Chapitre VIII - La bataille commence
Elle avait baissé la tête, croisé les bras, détourné le regard. Maya n'avait, depuis qu'elle avait avoué la perte de ses pouvoirs, plus prononcé un mot. Elle marchait simplement en dérobant son visage à ma vue, que je devinais, de par son attitude, couvert de larmes. Et je la suivais, sans rien dire, espérant qu'elle continue d'accepter ma présence. Soudain, elle s'arrêta brusquement et je heurtai son épaule, surpris. Elle mit sa tête dans ses mains et sanglota de rage. Puis elle frappa du pied un poteau électrique qui se déforma sous le choc, comme s'il ne s'agissait que de pâte à modeler. Ou de gâteau à la crème, ce que j'aurais souhaité de tout cœur.
En voyant l'œuvre de ses nouveaux pouvoirs, elle gémit de rage et frappa une seconde fois le poteau, comme pour voir si il allait s'affaisser. Il vrilla, parut disparaître tel de la brume, réapparut, plusieurs fois, puis se reforma, reprenant son allure habituelle. Devant cette nouvelle anomalie, Maya s'effondra. Je l'entourai de mes bras et lui murmurai à l'oreille :
- On est deux gardiens dans un monde d'humains, en 2178, à Londres - dont je n'avais jusque là que pu rêver. A nous deux on est plus puissants que tous les humains de la ville, au minimum...
- Avec nos pouvoirs... me coupa-t-elle.
Je secouai la tête.
- Non, avec nos pouvoirs, on est plus fort que tous les humains de l'espace et du temps réunis. Maya, je te jure qu'on réussira.
Je ne compris pas par quelle miracle cette phrase réussit à lui décrocher un sourire, et même à la faire rire, mais je m'en félicitai.
- Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce j'ai dit ? lui demandai-je en riant.
Elle secoua la tête comme pour balayer cette question et prit soudain un air plus sérieux.
- Tu te souviens du garçon qui m'accompagnait ? me demanda-t-elle alors.
- Évidemment...
- Il faut le retrouver.
Son air si déterminé me donna quelque raison de me réjouir : un premier objectif s'offrait à nous. Ce que j'abhorrais par dessus tout était de me retrouver sans perspective, sans horizon.
- Et il est quoi, lui ? C'est un gardien comme nous ?
Elle baissa les yeux, l'air gêné.
- Non, c'est un humain, mais il m'accompagne dans mes voyages... Je vais te raconter toute l'histoire en chemin. En attendant, il faut déjà le localiser. Ça ne me prendra qu'une minute.
Maya chercha quelque chose dans sa poche, me laissant incrédule quant à la manière grâce à laquelle elle comptait faire cela. Elle en sortie un grain de sable qu'elle posa au creux de sa paume ouverte, puis qu'elle fixa sur son front.
- Bon, écoute, lui dis-je, j'ai passé la majorité de mon temps au 19e siècle, et je n'ai pu aller plus loin que l'année 2050 ; tout ce que tu es en train de faire, et cette époque dans son entièreté, tout cela m'est absolument inconnu. Quelques petites explications ne seraient pas de trop.
Elle me sourit.
- Ça, me dit-elle, c'est une puce électronique. Mon pouvoir me permet de la rétablir dans mon cerveau quand je le souhaite. Luigi en a une aussi, donc ça me permet de...
Elle s'arrêta. Réfléchit un instant. Soupira, et reprit.
- De le localiser, voilà. Il se trouve à l'internat Élisabeth II. Il n'a pas perdu de temps...
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
Elle sortit de sa poche l'enveloppe que je reconnus être celle de la lettre.
- Regarde, à l'intérieur, il y a un signe. C'est un logo. Avec Luigi, on l'a identifié comme étant celui de cet internat. D'après moi, il nous indique le foyer de la malédiction.
- Tu crois qu'il s'agit de l'internat ?
Elle se mordit la lèvre en secouant la tête.
- Non... Je ne suis pas sûre de moi, mais je me dis que ça désigne en fait le lycée associé. L'internat ne serait - d'après moi - qu'une sorte de... QG ?
- De QG ?
- Un endroit où dormir, se poser pour trouver un plan...
Je me grattai la tête, embêté.
- Cela fait au moins 3 ans - si mon calcul est bon - que je n'ai pas dormi.
Elle me dévisagea, puis se mit à rire.
- Dépêches, j'ai activé le GPS. Suis-moi.
Je la fixai quelques secondes, le visage emplit d'admiration et de détermination, avant de lui obéir. Malédiction, tiens-toi bien, tremble tant qu'il en est encore temps, nous arrivons ; ton règne touche bientôt à sa fin...
- Et toi, tu viens faire quoi ici ?
Pour la dixième fois depuis notre rencontre, je ne pu m'empêcher de lui sourire.
- J'accompagne une... un ami.
Quel coup de folie avait bien pu me pousser à dire une chose aussi stupide ? Quand Dayla allait arriver, qu'allais-je bien pouvoir dire à Cynthia ? Elle allait bien remarquer que cet ami était en réalité une fille, et mon mensonge la pousserait à penser que j'avais quelque bonne raison de lui avoir caché la véritable identité de ma protectrice. Il fallait que je rattrape le coup.
- Et il s'appelle comment, cet ami ? me demanda-t-elle.
- Lewis, répondis-je spontanément, tout sourire.
Si j'avais eu un marteau à portée de main, et si j'avais été aussi immortel que ma chère Lewis, je me serais asséné un grand coup sur le front.
Mon cerveau avait pris les devants et ressorti ce nom maudit. Ma seule porte de sortie désormais : le vrai Lewis était l'un des résidents de la chambre, ce qui signifiait qu'avec un peu de chance, je pourrais me sortir indemne de ce mensonge sans aucun sens. Mais qui pourtant pouvait probablement compter quelque origine : la peur d'une potentielle jalousie de Cynthia pour ma protectrice... Un acte pathétique.
Les yeux de ma colocataire brillaient d'un éclat de malice, et ses cheveux blonds virevoltaient contre son visage. Son sourire accaparait tout mon attention. J'éprouvais l'irrésistible envie de coller son visage contre le mien, de passer ma main dans ses cheveux blonds, et de l'embrasser.
Cynthia paraissait souhaiter la même chose, puisque ses yeux se fermèrent tendrement et son visage se rapprocha du mien très doucement. Je suivis ce mouvement sans plus penser à rien, simplement à elle.
Tout à coup, nous entendîmes un bruit aussi brusque que surprenant, et la porte de la chambre s'affaissa. A la suite de quoi apparut ma Dayla alias Lewis, assez remontée contre cette pauvre porte. Elle brandit un pistolet sur Cynthia et la menaça.
- Lâche-le ! cria-t-elle.
- Dayla arrête ! la priais-je.
Le garçon à côté d'elle, qui jusque là s'amusait de l'attitude de ma protectrice - ce qui d'ailleurs m'étonnait, moi qui le pensait être un ennemi - parût alors surpris par cette dernière phrase, et il répéta en silence le nom de la gardienne.
Puis il reprit ses esprits et abaissa le pistolet.
- Ta petite effraction n'est pas passée inaperçue, la sécurité arrive, ils ont dû trouver la secrétaire ligotée... sourit-il.
Ligotée ? Sérieusement ? En effet des pas se firent entendre dans les escaliers et Dayla s'affola. D'une main tendue elle redressa et réenclencha la porte - qu'elle avait brisée d'un coup de pied - dans on axe. Puis elle se précipita sur Cynthia et lui ordonna de se taire et de ne pas bouger. La pauvre avait crié quand Dayla avait dégainé l'arme et elle demeurait tétanisée. Puis elle rangea son flingue que j'avais été très étonné de découvrir en sa possession, et prit un air naturel.
Ce ne fût pas la sécurité mais la jeune femme de l'accueil qui ouvrit la porte de la chambre.
- Que ce passe-t-il ici ? s'énerva-t-elle. C'était quoi, ce cri ?
- Je suis désolée, répondit Cynthia en tremblant. J'ai cru voir une mygale.
La secrétaire parut effarée devant cet énorme mensonge. La porte grinça comme pour dénoncer le traitement qu'elle avait reçu, et la jeune femme s'en alla.
Ce fût alors que nos question fusèrent toute part.
- Tu t'appelles Dayla, pas Maya ? Pourquoi tu ne me l'a pas dit ? demanda celui que je finis par me résoudre à reconnaître comme étant (le vrai) Lewis.
- Ligotée ? Qu'est-ce que tu dis ? ne pus-je m'empêcher de m'insurger.
- Qui êtes vous ? hoqueta Cynthia entre deux sanglots.
Dayla leva sa main pour nous nous taisions.
- Qui est-elle ? me questionna-t-elle en pointant du doigts notre jolie colocataire.
Je le lui dis sèchement. Puis elle s'adressa au Lewis, tête baissée, nous ignorant alors elle et moi. Avait-elle oublié notre complicité passée ?
- Cela me faisait rire que tu m'appelles Maya.
- Tu mens, rétorqua-t-il, apparemment vexé.
Elle se tourna vers lui.
- C'est vrai. Je ne te fais pas entièrement confiance, alors j'ai souhaité t'en dire le moins possible.
- Ce qui est fait est fait, les coupais-je en me levant. Dayla, explique moi tout cela.
- Je t'arrêtes tout de suite, m'interpella Lewis, c'était ironique, le coup de la secrétaire ligotée. On est rentrés ici en bonne et due forme.
- Voilà qui est rassurant. Et le flingue braqué sur Cynthia, ironique aussi ? je perdis patience.
- Nous devons prendre toutes les précautions, ils sont tous coupables à mes yeux, lui compris, dit-elle en désignant le garçon.
Bien sûr, j'aurais dû m'en douter. Dayla était toujours aussi méfiante, elle ne pouvait faire confiance qu'à elle-même. Elle portait bien trop d'orgueil sur ses épaules. Mais là n'était plus l'heure de s'entretuer, nous qui avions eu jusque là une entente parfaite, et une confiance sans faille. Non, il était temps de trouver un plan d'attaque. Nous ne devions plus attendre, il fallait agir, et comprendre le guet-apens que nous avions pour mission de déceler...
Note d'auteur : Patience ! La suite arrive Samedi 8, c'est à dire demain à ce jour ! Et surprise ! Vous allez faire la connaissance d'un nouveau personnage... Pour le moins énigmatique. Merci à @Ele_721 pour m'avoir aidé à trancher sur son prénom !
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