Bonus 1
Jeudi 23 Octobre
— Il est dix-neuf vingt-cinq, dit Aïdan.
Pierre adressa un sourire au blondinet et consulta l'écran du portable au-dessus de son épaule, touchant volontairement sa joue de la sienne. La chaleur qui s'en diffusait réveilla quelque chose au fond de lui. Ces mêmes picotements, ces mêmes frissons, ce même désir depuis déjà trois mois. Bien qu'il ne voulait précipiter les choses, le fait même de savoir que l'étudiant n'était plus en couple lui donnait le courage de tenter sa chance. Même s'il devrait sûrement attendre un peu. Mais, après s'être fait narguer pendant des mois par cet arrogant bad boy, il comptait bien charmer son ami et lui montrer qu'il serait un meilleur choix. Parce qu'il ne ferait jamais pleurer Aïdan.
Il reprit sa place et haussa les épaules avant de répondre avec un petit sourire joueur :
— Ça veut dire que tu dois me nourrir.
— T'as pas sonné à la bonne porte, rétorqua le blondinet avec un petit sourire amusé.
— Quel ingrat ! Tu me laisserais mourir de faim ? s'exclama-t-il en prenant un air interloqué.
Le voir rire et sourire après ces quelques jours de morosité réchauffa le cœur du brun.
— Pierre, je suis une buse en cuisine, ok ? Même Al..., il se mordit la langue et reprit, ma mère ne me laisse pas chauffer des pâtes. Et pourtant, c'est pas le plat le plus difficile du monde.
— Non, effectivement...
Pierre le fixa en silence, ayant parfaitement conscience du lapsus révélateur. Alex. Encore et toujours. Comment Aïdan pouvait s'y accrocher alors qu'il lui avait fait tant de mal ? Un mystère à l'état pur... Surpris, il l'observa se tirer les mèches du devant comme pour essayer de se cacher derrière, fuyant son regard. Afin de briser le silence, il frappa sur ses cuisses et se redressa en retroussant ses manches.
— Bon, je vais faire à manger parce qu'il est hors de question que ton appart' parte en fumée !
— Sinon, j'ai des trucs en boîte.
— Aïdan ! Tu vas finir par avoir une mauvaise alimentation, grimaça-t-il.
Il attrapa les bras de son ami et le remit sur pieds en le rapprochant de son torse. Un peu trop pour que ce ne soit qu'une coïncidence. Les iris émeraudes du plus jeune se figèrent dans les siens et il esquissa un sourire, malicieux. Bon dieu ! Il mourrait d'envie de goûter à cette bouche appétissante... On se calme Pierre ! s'intima-t-il. Ne vas pas tout gâcher.
Il lâcha à regret les bras de son ami tout en laissant ses doigts glisser lentement puis s'avança vers l'armoire qu'il ouvrit d'un geste vif.
— Qu'est-ce que tu fais ?! s'exclama Aïdan, paniqué.
Ce dernier se précipita vers son camarade et tenta de cacher ses vêtements de son corps bien que ce ne soit pas vraiment efficace étant donné la taille de basketteur que Pierre possédait.
— Je te cherche une tenue pour ce soir, répliqua le brun en souriant.
— Quoi ?
Il manqua de saisir son menton pour refermer sa bouche ouverte sous peine d'y glisser sa langue, gardant un self-control exemplaire qui lui vaudrait sans aucun doute une médaille. C'est injuste d'être aussi mignon ! pensa-t-il, son cœur s'amusant à faire des loopings dans sa poitrine.
— Je t'ai dit qu'on allait en boîte.
— Et je t'ai dit que je ne voulais pas, répondit Aïdan en fronçant les sourcils, croisant ses bras.
Amusé, le brun glissa ses doigts dans les cheveux blonds du plus jeune qui darda un regard noir dans sa direction. Pas le moins du monde intimidé, il enroula son bras autour de ses épaules et le rapprocha, savourant son odeur qui l'enveloppait. En étant aussi proche, il avait presque l'impression qu'Aïdan était à lui. Si seulement...
— Tu veux te réconcilier avec Vicky ?
Aussitôt, il sentit le blond bien plus attentif et il lui adressa un sourire, certain de pouvoir le tirer en boîte de nuit maintenant qu'il était question de son amie.
— J'ai fait en sorte qu'elle soit là ce soir. Mais ! Si tu veux une conversation, va falloir t'habiller en conséquence et rappliquer.
Soyons honnête cinq minutes : Pierre rêvait simplement de le mater en chemise et de lui arracher les boutons pour lui faire l'amour toute la nuit. Il allait devenir dingue à ainsi le côtoyer sans pouvoir aller plus loin que de simples gestes amicaux.
— Ok...
Il esquissa un sourire ravis en comprenant qu'il venait de le convaincre et se fit pousser de la penderie afin qu'Aïdan sélectionne lui-même ses habits. Il eut le temps d'apercevoir une chemise noir d'encre et en pantalon blanc en lin avant que ce dernier ne file à la douche en lui ordonnant de préparer à manger.
Un frisson agréable le saisit et il peina à chasser les images tantôt sensuelles et tantôt innocentes qui inondaient sa boîte crânienne. Aïdan était son idéal. Et un fantasme, malheureusement. Pour le moment seulement ! s'encouragea-t-il en se concentrant sur le repas. Il entendit la pomme de douche s'actionner et les gouttelettes frapper contre les parois et dû se faire violence pour ne pas imaginer le blondinet, nu et désirable.
— Je vais finir complètement fou..., marmonna-t-il pour lui-même.
Il ne s'était pas attendu à tomber amoureux aussi vite. Dès qu'il l'avait vu, son cerveau s'était mis en alerte et son cœur avait dansé la samba. Une pensée fugace l'avait traversé, lui indiquant que ce devait être lui. Son air angélique, ses iris clair et intense, l'innocence qui l'entourait l'avait séduit presque aussitôt. Puis la réalité l'avait brutalement rattrapé : un garçon comme ça ne pouvait pas être célibataire. Stupide Alex ! Quel chanceux, sérieux... Enfin, le terme était sûrement inexacte puisqu'il l'avait largué. Au moins pouvait-il marquer son territoire sans craindre d'être découper en morceaux par ce type.
Alex avait été là avant lui, mais il était partit. Il laisserait le temps qu'il faudrait à Aïdan pour se remettre, mais il ne permettrait pas à d'autres de l'avoir. Il avait pensé qu'être ami suffirait, mais la vérité était qu'il n'arrivait pas à simplement l'apprécier. Son désir de le toucher se transmettait par ces fois où il lui ébouriffait les cheveux, lorsqu'il lui effleurait l'épaule, le ramenait contre lui ou s'amusait à le porter quelques secondes ; son besoin de l'avoir à proximité le faisait lui courir après... Il n'en pouvait plus ! Il rêvait de ses lèvres, de son corps, de ses caresses et il ne savait pas quand son cerveau aurait décidé qu'un break était nécessaire. Histoire de ne pas lorgner sur son ami.
« Qui n'a plus de petit ami ! » susurra sa conscience. « Techniquement, tu lorgne sur de la chair fraîche et célibataire ! »
Il retourna les escalopes de dindes pour se calmer, désireux de ne pas aller trop vite. Soudain, une petite mélodie s'éleva dans la pièce et, curieux, il se dirigea jusqu'au lit sur lequel gisait le portable d'Aïdan. Il observa le correspondant, histoire que ce dernier ne loupe pas un appel important, et renifla dédaigneusement en apercevant le nom d'Alex apparaître à l'écran. Sérieusement ? Après deux semaines ?
Il hésita quelques secondes, puis saisit le combiné avec un petit sourire avant de s'assoir sur le matelas, la cuillère imbibée de crème fraîche dans l'autre main.
— Allô ? fit-il, le cœur battant.
Il savait qu'il jouait avec le feu, mais Alex s'était assez moqué du blond pour ne pas lui miner davantage le moral quand ce dernier acceptait lentement de remonter la pente.
— Qui est à l'appareil ? demanda ce dernier, agressif.
Calmement, le brun croisa ses jambes et répondit :
— Pierre.
Il entendit son interlocuteur lâcher un soupir exaspéré avant de rire jaune, visiblement peu ravis.
— Qu'est-ce que tu fais avec le téléphone de mon petit ami ?
Il sort les crocs, lui, songea Pierre en observant la porte close de la salle d'eau, espérant que le blond ne débarquerait pas à tout instant. Il ne faisait jamais cela d'habitude, mais l'envie de protéger Aïdan était présente et le poussait à prendre certaine mesure. Ainsi qu'une petite dose de jalousie, avouons-le.
— Vous n'êtes plus ensemble, non ?
Il contempla sa spatule en écoutant le silence qu'imposait le brun à l'autre bout du fil. Il lécha distraitement la crème et attendit, espérant que cet appel soit rapidement expédié.
— Qu'est-ce que tu racontes ? souffla Alex, visiblement ébranlé.
— Aïdan m'a dit que vous étiez séparés, répondit-il en haussant les épaules.
— Qu'est-ce que... !
Son interlocuteur grogna dans son coin avant de s'énerver, préférant attaquer le brun :
— Ça ne me dit pas ce que tu fous avec son portable !
Pierre soupira en feignant la lassitude alors qu'il n'en menait pas large devant la fureur d'Alex, et rétorqua :
— Aïdan l'a laissé. Il sonnait, j'ai décroché.
Il restait volontairement vague, conscient d'entretenir les quiproquos. Une part de sa conscience lui soufflait que ce n'était pas bien et qu'il n'aurait jamais dû répondre, Aïdan n'appréciait sûrement pas ce genre d'attitude, mais une autre - plus vil - lui disait que certaines choses devaient être remises à leur place et qu'Alex en faisait partie.
— Chez toi ? demanda-t-il agressivement.
— Non.
Pierre écouta le silence avant de revenir baisser le feu pour que les escalopes ne brûlent pas. Théoriquement, il ne mentait pas. Alex ferait ses propres conclusions, tout seul.
— On est chez lui, ajouta-t-il au bout d'un moment.
— Passe-le moi, ordonna Alex qui réunissait tout le sang-froid qu'il avait pour ne pas envoyer son portable à l'autre bout de la pièce.
— Non.
— Passe-le moi, connard ! s'énerva-t-il.
Pierre déposa la spatule sur le plan de travail, dans un récipient pour ne pas tacher le meuble, et se mordilla la lippe en se disant qu'il était heureux de ne pas l'avoir en face de lui. Qui sait ce dont il serait capable...
— Pas besoin de t'exciter, rétorqua-t-il avec calme. Aïdan est sous la douche.
Le silence qui suivit fut presque religieux, annonciateur d'une future mort. La sienne en l'occurrence. Il se pinça les lèvres et écouta la respiration sifflante du brun, la main accrochée à la gazinière.
— Qu'est-ce qu'il fout sous la douche ?
— Bah... il se lave.
— T'as très bien compris, me prends pas pour un con !
Pierre soupira, feignant d'être blasé, et répliqua :
— Qu'est-ce que tu voulais ?
— Non mais pour qui tu te prends ?! Tu te parades avec son tel et tu crois que je vais tout te dire ? Dis-lui que j'ai appelé, il rappellera.
— Hum... pas sûr qu'il en ait envie.
— J'en ai rien à foutre de ton avis ! s'écria Alex à l'autre bout du fil. Tu lui dis, c'est clair ? Et un petit rappel, monsieur je-marche-sur-les-platebandes-de-l'autre, si tu le touche... je te démembres. Et crois-moi, ce n'est pas une menace en l'air. Aïdan m'appartient.
— Il est libre de choisir qui il veut. Tu ne peux pas l'enchaîner, rétorqua Pierre avant de raccrocher purement et simplement.
Il imagina parfaitement l'ex du blondinet fulminer derrière son écran et l'affubler de tous les noms possibles et imaginables. Un sourire amusé étira ses lèvres avant qu'il ne hausse les épaules, insouciant. Certes, Alex était impressionnant, mais il se battait tous les deux pour la même personne. En amour comme à la guerre, tous les coups étaient permis. Même s'il ne se connaissait pas aussi vil.
Il supprima l'appel d'Alex pour ne pas plomber le moral du blond et profiter de sa soirée et, par pure jalousie, il bloqua le numéro du brun avant de reposer le smartphone là où il l'avait pris. Ni vu, ni connu. Et pourtant, il se sentait un peu coupable.
Lorsque Aïdan fit tourner le verrou de la porte et sortit pour le rejoindre, Pierre perdit l'usage de la parole pendant plusieurs minutes. La chemise noir d'encre enveloppait parfaitement la silhouette du blond et, rentrée négligemment dans son pantalon, elle lui donnait un petit air sexy. Quant au bas... il eut chaud rien qu'en dérivant sur le postérieur de son ami mis un peu trop en valeur à son goût. Pas sûr qu'il sache encore respirer.
N'y tenant plus, sa langue forma d'elle-même les mots qui lui traversèrent l'esprit et il se sentit rougir en prenant conscience de ce qu'il venait de dire :
— T'es vraiment à tomber !
Le visage d'Aïdan prit une teinte pivoine et il balbutia quelque chose d'inintelligible avant de détourner les talons pour ouvrir sa table. Tout aussi gêné, Pierre retourna à sa poêle dont il désactiva le feu, sentant ses oreilles chauffer. C'était beaucoup trop pour son cœur.
Aïdan était littéralement à croquer ! Comment allait-il faire pour se retenir toute la soirée ? Un vrai supplice quand son corps appelait celui du blond. Je suis foutu. Genre vraiment foutu.
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Voilà le petit bonus de Pierre qui s'est déroulé le 23 octobre dans « 30 jours avant Halloween », on a donc le point de vue de Pierre, celui que vous attendiez tous !
Je sais que j'ai mis du temps à le publier, surtout qu'il est relativement court... mais en ce moment ce que j'écris n'est pas bien. J'avais besoin de temps pour me remettre dedans 🙄
Que pensez-vous de Pierre ? De ce qu'il a fait et pourquoi ?
Dans cette scène, je voulais montrer que malgré la gentillesse du brun à l'égard d'Aïdan, il est humain et amoureux. Parfois, on fait des choses qu'on regrette dans l'espoir d'être remarqué. Pour Pierre, ça n'aura malheureusement pas tourné en sa faveur 🤷🏼♀️
On découvre aussi la détresse d'Alex qui se traduit par une colère plutôt agressive. Pour info, il a ensuite tout envoyer valser dans sa chambre avant d'aller se promener pour se calmer... et pleurer à l'abri des regards 🥺 Heureusement, on sait tous comment ça se termine 😉
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