Chapitre 2
- Super ! Maintenant, vous allez me suivre et nous allons faire des photos sur la plage, lança ma prof de photographie.
Une fois arrivés, Amber et moi allâmes directement dans notre coin favori : une petite crique que l'on avait découverte par hasard alors qu'on avait tout juste huit ans.
Amber et moi, on s'était rencontrées quand j'étais arrivée en ville, et depuis, on ne s'était plus quittées. Et c'était aussi une des rares personnes étant au courant pour ma maladie. Et à l'inverse de d'autres, elle ne m'avait pas tournée le dos.
On s'installa comme prévu et on commença l'exercice, tout en rigolant.
Le ciel était dégagé et les nuages étaient loin dans le ciel, laissant place à une douce brise chaude. Mais alors que je prenais un cliché de ma meilleure amie, on cria mon prénom. Je me tournai alors dans la direction du cri et y découvris Sean.
- Tu le connais ? me demanda Amber.
- Oui, je l'ai rencontré avant-hier, quand j'écrivais mon carnet. On a discuté rapidement et on a été faire du surf, enfin il a tenté de m'apprendre, riai-je en repensant à ma chute mémorable.
- Du surf ? Mais tu te rends compte que ça aurait pu être dangereux ? Et aggraver ton cas ? hurla ma meilleure amie.
- Amb', commençai-je, il ne m'est rien arrivé de grave, la preuve je suis devant toi...
- Et si tu étais tombée ? Et si tu avais été gravement blessé ? Ce garçon n'est pas au courant de ce qu'il t'arrive et...
- ...et il ne doit pas être au courant ! lui dis-je en faisant de gros yeux, tandis que le sujet de notre conversation arrivait, sa planche sous le bras.
- Hello Rose ça va ?
- Très bien et toi ? répondis-je en lui faisant la bise. Je te présente ma meilleure amie, Amber !
- Enchanté, dit-il à l'intention de l'intéressée.
- Oui c'est ça...
Devant son entrain légendaire je décidai qu'il était temps de s'en aller avant que l'ambiance ne devienne tendue et donc, gênante.
- Bon il faut qu'on y aille ! La prof a dit qu'on devait rentrer, dis-je à l'intention de mon amie, qui n'avait pas l'air d'avoir envie de faire connaissance.
- On se retrouve au même endroit ce soir ?
- Oui, souris-je en le quittant d'un signe de main.
Une fois éloignée de Sean, je lançai à Amber :
- Mais pourquoi tu as réagi comme ça ?
- Il a pas le droit de te laisser risquer ta vie. Alors ce soir tu n'iras pas le voir !
- Tu es qui pour me dire ce qui est bien pour moi ? Personne ! lui hurlais-je dessus.
La colère monta en flèche, sans que je ne saches réellement pourquoi. J'avais peut-être trop été protégée ces derniers mois que là, j'implosai ?
Je continuai donc :
- T'es pas ma mère, t'as pas besoin de te faire un sang d'encre pour moi, de t'immiscer dans mes rencontres !
- Non, ta mère elle t'a abandonnée comme la lâche qu'elle est ! me lança-t-elle à la figure.
Je n'en croyais pas mes oreilles, elle avait osé... Elle qui savait que ce sujet était sensible pour moi...
- Je vais y aller, dis-je complètement déstabilisée. Explique à la prof que je ne me sentais pas bien du tout.
- Mais attends ! cria-t-elle.
Mais j'étais déjà loin. Loin d'elle et de ces mots qui m'avaient touchée, au plus profond de mon cœur...
- Papa je suis rentrée !
Pas de réponse...
Tant mieux, comme ça j'avais la maison pour moi toute seule. Je montai dans ma chambre et mis la musique à fond, c'était Stitches de Shawn Mendes. Cette musique me faisait oublier tout mes problèmes, un peu comme un remonte moral...
Je pris une bonne douche bien chaude et me mis devant un film qui passait à la télé. Malheureusement pour moi, le sommeil m'emporta et je sombrai dans les bras de Morphée ...
***
À mon réveil, il était déjà près de dix-neuf heures trente. Je me rappelai subitement que je devais rejoindre Sean à la plage. Je pris donc un sac avec mon carnet, ma trousse et mes clefs. J'enjambai mon vélo de couleur turquoise et roulai en direction de la côte.
- Te voilà enfin ! plaisanta-t-il.
- Excuse, je m'étais endormie, riai-je ne pensant que j'avais séché le reste de ma journée pour dormir alors que d'autres aurait sûrement fait quelque chose de plus passionnant.
- Excuses acceptées. Bon et sinon, ça va la vie ?
C'est plutôt le genre de question que j'aimerais qu'on évite de me poser... pensai-je.
- Ça va assez bien et toi ?
- La belle vie, j'ai pas cours de la semaine, me nargua-t-il.
- Oh la chance ! dis-je en me mettant à marcher vers l'océan.
- Et oui, c'est la journée d'orientation des élèves pour l'année prochaine, lança-t-il en m'emboîtant le pas. Les élèves actuels doivent "dégager" et j'emploie les termes de mon prof de maths, rit-il, m'entraînant avec lui.
- L'année prochaine ? dis-je ensuite, étonnée.
- Je t'explique : chaque année dans mon université, il y a une semaine où on a pas de cours pour que les élèves qui seront de "potentiels nouveaux" puissent s'imaginer dans leur "potentiel environnement universitaire".
- Compliqué ton truc, mais j'ai compris ! Mais pourquoi nous on a pas ça ?
- Tu es à quelle université ?
- La même que tu as dit je crois. Sauf que je suis en première année, en section photographie.
- Tu rigoles ?
- Euh non pourquoi ?
- La section photo est la plus dure à avoir ici ! Tout le monde rêve d'y entrer et toi tu y es comme ça !
- Écoutes, le talent tu l'as ou tu l'as pas, plaisantai-je.
- C'est cela on va dire, rit-il sans continuer sur le sujet. Bon il commence à se faire tard, tu veux que je te dépose ?
- Non je suis venue en vélo, merci.
Je me tournai donc et marchai jusqu'à mon vélo avant de prendre la route, vers mon chez-moi, sous le soleil couchant.
***
Il était tôt ce matin quand je m'étais levée, n'arrivant plus à dormir. J'étais donc allée me réfugier sur la plage et avais emporté avec moi mon précieux journal.
«17 juin 2017.
Mon petit journal,
Aujourd'hui encore je t'écris, au bord de l'eau, sur mon rocher habituel. En face de moi, le soleil se lève. Hé oui, il n'est que six heures trente du matin ici. Mais j'ai l'habitude maintenant. Me lever tôt et me coucher tard, c'est presque devenu une routine. En bref, ne pas beaucoup dormir ne m'affecte plus tellement. Le médecin a dit que c'était normal mais moi je pense le contraire...
Je ne t'ai pas raconté je crois mais, ce garçon, Sean, on s'est beaucoup rapprochés ces derniers jours, je commence à l'apprécier; comme un ami je pense. Mais j'ai peur qu'il ne fasse comme tous les autres et qu'il ne s'en aille à la découverte de ma maladie. C'est pourquoi je préfère attendre avant de lui dire.
Oh, et pour un devoir que je dois faire en photographie, il faut prendre sa famille en photo... Charlotte, Lucie et Arthur vont venir à la maison, je suis tellement contente ! Mais avec maman c'est une autre paire de manches... Elle est si compliquée... Elle ne veut plus de moi, ça je l'avais compris mais j'espère que papa arrivera tout de même à la convaincre de faire un petit effort, rien que quelques minutes, pour quelques malheureuses photos, pour celle qu'elle considérait comme sa fille auparavant...
Tu sais quand je repense à ce jour à l'hôpital, celui où elle nous a quittés papa et moi, et bien je revois la scène : le docteur Martins qui arrive avec les résultats, papa qui tente de cacher sa tristesse et ses larmes derrière ses mains, et maman qui... qui s'en va. Comme ça, sans rien ajouter. Et je me revois moi, me décomposer, pleurer à chaudes larmes et regarder celle que j'aimais le plus au monde, m'abandonner. J'en suis restée choquée, d'une part, parce que le médecin nous avait annoncés l'arrivée de ma maladie sans la moindre once de compassion, et ensuite par l'attitude de ma mère que je ne comprenais pas. Mais ce qui m'avait étonnée, c'était le fait qu'en rentrant à la maison, toute trace de ses affaires aurait pu être introuvable, même pour Sherlock Holmes; comme si elle n'avait jamais été ma mère.
Et tu sais quoi journal ? Deux semaines plus tard, elle était venue sonner à la porte de la maison, et était entrée comme si elle avait toujours habité ici, qu'elle n'était jamais partie. Elle s'était fait un café avec la machine qu'elle connaissait si bien et m'avait demandée de prendre place à table, en face d'elle. Elle avait attendue que papa nous rejoigne avant d'annoncer : " Je suis désolée, mais je ne peux pas. Je ne peux pas regarder ma fille mourir doucement, ma famille se décomposer, se déchirer à cause d'une simple et stupide maladie. Je n'y arriverais tout simplement pas. Alors Rose, je suis désolée mais je vais m'en aller. Je reste en ville mais je vous quitte, je ne peux pas. Je n'aurais pas la force de te perdre, pas une seconde fois." Après ce discours émouvant, nous étions restés tous trois, figés. Moi, versant de silencieuses larmes, mon père bouche-bée, tandis que ma mère s'était levée avant de me dire "Au revoir Rose, je t'aime." Alors je lui avait dit, entre deux sanglots : "Si tu m'aimais vraiment, tu resterais et tu te battrais avec moi. Tu n'as pas le droit de dire ça, de dire que tu ne peux pas, ça ne se fait pas. En fait tu as juste peur, peur que je ne meurs avant toi et que je vous quitte, papa et toi. Tu n'as pas le droit !! Penses un peu à moi, ta fille, celle à qui tu as donné la vie. J'ai besoin de ma maman pour faire face à tous ces problèmes qui nous tombent sur la tête. Et je moi je ne pourrais pas sans toi. Alors reste, je t'en supplie maman, reste, pour moi ". Mais elle m'avait juste regardée une dernière fois, croisant le regard de mon père qui la suppliait de faire ce que je lui avais demandée une seconde plus tôt. Sauf qu'elle était partie, et que je ne l'avais plus jamais revue. Même pas aux examens médicaux où elle était obligée de se présenter.
Non, rien du tout. Et malgré les mots laissés dans sa boîte aux lettres, je n'avais jamais eu de retour. Mais d'une certaine façon, maintenant je m'y étais faite, ça ne m'atteignait presque plus. Presque...
En revanche, dès que j'avais appris que ce devoir était obligatoire et que s'il n'était pas complet, on n'aurait pas notre année, je m'étais légèrement affolée, et encore c'était relatif : j'avais fait une crise de panique. J'appréhendais le moment où j'allais revoir ma... maman.
Journal, je te retrouve plus tard, je vais rentrer avant que papa ne se réveille et découvre que je ne suis pas à la maison, il se ferait beaucoup trop de soucis. »
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