Chapitre 24
Hermione faisait les cents pas dans son salon.
— Arrête.
— C'est plus fort que moi.
— Hermione Granger qui stresse, c'est nouveau.
La jeune femme darda un regard noir au tableau de Rogue qui releva le nez.
— Tu n'as pas à t'en faire, dit-il alors. Nous savons tous les deux de quoi tu es capable, et puis ce n'est l'affaire que de quelques jours, quelques semaines, tout au plus. Et aussi... tu pourrais en profiter pour écrire un livre ?
Hermione s'étouffa.
— Tu n'es pas sérieux ?
— Et pourquoi pas ? Après tout, sans toi, Potter et Weasley ne seraient peut-être plus en vie aujourd'hui... et personne d'autre.
La Gryffondor serra les lèvres. Soudain, la pendule sonna et elle sursauta.
— Courage, chérie, dit Rogue. On se retrouve de l'autre côté.
— Dis comme ça, ce n'est pas du tout rassurant... grimaça Hermione.
— Hm, oui, navré...
La jeune femme souffla ensuite par le nez et frappa dans ses mains. Aujourd'hui premier lundi de février, elle intégrait Poudlard en tant qu'intervenante externe pour le professeur d'Histoire de la Magie, mais aussi pour les cours de Défense Contre les Forces du Mal, Sortilèges, Potions... Elle allait devoir répéter encore et encore l'année écoulée pendant laquelle elle avait fui les Mangemorts en compagnie de Harry et Ron, comment ils avaient fait pour trouver et détruire les Horcruxes de Voldemort avant qu'il ne mette la main dessus pour les protéger... Heureusement, elle allait pouvoir se concentrer sur certains aspects de cette chasse aux trésors version sorciers pour chaque cours et ne pas avoir à tout répéter mot pour mot à chaque fois.
— Allez, allons-y.
S'approchant de la cheminée, Hermione y jeta une dose de Poudre de Cheminette et entra dans les flammes vertes en criant sa destination. Elle reparut quelques secondes plus tard dans l'âtre de la cheminée de la Directrice McGonagall qui l'accueillit en quittant son bureau.
— Pile à l'heure ! dit-elle. Prête ?
— Non.
— Elle stresse.
Hermione darda un regard noir à Rogue qui esquissa un sourire. Elle lui tira ensuite la langue et McGonagall regarda sa pendule.
— Huit heures, dit-elle. Venez, allons-y. Je vais vous accompagner jusqu'au cours du professeur Binns et vous présenter, même si tout le monde vous connaît, et expliquer ce que vous allez faire chez nous ces prochaines semaines.
Hermione opina et après un dernier coup d'œil au tableau de son compagnon qui hocha la tête, elle suivit la Directrice dans les entrailles du château. De très nombreux souvenirs lui revinrent en mémoire alors et les affronter fut douloureux, mais elle tâcha de ne rien laisser transparaître.
— À moins que vous ne désiriez rentrer chaque soir, j'ai fait préparer un appartement pour vous, dit soudain McGonagall.
Hermione leva les yeux vers elle, surprise, et secoua ensuite la tête.
— Ce n'était pas utile, je vais rentrer. Rester ici plus longtemps que nécessaire risque d'être douloureux.
— Douloureux ? En quoi ? Vous avez passé de merveilleuses années ici, je me trompe ?
— Justement.
Hermione baissa le nez et McGonagall lui jeta un regard avant de pincer les lèvres. Elle s'arrêta de marcher et pivota vers la jeune femme qui fut contrainte de s'arrêter à son tour.
— Si la tâche est trop compliquée, Hermione, je comprendrais, dit la Directrice. Que l'on soit bien claires vous et moi, je n'ai aucune envie de vous faire revivre des moments douloureux. Je sais ce que vous traversez actuellement, je sais que c'est difficile dans votre tête, mais je vous ai toujours connue forte face à l'adversité.
— Je suis forte, Madame, répondit Hermione. Mais les derniers mois n'ont pas été faciles et cela risquera d'aller de mal en pis. C'est la faute de Severus, mais je ne lui en veux pas. Je dois surmonter le deuil, je dois me faire au fait qu'il ne sera jamais près de moi et que je ne peux rien y faire. Le projet de mariage arrangé avec Malefoy va dans ce sens. Je dois aller de l'avant.
McGonagall hocha la tête sans répondre. Elle pivota ensuite et poussa une porte en laissant passer la jeune femme devant elle.
.
Après plusieurs couloirs et escaliers, les deux sorcières arrivèrent enfin en vue de la salle d'Histoire de la Magie. Les cours allaient commencer d'une minute à l'autre et les élèves attendaient sagement dans le couloir en discutant. Le silence se fit aussitôt quand ils virent la Directrice, et des chuchotements montèrent ensuite quand ils repérèrent Hermione.
— C'est Hermione Granger... souffla quelqu'un.
— C'est la copine de Harry Potter... Si, je te jure !
Hermione parcourut les élèves des yeux, et releva le menton. McGonagall poussa alors la porte de la classe et elles entrèrent toutes les deux. Le professeur Binns était assis à son bureau, en train de lire. Fantôme magique, il avait gardé la capacité à interagir avec le monde vivant, ainsi il pouvait soulever des objets, tourner les pages d'un livre, ou encore écrire au tableau.
— Ah ! s'exclama-t-il en relevant le nez. Madame la Directrice !
— Je vous amène notre intervenante, Cuthbert, dit la sorcière.
— Oh ! Oui, Miss Granger !
Le vieux fantôme observa la jeune femme derrière ses petites lunettes rondes. Il plissa un peu les yeux puis haussa les sourcils.
— Diantre, vous avez grandi ! s'exclama-t-il alors, surpris.
— Allons, pas tant que ça, répondit Hermione avec un petit sourire. Disons que j'ai... mûri.
— Oui, n'importe qui prendrait du plomb dans la cervelle avec ce que vous avez vécu, Miss...
Hermione opina, les lèvres serrées. Le professeur Binns l'observa une dernière fois puis McGonagall lui expliqua que la jeune femme allait passer quelques semaines en la compagnie de plusieurs professeurs pour raconter son année d'errance en Angleterre.
— Il se peut que je ne sois pas capable de tout raconter, dit Hermione quand la Directrice se tut.
— Pour quelle raison ?
— Psychologiques, principalement. Revenir ici est déjà douloureux, alors faire remonter des souvenirs que j'ai mis des mois à ranger...
— Sans parler de votre situation... conjugale actuelle, acheva Binns. Oui, oui, je comprends, ne vous en faites pas.
Hermione porta sa main au bracelet d'argent à son poignet et baissa légèrement le nez. McGonagall regarda alors la montre suspendue à son cou et proposa que le cours commence. Elle indiqua qu'elle allait demeurer ici pour le premier cours, puis qu'Hermione serait ensuite seule pour répondre aux questions de tout le monde.
Les élèves entrèrent alors, étrangement silencieux, et prirent place sans lâcher Hermione du regard. C'était des troisième année, ils la connaissaient tous au moins de nom, à défaut de connaître son visage, mais étrangement, le fait de la voir là, devant eux, alors qu'en quelques semaines elle était devenue une légende vivante, semblait les impressionner.
— Commençons, dit alors Binns. Prenez une chaise, Madame, je vous en prie. Vous aussi, Miss.
McGonagall opina et Binns expliqua ensuite la raison de la présence d'Hermione Granger dans son cours, de la même manière que la Directrice venait de le faire pour lui. Les élèves se mirent aussitôt à chuchoter et Hermione les observa en sentant son stress augmenter petit à petit. Elle décida alors de faire le vide dans sa tête, de laisser remonter certains souvenirs, et d'en bloquer d'autres...
.
La matinée s'achevait et Hermione était épuisée. Pas physiquement, mais psychologiquement. Elle avait passé plusieurs heures avec le professeur Binns et avait parlé de son année de fuite avec les troisième année de Serpentard et de Serdaigle. Cet après-midi, ce serait ceux de Gryffondor et de Poufsouffle, et ainsi de suite jusqu'à ce que tous les niveaux aient entendu son histoire. Y compris les premières années qui avaient fait leur rentrée en septembre dernier et qui n'avaient, pour la plupart, aucune idée de ce qui s'était déroulé à Poudlard bientôt un an en arrière.
— Miss Granger, tout va bien ?
Hermione cligna des paupières et tourna la tête vers Aurora Sinistra. Elle lui adressa un mince sourire et soupira ensuite.
— La matinée a été intense, dit-elle en s'adossant à son fauteuil. Je n'avais pas repensé à tout cela depuis des mois, j'avais réussi à classer certains souvenirs, mais...
Elle secoua la tête et Sinistra grimaça.
— Parlez-moi de Severus, dit-elle alors, désireuse de changer de sujet. Minerva nous a plus ou moins tenus au courant de son legs envers votre personne et de tout ce qui a suivi, mais Severus était mon meilleur ami, et il me manque énormément, surtout avec l'approche de la date...
— Je ne cesse de penser à cette date aussi, avoua alors Hermione. Depuis que je vis dans sa maison, je m'habitue à son absence, au fait qu'il ne soit qu'un Echo dans un portrait, mais le pire est vraiment depuis que j'ai reconnu être tombée amoureuse de lui.
— Je suis veuve, Miss Granger, dit alors Sinistra. Je ne sais que trop bien ce que c'est quand votre mari vous manque et que vous savez que vous ne pourrez rien faire pour le ramener près de vous.
Hermione se mordit la lèvre. Elle saisit soudain la main du professeur d'Astronomie qui serra les mâchoires. Son mari avait été tué par des Mangemorts, en pleine ville, alors qu'ils semaient la panique dans les rues de Londres. Il avait été un dommage collatéral parmi tant d'autres, au mauvais endroit au mauvais moment, comme on dit...
— Si vous le pouviez, remonteriez-vous dans le temps pour lui sauver la vie ? demanda soudain Hermione.
— Oh oui, répondit Sinistra. Je n'étais même pas à la maison quand il a été tué, j'étais ici, en train de faire cours, sans me douter de rien et je...
Elle se tut et déglutit. Elle renifla ensuite et se redonna une contenance.
— Mais ce n'est pas possible, dit-elle alors avec un mince sourire. Si nous pouvions remonter le temps et empêcher les choses se produire, quelqu'un aurait certainement remonté jusqu'au moment où notre regretté professeur Dumbledore a proposé à ce serpent de Tom Jedusor de rejoindre Poudlard...!
Hermione se mordit la joue. C'était tellement tentant ! Remonter le temps et empêcher les choses de se produire, l'assassinat de John Kennedy, la naissance d'Hitler, la conception de la bombe A... Mais ce n'était pas possible.
— Certaines choses doivent arriver pour que l'histoire continue, dit alors la Gryffondor. Mais contrairement à elles, la mort de Severus n'était pas nécessaire. Elle a été gratuite et brutale, Nagini a fait en sorte qu'il souffre et agonise le plus longtemps possible, juste pour le plaisir de son maître...
Sinistra hocha la tête. Elle demanda alors à Hermione de lui raconter comme elle avait vécu cette première année post-Poudlard, ce qu'elle avait fait ou ce qu'elle voulait faire, ce qu'elle prévoyait pour l'année suivante et les autres à venir, etc. Elle ne s'attendait cependant pas à ce que la jeune femme lui révèle avoir proposé à Drago Malefoy de répudier sa femme pour l'épouser elle.
— Vous êtes un peu... gonflée, excusez-moi du peu.
— Oh, j'en suis consciente, répondit Hermione avec un sourire. Mais je dois aller de l'avant. Severus ne reviendra jamais, Madame, quoi que je fasse, c'est ainsi, même la magie ne peut pas ressusciter les morts...
Sinistra avait fait apparaître du thé entre elles et la Salle des Professeurs était encore vide. Ils faisaient leur petite ronde habituelle entre la fin des cours de la matinée et le début du déjeuner.
— Ceci dit, dans la vie, on n'a rien sans rien, ajouta Sinistra en haussant les épaules. Va-t-il le faire ?
— Je l'ignore. Son mariage est dans quelques semaines, en mars... Severus me dit d'y aller, mais je n'en ai aucune envie, je risque de jeter un froid dans la cérémonie, surtout si Drago a mis sa mère au courant que ma proposition n'avait rien d'une blague.
Sinistra opina.
— Peut-être que vous seriez heureuse avec lui, allez savoir. Après tout, vous avez le même âge, il n'est un Mangemort que sur le papier et il semble avoir outrepassé son inimitié contre vous.
— Je pense, mais ce sera ma dernière carte, mon ultime coup, si je ne parviens pas à surmonter ma peine. Je ne veux pas que ce soit la solution de facilité pour ne pas être qualifiée de veuve à même pas vingt ans.
— Vous y parviendrez, répondit Sinistra avec un sourire. J'y suis arrivée, moi, donc une jeune femme aussi forte que vous pourra surmonter tout cela et repartir croquer la vie à pleines dents. La première année après la perte d'un être cher est très compliquée, mais pour vous, ça s'apparente plus à l'enfer sur Terre. Je pense que vous n'aurez plus à souffrir autant avant bien longtemps.
— Je l'espère ! répliqua Hermione.
Elles se mirent ensuite à rire et la porte de la pièce s'ouvrit sur des professeurs qui, en voyant Hermione, vinrent aussitôt l'entourer pour lui demander des nouvelles.
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À la fin de la journée, la Gryffondor était lessivée. Elle avait la voix fatiguée et elle n'avait qu'une hâte, rentrer chez elle, mais McGonagall tint à la garder pour dîner en prétextant que de toute manière, un appartement l'attendait. Coincée, la jeune femme n'eut donc pas d'autre choix que d'accepter et elle se retrouva à la table des professeurs, à côté de Hagrid, et cela lui fit bizarre de se retrouver de ce côté de la barrière !
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