Chant 3-Partie 2
Et la messagère Iris s'envola chez Hélénè aux bras blancs, s'étant faite
semblable à sa belle-sœur Laodikè, la plus belle des filles de Priamos, et
qu'avait épousée l'Anténoride Élikaôn.
Et elle trouva Hélénè dans sa demeure, tissant une grande toile double,
blanche comme le marbre, et y retraçant les nombreuses batailles que les
Troiens dompteurs de chevaux et les Akhaiens revêtus d'airain avaient
subies pour elle par les mains d'Arès. Et Iris aux pieds légers, s'étant
approchée, lui dit :
: Viens, chère nymphe, voir le spectacle admirable des Troiens dompteurs
de chevaux et des Akhaiens revêtus d'airain. Ils combattaient tantôt dans la
plaine, pleins de la fureur d'Arès, et les voici maintenant assis en silence,
appuyés sur leurs boucliers, et la guerre a cessé, et les piques sont
enfoncées en terre. Alexandros et Ménélaos cher à Arès combattront pour
toi, de leurs longues piques, et tu seras l'épouse bien-aimée du vainqueur.
Et la déesse, ayant ainsi parlé, jeta dans son cœur un doux souvenir de son
premier mari, et de son pays, et de ses parents. Et Hélénè, s'étant couverte
aussitôt de voiles blancs, sortit de la chambre nuptiale en pleurant ; et deux
femmes la suivaient, Aithrè, fille de Pittheus, et Klyménè aux yeux de
bœuf. Et voici qu'elles arrivèrent aux portes Skaies. Priamos, Panthoos,
Thymoitès, Lampos, Klytios, lbkétaôn, nourrisson d'Arès, Oukalégôn et
Antènôr, très sages tous deux, siégeaient, vieillards vénérables, au-dessus
des portes Skaies. Et la vieillesse les écartait de la guerre ; mais c'étaient
d'excellents agorètes ; et ils étaient pareils à des cigales qui, dans les bois,
assises sur un arbre, élèvent leur voix mélodieuse. Tels étaient les princes
des Troiens, assis sur la tour. Et quand ils virent Hélénè qui montait vers
eux, ils se dirent les uns aux autres, et à voix basse, ces paroles ailées :
Certes, il est juste que les Troiens et les Akhaiens aux belles knèmides
subissent tant de maux, et depuis si longtemps, pour une telle femme, car
elle ressemble aux déesses immortelles par sa beauté. Mais, malgré cela qu'elle s'en retourne sur ses nefs, et qu'elle ne nous laisse point, à nous et à
nos enfants, un souvenir misérable.
Ils parlaient ainsi, et Priamos appela Hélénè :
: Viens, chère enfant, approche, assieds-toi auprès de moi, afin de revoir
ton premier mari, et tes parents, et tes amis. Tu n'es point la cause de nos
malheurs. Ce sont les dieux seuls qui m'ont accablé de cette rude guerre
Akhaienne. Dis-moi le nom de ce guerrier d'une haute stature ; quel est cet
Akhaien grand et vigoureux ? D'autres ont une taille plus élevée, mais je
n'ai jamais vu de mes yeux un homme aussi beau et majestueux. Il a
l'aspect d'un roi.
Et Hélénè, la divine femme, lui répondit :
: Tu m'es vénérable et redoutable, père bien-aimé. Que n'ai-je subi la noire
mort quand j'ai suivi ton fils, abandonnant ma chambre nuptiale et ma fille
née en mon pays lointain, et mes frères, et les chères compagnes de ma
jeunesse ! Mais telle n'a point été ma destinée, et c'est pour cela que je me
consume en pleurant. Je te dirai ce que tu m'as demandé. Cet homme est le
roi Agamemnôn Atréide, qui commande au loin, roi habile et brave
guerrier. Et il fut mon beau-frère, à moi infâme, s'il m'est permis de dire
qu'il le fut.
Elle parla ainsi, et le vieillard, plein d'admiration, s'écria :
: Ô heureux Atréide, né pour d'heureuses destinées ! Certes, de nombreux
fils des Akhaiens te sont soumis. Autrefois, dans la Phrygiè féconde en
vignes, j'ai vu de nombreux Phrygiens, habiles cavaliers, tribus
belliqueuses d'Otreus et de Mygdôn égal aux dieux, et qui étaient campés
sur les bords du Sangarios. Et j'étais au milieu d'eux, étant leur allié, quand
vinrent les Amazones viriles. Mais ils n'étaient point aussi nombreux que
les Akhaiens.
Puis, ayant vu Odysseus, le vieillard interrogea Hélénè :
: Dis-moi aussi, chère enfant, qui est celui-ci. Il est moins grand que
l'Atréide Agamemnôn, mais plus large des épaules et de la poitrine. Et ses
armes sont couchées sur la terre nourricière, et il marche, parmi les
hommes, comme un bélier chargé de laine au milieu d'un grand troupeau
de brebis blanches.
Et Hélénè, fille de Zeus, lui répondit :
: Celui-ci est le subtil Laertiade Odysseus, nourri dans le pays stérile
d'Ithakè. Et il est plein de ruses et de prudence.
Et le sage Antènôr lui répondit :
: Ô femme ! tu as dit une parole vraie. Le divin Odysseus vint autrefois ici,
envoyé pour toi, avec Ménélaos cher à Arès, et je les reçus dans mes
demeures, et j'ai appris à connaître leur aspect et leur sagesse. Quand ils
venaient à l'agora des Troiens, debout, Ménélaos surpassait Odysseus des
épaules, mais, assis, le plus majestueux était Odysseus. Et quand ils
haranguaient devant tous, certes, Ménélaos, bien que le plus jeune, parlait
avec force et concision, en peu de mots, mais avec une clarté précise et
allant droit au but. Et quand le subtil Odysseus se levait, il se tenait
immobile, les yeux baissés, n'agitant le sceptre ni en avant ni en arrière,
comme un agorète inexpérimenté. On eût dit qu'il était plein d'une sombre
colère et tel qu'un insensé. Mais quand il exhalait de sa poitrine sa voix
sonore, ses paroles pleuvaient, semblables aux neiges de l'hiver. En ce
moment, nul n'aurait osé lutter contre lui ; mais, au premier aspect, nous ne
l'admirions pas autant.
Ayant vu Aias, une troisième fois le vieillard interrogea Hélénè :
: Qui est cet autre guerrier Akhaien, grand et athlétique, qui surpasse tous
les Argiens de la tête et des épaules ?
Et Hélénè au long péplos, la divine femme, lui répondit :
: Celui-ci est le grand Aias, le bouclier des Akhaiens. Et voici, parmi les
Krètois, Idoméneus tel qu'un dieu, et les princes Krètois l'environnent.
Souvent, Ménélaos cher à Arès le reçut dans nos demeures, quand il venait
de la Krètè. Et voici tous les autres Akhaiens aux yeux noirs, et je les
reconnais, et je pourrais dire leurs noms. Mais je ne vois point les deux
princes des peuples, Kastôr dompteur de chevaux et Polydeukès invincible
au pugilat, mes propres frères, car une même mère nous a enfantés.
N'auraient-ils point quitté l'heureuse Lakédaimôn, ou, s'ils sont venus sur
leurs nefs rapides, ne veulent-ils point se montrer au milieu des hommes, à
cause de ma honte et de mon opprobre ?
Elle parla ainsi, mais déjà la terre féconde les renfermait, à Lakédaimôn,
dans la chère patrie.
Et les hérauts, à travers la ville, portaient les gages sincères des dieux,
deux agneaux, et, dans une outre de peau de chèvre, le vin joyeux, fruit de
la terre. Et le héraut Idaios portait un kratère étincelant et des coupes d'or ;
et, s'approchant, il excita le vieillard par ces paroles :
: Lève-toi, Laomédontiade ! Les princes des Troiens dompteurs de
chevaux et des Akhaiens revêtus d'airain t'invitent à descendre dans la
plaine, afin que vous échangiez des serments inviolables. Et Alexandros et
Ménélaos cher à Arès combattront pour Hélénè avec leurs longues piques,
et ses richesses appartiendront au vainqueur. Et tous, ayant fait alliance et
échangé des serments inviolables, nous, Troiens, habiterons la féconde
Troiè, et les Akhaiens retourneront dans Argos nourrice de chevaux et dans
l'Akhaiè aux belles femmes.
Il parla ainsi, et le vieillard frémit, et il ordonna à ses compagnons d'atteler
les chevaux, et ils obéirent promptement. Et Priamos monta, tenant les
rênes, et, auprès de lui, Antènôr entra dans le beau char ; et, par les portes
Skaies, tous deux poussèrent les chevaux agiles dans la plaine.
Et quand ils furent arrivés au milieu des Troiens et des Akhaiens, ils
descendirent du char sur la terre nourricière et se placèrent au milieu des
Troiens et des Akhaiens.
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