5ème Nuit : Le Commencement de l'Enfer
Le repas venait de se terminer, quelques-uns étaient restés sur le banquet, attendaient d'être servis d'une nouvelle part de gâteau que Felix seul avait concocté pour le nombre effectif d'invités. La plupart s'étaient directement jetés sur la piste pour se faire emporter par les basses toujours plus addictives. Ils ne semblaient jamais s'épuiser.
Monsieur Kang se leva pour aller au centre de la pièce, prononcer un nouveau discours pour remercier les invités de leur venue, espérant qu'ils en profitaient bien.
— Seungmin, chuchota-t-il à son neveu en s'appuyant sur son épaule pour garder l'équilibre, le corps tout engourdi, si je n'arrive pas à finir le discours, pourras-tu le transmettre à ma place ? Je crois que j'ai mangé trop de gâteau, je ne me sens pas très bien.
Il hocha de la tête en silence et l'observa partir au milieu de la pièce. Il ne s'étonnerait pas qu'il s'agisse des nombreuses parts de gâteaux qu'il avait dégustées tout au long de la soirée.
Lorsque l'ancien professeur se tint au centre, immobile, sa présence attira l'attention de tous les invités de la pièce. Il n'était pas bien grand, pas bien imposant, mais il savait captiver l'attention et avoir le silence lorsqu'il en avait besoin, sans même devoir demander. Ses collègues l'avaient toujours envié pour cela.
Chan fit le tour des invités pour lui donner un micro. Le silence avait beau régner dans tout le rez-de-chaussée, les invités étaient si nombreux que sa voix ne porterait pas assez pour se faire entendre clairement.
— Mes chers élèves, commença-t-il enfin une fois tous les yeux rivés sur lui, laissant sa voix résonner dans tout le manoir, je tenais à vous remercier d'être venus ici. Vous ne pouvez pas savoir à quel point cela fait plaisir à votre ancien professeur de retrouver ses anciens élèves et de voir à quel point ils ont tous changé, ont trouvé leur voie, ou bien la cherchent encore mais se surpassent toujours pour réussir. J'ai là des élèves admirables, dont je suis fier.
Il se racla la gorge bruyamment. Il se sentait de plus en plus mal, ses maux de ventre augmentaient en prononçant ses mots, et des sueurs froides coulaient le long de ses tempes. Mais il devait se montrer confiant, il se devait de rester un professeur tout aussi admirable que ses élèves qui le fixaient sans relâche. Ils ne devaient attendre qu'une chose, qu'il finisse son discours pour retourner s'amuser.
Lee Minho se porta volontaire pour aller apporter un verre d'eau au professeur qui souffrait à vue d'œil. Il passa entre les corps immobiles pour se diriger jusqu'à une des grandes tables.
En remplissant un verre, il vit son amour d'antan continuer de déguster les restes du gâteaux. Il tenait les parts comme un affamé, la crème dégoulinait le long de ses doigts et de son menton. C'était répugnant de le voir ainsi.
— T'as pas fini de te goinfrer, lança-t-il en posant la bouteille, t'en fous partout, c'est vraiment dégueu. T'écoutes même pas le discours du pauvre Monsieur Kang.
L'interpellé lança un regard noir au buisnessman, lui indiquant une sorte d'accusation, comme s'il le désignait dans ce comportement inhabituel.
— Bonne nouvelle que j'te dégoûte, tu vas enfin pouvoir me lâcher la grappe. Une énième part de gâteau ne fera que soigner mes maux, répondit-t-il impassiblement en avalant un bout de la part qu'il tenait fermement entre les doigts. Tout est de ta faute. Et si, je l'entend d'ici, on doit même l'entendre dans tout le jardin.
Minho ne releva pas. Il détestait voir Jisung faire des siennes en lui rejetant la faute. Il tourna les talons et s'en alla retrouver le centre de la pièce, là où Monsieur Kang tenait son ventre faiblement, tenu par quelques élèves qui l'aidaient à tenir debout.
Il saisit doucement ce qu'on venait de lui apporter et en but le contenu coup sec. Après avoir avalé sa gorgée, le verre lui glissa des doigts, se brisa sur le sol en un bruit strident, plus fort que la musique. Ce ne fut pas le bruit le plus désagréable qu'ils entendirent, car celui qui s'ensuivit fut celui du corps de Monsieur Kang s'écroulant sur le sol parsemé de bouts de verre en un bruit sourd. Tout le monde s'affola, se rua sur le corps étendu de leur ancien professeur.
Dans le fond, la musique continuait, ajoutait une touche absurde à cette scène aussi effroyable que tragique. Un de ses anciens élèves le plus jeune vint poser ses doigts sur son cou pour capter son pouls, son souffle, les battements de son cœur. Le corps de Monsieur Kang ne montrait plus aucun signe de vie.
Quelques élèves l'emmenèrent dans sa chambre, au dernier étage, espérant qu'il se réveillerait, par miracle peut-être.
Tout le monde se rassembla de nouveau au rez-de-chaussés, se regardaient dans le blanc des yeux. Les regards étaient craintifs, effrayés, cherchaient à trouver une issue, que faire, que dire. Tous les invités avaient peur à présent, pour leur vie, peur qu'un autre meutre se déroule. Car oui, ils étaient tous persuadé qu'il s'agissait d'un meurtre, qu'on l'avait empoisoné. Kang n'était pas bien vieux, il n'était pas tout jeune non plus, mais il n'avait aucun problème de santé, rien de susceptible pouvant accélérer le processus de la mort.
Le premier suspect fut Felix. C'était lui qui avait préparé les gâteaux. Peut-être que Jisung avait parlé trop vite tout à l'heure, que ce gâteau ne soignait pas les maux mais en apporterait davantage. Qui sait ce que son ancien camarade avait mis dedans, peut-être qu'ils allaient tous y passer. Le second fut Minho, c'était lui avait apporté le verre d'eau. Lorsque les regards se ruèrent vers lui, un frisson parcourut son corps tout entier.
— Vous ne pensez quand même pas ?
— C'est vraiment de l'eau que tu lui as apportée ?
— La bouteille était posée sur la table du banquet, je l'ai servi devant Jisung, il m'aurait vu.
Un des élèves saisit la bouteille avec laquelle il avait servi le verre et en bu une gorgée. Il la posa violemment sur la table en sentant le goût attaquer sa langue.
— C'est de l'alcool, pas de l'eau que tu lui a fait boire.
— Je suis désolé, je n'ai pas fait attention, je voulais me dépêcher car il paraissait vraiment souffrant.
L'attention des invités se retira de Minho. Ce n'était sûrement pas lui, un homme si riche avait mieux à faire que d'attirer les ennuies et de perdre tout ses biens par les conséquences qu'il subirait s'il avait commis ce crime. Si cela avait été lui, l'autre se serait écroulé comme le professeur.
Les yeux se rivèrent sur Felix, et, immédiatement, la moitié des invités se jetèrent à son cou.
— Qu'est-ce que vous foutez ? s'écria le jeune homme en se faisant entraîner par la foule vers les grands escaliers.
— Va pourrir dans ta piaule !
— Attendez, je sais qui c'est, c'est pas moi !
Son corps se faisait compresser pour la masse, il n'en avait plus le contrôle, il ne pouvait se débattre, la foule l'emportait, comme un troupeau se rebellant contre leur prédateur, le peuple voulant amener le roi à l'échafaud.
Il l'entrainèrent dans sa chambre, au premier étage, en le bousculant dans le noir après l'avoir cogné contre la porte pour l'ouvrir. Il se retourna vers eux, s'agitant dans l'encadrement de la porte pour tenter de se faire entendre.
— Mais écoutez moi, puisque je vous dis que je sais qui-
La porte se referma sur lui en un bruit sourd, elle avait certainement tapé sa tête. Après ça, plus un bruit, il n'en rajouta pas plus, on l'entendit s'écrouler sur le sol douloureusement. Et puis ils partirent, l'abandonnèrent dans son supplice. On n'avait pas le temps de peser la justice ici. On était venus pour prendre des vacances, éviter toute forme de pression.
Le reste de la soirée se passa anormalement, une ambiance pesante régnait dans tout le manoir. On avait tué Monsieur Kang. Cette phrase résonnait dans la tête de tous les invités. Pourtant, on avait toujours envie de s'amuser, la musique ne s'arrêtait, la fête continuait.
Plus personne ne revint dans la pièce principale, près du salon. La plupart s'étaient réfugiés dans le grand jardin, prendre l'air, se changer un peu les idées, le reste étaient dans la salle de karaoké, un petit salon annexe près des escaliers menant à l'étage.
— Seungmin montre nous tes talents pour nous faire oublier tout ça, s'écria Changbin allongé sur le canapé, la tête reposant sur l'accoudoir.
Les autres autour agréèrent en hochant de la tête, en captivant leur attention sur le concerné. Ça ne semblait pas les embêter plus que ça. Que son oncle venait de mourir.
Il ne s'agissait que d'un petit groupe parmi tous les invités qui l'invitèrent à chanter, le reste discutaient et fumaient pour essayer d'oublier ce qui venait de se passer.
Seungmin ne voulait pas vraiment, il n'était pas d'humeur à chanter, il était dépassé par trop d'événements. Mais le monde autour de lui l'encourageait, il entendait son prénom résonner en boucle, sans cesse, infiniment, comme un disque rayé. Et puis ceux qui étaient initialement désintéréssés se rajoutèrent petit à petit, et encore plus de voix résonnèrent douloureusement dans son tympan. C'était certainement le genre de situation dans laquelle les artistes se retrouvaient souvent. Son oncle aurait été fier qu'on l'encourage ainsi, il l'aurait été lui aussi. Mais il en avait presque la tête qui tournait. La seule manière d'arrêter tout ça était d'accepter, car avec un refus ils continueraient d'autant plus, ils l'obligeraient peut-être. Au fond, il n'était jamais libre, avec personne, pas même lui-même. Un roi sans peuple qui gouvernerait seul, juste lui-même, mais qui ne parvenait même pas à le faire.
Il avança vers la scène près de l'écran où étaient affichées les paroles. Il n'en avait pas vraiment besoin, il connaissait Goodbye Yellow Brick Road par cœur. Son oncle lui avait appris lorsqu'il était enfant. Chan se mit au piano. Seungmin se sentit plus en sécurité avec quelqu'un à ses côtés, il le regarda commencer à jouer les notes de la mélodie calmement. Il avait l'air de la connaître parfaitement, son visage impassible était le seul qui inspirait confiance.
Les notes défilaient dans sa tête, il fixait le mur au loin, apercevant brièvement les yeux qui le fixaient. Il inspira un grand coup, et sa voix prononça les premières paroles.
Plus le temps passait, plus le temps semblait ne pas passer. Les notes semblaient s'enchaîner de plus en plus vite, de plus en plus bruyamment. Et Seungmin continuait à chanter, car Chan continuait la chanson en boucle, tapait ses doigts contre les touches du piano avec violence, acharnement. Et le monde dans la salle ne retirait pas leur regard de la scène. Seungmin se sentait obligé de continuer, Chan ne regardait plus le monde autour de lui, avait l'air de ne plus en tenir compte. Il avait le visage levé vers le plafond, les yeux fermés, comme pour se concentrer sur les notes le plus profondément possible.
Chan s'était mis au piano pour canaliser sa colère intérieur depuis petit, et avait fini par en faire sa carrière. Il faisait ressortir sa rage dès qu'il jouait une mélodie. Il rendait les plus douces notes violentes, fougueuses.
Ses doigts glissaient sur quelques touches qui rougissaient. Il saignait, chaque touche était recouvertes du liquide rouge qui coulait de ses doigts torturés.
Les invités qui les regardaient commençaient à s'inquiéter pour le pianiste. Seungmin commençait à s'essouffler, avoir la tête qui tournait. Il fallait que quelque chose l'arrête.
Peut-être que le Ciel l'avait entendu, qu'un miracle était arrivé. Lorsque Chan appuya sur une des touches un peu trop fortement, le piano s'embrasa soudainement. Chan ne fit pas attention, continua, tandis que les invités se jetèrent sur lui pour l'éloigner. Des flammes sortirent subitement du piano, le visage de Chan fut touché avant qu'il ne s'écrase par terre et se fasse attraper par ses anciens camarades. Le feu s'éteignit quelques minutes après qu'ils soient tous restés immobile à le fixer de loin.
Personne ne comprit ce qui venait de se passer. Lorsque Chan se tourna vers les autres invités, ces derniers poussèrent des cris d'épouvante. La moitié de son visage avait été brûlé.
Seungmin se sentit de plus en plus mal. Il monta à l'étage, il avait besoin de se changer les idées. Un bon bain ferait certainement l'affaire.
Lorsqu'il entra dans la salle de bain, il tomba nez à nez avec Jisung qui venait de se rincer le visage en faisant couler l'eau de l'évier rempli. Il semblait essoufflé, le visage tout rouge, les mains tremblantes. Cela ressemblait clairement à quelqu'un qui venait de se vider de ses tripes.
— Ça va ? Je comptais prendre un petit bain...tu veux venir ?
— Je suis épuisé, je vais aller me coucher et me réveiller de ce cauchemar.
Sa voix avait résonné doucement comme un vent glacial. Il passa à côté de lui en lui tapotant le dos. Il semblait avoir le corps lourd, sa fatigue sautait aux yeux, il en avait presque l'air malade, son visage rouge était devenu tout pâle en un rien de temps.
— Bonne nuit, Ji.
Il l'observa disparaître dans l'obscurité du couloir sans dire un mot de plus. Il savait qu'il ne fallait pas insister quand Jisung était comme ça, qu'il avait besoin de se reposer seul.
Il entra dans la salle de bain le pas lent, s'enferma à clé et commença à faire couler l'eau chaude dans la baignoire. Il s'observa furtivement dans le miroir. S'ils savaient, tous les secrets que son minois renfermait. C'est certainement lui qu'ils tueraient. Il retira ses vêtements. Sa peau était pâle lui aussi. Après tout, ils ne vivaient tous plus que la nuit durant ce séjour. Ils allaient tous finir par ressembler à des vampires à la fin des vacances et ne plus supporter le soleil même caché derrière les nuages.
Il s'allongea doucement dans la baignoire déjà bien remplie, posant sa tête sur le rebord, tendant ses jambes.
— Hm, glamour, fit-il en pensant à voix basse seul dans la pièce en remarquant un objet suspendu au plafond. T'aurais pu nous prévenir dans l'invitation « Souriez, vous êtes filmés ! » .
Il fixait l'objectif impassiblement. Il devait y'en avoir dans toutes les pièces, à part peut-être les chambres, étant beaucoup trop nombreuses. Il aurait mené son idée bien loin.
— Tu pourras plus rien en faire. C'est moi qui suis le propriétaire de cet endroit à présent.
Il tendit ses jambes engourdies en fixant la caméra. Il ne pouvait pas les plier, ce qu'il avait sur la cuisse lui faisait trop mal. Peut-être que l'eau allait pouvoir l'aider à le retirer.
Il essaya de le défaire avec ses doigts humides. Ce n'était pas facile, sa peau glissait sur le cuir. Il essaya de le faire glisser le long de sa cuisse. Impossible. Il était comme sous l'emprise de cette chose. Il était sous son emprise même s'il était mort.
Seungmin se redressa légèrement pour atteindre le placard accroché au mur, à côté de l'évier. Il fouilla, retira certains objets comme des pansements et des médicaments, des flacons d'une substance inconnue, et en sortit un couteau.
Il claqua la porte du placard et se rallongea dans la baignoire, dirigeant la lame en direction de sa cuisse. Il la passa entre les deux bouts de la sangle pour les séparer en tournant le couteau. Il tira sur le bout de la sangle pour la détacher de la boucle métallique. Il réussit, en se blessant légèrement la jambe, mais il réussit. Il répéta ces mêmes mouvements, un peu plus difficilement en se coupant le bout des doigts.
Il jeta les deux sangles en cuir léger et le couteau par terre, suçota le bout de ses doigts pour faire cesser la petite tâche de sang de couler. Il put enfin souffler un bon coup, se laisser s'engouffrer dans l'eau qui perdait petit à petit sa mousse et sa chaleur. Il frotta légèrement ses mains sur sa cuisse, la marque de sa douleur encore visible.
Il se laissa bercer par l'eau, par le calme qu'elle lui apportait. Sa tête se pencha en arrière, ses jambes s'affaissèrent en même temps que son torse. S'il le pouvait, il se laisserait noyer. Mais il était déjà bien trop au fond du gouffre. Sa main caressait sa cuisse de plus en plus doucement, longuement, jusqu'à descendre vers son bas du ventre.
Il se redressa soudainement, violemment, faisant couler un peu d'eau sur le carrelage blanc. Il sortit hors de la baignoire, saisit sa serviette et l'entoura autour de son corps, légèrement recroquevillé, comme pour l'enfermer. Il était dans le même état que Jisung précédemment, à quelques détails près. Les jambes tremblantes, la respiration paniquée, ses yeux fixant un point inexistant, le fond de sa pensée vide.
Il releva la tête en direction du miroir. La serviette tomba à ses pieds. Il ne releva pas, perdu dans son propre regard, l'absurdité de son visage. Il eut la soudaine envie de pleurer, de passer ses mains sur son corps pour effacer ce qui le démangeait. Avant qu'il ne fonde en larmes, il retira ses yeux de son horrible reflet et enfila ses vêtements.
Ici, à l'étage, c'était tellement plus calme. Il n'entendit que ses pas en sortant de la salle de bain, avec seulement les basses du rez-de-chaussée en fond. On aurait dit que seule la musique tournait et qu'il n'en restait plus rien des invités.
En traversant le couloir, il n'entendit pas que ces éléments, quelque chose s'y ajoutait. Des sanglots. Seungmin entendait des sanglots provenant des chambres, comme étouffés. Il les suivit, s'en approcha doucement, sans aucun bruit, sur la pointe des pieds, tentant d'entendre clairement d'où cela venait.
Il poussa la porte derrière laquelle résonnait ces pleurs. On n'y voyait rien, la lune n'éclairait pas assez ce soir, ou alors ses yeux n'avaient pas encore pu s'adapter suffisamment à l'obscurité. Il n'osait pas allumer la lumière ou ne serait-ce que se faire remarquer.
Il s'avança des sanglots, venant d'un corps étendu sur le lit, le visage certainement enfoui dans le coussin. Il ne savait pas comment mais il reconnut Jisung. Certainement grâce aux cicatrices qu'il avait sur le bras éclairé par la fine clarté de la lune. Il s'était un peu attendu à ce que ce soit lui, vu l'état où il l'avait retrouvé précédemment.
Il s'assit sur le rebord du lit et posa une main attendrissante sur son corps maussade et épuisé par les larmes.
— Seungmin, demanda-t-il, la voix tremblante, c'est toi ? Qu'est-ce que tu fais là ?
— Je t'ai entendu pleurer. Ça ne va pas ? C'est à cause de Minho ?
— Pitié ne me parle plus de lui, ne prononce même pas son nom, je n'en peux plus.
Il se pencha pour passer une main sur sa joue, sécher ses larmes devenues habituelles. Jisung se calma petit à petit, se trouvant certainement ridicule de toujours pleurer et qui plus est pour toujours la même personne, depuis des années. Si ça ne tenait qu'à lui, il ferait toutes les choses les plus inimaginables pour l'oublier.
— Tu te souviens d'hier ? demanda Seungmin en se rapprochant de lui. J'étais bizarre comme quand j'avais fumé le joint.
— Quand tu étais triste, oui.
— Je me sens pareil, j'ai peur.
Seungmin était pris de ce sentiment incontrôlable qu'il ressentait un peu trop au long de cette fête. Ça lui collait à la peau horriblement, il avait besoin qu'on la lui retire au plus vite, mais il n'y avait qu'un seul moyen d'y parvenir. Il plaça ses jambes de part et d'autre de son ami, s'assit au niveau de son bassin.
La lune brillait plus que tout à l'heure, ils arrivaient à se voir très brièvement, seulement quelques formes de leur corps. Les courbes de leurs côtes, la lisseur de leur peau. Jisung essayait de distinguer les formes de Seungmin pour comprendre comment il s'était placé. C'était la première fois qu'ils étaient si proches et que cette atmosphère étrange régnait dans la pièce sombre. Leurs visages se rapprochèrent, un peu trop à leur goût, mais ça ne leur déplaisait pas, ça les rassurait un peu. Ils étaient deux corps en détresse qui pouvaient se comprendre sans mot.
Le téléphone de la chambre se mit à sonner bruyamment. Ils sursautèrent tous les deux au même moment, cela leur fit l'effet d'un frisson le long de leurs corps serrés l'un contre l'autre. Seungmin se pencha légèrement pour attraper le fixe posé sur la table de nuit, s'accoudant au matelas, son torse frôla presque le visage de Jisung qui retenait sa respiration par une peur inexplicable.
Une fois le téléphone pris en main, il se redressa, s'assit plus droit, seul son bassin étant en contact avec le corps de Jisung qui le fixait.
— Minho ? J'imagine que c'est toi.
« Seungmin ? » répondit la voix du businessman au bout du fil.
— Hm hm.
Cela ressemblait plus à des souffles retenus que des acquiescement au bout du téléphone.
« Jisung est avec toi ? »
— Oh oui, répondit-il avec un enthousiasme assez ironique, t'en fais pas.
« Qu'est-ce que tu fous avec lui ? C'est pas la suite du deuxième jour j'espère... »
— Jisung n'est plus tien, ça ne te regarde pas. Je suis en train de le consoler à ta place, c'est une bonne chose.
« Seungmin, fais pas n'importe quoi, j'ai compris que tu... »
— À plus, Minho, amuse-toi bien avec les autres, vérifiez que le feu ne se soit pas propagé dans le jardin.
Dans le jardin, non, dans ses entrailles, oui. Il reposa violemment le téléphone sur la table de nuit. Il avait perdu patience, il était à bout. Il n'en pouvait plus, d'entendre la voix insupportable de Minho et de devoir encore attendre pour ses beaux yeux alors qu'il avait fait du mal à Jisung, et qu'il continuait. Il se pencha sur son ami, il avait besoin de le ressentir contre lui, entièrement.
— Et s'il débarque... chuchota Jisung en passant ses mains sur les côtes du blond.
— On lui fera regretter toutes ses promesses en l'air. Je déteste ceux qui font semblant de se soucier des autres et qui promettent un avenir qu'ils s'approprient.
Seungmin ne parlait plus qu'en souffles, il n'était plus lui-même, la luxure avait pris le dessus, incontrôlable qu'elle était en lui. Un peu plus tôt il détestait ce sentiment, mais il n'était plus capable de penser correctement, son corps le contrôlait tout seul à présent, même sa pensée.
Son bassin s'appuya davantage sur le corps de Jisung. Il poussa un long soupir, les lèvres tremblantes, et tendit ses bras de part et d'autre de la tête de ce dernier. Il écarta ses doigts et referma son poing entre les draps blancs, si fort qu'il ressentait presque ses ongles contre sa paume à travers le tissu. Son visage effleurait celui de son ami qui le trouvait brûlant sans même l'effleurer.
Son propre corps le dirigeait tout seul, ses pensées ne reflétaient plus rien. Il cherchait une quelconque sensation, un sentiment, quelque chose qui le comblerait, qui lui ferait tout oublier. Il n'était plus qu'un corps, misérable, un désir à lui-même.
Une sensation jaillit en lui soudainement, son bas ventre se noua à s'en étouffer, atrocement. Il plongea son visage dans le cou de Jisung qui avait la respiration presque aussi saccadée que lui en parcourant son torse de ses doigts.
Seungmin s'écarta brusquement de son ami. Son corps se recroquevilla sur lui-même, serrant son ventre fortement, douloureusement, il se mit à pleurer. Son corps en voudrait toujours plus, jamais satisfait, mais mentalement il était épuisé. Il pleurait sa débauche, cette impression d'être souillé par son propre corps, s'apitoyant sur un sort dont il était responsable, pitoyablement.
Jisung se rapprocha de lui avec hésitation. Il ne comprenait pas Seungmin, il ne comprenait pas ce qu'il avait, il ne comprendrait certainement pas, mais ce qui était sûr c'est que ça n'allait pas. Il le prit dans ses bras pour le rassurer. Son ami fit de même, il ne voulait pas qu'il pense que c'était de sa faute.
Ils restèrent ainsi, enlacés l'un contre l'autre, immobiles. Tout compte fait, ça rassura Seungmin qu'il soit avec Jisung et qu'il n'ait pas pris de risque avec quelqu'un d'autre, qui sait dans quelle situation son corps pouvait le mettre.
— Seungmin, résonna la voix de Jisung en le serrant un peu plus contre lui, je crois qu'après ce séjour je ne voudrais plus jamais voir personne. J'aurais jamais imaginé, y'a quelques années, me retrouver dans toutes ces situations, presque coucher avec toi, mon confident de toujours, détester celui que j'ai le plus aimé, me rendre malade. J'ai l'impression de ne jamais avoir connu personne, de découvrir les vrais visages, de découvrir même le mien.
***
Chapitre que j'ai grave songé à poster ou non tellement certains aspects me paraissent interdis surtout la fin mais c'est parce que je crois c'est pas trop compréhensible et ça sort trop de ma zone de confort habituelle sûrement, mais bon c'est un thriller le but c'est de pas laisser indifférent donc fallait bien le faire...☝️
Pour ceux qui ne comprendraient pas la fin je vous laisse avec cette explication : De nombreuses personnes hypersexuelles se sentent mal vis-à-vis de leurs comportements. Ce sentiment de honte peut être accru si la personne n'a pas pu contrôler son impulsion. Beaucoup peuvent se sentir confus quant à la raison pour laquelle ils ont agi ainsi, surtout si l'impulsion est récurrente. Cette frustration peut venir du fait de ne pas réussir à maîtriser ces comportements.
Je suis le plan mais j'ai l'impression ça n'a aucun sens help après ça correspond bien à la tournure chaotique j'imagine ahi
Plus que deux chaps la team !
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