Acte IV, scène 10
Auriane, Antoine
Une fois tous les invités sortis, Auriane s'approche d'Antoine.
AURIANE, innocemment – Vous ne partez pas Monsieur ?
ANTOINE– A vrai dire, je voudrais vous parler avant.
AURIANE – D'accord. De quoi souhaitez-vous m'entretenir ?
ANTOINE – C'est que... Je n'ose proférer les mots qui me tourmentent devant vous.
AURIANE – N'ayez crainte, tout ce qui se dira ici restera entre nous, enfin, je ne peux vous le garantir car mes amies lisent en moi tout ce que je voudrais leur cacher. Mais je ne vous porterais jamais préjudice, quoique vous disiez.
ANTOINE– Ah ! Madame ! Vous me rassurez ! Mais ce que je veux dire, je ne l'ai encore jamais dit avant et je ne sais pas si j'en aurai le courage.
AURIANE – Vous en avez trop dit ou pas assez. Je ne vous laisserai plus partir tant que vous n'aurez parlé !
ANTOINE – Voulez-vous ... ? Puis-je vous demander de ne pas m'interrompre ?
AURIANE – Si cela vous donne le courage qu'il vous manque, vous avez ma parole.
ANTOINE – Ah ! Du courage ! Je me lance. Voilà, Auriane, je pense que vous l'avez remarqué, et je ne peux guère plus le cacher, je vous aime.
Auriane fait un mouvement de recul.
ANTOINE, se mettant à genoux – N'ayez pas peur. Je sais que je ne fais pas battre votre cœur comme vous tambourinez sur le mien. Je sais. Vous ne me croyez pas bien malin (elle veut le contredire mais il continue) mais je sais que vous aimez. Vous aimez tendrement et follement Monsieur de Nemours. Je ne vous blâme pas. Qui ne succomberait pas à ses charmes ? Il nous surplombe tous, du haut de sa beauté et de son esprit. Il nous vole les jolies jeunes femmes et nous les rend toutes le cœur brisé. Mais je voudrais être celui qui réparera le vôtre, je voudrais être celui à qui vous vous confiez sans crainte, celui qui serait présent à vos côtés quoi qu'il arrive. Votre détresse me touche et je ne peux que vous aimer. Depuis longtemps maintenant, je nourris une tendresse infinie pour votre beau visage, qu'il soit souriant ou baigné de larmes. (Elle veut l'interrompre, il continue) Je vous laisserai du temps. Non, je ne suis pas pressé. Contrairement à l'autre, je vous aimerais toujours, toujours je vous chérirai. Et si un jour, votre cœur se cicatrise, si un jour vous cherchez quelqu'un pour partager votre vie, je vous en prie, songez à moi en premier. En attendant, sachez que vous voir me suffira. Ne parlez pas si vous ne le désirez pas. Ne dites rien sauf si de partager vous en avez le besoin. Je vous offre la certitude quand il vous renie. Je vous aime quand il vous abandonne. Choisissez-moi. Je vous en supplie.
AURIANE – Je... je ne peux pas. Je suis vraiment désolée. Je voudrais tant vous rendre heureux. Soyez-en certain. Je voudrais... mais je ne peux pas. Mon cœur n'est pas seulement déchiré, il appartient à Monsieur de Nemours. Je vous rendrais le plus malheureux des hommes si j'acceptais.
ANTOINE – Mais je me contenterai de peu. Un sourire me convient très bien.
AURIANE – Je ne sais pas... Pour l'instant, j'ai l'impression que jamais plus de ma vie je ne pourrais aimer. Voudriez-vous d'une compagne qui ne vous aime pas ? Voudriez-vous de quelqu'un qui, en étant avec vous, pense à un autre ? Je ne souhaite cela à personne.
ANTOINE – Mais... Je suis mieux que lui, vous le savez ?
AURIANE – Hélas ! Oui. Je ne le sais que trop bien.
ANTOINE – Alors pourquoi ne l'abandonnez-vous pas ? Pourquoi ne pas renoncer à lui et aller vers ceux qui vous aiment ?
AURIANE – J'aimerais bien mais, le cœur à ses raisons. Je ne peux m'empêcher de trembler en le voyant arriver, je suis jalouse de Cécile, je pense à lui à chaque seconde, je nourris l'espoir qu'il revienne alors que je sais pertinemment que c'est perdu d'avance.
ANTOINE – Je ne cesserai jamais de vous aimer. Je vous laisse du temps. Mais je vous en prie, pensez à moi, au moins quelques fois.
Il se relève et sort pour cacher ses larmes.
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