Chant 1-Partie 3
Et Athènè aux yeux clairs lui répondit :
: Je suis venue de l'Ouranos pour apaiser ta colère, si tu veux obéir. La
divine Hèrè aux bras blancs m'a envoyée, vous aimant et vous protégeant
tous deux. Donc, arrête ; ne prends point l'épée en main, venge-toi en
paroles, quoi qu'il arrive. Et je te le dis, et ceci s'accomplira : bientôt ton
injure te sera payée par trois fois autant de présents splendides.
Réprime-toi et obéis-nous.
Et Akhilleus aux pieds rapides, lui répondant, parla ainsi :
: Déesse, il faut observer ton ordre, bien que je sois irrité dans l'âme. Cela
est pour le mieux sans doute, car les dieux exaucent qui leur obéit.
Il parla ainsi, et, frappant d'une main lourde la poignée d'argent, il repoussa
sa grande épée dans la gaine et n'enfreignit point l'ordre d'Athènè.
Et celle-ci retourna auprès des autres dieux, dans les demeures
olympiennes de Zeus tempétueux.
Et le Pèléide, débordant de colère, interpella l'Atréide avec d'âpres
paroles :
: Lourd de vin, œil de chien, cœur de cerf ! jamais tu n'as osé, dans ton
âme, t'armer pour le combat avec les hommes, ni tendre des embuscades
avec les princes des Akhaiens. Cela t'épouvanterait comme la mort
elle-même. Certes, il est beaucoup plus aisé, dans la vaste armée
Akhaienne, d'enlever la part de celui qui te contredit, roi qui manges ton
peuple, parce que tu commandes à des hommes vils. S'il n'en était pas
ainsi, Atréide, cette insolence serait la dernière. Mais je te le dis, et j'en
jure un grand serment : par ce sceptre qui ne produit ni feuilles, ni
rameaux, et qui ne reverdira plus, depuis qu'il a été tranché du tronc sur les
montagnes et que l'airain l'a dépouillé de feuilles et d'écorce ; et par le
sceptre que les fils des Akhaiens portent aux mains quand ils jugent et
gardent les lois au nom de Zeus, je te le jure par un grand serment : certes,
bientôt le regret d'Akhilleus envahira tous les fils des Akhaiens, et tu
gémiras de ne pouvoir les défendre, quand ils tomberont en foule sous le
tueur d'hommes Hektôr ; et tu seras irrité et déchiré au fond de ton âme
d'avoir outragé le plus brave des Akhaiens.
Ainsi parla le Pèlëide, et il jeta contre terre le sceptre aux clous d'or, et il
s'assit. Et l'Atréide s'irritait aussi ; mais l'excellent agorète des Pyliens,
l'harmonieux Nestôr, se leva.
Et la parole coulait de sa langue, douce comme le miel. Et il avait déjà
vécu deux âges d'hommes nés et nourris avec lui dans la divine Pylos, et il
régnait sur le troisième âge. Très sage, il dit dans l'agora :
: Ô dieux ! Certes. un grand deuil envahit la terre Akhaienne ! Voici que
Priamos se réjouira et que les fils de Priamos et tous les autres Troiens se
réjouiront aussi dans leur cœur, quand ils apprendront vos querelles, à vous
qui êtes au-dessus des Danaens dans l'agora et dans le combat. Mais
laissez-vous persuader, car vous êtes tous deux moins âgés que moi. J'ai vécu autrefois avec des hommes plus braves que vous, et jamais ils ne
m'ont cru moindre qu'eux. Non, jamais je n'ai vu et je ne reverrai des
hommes tels que Peirithoos, et Dryas, prince des peuples, Kainéos,
Exadios, Polyphèmos semblable à un dieu, et Thèseus Aigéide pareil aux
immortels. Certes, ils étaient les plus braves des hommes nourris sur la
terre, et ils combattaient contre les plus braves, les centaures des
montagnes ; et ils les tuèrent terriblement. Et j'étais avec eux, étant allé
loin de Pylos et de la terre d'Apiè, et ils m'avaient appelé, et je combattais
selon mes forces, car nul des hommes qui sont aujourd'hui sur la terre
n'aurait pu leur résister. Mais ils écoutaient mes conseils et s'y
conformaient. Obéissez donc, car cela est pour le mieux. Il n'est point
permis à Agamemnôn, bien que le plus puissant, d'enlever au Pèléide la
vierge que lui ont donnée les fils des Akhaiens, mais tu ne dois point aussi,
Pèléide, résister au roi, car tu n'es point l'égal de ce porte sceptre que Zeus
a glorifié. Si tu es le plus brave, si une mère divine t'a enfanté, celui-ci est
le plus puissant et commande à un plus grand nombre. Atréide, renonce à
ta colère, et je supplie Akhilleus de réprimer la sienne, car il est le solide
bouclier des Akhaiens dans la guerre mauvaise.
Et le roi Agamemnôn parla ainsi :
: Vieillard, tu as dit sagement et bien ; mais cet homme veut être au-dessus
de tous, commander à tous et dominer sur tous. Je ne pense point que
personne y consente. Si les dieux qui vivent toujours l'ont fait brave, lui
ont-ils permis d'insulter ?
Et le divin Akhilleus lui répondit :
: Certes, je mériterais d'être nommé lâche et vil si, à chacune de tes
paroles, je te complaisais en toute chose. Commande aux autres, mais non
à moi, car ne pense point que je t'obéisse jamais plus désormais. Je te dirai
ceci ; garde-le dans ton esprit : Je ne combattrai point contre aucun autre à
cause de cette vierge, puisque vous m'enlevez ce que vous m'avez donné.
Mais tu n'emporteras rien contre mon gré de toutes les autres choses qui
sont dans ma nef noire et rapide. Tente-le, fais-toi ce danger, et que ceux-ci le voient, et aussitôt ton sang noir ruissellera autour de ma lance.
S'étant ainsi outragés de paroles, ils se levèrent et rompirent l'agora auprès
des nefs des Akhaiens. Et le Pèléide se retira, avec le Ménoitiade et ses
compagnons, vers ses tentes. Et l'Atréide lança à la mer une nef rapide,
l'arma de vingt avirons, y mit une hécatombe pour le dieu et y conduisit
lui-même Khrysèis aux belles joues. Et le chef fut le subtil Odysseus.
Et comme ils naviguaient sur les routes marines, l'Atréide ordonna aux
peuples de se purifier. Et ils se purifiaient tous, et ils jetaient leurs
souillures dans la mer, et ils sacrifiaient à Apollôn des hécatombes choisies
de taureaux et de chèvres, le long du rivage de la mer inféconde. Et l'odeur
en montait vers l'Ouranos, dans un tourbillon de fumée.
Et pendant qu'ils faisaient ainsi, Agamemnôn n'oubliait ni sa colère, ni la
menace faite à Akhilleus. Et il interpella Talthybios et Eurybatès, qui
étaient ses hérauts familiers.
: Allez à la tente du Pèléide Akhilleus. Saisissez de la main Breisèis aux
belles joues ; et, s'il ne la donnait pas, j'irai la saisir moi-même avec un
plus grand nombre, et ceci lui sera plus douloureux.
Et il les envoya avec ces âpres paroles. Et ils marchaient à regret le long du
rivage de la mer inféconde, et ils parvinrent aux tentes et aux nefs des
Myrmidones. Et ils trouvèrent le Pèléide assis auprès de sa tente et de sa
nef noire, et Akhilleus ne fut point joyeux de les voir. Enrayés et pleins de
respect, ils se tenaient devant le roi, et ils ne lui parlaient, ni ne
l'interrogeaient. Et il les comprit dans son âme et dit :
: Salut, messagers de Zeus et des hommes ! Approchez. Vous n'êtes point
coupables envers moi, mais bien Agamemnôn, qui vous envoie pour la
vierge Breisèis. Debout, divin Patroklos, amène-la, et qu'ils l'entraînent !
Mais qu'ils soient témoins devant les dieux heureux, devant les hommes
mortels et devant ce roi féroce, si jamais on a besoin de moi pour conjurer
la destruction de tous ; car, certes, il est plein de fureur dans ses pensées
Tous
le voient, et aussitôt ton sang noir ruissellera autour de ma lance.
S'étant ainsi outragés de paroles, ils se levèrent et rompirent l'agora auprès
des nefs des Akhaiens. Et le Pèléide se retira, avec le Ménoitiade et ses
compagnons, vers ses tentes. Et l'Atréide lança à la mer une nef rapide,
l'arma de vingt avirons, y mit une hécatombe pour le dieu et y conduisit
lui-même Khrysèis aux belles joues. Et le chef fut le subtil Odysseus.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro