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Chapitre III - L'horizon à nos pieds


La porte de l'orphelinat claqua à grand bruit. Luigi s'avança sans me voir et, si l'obscurité du soir n'en laissait rien paraître, mes quatre précédentes boucles temporelles m'avaient informé de sa profonde désillusion qu'il ne pouvait cacher.

Quand il me vit enfin, il essuya les larmes qui obstruaient sa vision et fit mine de ne me remarquer qu'ensuite. Il me sourit en baissant la tête et s'assit à sa place fétiche où il exerçait sa mélancolie. Voici la preuve irréfutable qu'il fallait bien plus d'un évènement pour changer le cours du temps. Même place, même tristesse, même solitude, avec ou sans moi. Mais pas pour longtemps. Mon cœur battait si vite que j'eus peur qu'il ne brise le silence majestueux. Pourtant il n'en fut rien, bien évidemment, j'étais la seule à le percevoir tandis qu'il me murmurait l'état de mes émotions. Avais-je seulement le droit de faire cela ? En avais-je la possibilité, le pouvoir ? Mieux valait essayer, quoi qu'en dise le conseil des Immortels, qui me supervisait lors de mes missions, aussi inexistantes soient-elles pour l'instant.

Je pris une grande respiration après avoir visualisé plusieurs fois dans mon esprit ma prise de parole.

- Luigi ?

Celui-ci n'osa pas découvrir son visage de ses mains, de peur sûrement que je ne vois l'état dans lequel il était. Cette inertie de sa part me donna malgré tout le courage de continuer, craignant sa réaction autant qu'il craignait de me laisser paraître sa tristesse.

- Luigi, écoute-moi jusqu'au bout s'il te plaît. Je suis une gardienne de l'espace, je ne suis pas orpheline à proprement parlé, c'est l'espace qui m'a créée. Je suis prise au piège dans une boucle temporelle qui répète sans cesse cette année 2120, ce qui fait que cela fait dix-sept fois à présent que je revis la même année. Mais je ne te dis pas cela pour t'accabler d'incertitudes, ni pour te laisser croire que je me joue de ton malheur. Je ne te demande pas de me croire, ni même de te demander si je te dis ou non la vérité. Je veux savoir une seule et unique chose. Es-tu attaché à ta vie ici ? Voudrais-tu quitter ta ville, tes repères, pour plonger dans une vie mouvementée, sans avoir la certitude de pouvoir atteindre le jour suivant ?

Peut-être ma description du voyage spatial était-elle légèrement hyperbolique et exagérée, mais j'avais en réalité une autre perspective en tête. C'était pour cela que je voulais m'assurer de sa réelle envie de s'arracher au monde qu'il connaissait. Peut-être devrais-je m'expliquer. J'avais eu sur un coup de tête l'idée de l'emmener avec moi dans mes voyages, et j'avais pensé également à l'éventualité d'une mission : là se trouvaient tous les dangers de ma profession, même si je n'en avais réalisé à ce jour que d'insignifiantes.

Luigi releva la tête tout en fixant l'horizon, me laissant le doute sur sa réaction, et même sur l'attention qu'il avait porté à mon discours.

- Tu te fous de moi.

Je ne répondis rien.

- Mais puisque tu y tiens, je ne vais pas prêter attention à ton histoire.

Il tourna enfin la tête vers moi pour me fixer de ses yeux verts. Mon visage peinait à garder une expression neutre.

- Ici, je ne serais plus jamais sûr d'atteindre le jour suivant.

Ses dernières paroles me décrochèrent un sourire. Mais Luigi n'avait guère l'espoir que j'ai une ambition pour lui derrière la tête. Il se releva comme pour rentrer, avant de se rappeler qu'il n'avait aucun endroit où aller. Il se rassit alors et me regarda, le regard empli de rage.

- Pourquoi tu me dis ça, d'abord ? railla-t-il.

Sous ses airs de désintéressé, mon petit Luigi n'avait plus qu'un seul espoir : ma réponse.

- Je t'apprécie énormément, Luigi, et tu me fais de la peine. Ce que je t'ai dit est vrai, peu importe ce que tu penses. Et je peux te proposer de t'emmener avec moi lors de mes voyages. Tu as répondu comme je l'espérais à ma question, ce qui m'amène à te dire que tu n'as rien à perdre si tu acceptes. Et si tu penses que je mens, qu'est-ce que ça ferait, au fond ? Tu n'as plus rien ici, viens, je t'en prie.

Il fit mine d'hésiter. Mais je le connaissais trop bien à présent.

- Je ne suis pas certain de ce qui m'attend, peut-être rien, si j'accepte. Mais il est vrai qu'ici je n'ai pas plus de perspective.

- Donc ?

J'avais en réalité très bien compris sa réponse, mais je voulais l'entendre me le confirmer.

- Donc oui.



Paris, ô Paris, ma prison d'or. Son envergure allant de sous-terre jusqu'à l'espace, où que j'aille elle était là. Me regardant orgueilleusement mais avec humilité, et de par son histoire qui s'étendait sur des millénaires, j'étais son confident. Et elle ne voulait pas me laisser lui échapper, de peur de ne devoir se restreindre à voir défiler des vies se croyant toutes puissantes avant de périr l'instant d'après. Oui, elle était le seul endroit de l'univers où j'avais le droit d'accès, mais elle souhaitait ma compagnie durant chacune des étapes de sa vie éternelle. Son égoïsme voulait me retenir là où son bon cœur m'abritait.

Paris, ô Paris, qu'es-tu, là-bas ? Derrière ce mur temporel qui m'empêchait de veiller sur toi plus longtemps... Que pourrait-il encore t'arriver ? Ta belle cathédrale s'était déjà envolée, est-elle guéri dans ce futur inaccessible ? Ou es-tu malade, triste sans moi ? Que t'arrive-t-il, là-bas ?

La foule bruyante s'empressait devant l'avenue fière des champs Élysée. L'arc de Triomphe me fit un humble signe avant d'adresser son regard à la foule qui criait. Son merveilleux spectacle allait commencer, le pauvre, il devait avoir le trac. Je n'avais pas la force de lui dire que c'était son dernier spectacle à mes côtés, lui qui croyait ce jour futur.

L'arc de Triomphe s'éclaira de mille couleurs, et afficha fièrement l'année en cours, qui ne serait bientôt plus qu'un souvenir envié. 2050... trois, deux, un... Et le feu d'artifice débuta, tandis que la nouvelle année s'affichait. Et la foule l'accueillait avec amabilité, sans pourtant la connaître encore. Sans pourtant savoir qu'elle allait les trahir de façon cruelle. Je soupirai, fermai les yeux et commandai à mon esprit de me transporter à la toute fin de cette année mortuaire.

31 décembre 2050, 23h59. Les champs Élysée étaient vides, mon petit arc de Triomphe était triste. Me voir lui apporta une petite consolation. Il m'était trop difficile de repenser à cette année, à ce qu'il s'y était passé, ainsi que d'imaginer ce qu'il pourrait arriver de pire encore. Je laissai seulement les trois dernières secondes de l'année emporter mon esprit vers le léger mouvement des arbres qui valsaient pour la dernière fois sous mes yeux. Trois, deux, un, et tout se figea. J'y étais arrivé, j'étais à la limite du temps, encore. Doublement prisonnier, de l'espace, ainsi que, d'une certaine façon, du temps, que je maîtrisais. Mais comment le protéger si je ne connaissais pas son futur ? Le laisser seul, près d'un siècle...

Je retournai sur mes pas, observant tristement les oiseaux figés dans le ciel, dont je ne connaîtrais jamais la destination. Oui, un siècle, seulement. Soixante-dix ans exactement. Le temps m'abandonnait, me délaissait, pour un autre. Il allait s'éprendre du gardien de l'espace, résidant dans le futur, et le protégeant comme Paris me protégeait, l'emprisonnant comme elle m'emprisonnait, aussi. Finalement, d'une certaine façon, n'étions-nous pas liés, le gardien de l'espace et moi ? Utilisant nos éléments pour protéger autant que piéger l'autre ?

C'était bien étrange, de finir ma ligne temporelle ici, sans foule, sans bruit, sans rien d'autre que la catastrophe industrielle et nucléaire pour régner à ma place sur le Monde... Mais pas sur le Temps ! Temps, invaincu, pour toujours, rien ne persiste à travers le temps, rien, tout se termine, y compris ça. Y compris l'humanité...

La Seine, dont les mouvements de l'eau étaient figés, n'avait pas vieilli depuis 1887, l'année où je l'avais vue il y avait quelques heures seulement de cela... L'ennui commençait à m'envahir. Las du temps, que je connaissais à présent si bien... Las de Paris, peut-être, aussi. Aucune mission de grande importance ne s'était offerte à moi depuis... Le début. Étais-je vraiment utile dans mon rôle ? Ou se jouait-on de moi, au conseil des Immortels, de moi qui me pensais indispensable à la protection du temps, mais qui n'en étais que prisonnier ?

Pourtant l'une de mes missions de petite envergure m'avait permis de rencontrer Gustave, mon grand ami. C'était en 1880, lors d'une mission dont l'inutilité me frappait encore. Il avait gagné ma confiance en me fournissant quelques indications sur le XIXe siècle qui m'était inconnu jusqu'alors, par l'intermédiaire de récits qui l'avaient emmené à me parler de son ambition. Ma mission terminée, je m'étais attardé cette année-là, aidant mon nouvel ami à réaliser ses rêves, que je savais déjà révolutionnaires... Peut-être ma place n'était-elle que là-bas, finalement. Le temps n'avait pas besoin de moi ailleurs, pour l'instant. Et, si chaque soir j'usais de mes pouvoirs pour passer directement au lendemain, peut-être serait-ce l'endroit le plus apte où attendre une prochaine mission...

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