

Ces paroles, murmurées au creux de son oreille, étaient une promesse. La promesse de sa mise à mort immédiate, dans le cas où il se serait effectivement moqué d'eux. Le blond ne se laissa pas déstabiliser et offrit au contraire un sourire en coin moqueur au hors-la-loi. Celui-ci se redressa alors dans un reniflement de mépris, tout en rapprochant sa main de son arme, accrochée à sa ceinture. Le Traqueur comprit alors que tout allait se jouer très vite. Il n'aurait pas droit à l'erreur.

Les mains moites, il raffermit son emprise sur sa propre arme, toujours collée au dos du petit Emerik. Au même instant, les deux hommes de main de Fitz pénétrèrent dans la cabane. Durant de très longues secondes, on n'entendit aucun bruit. Puis, finalement, un choc sourd fit se tendre Fitz. Le silence revint presque aussitôt, et alors que le hors-la-loi ouvrait la bouche, certainement pour demander des nouvelles à ses hommes, le premier coup de feu claqua dans l'air comme un fouet.

L'un des hommes de Fitz, resté à cheval, tomba de sa selle comme une masse, faisant s'envoler un nuage de poussière. Effrayé, son cheval fit un écart qui fit paniquer les autres chevaux, que leurs cavaliers eurent le plus grand mal à calmer. Lorsque Fitz reposa son regard sur Wiley, l'arme désormais dégainée, celui-ci le vit déglutir avec difficulté. Il lui avait suffit de deux secondes, deux petites secondes seulement d'inattention pour glisser la main dans la poche de son pantalon et en ressortir le petit objet rond qui s'y trouvait. Fitz ne comprit que trop tard.

Dans un petit sourire en coin, le Traqueur appuya sur le bouton. Dans un même mouvement, il ramena Emerik derrière lui et serra Amalia contre lui. Une déflagration sonore se fit entendre et le souffle de l'explosion propulsa Wiley, Fitz et les deux enfants plus loin. Les hommes de main du Fléau n'eurent même pas le temps de comprendre ce qui leur arrivait et ne ressentirent sans doute pas la moindre douleur. La tête de Wiley, en revanche, heurta de plein fouet le mur en bois de la cabane le plus proche. Une grimace de douleur lui échappa.

Un cri rageur se fit soudain entendre, non loin de lui. Le jeune cow-boy tourna la tête pour découvrir qu'il émanait de Fitz. Allongé sur le dos, à plusieurs mètres de lui, le bras droit du Fléau observait l'endroit où se tenaient encore ses acolytes, quelques secondes à peine plus tôt. Ne restaient désormais plus que des corps sans vie. Ou du moins... ce qu'il en restait. Aucun n'avait survécu.

Toutefois, en arrivant, Fitz avait pris soin de déployer des hommes de l'autre côté de la cabane. Ils avaient certes été épargnés par l'explosion, mais ne tarderaient pas à rappliquer. Le jeune Traqueur pouvait déjà entendre le bruit des sabots de leurs chevaux, qui se rapprochait de plus en plus. Il n'avait plus une minute à perdre.

Malgré sa tête et son dos douloureux, il se releva aussi vite que ses jambes le lui permirent et aida les enfants à en faire de même. Même s'ils étaient encore un peu sonnés, ils n'avaient rien de cassé, fort heureusement. Il les exhorta à avancer, tout en se tournant à moitié pour jeter un œil à Fitz. Ce réflexe lui sauva la vie. Wiley se jeta en avant et plaqua les enfants au sol. La balle siffla juste au-dessus de la tête, lui tirant un frisson. Bien que toujours à terre, Fitz avait rapidement retrouvé ses esprits et tenté de le tuer. Cette tentative ne serait pas la seule ; il le viserait jusqu'à ce qu'il l'ait tué.

-          Courez ! Allez vous mettre à l'abri là-dedans, allez ! Ne vous retournez pas ! cria-t-il en direction des enfants en les aidant à se relever.

Il les poussa en avant et, bien que chancelants, les deux enfants s'appuyèrent l'un sur l'autre pour regagner le pas des marches, qu'ils gravirent en courant. Quant à Wiley, il se redressa et se tourna totalement en direction de Fitz, sur lequel il tira à l'instant même où le hors-la-loi le visait à nouveau. Tout de même encore un peu étourdi suite à l'explosion qu'il avait causée et n'ayant pas vraiment le temps de viser, il tira complètement à l'aveugle. Fort heureusement pour lui, sa balle atteignit sa cible, qui poussa un hurlement de douleur et de rage mêlés lorsqu'elle vint se ficher dans sa jambe. Cela accorda quelques secondes de répit à Wiley, qui se hâta de gravir les marches du perron à son tour. Il trébucha sur la dernière, mais un bras le rattrapa juste à temps, lui évitant une chute. En relevant la tête, il croisa le regard d'Herald, qui lui offrit un léger sourire.

-          Va te mettre à l'abri, fiston.

En temps normal, Wiley se serait probablement offusqué de ce surnom ridicule. Mais la situation n'avait rien de normal. Il s'exécuta donc sans se faire prier. Immédiatement, Chuck vint à se rencontre en geignant et le gratifia de quelques coups de langue affectueux sur les mains. Un échange de tirs leur parvint et quelques secondes après lui, le père de famille rentra dans la cabane et referma la porte derrière lui. Le regard du plus jeune se posa presque immédiatement sur Elise, postée derrière une fenêtre. La métisse tirait sur tout ce qui bougeait, l'air plus concentrée que jamais. Elle ne semblait pas avoir remarqué que ses enfants l'avaient rejoint et s'accrochaient désespérément à elle, comme si elle risquait de disparaître d'un instant à l'autre.

Wiley prit à son tour position derrière une fenêtre et se saisit du fusil qu'il avait appuyé contre le mur avant de sortir. Il ne restait plus beaucoup de cavaliers. Entre Elise et Herald, qui avait déjà recommencé à tirer, sur la gauche de Wiley, le nombre d'ennemis encore en selle était presque nul. Il n'en restait plus que cinq, plus Fitz, que le jeune homme ne voyait même plus. Était-il seulement encore en vie ?

Sans grande difficulté, Wiley parvint à éliminer deux cavaliers. Plus que trois. Le temps qu'il recharge son arme, Elise et Herald en avaient éliminé deux autres. Le Traqueur se chargea du dernier. Presque aussitôt, un silence de plomb retomba sur la petite cabane perdue au milieu du désert. La poussière mit du temps à retomber, de même que la poudre de leurs armes, qui emplissait encore l'air et se mêlait à la poussière, formant une sorte de brouillard épais.

Wiley attendit quelques minutes, le temps d'être sûr qu'il ne restait plus aucun survivant. Puis il se releva et ouvrit la porte de la cabane. Le soleil, désormais à son zénith, l'aveugla pendant quelques secondes. Les yeux plissés, il compta les corps jonchant le sol, pour ceux qu'il pouvait le mieux identifier. Treize corps. Presque le nombre qu'il avait compté avant quand les hommes du Fléau avaient encerclé la cabane.

Avec prudence, suivi de Chuck, il descendit les marches du perron et se dirigea dans la direction où il avait laissé Fitz. Il n'était plus là. Il avait seulement laissé une tache de sang à l'endroit où il s'était tenu, quelques minutes plus tôt. Wiley s'accroupit et suivit quelques gouttes de sang du regard, jusqu'à ce qu'il distingue une silhouette, qui s'éloignait au grand galop et disparaissait déjà à l'horizon.

-          On devrait le prendre en chasse, proposa Herald, qui venait de le rejoindre.

-          Non. Ce serait prendre des risques inutiles.

Prenant appui sur ses genoux, il se releva et se tourna vers le quadragénaire, qui l'observait d'un air médusé.

-          Il ne reviendra pas tout de suite. Il est blessé. Pour l'instant, il va chercher un endroit où se reposer, ou alors rejoindre Pierce. Vous devez vous remettre en route sur-le-champ. Le temps qu'il les prévienne, vous aurez peut-être le temps de trouver une autre planque. Je connais un endroit sûr, par-delà les montagnes. Vous y trouverez refuge. Mais vous ne devriez pas traîner, ce n'est qu'une question de temps avant que le Fléau et ses hommes ne se remettent en chasse...

Herald le dévisagea longuement. Si longuement que Wiley crut qu'il s'était figé en véritable statue. Jusqu'à ce qu'enfin, à sa grande surprise, il ne vienne le prendre dans ses bras et ne le gratifie d'une grande tape dans le dos. Décontenancé, le jeune cow-boy resta sans bouger durant de longues secondes, avant de répondre un peu maladroitement à son étreinte.

-          Merci, fiston. Je te dois tout...

-          Mettez votre famille à l'abri. C'est tout ce qui compte.

Herald se recula finalement, laissant sa femme s'avancer. Les larmes aux yeux, elle vint à son tour serrer le jeune homme dans ses bras. Son étreinte était l'expression même de se reconnaissance et de son soulagement.

-          Merci pour tout, Wiley, souffla-t-elle en prenant son visage entre ses mains froides. Nous n'oublierons pas.

-          Je ne vous oublierai pas non plus.

C'est alors que son regard se posa sur Amalia et Emerik, restés en retrait. Tout comme il l'avait fait la veille pour les rassurer, en se mettant à leur hauteur, Wiley s'accroupit et leur offrit un sourire doux.

-          J'espère que vous ne m'en voulez pas trop...

Durant un instant, les enfants ne réagirent pas. Jusqu'à ce qu'enfin, ils ne se jettent tous deux dans ses bras. Wiley referma les siens autour de leurs corps frêles et déposa un bref baiser sur le haut du crâne de la fillette.

-          Tu vas me manquer..., sanglota-t-elle.

-          On se reverra peut-être, un jour.

Même s'il croyait lui-même très peu en ces paroles, il espérait qu'elles se révéleraient vraies, un jour ou l'autre. Après une dernière étreinte accordée aux deux enfants, il se redressa et observa tour à tour Elise et Herald, soudain très sérieux.

-          Vous devez être prudents. Entre les hommes du Fléau et cette Bête...

-          Quelle Bête ?

Le Traqueur prit alors le temps de leur raconter toute l'histoire. Lorsque le père de famille reprit la parole, les traits de son visage étaient plus tendus encore que lorsqu'ils s'étaient rencontrés, la veille.

-          Tu es sûr qu'il ne s'agit pas d'un simple puma ?

-          Certain. Cette bête... n'est pas normale. Il y a quelque chose qui cloche... Alors vous devez me promettre de vous montrer prudents.

-          On te le promet, le rassura Elise d'un sourire. Sois prudent, toi aussi.

Wiley ne put qu'hocher la tête. Le métier de Traqueur était plein de dangers, plus encore que celui de minier. Même s'il s'était toujours montré aussi prudent que possible, il craignait que cela ne suffise pas, cette fois... Pour autant, il ne voulait pas inquiéter Elise davantage. Alors, il ne fit aucun commentaire, se contentant de lui adresser un petit sourire aussi convainquant que possible.

Il ne lui fallut que quelques minutes pour rassembler ses affaires et préparer ses chevaux. Revigorés par une bonne nuit de sommeil, ceux-ci trépignaient d'impatience. C'était comme s'il n'avait absolument aucune idée du danger qui les avait guettés, un peu plus tôt dans la journée, et de celui qui continuerait de les guetter tout au long de leur quête. Wiley, lui, n'en était que trop conscient...

Pourtant, il n'hésita pas un seul instant à se remettre en selle. Seule la perspective de laisser Herald et sa famille derrière lui lui firent éprouver des remords. Pendant de longues secondes, il les observa, en ne pouvant s'empêcher de se demander s'il les reverrait un jour. Après un ultime regard en arrière, il se détourna et lança son cheval au galop. Chuck partit en courant, lui aussi, et devança les chevaux de plusieurs mètres, visiblement heureux d'évacuer toute la tension accumulée ces dernières heures.

Wiley ne se retourna pas. Il savait que s'il le faisait, il serait de nouveau pris de remords, et il n'avait pas le temps pour ça. Il avait une Bête à retrouver et à capturer. Les vies de nombreux innocents étaient en jeu. La famille de survivants le regarda donc s'éloigner, jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un point flou à l'horizon.


Bon, je ne retrouve pas ma story banner donc on fera sans ce coup-ci, je la rajouterai plus tard hein.

Qu'est-ce que ça fait du bien de revenir ici après tant de temps, en tout cas ! Wiley m'avait manqué.

J'espère que ce chapitre vous a plu ^^ Des théories quant aux enfants d'Herald et la raison pour laquelle Le Fléau les veut ? Les confidences de Wiley ? Et qu'avez-vous pensé de la petite scène d'échange de tirs ?

Je vais pouvoir être plus régulière dans l'écriture en tout cas, et je compte bien en profiter pour avancer sur cette histoire !

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