
Ch 23: Maintes allées-retours dans les allées de bambous
Les trois apprentis prirent congé auprès de Lin Ming qui n'avait rien compris du combat qui avait été déclenché. Pour les remercier, il leur offrit un panier de plats à emporter chez eux.
Quelques bâtons d'encens plus tard, attablés autour de ces plats qu'ils avaient fait réchauffer dès qu'ils étaient rentrés chez Yuan Sunjie, les trois apprentis mangeaient comme des petits princes.
« Cette nourriture me fait penser à ma grand-mère, dit Wang Xiao avec nostalgie à la fin du repas. Sa cuisine me manque tellement que j'en rêve la nuit ! »
Puis changeant de sujet, Wang Xiao se tourna pour demander à Yuan Sunjie :
« Qu'est-ce qui s'est passé avec ces disciples au juste, Yuan-xiong ? Tu t'es battu contre deux disciples, tu t'en rends comptes ? Et il y en avait même un qui n'a pas hésité à utiliser ses pouvoirs spirituels contre toi, mais tu lui as quand même fracassé la mâchoire ! Comment as-tu fait ça ?
— J'avoue que je suis curieux aussi » ajouta Ying Luo en lissant son col.
Yuan Sunjie sourit et soupira de soulagement que ses pouvoirs ne se soient pas révélés. Ce qui avait été le plus difficile pour lui avait été d'utiliser le petit pourcentage d'énergie qu'il avait à disposition, sans dévoiler ses aptitudes.
Il avait déjà prévu une réponse toute faite dans sa tête. Alors, il leur expliqua d'une voix presque monotone en haussant les épaules. :
« Ces disciples cultivent peut-être, mais je les surpasse largement en arts martiaux. Je n'ai eu juste qu'à éviter les coups et à attendre le bon moment pour frapper au bon endroit. Je me suis entraîné avec un maître qui était sur le point de devenir un Immortel je vous rappelle. Des gars comme eux ne me font pas peur.
— Oh ! Tu es vraiment très fort Yuan-xiong ! » complimenta Wang Xiao les yeux pétillants d'admiration.
Ying Luo, ses sourcils rapprochés pendant qu'il jouait avec son col machinalement, restait perplexe.
« Et le spectre de Linglin ? Est-ce que nous l'avons réellement exorcisé ? Nous n'avons pas de jiedan, comment nous avons pu l'exorciser juste en lui donnant à manger ?
— J'en suis convaincu et je n'ai rien inventé, répondit Yuan Sunjie. Cette technique existe belle et bien depuis longtemps. En fait, c'est comme ça que les gens faisaient autrefois.
— Tu peux expliquer ? »
Les apprentis n'étaient pas encore initiés sur les sujets des esprits et des rituels d'exorcismes. Ils pouvaient accéder à ces connaissances seulement après être devenu un disciple à leur tour. Contrairement à ses deux amis, Yuan Sunjie avait vécu pas mal d'expériences de ce genre avec Shi Chang.
« Un spectre, ce n'est qu'un cadavre après tout, mais il se forme en passant d'abord par une phase fantôme trois jours après la mort. Après le dixième jour, si de l'énergie Yin ou de l'énergie Yang est suffisamment abondante autour de l'endroit où est enterré le cadavre, le fantôme se transforme en spectre. Une forme astrale s'ancre dans le cadavre. Elle prend son apparence, ses habitudes, ses souvenirs, sa voix, et même sa personnalité. À tel point qu'on croirait que c'est réellement la personne défunte revenu des morts. La vérité, c'est que ça ne reste qu'une projection astrale qui prend possession d'un cadavre, expliqua-t-il.
— Lin Ming nous avait dit qu'il avait enterré sa femme sous l'arbre de leur enfance. Cet endroit avait une abondance d'énergie Yin ? questionna Wang Xiao.
— Pas de Yin, mais de Yang » précisa Yuan Sunjie en levant un doigt.
Ying Luo le questionna encore :
« Les cultivateurs chassent les spectres normalement. De quelle manière, réaliser son dernier voeu l'a exorcisé ?
— J'ai lu beaucoup d'histoires sur des héros et des légendes, mais je n'en ai jamais lu sur des spectres qui retournaient d'eux-mêmes dans la tombe ! renchérit Wang Xiao.
— L'histoire est vieille et elle est presque tombée dans l'oubli. Pourtant, la logique est simple, fit Yuan Sunjie en se grattant la joue.
— Expliques-nous, vas-y. »
Yuan Sunjie prit un air sérieux et continua son récit.
« Auparavant, les gens n'avaient pas facilement accès aux services des cultivateurs, alors ils devaient trouver d'autres moyens à leur disposition pour combattre ces apparitions. Parfois, certains spectres avaient la capacité de parler et d'exprimer le plus grand désir du défunt, ou leur désir avant leur mort, alors les villageois ont tentés d'accomplir ce qu'ils voulaient et quelques fois, ça a réellement marché.... »
Il fit une pause avant de poursuivre :
« Les spectres sont aussi des esprits. Ils apparaissent aussi en cycles Yin et Yang. Sans s'en rendre compte, les anciens avaient découvert la nature des spectres dans un cycle Yang. Les spectres Yang sont vraiment très rares, c'est pour cela que leur existence même est remise en cause.
— Je n'ai jamais entendu parler de spectres Yang..., ajouta Wang Xiao.
— Il y a une raison derrière cela, dévoila-t-il. C'est parce que les humains ont tendance à mourir avec plus de ressentiments et de regrets. Les cimetières sont remplis d'énergie Yin la plupart du temps, c'est pour ça que ce sont les spectres Yin qui apparaissent souvent, mais comme les cultivateurs font des purges régulièrement dans les cimetières, ils nous évitent d'en croiser. Sauf exceptionnellement, quelques situations rares comme le cadavre enterré de Linglin sous son arbre d'enfance, amènent parfois un spectre à prendre forme. »
Yuan Sunjie se leva de table pour aller préparer du thé et quand il revint avec un plateau et des tasses, ses amis avaient déjà une autre question pour lui.
« Comment as-tu fait pour savoir si le spectre était Yin ou Yang ?
— Tout le volcan aurait entendu parler du spectre si tel était le cas. Les spectres Yin sont dangereux, malfaisants et attaquent humains et troupeaux. Au fil du temps, les cultivateurs ont pris l'habitude de les exorciser en les chassant et de les prévenir en purgeant l'énergie pour apaiser la terre, expliqua Yuan Sunjie. Si Linglin était un spectre Yin, elle aurait causé bien plus de dégâts que ça, surtout, sur une si longue période entre ses apparitions. »
Ses amis restèrent un moment silencieux, réfléchissant à ses paroles. Ils avaient encore le sang en ébullition de leur soirée. Comme Yuan Sunjie leur avait dit, cela avait vraiment été facile et surtout, ils étaient vraiment heureux d'avoir pu voir un spectre d'aussi près.
Ying Luo se tourna vers Yuan Sunjie avec un sourire radieux et dit :
« Après la correction que tu viens de donner aux amis de Ma Han, je crois bien qu'il n'osera plus venir te chercher des poux maintenant. C'est dommage, il ne manquait vraiment que lui aujourd'hui. »
Ying Luo hocha les épaules et l'instant suivant, tous les trois riaient aux éclats.
Au bout de quelques instants, Wang Xiao voulut changer de sujet pour poser une question qu'il voulait longtemps demander à Yuan Sunjie. Il lui demanda alors en toute innocence :
« Dis Yuan-xiong, je voulais te demander... À quel moment as-tu le temps d'aller voir les sœurettes ?
— Aller voir les sœurettes ? Quelles sœurettes ?
— Les filles, voyons ! Les shijies, les shimeis ... Elles ne font que parler de toi ici. Elles disent que tu es le plus beau garçon de toute la montagne ! Il y a moyen que tu puisses... Tu vois ?
— ..... - ?
— Je suis sûr que tu pourrais avoir une amoureuse si tu le souhaitais ! En tout cas, moi, il y a pleins de filles qui m'intéresse !
— À ton âge qu'est-ce que t'y connais aux filles ?, plaisanta Ying Luo avec du rire dans la voix. Et qu'elles sont les filles qui t'intéresses Wang Xiao ?
— Il y a certainement shijie-Xue et shijie-Qiu qui rivalisent pour être la plus belle. Qiu Yefeng aussi !, fit Wang Xiao avec des yeux soudain émerveillés et rêveurs. Elle est d'une beauté à faire pâlir les étoiles ! Si élégante que sa beauté cache la lune et fait honte aux fleurs ! Il y a aussi shijie Wan Meiguan qui est ravissante et sa petite sœur, ma shimei... Wan Meigui... elle est trop mignonne ! »
Un sourire béat s'étira d'une oreille à l'autre sur le visage de Wang Xiao tandis que Yuan Sunjie et Ying Luo éclatèrent de rire.
« Toutes ces filles ?, s'esclaffa Yuan Sunjie.
— Tu es un vrai bourreau des coeurs ! Attention danger ! Wang Xiao est lâché !, taquina Ying Luo en parlant fort.
— Tantines, ramassez vos poules ! Un jeune coq est de sortie dans la basse-cour !, chambra Yuan Sunjie en riant.
— Il a même l'embarras du choix ! Tantines, faites attention ! » ajouta Ying Luo suivant le délire.
***Quelques lunes plus tard...
« FÉLICITATIONS YING LUO !!! » crièrent plusieurs voix en chœur.
Yuan Sunjie, Ying Luo et Wang Xiao étaient dans un restaurant en ville, au pied du volcan pour fêter un événement spécial : la promotion de Ying Luo, qui passait du statut d'apprenti à celui de disciple du Bambou de Jade.
« Félicitations Ying Luo !, entonnèrent-ils à tue-tête en faisant cogner leurs coupes.
— Félicitations pour ta promotion !, s'égosilla Wang Xiao.
— Félicitations P'tit Paquet !, ajouta Yuan Sunjie en lui ébouriffant les cheveux.
— Maintenant que tu as le statut de petit génie pour avoir développé ton jiedan avant quinze ans, tu auras du succès auprès des filles et tu pourras te trouver une belle sœurette !
— Tu ne penses vraiment qu'aux filles Wang Xiao !, pouffa Ying Luo en se dégageant des bras de Yuan Sunjie qui riait à son oreille. Dépêche-toi de me rattraper au lieu de ne penser qu'à voler du parfum et à dérober du jade* ! »
Wang Xiao lui lança un regard douloureux et poussa un soupir exagéré.
« Je n'ai ni ton talent, ni le charme de Yuan Sunjie auprès des filles. Mais à mon âge, tu étais au troisième palier. Je suis déjà au deuxième ! dit-il avec une bouche mielleuse. Je te rattraperai ne t'en fais pas, n'est-ce pas shixiong ?
— Évidemment !, acquiesça Yuan Sunjie. Ce n'est qu'une question de temps à la vitesse à laquelle tu progresses. Allez ! On mange ou pas ? »
Ils avalèrent leur coupe d'une traite, ne se gênant pas du bruit qu'ils faisaient même s'ils n'étaient que trois. Bien que quelques têtes se retournaient vers eux de temps en temps, et qu'il y avait même une paire d'yeux qui les fixait intensément, les clients du restaurant comprirent qu'ils fêtaient une occasion spéciale et personne ne vint les interrompre.
Soudain, un jeune adolescent entra dans la salle en trombe en s'écroulant de tout son long devant tous les regards. Certains auraient voulu rire de sa chute maladroite, mais il portait le même vêtement de la couleur du bambou que Yuan Sunjie et Ying Luo, et personne dans le restaurant n'osa se moquer.
Le jeune se releva péniblement sur ses genoux et sur son visage blême, on voyait qu'il était effrayé. Il serrait très fort une sacoche en cuir contre sa poitrine en y plantant ses ongles.
Wang Xiao reconnut le jeune apprenti et l'appela par son nom.
« Xia-shidi, par ici ! ..... Tout va bien ?, lui demanda Wang Xiao d'un air inquiet.
— Tu fais une drôle de tête, tu ne te sens pas bien ?, questionna Ying Luo en posant une main sur son épaule et en tirant une chaise pour l'asseoir.
— Je... Je suis juste entré ici... Pour me cacher... Je ne savais pas où aller...
— Que t'arrive-t-il P'tit Zozio ? Quelqu'un t'a fait du mal ? » lui demanda Yuan Sunjie.
En entendant ces mots, Xia Shuibo se jeta dans les bras de Wang Xiao et éclata en sanglots à leur grande surprise.
À peine âgé de douze ans, il était nouveau à la secte Zhu et il partageait la chambre de Wang Xiao. Il pleurait si fort qu'il reniflait sans cesse et était incapable de parler.
« Là, là... Calme toi, réconforta Wang Xiao en lui tapotant l'épaule.
— Je voulais me cacher, pleura-t-il.
— Raconte-nous tout shidi. »
Xia Shuibo s'efforça de prendre quelques grandes bouffées avant de pouvoir raconter sa mésaventure.
« Je-je-je..., hoqueta-t-il. Je me suis fait attaqué par des grands ! Ils ont volé ma bourse et ils ont pris mon médaillon de la déesse Mazu. Ils ont voulu prendre ma sacoche, mais ce sont les notes de l'ainé Ling ! Je n'ai pas voulu la leur donner, alors j'ai couru et je me suis caché ici ! fit-il en sanglotant.
— Ils étaient combien ? À quoi ressemblent-ils ?
— C'étaient des adultes Wang-shige* ! Des étrangers, pas des gens d'ici... Ils ne connaissent pas le clan Zhu. C'est ce qu'ils m'ont dit quand je leur ai dit que j'étais un apprenti de la secte, dit-il en s'essuyant la joue alors que d'autres larmes suivirent. Ils ont juste ri et ils se sont moqués !
— Où est-ce survenu ? » demanda Yuan Sunjie.
Xia Shuibo renifla plusieurs fois avant de répondre:
« J'étais près du carrefour... à la place des marchands de fruits confits.
— Comment étaient-ils habillés ?, ajouta Yuan Sunjie calmement.
— ... Ils portaient une chemise et un pantalon gris... qui s'arrête sur les mollets et-et-et... ils avaient un ruban frontal rouge ! Le chef était complètement chauve et il avait de grandes dents ! Il y avait trois autres types balèzes avec lui ! »
Yuan Sunjie et Ying Luo se levèrent d'un seul mouvement et se dirigèrent vers la sortie.
« Reste ici ! » intima Wang Xiao à Xia Shuibo en suivant ses amis.
L'aubergiste voulu courir après eux en voulant les empêcher de partir sans payer leur note, mais il fut stoppé par d'autres membres de la secte qui mangeaient aussi au restaurant et avaient tout entendu.
« N'ayez crainte, ils vont revenir. Sinon, c'est le clan Zhu qui réglera leur ardoise » lui dit l'un des cultivateurs qui devait être âgé d'une vingtaine de printemps.
À ses côtés, le fils du chef de clan, le junzi Zhu Yaling lui-même, était attablé. L'aubergiste se tourna vers le premier cultivateur et secoua la tête d'un air entendu.
Le cultivateur se leva en se frappant la cuisse, aussitôt suivi par les trois convives à sa table, et ils se dirigèrent vers la porte.
L'aubergiste poussa un soupir navré après eux. Cet homme a vécu toute sa vie sur ce volcan. Le clan Zhu, lui, il connaissait, contrairement à ses marins. S'il soupirait, ce n'était pas par crainte ou de soulagement, mais bien parce qu'il connaissait leur réputation.
Les disciples de la secte du Bambou étaient en tout point l'image d'élégants gentilshommes, que ce soit dans leurs manières, leurs codes d'honneur et leurs paroles, mais en ce qui concernait les combats, leur réputation était celle d'être de vrais brutes qui ne respectaient aucune règle.
À l'extérieur du restaurant, Yuan Sunjie avec son usuel demi-sourire espiègle, Ying Luo son air doux, et Wang Xiao toutes dents dehors, se dirigeaient vers les marchands de fruits, suivis non loin par le deuxième groupe.
P'tit Zozio sortit après eux en quittant le restaurant à toutes jambes. Pourquoi resterait-il seul derrière après tout ?
Arrivés à l'endroit indiqué, ils ne tardèrent pas à repérer la bande et leur chef décrit par Xia Shuibo.
« C'est vrai que tu as de grandes dents ! » ricana Yuan Sunjie malicieusement en bondissant vers lui, il lui envoya une droite en plein dans les dents.
Le chef de la bande tomba à terre en fusant une mare de sang par la bouche et les gencives. Dans sa main, il cracha ses dents de lapin, de la bave et du sang.
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Notes et Références :
⎨* parfum volé, jade dérobé : faire le coureur de jupons ⎬
* shige : grand Frère Apprenti ⎬
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