20. I can't win - The Strokes
Pendant un bref instant, elle eut l'air troublée. Elle arborait la même expression confuse, légèrement vulnérable, que lorsqu'il avait enfin réussi à lui parler quelques jours après leur baiser. Elle la fit cependant bien vite disparaître pour retrouver sa verve, croisant les bras sous sa poitrine et s'appuyant sur une jambe.
- Alors comme ça tu viens jusque chez moi me pourrir la vie ?
Elle se fendit d'un sourire narquois. Pour avoir subi ses piques pendant six ans, Scorpius détecta aussitôt que son ton n'avait pas le mordant de l'amertume qu'il avait autrefois.
- Que veux-tu, je suis tellement doué pour te battre au Quidditch... soupira-t-il avec un sourire en coin.
- Voilà une attitude qui me plaît ! s'exclama Charlie qui venait de sortir de la maison.
Il abattit sa main pleine de callosités et d'ampoules sur l'épaule du jeune Malefoy et lui tendit l'autre.
- Charlie, l'oncle amoureux de dragons.
- Scorpius, se présenta-t-il en lui serrant chaleureusement la main.
- Ravi de faire ta connaissance. Et je te veux dans mon équipe.
S'il y avait une chose pour laquelle la famille Weasley était douée, c'était vous faire sentir à l'aise et bienvenu. Scorpius n'était pas arrivé depuis dix minutes que toutes ses appréhensions s'étaient déjà dissipés. Hugo avait été le premier à le saluer. Scorpius appréciait véritablement le garçon. Depuis quelque temps qu'ils se côtoyaient, il lui semblait plus épanoui que lors de la première visite à Pré-au-Lard, à Halloween. Sa personnalité posée avait l'air bénéfique pour Rose, comme le contact de sa sœur paraissait l'ouvrir aux autres.
Puis Molly et Arthur l'avaient accueilli avec bienveillance et il avait immédiatement ressenti un élan d'affection pour eux. Il comprenait sans mal pourquoi Rose était si farouche à défendre ses proches. Lorsqu'il avait suivi Albus jusqu'au Terrier, il avait repensé avec une honte cuisante à l'attitude imbuvable qu'il avait eu en première année. Les mots de grand-père Lucius avaient résonné dans son esprit et il avait culpabilisé d'être un Malefoy. Pourtant, les Weasley l'avaient reçu sans sourciller, sans le jauger avec la moindre once de méfiance.
Et maintenant, Charlie le traitait avec la même bonhomie. En fait, la seule crainte qui lui restait, c'était rencontrer le père de Rose, Ron. Albus l'avait toutefois informé que lui et Hermione, ainsi que ses propres parents, travaillaient et ne viendraient que le soir.
- Bon, on joue ou on bavasse ?
James, Lily, Roxanne et Fred arrivèrent du jardin. Le premier salua Scorpius, puis alla nonchalamment poser son avant-bras sur l'épaule de Rose.
- Rosie et moi, on joue ensemble, annonça-t-il.
- Hors de question, vous êtes insupportables tous les deux, objecta Fred en venant serrer la main du blond. Salut, Scorp.
Le frère aîné de Roxanne était un gaillard à la solide charpente de deux ans de plus. Métissé, sa peau était un peu plus laiteuse que celle de sa cadette et criblée de taches de rousseur foncés. Il portait courts ses cheveux crêpus de la même teinte d'un fauve profond. Non seulement doté d'un charme unique et captivant, il était aussi un batteur hors pair comme l'avaient été son père et son oncle à qui il devait son prénom. Scorpius avait déjà goûté à ses cognards et risquait de s'en souvenir toute sa vie. Il eut envie de se frotter douloureusement l'abdomen rien que d'y repenser.
- Je suis assez de ton avis, approuva Scorpius en riant.
Fred leva les mains comme pour dire « vous voyez, je suis pas le seul à le dire » tandis que James et Rose prenaient un air outré. La jeune fille avait beau être inséparable d'Albus, quand il s'agissait de Quidditch, c'était clairement de son duo avec James dont il fallait se méfier. Chacun des cousins y alla de son avis dans une joyeuse cacophonie.
- On était déjà pénible quand on était que sept enfants, mais alors depuis que mes frères et sœur ont fait des gosses... confia Charlie en aparté à Scorpius et Oliver.
- Je suis ravie de t'entendre admettre que vous étiez infernaux, Charlie, intervint Molly alors que leurs invités s'esclaffaient.
- Et encore, tout le monde n'est pas là !
Oliver se tourna vers Arthur.
- Ils vont venir ?
- Molly et Lucy n'arriveront qu'en fin de journée, mais Victoire est en Grèce avec Teddy, son copain, et Bill et Fleur ont emmenés Dominique et Louis en France, dans la famille de Fleur.
- En Grèce ? s'intéressa Scorpius.
- Oui, ils font le tour du monde à la recherche de vieilles légendes sur la lycanthropie. Ils espèrent trouver la source de la maladie pour pouvoir y trouver un remède, et ils sont actuellement en Arcadie, sur les traces du mythe antique moldu de Lycaon, lui fit part Molly.
- J'imagine qu'il y a un rapport avec les fonds qu'a débloqué le Ministère pour la recherche d'une cure à la lycanthropie ?
Une lueur appréciatrice brilla dans les yeux du couple Weasley.
- Effectivement, confirma Arthur. Teddy est très touché par le sujet, et quand ma belle-fille, Hermione, a réussi à créer la bourse de recherche, lui et Victoire ont envoyés leur dossier de candidature. Ton père t'en a parlé ?
- En fait, je me suis renseigné sur le sujet après qu'Albus m'en ait parlé.
Quand Scorpius avait demandé à Albus d'où lui venait son désir de devenir médicomage, il lui avait expliqué qu'il avait commencé à y réfléchir en s'apercevant qu'il était doué en potions, mais que c'étaient les discussions avec le filleul de son père qui l'avait décidé. À plusieurs reprises, Teddy avait confié à Albus son désir de faire avancer les choses et ce dernier en était rapidement venu à partager son ambition. Harry avait déjà parlé à ses enfants de Remus Lupin et les Potter étaient aussi connus que les Weasley pour leur combat contre la discrimination. Ses prédispositions, plus ses talents en potions et en sortilèges, eux-mêmes couplés au sérieux dont il pouvait faire preuve et son empathie, ferait d'Albus un médicomage d'exception, Scorpius n'avait aucun doute là-dessus. Cela l'avait lui-même poussé à s'informer sur la condition des loups-garous.
Arthur et Molly le regardaient à présent avec une nouvelle curiosité. Sans doute auraient-ils poursuivi la discussion, mais les cousins avaient fini par constituer les équipes.
- Scorpius et Oliver, vous êtes avec Charlie et moi ! lança James.
La petite troupe commença à s'éloigner vers le champ bordant le Terrier, balais sur l'épaule. Charlie tenait également un Souafle au creux de son bras et Roxanne transportait un sac bombé en bandoulière. Le jeune homme s'excusa auprès du couple avec un sourire et emboita le pas à Rose. Il profita qu'ils soient un peu retraits pour dire :
- Dommage, j'espérais jouer avec toi pour une fois.
- Mais c'est tellement plus drôle de te marquer des buts, rétorqua-t-elle malicieusement.
Il eut un léger rire.
- Je suis étonné que tu aies accepté de faire équipe avec Al. D'après ce qu'il m'a dit, tu étais prête à l'étrangler avant qu'il vienne me chercher...
- J'ai été un peu... surprise.
- J'espère que ça ne te dérange pas trop que je sois là... lâcha-t-il en se passant la main sur la nuque.
Rose comprit qu'il était réellement inquiet de sa réaction. Merlin, comment faisait-il pour être aussi prévenant ? Comment faisait-il pour rester aussi adorable face à son caractère de cochon ?
Avant qu'elle puisse ouvrir la bouche pour lui répondre, Fred interpella le garçon.
- T'as déjà fait du Quidditch à quatre, Scorpius ?
- Jamais !
- Le principe de base est déjà simple, mais pour jouer ici, on est encore obligé de simplifier, dit Charlie.
Ils s'étaient arrêtés au milieu du champ. L'oncle de Rose entreprit d'expliquer à Scorpius et Oliver la version Weasley du jeu.
- Bon. Au Quidditch à quatre, il n'y a qu'un seul cognard, par contre il n'y a pas de batteurs, donc il faut être suffisamment habile pour l'éviter seul. La plupart du temps, les équipes se composent d'un attrapeur et de trois poursuiveurs, mais on voit régulièrement des équipes dont un des quatre joueurs se dévoue pour être gardien. Ici, au Terrier, on ne peut pas prendre le risque de lâcher un cognard ou le Vif d'or, du coup pas d'attrapeur non plus.
- Euh... ? On marque juste des buts en fait ?
À la question d'Oliver, Rose, qui était en train de relever ses cheveux en queue de cheval, échangea un regard en coin complice avec Roxanne. Leur petit rictus n'échappa pas à Scorpius.
- Je sens qu'il y autre chose...
Comme pour confirmer le soupçon du jeune Malefoy, l'ensemble de la fratrie sourit avec une identique espièglerie. Quand il n'y avait que Rose pour sourire de cette façon, Scorpius craignait le pire. Quand Rose et Albus souriaient de cette façon, il commençait sérieusement à s'inquiéter. Mais quand tous les enfants Weasley l'entourant souriaient de cette façon, il avait brusquement envie de détaler.
- Effectivement, on a rajouté une petite difficulté. Rien de bien méchant, mais on vous laisse la surprise.
Oliver jeta un coup d'œil à Scorpius, aussi peu rassuré que lui. James et Charlie les entraînèrent un peu à l'écart, pendant que Rose, Albus, Fred et Hugo se consultaient de leur côté. Ne restaient plus que Roxanne et Lily.
- Mais du coup, elles font quoi les filles ?
- Lily est l'arbitre. Et Roxanne...
- Et moi, je suis la surprise, intervint la petite sœur de Fred, non sans un certain machiavélisme.
Rose rit si fort lorsque Scorpius reçut le premier ballon de peinture qu'elle dut stabiliser son balai pour ne pas tomber. Son rire devint incontrôlable quand il leva la tête, proprement choqué, du liquide orange gouttant de sa joue à son épaule. Tous furent gagnés par l'hilarité de Rose, Scorpius y compris une fois remis de sa stupeur.
- T'en fais pas pour tes vêtements, Scorpius. À force de nous voir revenir couverts de peinture, ma mère a mis au point un détachant ultra efficace, lui lança Charlie.
Le jeune homme fit un geste de la main désinvolte, lui signifiant qu'il n'avait aucune inquiétude à ce sujet. Il souriait encore largement, les prunelles pétillantes. Rose se sentit irrémédiablement attiré.
- Bon. J'en déduis qu'il faut esquiver Roxanne ?
Cette dernière pouffa.
- Tu as tout compris, confirma-t-elle en tapotant sa besace remplie de ballons de peinture.
À défaut de pouvoir utiliser les balles traditionnelles du Quidditch, les petits-enfants Weasley avaient corsés leurs parties en les croisant avec le paintball moldu. C'était James qui en avait eu l'idée, après une des fameuses visites à Dudley Dursley et sa famille. Son fils était un mordu de tir de loisirs et possédait une impressionnante collection d'armes de paintball et d'airsoft. Le jeune Potter avait rapporté à ses cousins le concept, et ils avaient rapidement créé une nouvelle règle : si un joueur était touché par trois projectiles, il était éliminé. Avec l'aide de George et Ron, et après plusieurs prototypes, ils avaient détourné des ballons moldus pour les rendre moins élastiques et capables d'exploser à l'impact. Ils n'étaient jamais beaucoup remplis de peinture, mais cela suffisait aux Weasley pour rentrer bariolés.
Ils jouèrent pendant deux bonnes heures, enchaînant les matchs, à filer dans les airs, monter en flèche, piquer, feinter pour marquer dans les buts de fortune, le tout en tentant d'échapper à Roxanne et ses munitions. Le champ résonna de leurs cris d'allégresse et de leurs éclats de rire. Quand l'un d'eux était disqualifié, il retournait au sol pour encourager son équipe, mais finalement, personne ne savait vraiment qui gagnait. Aucun n'en ressortit indemne, pas même Roxanne et Lily.
- Pendant quelque temps, quand on n'avait pas encore de peinture, on utilisait des œufs, avoua Hugo à Oliver pendant qu'ils rentraient, mais mamie a fini par s'en rendre compte. Elle était furieuse.
- Elle l'était encore plus quand elle s'est rendu compte que papy nous avait couvert une fois, renchérit Lily.
Ils s'esclaffèrent. Molly les vit arriver à travers la fenêtre de la cuisine et alla se poster dans l'entrée. Elle regarda la petite troupe des pieds à la tête.
- Par la barbe de Merlin, regardez-vous. Charlie, tu n'es pas en meilleur état que tes neveux et nièces.
- Maman, si Bill, George, Ron et Ginny ne travaillaient pas, à l'heure actuelle, ils seraient exactement dans le même état, répliqua-t-il dans un soupir.
- Mmh. Bon, vous connaissez les règles. Les chaussures à l'extérieur, les vêtements vous me les rassemblez. Les filles, salle de bains du premier, les garçons, celle du troisième. Albus et Hugo, montrez à Scorpius et Oliver où ils peuvent trouver du rechange. Et ne vous en faites pas, vos vêtements seront propres avant que vous ne rentriez chez vous, ajouta-t-elle à l'intention de ses invités.
La matriarche les observa se débarrasser de leurs chaussures puis défiler à la file indienne devant elle en direction des escaliers. James s'arrêta à sa hauteur, son visage barbouillé éclairé d'un sourire.
- On aurait peut-être dû construire des vestiaires au lieu de faire une deuxième salle de bains, mamie.
Molly esquissa un sourire et pour toute réponse, attrapa le torchon sur son épaule pour le faire mollement claquer sur les fesses de son petit-fils. James rit et s'éclipsa à la suite des autres.
Ce fut une douche express, mais bienfaisante. Rose avait revêtu un épais legging et le pull en laine qu'elle avait subtilisé à son père. Elle était habitée par un puissant sentiment de bien-être après avoir virevolté dans les airs et rit à en avoir les larmes aux yeux. Ils étaient à présent tous propres et blottis dans le living-room. Molly avait préparé des litres de thé et de chocolat chaud, ainsi qu'un goûter pour toute une légion.
En face d'elle, Hugo et Charlie s'affrontaient aux échecs, pendant que Lily discutait avec un Oliver rougissant. Roxanne et Albus, non loin, lorgnaient ces derniers en commentant les efforts du jeune Poufsouffle pour ne pas s'évanouir. Scorpius, Fred et James s'étaient lancés dans un débat sur la Coupe de la Ligue et les chances qu'avaient les Pies de Montrose de la remporter une année de plus. Quant à elle, elle s'était à nouveau penchée avec son grand-père sur le problème de leur robot cuiseur. Un parchemin rempli de schémas était étalé sur ses genoux.
- Et de la sécrétion de Veracrasse ? proposa Rose en tapotant le bout de sa plume contre sa joue. Est-ce que quelques gouttes pourraient suffire à moduler la vitesse ?
Arthur étudia leurs calculs, les sourcils froncés.
- Mmh... peut-être... Ce n'est pas un animal connu pour sa vivacité... et sa sécrétion est épaisse... réfléchit-il à haute voix. Ça pourra peut-être ralentir certaines pièces et rééquilibrer le...
Enfoncée dans son fauteuil, Molly émit un claquement de langue réprobateur en les écoutant parler. Son mari lui jeta un regard agacé qu'elle intercepta par-dessus ses aiguilles de tricot. Cela suffit à faire étinceler les yeux de la sorcière. Rose battit lentement en retraite, comprenant que le ton allait monter entre eux. Depuis l'épisode désastreux de la Ford Anglia en 1992, les choses avaient tendance à rapidement dégénérer quand il s'agissait de détournements d'objets moldus.
Discrètement, elle se leva du sofa où elle était assise et rejoignit Scorpius et ses deux cousins. Elle se laissa tomber sur un pouf au moment où Molly haussait la voix.
- Tu sais que je n'aime pas quand tu trafiques ces machines moldues ! Ça ne t'a pas suffi, cette maudite voiture !? Et en plus, tu entraînes Rosie dans tes expérimentations farfelues et dangereuses !
La jeune fille grimaça, alors que ses cousins et son oncle lui jetaient des regards amusés. C'était l'éternelle dispute entre Molly et Arthur Weasley. Personne ne s'en était jamais vraiment inquiété, excepté le jour où la petite Rose avait débarqué dans la cuisine, toute fière, pour raconter à sa grand-mère que papy l'avait nommé comme assistante personnelle. Cette fois-ci, toute la maisonnée avait profité de la colère de dragon de Molly.
- En même temps, vous en parlez devant elle, ricana James.
Rose lui jeta un regard noir.
- Parler de quoi ? demanda Scorpius.
- Rose et papy s'amuse à démonter et ensorceler des objets moldus, expliqua succinctement Fred.
Scorpius croisa son regard. Elle songea immédiatement au lendemain du bal, au hangar à bateaux. C'était là-bas qu'elle lui avait parlé de ses projets de carrière.
- Tu devrais lui montrer l'atelier, Rosie, suggéra innocemment Hugo.
Mais quel... commença-t-elle à penser.
- Pourquoi pas, accepta Scorpius.
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Je me suis bien amusée à l'écrire celui-ci :D
Quelques petites précisions : tout d'abord, l'idée des fonds pour la recherche d'une cure à la lycanthropie n'est pas de moi. Elle est tirée du même article de la Gazette qui m'a soufflé les projets de carrière de Rose (lien en commentaire à la fin du chapitre 9).
Ensuite, pour les lecteurs de Au Temps des Maraudeurs, vous aurez reconnu le Quidditch à quatre qu'a inventé annabethfan dans le second tome ! Pour ceux qui n'ont pas lu (mon dieu, mais foncez, déjà, parce que son travail est juste sensationnelle ! Toutes ses œuvres sont géniales, il y a beaucoup trop de choses à dire sur la qualité de son écriture et de ses textes, et elle est adorable ♥), j'espère avoir bien retranscrit les règles, j'ai galéré à ne pas refaire du pitoyable copié-collé mais du coup je sais pas si c'était très clair. Encore merci à elle de m'avoir permis de réutiliser son idée !
C'est tout pour moi ! À la semaine prochaine ♥
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