Chapitre 14
Trois jours après Noël, Hermione se présenta à Poudlard, surprise d'avoir reçu une convocation de la main de McGonagall.
En montant les marches de pierre du perron, la jeune femme craignait que son ancienne Directrice ne lui annonce quelque chose concernant les Weasley dont personne n'avait de nouvelles depuis huit mois.
Il n'en fut heureusement rien, mais ce que McGonagall annonça à la Gryffondor à la place, laissa celle-ci les jambes coupées, sans voix.
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Assise dans le bureau de la Directrice, Hermione était sous le choc. Sans passer par quatre chemins, McGonagall lui avait annoncé, avec des mots clairs, qu'elle était purement et simplement tombée amoureuse du professeur Rogue, et ce malgré son décès. L'atmosphère de la maison et la présence du grand tableau représentant l'homme n'y étant sans doute pas pour rien.
— Je...
— Oui ?
Hermione déglutit et secoua la tête.
— Je pensais que c'était du chagrin, le deuil d'avoir perdu quelqu'un de proche, de l'avoir vu mourir, de...
Elle haussa les épaules puis se cacha le visage dans ses mains. Quand elle releva la tête, elle jeta un regard au tableau vide de Rogue.
— Il n'a pas tenu à assister à l'entrevue, répondit McGonagall. Le professeur Dumbledore l'a emmené avec lui quelque part dans le château...
Hermione déglutit et passa sa langue sur ses lèvres.
— Amoureuse... souffla-t-elle alors. Comment est-ce possible, Madame ? Je veux dire, je sais qu'il est mort, je le sais, j'étais à ses funérailles, je l'ai vu mourir, je... Je l'ai vu mort !
— Ne vous mettez pas Martel en tête pour ça, répondit McGonagall. Il arrive assez fréquemment, dans l'histoire Moldue et sorcière, qu'une personne s'entiche d'un être disparu depuis longtemps, comme un chanteur ou une star. On appelle officiellement cela une passion, mais en aucun cas de l'amour, car ce ne serait pas... correct.
— Alors pourquoi moi... ?
— Parce que vous concernant, c'est de l'amour, répondit la Directrice. Vous avez grandi avec Severus, vous avez développé un sentiment le concernant, au fil des années, occulté par une solide haine pour sa personne. Cependant, cette haine s'est dissipée quand vous avez compris, le soir de sa mort, que tout ce qu'il a fait pendant toutes ces années, c'était pour protéger Harry de Voldemort, et uniquement ça.
Hermione baissa les yeux.
— Nous ne l'avons compris que bien trop tard, malheureusement, dit-elle.
— Justement. Et c'est ce sentiment que vous traînez depuis des mois qui vous perturbe. Vous vous sentez coupable de ne pas avoir su que Severus n'était pas le monstre des cachots que vous pensiez, vous vous en voulez de l'avoir détesté pendant tant d'années et maintenant, le remord a laissé la place à la haine et la colère. Ce sont les étapes du deuil, tout le monde y passe...
— Mais comment peut-on passer des remords à l'amour, Madame ? Je n'y comprends plus rien.
— C'est là qu'entre en scène le sentiment de manque...
Hermione déglutit et se mordit la joue. Elle tourna alors la tête et soudain, ferma les yeux et une larme glissa sur sa joue.
— Quand je vous ai trouvée près de son corps, dans la crypte, vous étiez effondrée, Hermione, dit alors doucement McGonagall. J'ai pensé que vous étiez épuisée, ce qui devait être le cas, et puis j'ai réalisé que vous regrettiez sa mort si brutale, si douloureuse, et surtout si inutile. Malgré ses airs de chauve-souris, Severus Rogue était un homme adorable, il était attentif et il savait plaisanter... Lorsque nous buvions le thé, le dimanche après-midi, avec Albus, nous passions un après-midi délicieux...
McGonagall se tut et baissa le nez. Hermione eut un hoquet et porta sa main à sa bouche. La Directrice invoqua une boîte de mouchoirs près d'elle et la jeune femme en prit un pour étouffer ses sanglots.
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La vieille sorcière attendit patiemment que son ancienne élève se calme. Elle invoqua une théière et deux tasses, en attendant, ainsi qu'une assiette de petits gâteaux et quelques morceaux de chocolat, le remontant des sorciers.
Quand la Gryffondor eut séché ses larmes, McGonagall poussa une tasse vers elle et la jeune femme la remercia à mi-voix.
— Que faut-il faire ? demanda-t-elle alors, la voix un peu rauque. Si je continue à vivre dans cette maison, avec ce grand portrait sous les yeux toute la journée, mon mal-être ne guérira jamais, je serais toujours triste, seule... Je pourrais peut-être concocter une potion pour effacer ces sentiments, mais j'ai peur d'en perdre d'autres dans la foulée et...
Hermione secoua la tête et McGonagall pinça la bouche. Elle tira alors de sa manche le parchemin plié en deux et le tendit à la jeune femme qui le prit avec étonnement.
— Quand j'ai parlé de cela à Severus, il a bondi en refusant catégoriquement, mais j'ai réussi à le faire changer d'avis avec l'aide d'Albus... dit-elle.
— Qu'est-ce ? demanda Hermione en le dépliant. Un sortilège ? Pour quoi faire ?
— Ceci, est un sortilège qui va vous permettre de pénétrer, malgré votre statut de personne « vivante », dans le monde des tableaux, Miss Granger. Pendant vingt-quatre heures et pas une de plus.
Hermione regarda le parchemin, puis McGonagall, perplexe.
— Le... monde des tableaux ? répéta-t-elle. Mais comment... ?
— Miss Granger, vous avez beau être une encyclopédie sur pattes, il y a des choses que vous ignorez encore sur notre monde, répondit McGonagall avec un sourire. Comme le monde des tableaux.
Et à la vieille sorcière de se lancer dans l'explication concernant l'existence d'un monde parallèle à part, totalement isolé du monde normal. Techniquement, personne ne pouvait s'y rendre physiquement, hormis quelques peintres qui gardaient le secret jalousement.
— Alors ce sortilège...?
— Ce sortilège est l'un de ces secrets, répondit McGonagall. Je l'ai trouvé glissé entre deux pages d'un vieux livre de cette bibliothèque alors que je cherchais des sorts à apprendre à mes élèves. J'ignore ce qu'il faisaitici, il y était sans doute depuis des années...
Hermione se mordit la lèvre
— Si... commença-t-elle. Si je m'en sers...
— Si vous exécutez ce sort sur le tableau de Severus, vous pourrez pénétrer dans le monde des tableaux. Ce que vous y trouverez, je l'ignore, mais gardez bien en tête que le Severus Rogue que vous verrez là-bas n'est en rien le même que celui que vous avez connu. Il lui ressemble, il a ses souvenirs et son caractère, mais ce n'est qu'un Écho du vrai Severus Rogue. C'est une partie de son essence magique, on pourrait presque parler d'une partie de son âme, mais disons que cela ferait trop...
— Horcruxe ? acheva Hermione en plissant le nez.
— Oui, voilà. Quoi qu'il en soit, Hermione, je vous donne ce sortilège afin que vous puissiez régler vos peines avec Severus. Il est clair depuis le temps, que l'un comme l'autre, vous avez développé des sentiments l'un envers l'autre. Severus tenait déjà à vous de son vivant, d'une manière que je ne m'explique pas car il m'a assez confié que vous l'agaciez, mais les choses sont ainsi. Vos propres sentiments se sont développés après sa mort, et non assouvis, ils vous torturent. Je ne puis vous laisser souffrir plus longtemps. Comme l'a si bien dit Albus, vous êtes trop jeune pour être veuve.
Hermione serra les mâchoires et regarda le parchemin dans ses doigts. Elle le replia brusquement se leva soudain.
— Miss, attendez, dit McGonagall en tendant la main. Une dernière chose...
— Laquelle ?
— Ne soyez pas trop déçue si jamais...
— Si jamais il m'envoyait sur les roses ? acheva Hermione avec un sourire en coin, un peu amère. Je vis avec son portrait depuis huit mois, Madame, reprit-elle. J'ai appris à lui faire fermer son clapet, vous savez ?
McGonagall haussa les sourcils, étonnée, puis sourit et se leva. À la surprise d'Hermione, elle l'enlaça affectueusement puis lui caressa les cheveux quand elle recula.
— Si je n'avais pas déjà autant de petites-filles, je vous aurais volontiers adoptée, Hermione... dit-elle doucement en repoussant une mèche brune torsadée. Mais vous avez des parents et je sais qu'un jour vous trouverez le moyen de leur rendre la mémoire, quitte à inventer vous-même un sortilège ou une potion pour cela... J'en suis certaine.
Hermione se mordit la lèvre puis après une dernière accolade, la jeune femme quitta le bureau rond. McGonagall se tourna alors vers les deux grands portraits vides et soupira.
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Une fois de retour chez elle, Hermione hésita. Elle avait envie d'exécuter ce sortilège tout de suite, pour enfin régler les choses, mais McGonagall lui avait clairement fait comprendre que Rogue n'avait pas sauté de joie quand elle lui en avait parlé...
— Il faut qu'on en discute tous les deux, avant, décida-t-elle finalement après quelques minutes à converser avec elle-même.
Elle glissa le parchemin dans son secrétaire puis reprit le cours de sa journée, à savoir, chercher du travail.
Étrangement, depuis qu'elle avait reçu les résultats de ses ASPICs, un mois après l'examen, elle n'avait éprouvé aucune envie de s'inscrire dans une Université, qu'elle soit magique ou Moldue.
Depuis fin octobre donc, elle épluchait les annonces dans la Gazette du Sorcier et entourait celles qui lui plaisaient. Elle envoyait quelques lettres aux demandeurs et si elle n'avait pas encore reçu de réponse, elle ne désespérait pas. Elle était prête à tout faire, vente, service, vaisselle, ménage, pour peu qu'elle puisse sortir de chez elle quelques heures par jour et ramener un peu d'argent, même si techniquement, elle n'avait pas besoin de cette seconde raison...
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