[Chapitre 1]
Je me réveillais sur un lit au matelas dur dans un sursaut, un goût étrange et métallisé dans la bouche. Du sang ? J'observais mon corps pour déceler quelque blessure. Pourtant j'étais propre et aucunement blessée. Je portais une robe blanche ample et légère qui rendait ma peau encore plus pâle. Mes longs cheveux châtains semblaient avoir été soigneusement brossés et posés sur le lit.
Je ne connaissais pas cet endroit : c'était une petite pièce aux murs en pierre grise et brute sans fenêtre. La seule source de lumière était une simple bougie posée sur une table de chevet à ma gauche. Aucun moyen de savoir l'heure.
Je n'entendais pas plus de bruit que je ne captais de lumière naturelle. Il régnait un silence profond presque cérémonial et, je devais l'avouer, assez apaisant. Mais l'heure n'était sûrement à la méditation. Il fallait absolument que je sache où je me trouvais. Et comment je m'étais retrouvée là.
Sortir. Oui, exactement sors d'ici Lyria.
Mais au moment où je me redressais en posant les yeux sur la seule porte, cette dernière s'ouvrit laissant entrer une jeune femme blonde qui devait avoir la trentaine.
Elle portait une tunique blanche cintrée à la taille dont le tissu semblait bien plus résistant que ma robe. Ses bottines en cuir marron claquèrent sur le sol carrelé lorsqu'elle s'approcha de moi calmement un sourire rassurant aux lèvres. Un peu trop confiante à mon goût. . .
Je sautais alors prestement du lit, sans me soucier de mes muscles endoloris et sans la quitter des yeux, sur la défensive. Nous nous trouvions à présent chacune d'un côté du lit. Elle dut remarquer ma grimace puisqu'elle se permit de dire sur un ton conciliant :
- Tu devrais éviter les mouvements brusques pour l'instant, Lyria.
Je me contins de lui rétorquer : "Il aurait fallu le dire avant de débarquer sans toquer" mais me retint. Ma priorité était d'obtenir des réponses aussi je demandai sur un ton brusque :
- Qui êtes-vous et que m'avez-vous fait ? Et comment connaissez-vous mon prénom... alors que je ne me souviens plus de rien.
Ma voix se cassa alors que je me rendais compte que je ne me rappelais ni de ma date de naissance ni d'un membre de ma famille ou de ce que j'avais mangé la semaine passée. J'avais beau chercher dans ma mémoire, tout restait anormalement vide. La femme eut un mouvement vers l'avant que j'arrêtai, criant tout en saisissant le porte-bougie ainsi que la flamme qui sembla s'intensifier :
- N'approchez pas !
Je fus satisfaite de voir le sourire de mon interlocutrice s'effacer en regardant mon arme de fortune. Pourtant elle me répondit tranquillement :
- Je m'appelle Calista, je serai ton mentor. Ta panique est légitime mais ton amnésie est normale, tu viens d'intégrer l'Ordre des Aimés du royaume sacré d'Ostran. Tu te trouves dans le quartier général de l'Ordre, au cœur de Remilla, la capitale.
- C'est vraiment le joli discours de bienvenue que vous sortez à tous vos nouveaux soldats ? demandai-je d'un ton blasé que je feignis désintéressé.
En réalité mon cerveau fonctionnait à plein régime et je me rappelai ce qu'était l'Ordre, la puissante armée d'Ostran aussi estimée que crainte par les autres royaumes du continent pour leurs caractéristiques bien particulières : ses soldats, les "aimés des dieux", étaient tellement dévoués pour leur pays qu'ils renonçaient à leur passé et à leur identité mais surtout ils possédaient tous des pouvoirs d'exception... Ce qui signifiait donc que j'avais moi aussi un pouvoir ?!
Mais avant que je puisse poser plus de questions, j'entendis des bruits agités de pas et des voix s'élever hors de la pièce. Sans réfléchir, je m'élançai vers la porte laissée ouverte avant que Calista n'ait pu me retenir. Je me retrouvai dans un long couloir du bout duquel venaient les voix. Je courus consciente qu'elle me poursuivait probablement.
J'arrivais dans une grande salle circulaire dans laquelle une dizaine de personnes s'affairait à ouvrir deux hautes et lourdes portes en bois massif à l'aide d'un mécanisme complexe de chaines en métal. Alors que des gens poussaient des roues à l'aide de leur force musculaire, d'autres manipulaient des flux d'air visibles par un léger scintillement en faisant des mouvements fluides avec leurs mains.
Ce n'était que des jeunes hommes et femmes pourtant ils étaient tous d'une discipline exemplaire, habillés en tenue de combat, cottes de maille, cuirasses et capes aux couleurs sombres. La scène était impressionnante et je n'osais plus bouger de peur de gêner leur manœuvre, bien que je me sentais totalement inadaptée à l'ambiance générale avec ma robe de nuit claire et mes pieds nus...
Mais aucun des soldats ne semblait remarquer ma présence dans leur extrême effort et concentration. Les portes s'ouvrirent au bout de quelques secondes laissant passer une lumière tellement éclatante que je dus me couvrir les yeux.
J'aperçus un petit groupe de soldats entrer par les portes en trottinant tandis qu'une autre équipe sortait.
Deux garçons qui devaient avoir la vingtaine entrèrent en premier. L'un passa sa main dans ses cheveux ondulés qui tombaient sur sa nuque et remercia à la cantonade ceux qui venaient de lui ouvrir avec un sourire franc. Une des filles qui avaient poussaient la porte appela l'autre :
- Milo t'avais raison pour le coq gagnant des jeux d'hier soir !
Le garçon en question avaient les cheveux noirs et courts. Il se contenta de répondre par un clin d'œil malin et déclencha un rire général.
- Si seulement tes prédictions pouvaient nous servir pendant nos missions, se moqua une fille rousse qui arrivait elle aussi de l'extérieur.
Mais en entrant elle me remarqua et fronça directement les sourcils. Je devrais l'éviter...
- Qu'est-ce que la nouvelle fait ici ? s'enquit-elle d'une voix cassante.
Avant que j'ai pu répliquer quoique ce soit de mordant (ma résolution de l'éviter déjà totalement oubliée), une autre fille brune qui venait d'arriver à la suite de la rousse dit d'une voix douce :
- Elle vient de se réveiller, elle est encore perdue.
Ma présence maintenant remarquée par les autres soldats déclencha quelques murmures :
- Elle n'est pas trop âgée...?
- Son pouvoir a l'air puissant !
Calista qui se tenait derrière moi sans que j'ai pu la remarquer m'expliqua :
- La plupart des nouvelles recrues sont repérées vers leur dix ans. Et tu en as presque le double.
Mais avant que je puisse lui poser d'autres questions, les murmures cessèrent et les portes commencèrent à se fermer. Un dernier soldat venait de rentrer dans le quartier général de l'Ordre.
Il était svelte et portait une longue cape noire à capuche qu'il enleva quand les portes furent tout à fait closes. Et bien que la lumière du jour venait de disparaitre, je vis un éclat flamboyant passer dans ses yeux clairs et froids quand nos regards se croisèrent.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro