L'hérier du mal
Une semaine était passé depuis la mort de Bec d'Acier. Mais tandis que les chouettes du Grand Arbre célébraient le sauvetage des oisillons, un jeune gardien était rongé par le remord. Soren n'arrivait pas à accepter le fait d'avoir prit la vie d'une autre chouette, aussi cruel fut-elle. Chaque fois qu'il fermait les yeux, le tyto revoyait la carcasse inerte du seigneur des Sangs-Purs, avec une branche embrasée dans la poitrine. Cette nuit encore, la jeune chouette se réveilla en sursaut après un énième cauchemar. Comme il restait quelques heures avant le déjeuner, la chouette effraie décida de se vider la tête avec une petite ballade aérienne. À de nombreuses reprises au cours de sol vol, Soren crut entendre des battements d'ailes près de lui, mais il avait beau tourner la tête dans tous les sens, il ne voyait jamais d'oiseau d'aucune sorte. Après deux heures de ce manège, la jeune effraie décida qu'il était temps d'aller manger. Il retourna à son creu et se posa. Il allait se diriger vers la cafétéria lorsqu'il remarqua qu'à travers la lumière de la lune, deux ombre était visible sur le sol. Il y avait la sienne, bien sûr, juste à côté d'une, beaucoup plus massive, de chouette adulte. Soren se tourna prestement, mais comme durant son vol, il n'y avait personne. D'un pas nerveux, le jeune gardien fonça vers la cantine en se demandant s'il devenait fou. Une fois sur place, il alla rejoindre ses trois amis à la table de Mme P. Comme d'habitude, tous les trois discutaient de tout et de rien dans la bonne humeur. Mais Soren restait silencieux, trop occupé à songer à ces visions qu'il avait eut. Il laissait son regard vagabonder sur les autres groupes en mangeant son mulot rôtis. Soudain son regard se fixa sur une chouette noire plantée debout au centre de la pièce. Soren reconnut sans peine le plumage et le masque de Bec d'Acier, dont les yeux sombres étaient braqués sur lui. Choqué, Soren s'étouffa avec son mulot et fut pris d'une quinte de toux.
-Ça va? lui demanda Gyfie.
En se reprenant, la jeune effraie réalisa que la chouette noire avait disparu.
-Ou... oui, bégaya Soren. J'ai juste avalé de travers.
-T'es sûr? demanda Spéléon. T'avait l'air d'avoir vu un fantôme.
-Je vous dis que je vais bien! s'énerva Soren en quittant la table.
-Mais enfin, dit Perce-Neige. Soren...
-Fichez-moi la paix! hurla la chouette effraie en sortant de la pièce.
Les trois amis ainsi que madame Pittivier étaient tous très inquiets. Soren ne se mettait jamais en colère, alors pour une broutille pareille...
***
Soren entra précipitamment dans chambre. Mais à peine était-il entré qu'il entendit dans son dos une voix qu'il tentait désespérément d'oublier.
-Cela ne te ressemblait pas, jeune tyto.
Soren se retourna pour se retrouver face à face avec... Bec d'Acier! Complètement paniqué, le gardien recula de plusieurs pas.
-Impossible! s'étrangla-t-il. Tu es mort!
-Effectivement. D'ailleur, je ne te dis pas merci.
-Mais comment...
-Allons bon. Tu ne croyais quand même pas que je quitterais ce monde aussi facilement? Je me suis accroché à toi. Je suis enfoncé bien profondément dans ta petite tête.
-Qu'est-ce... qu'est-ce que tu veux?
-Je veux revivre à travers toi.
-Comment!?
-Je veux que tu abandonne ton esprit et que me laisse le contrôle de ton corps. Tu as pris ma vie. Ce ne serait que justice que tu me cède la tienne en échange
-N'y compte pas! rétorqua Soren.
-Tu ne peux pas me résister, jeune tyto. Un jour, tu m'appartiendras.
En disant cela, la chouette noire pointa d'une aile un miroir accroché sur un mur. Poussé par la curiosité, la jeune effrai s'approcha de l'objet. Soren fut saisi d'effroi devant l'image que lui renvoya le miroir. C'était bien son plumage, mais son visage était masqué par un casque noir, le casque de Bec d'Acier.
***
Soren et Otulissa, tous deux membres du squad des charbonniers, étaient partis récolter quelques braises et des charbons ardent dans un petit feu de forêt. Otulissa cherchait des charbons au sol tandis que son équipier attrapait les braises qui flottaient jusqu'au ciel. Soudain, sans qu'Otulissa ne s'en rende compte, Soren cessa son labeur. Il se posa sur une petite branche épargnée des flammes et l'arracha. Il se dirigea vers un autre arbre qui était, lui, en proie au brasier. Il tendit ensuite la branche dans le feu et, en un rien de temps, le bois s'enflamma. Après quoi, Soren plana tout doucement jusqu'à Otulissa. Il ne fut bientôt plus que juste au dessus d'elle. Son visage démontrait à présent des envies de meurtre. Plus surprenant encore, ses yeux avaient laissé à deux bille rouges, empirant le côté sinistre de la scène. Soren leva la patte tenant la branche et s'apprêtait à s'abattre sur son amie. Au dernier moment, cette dernière se retourna et fut très surprise de voir Soren avec cette branche. Le jeune tyto avait retrouvé son visage souriant et ses yeux verts.
-Tu devrais faire plus attention, lui dit Soren. Cette branche s'est cassée et a bien failli t'assomer.
-Oh... Et bien merci. Bon, j'ai fini. On rentre?
-Pars devant, je te rejoins.
Les deux chouettes quittèrent cette fournaise et, tandis qu'Otulissa volait en direction du grand arbre, Soren partit dans la direction opposée. Une fois certain que son amie ne l'entendrait pas, la jeune effraie laissa s'échapper sa colère.
-Mais c'était quoi, ça!? Répond! Je sais que tu es là!
-Ça, dis Bec d'Acier qui venait d'apparaître comme par magie à la droite de Soren, c'était pour te montrer mon pouvoir sur toi. Et j'aurais très bien pus ne pas m'arrêter. On y retourne?
-Non!
-Tu as vu de quoi je suis capable, jeune tyto. Fais ce que je te dis ou je tuerai tous tes chers amis ainsi que ta petite soeur que tu aimes tant. Es-tu prêt à avoir leur sang sur les serres?
Soren réfléchit un instant. Accepter signifiait renoncer à sa vie présente. Il ne reverrait jamais plus ses amis, ou n'importe quelle autre chouette du grand arbre. De plus, les crimes des sang-pure allaient certainement reprendre. Mais d'un autre côté, il ne permettrait jamais qu'on fasse du mal à Églantine ou à ses amis.
-Très bien, soupira le jeune gardien. Que dois-je faire?
***
Les Gorges de Saint-Ægolius. Une série de crevasses profondes et inhospitalières où, il y a encore peu, Bec d'Acier et son épouse, Nyra, transformaient de jeunes tyto en soldats et les autres races en trieurs. Au coeur de ce dédale de pierres se dressait un pic creu au sommet duquel se trouvait le trône de Bec d'Acier, point culminant de la zone rocheuse. C'est vers ce lieu que volait une jeune chouette au coeur et à l'esprit brisés. Elle traversa le trou qui éclairait la pièce au sommet du pic, survola le perchoir personnel de Bec d'Acier et se posa sur l'esplanade en contre-bas. Tout autour de cet oiseau, des hordes de sang-pures le fixait de leurs yeux rouges.
-Que viens-tu faire ici, demanda une voix empreinte de haine.
C'était Nyra qui venait de parler. Elle avait pris le commandement des sang-pures après la mort de son époux. Toutefois, ce qui lui permettait de tenir bon était sans conteste la rage incommensurable qu'elle éprouvait pour le gardiens qui lui avait pris son aimé.
Sans répondre, la je chouette commença à marcher dans la direction de Nyra. Elle s'arrêta toutefois à mi-chemin, devant un objet immobile depuis la mort de son propriétaire. Il s'agissait du masque noir qu'arborait Bec d'Acier de son vivant. L'oiseau saisit l'objet maléfique entre ses serres avant de finalement prendre la parole.
-Je suis venu vous rendre ce que je vous ai pris, déclara Soren.
Puis, à l'étonnement générale, le tyto enfila le masque avant de se tourner vers les troupes sang-pure. Les yeux qui paraissaient à travers les trous du masque n'étaient plus ceux du jeune gardien mais bien deux billes rouges luisante de malveillance. Après une minute de silence, il parla de nouveau, mais d'une voix beaucoup plus grave qu'auparavant.
-Je suis... BEC D'ACIER!!!.
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