Iruka fêtait seul sa cinquième bougie imaginaire lorsqu'il s'était une nouvelle fois perdu dans la splendeur des jardins royaux. Il avait même cru à un rêve, lorsqu'il avait aperçu un autre enfant, à peine plus âgé que lui. Arborant une sublime chevelure d'argent, il était sagement assis au bord d'un bassin de poissons, et avait le nez rivé dans le livre qu'il tenait dans ses mains pales.

Iruka ne comprenait pas comment les vêtements du prince pouvait être si blanc et si bleu ! Le siens étaient toujours marrons, orange ou des fois jaunes.

Iruka avait déjà entendu parler du prince Kakashi, mais jamais encore il ne l'avait aperçu. Lorsque les yeux du prince s'étaient élevés vers lui, Iruka avait été étonné d'y lire une douloureuse solitude. Prince Kakashi était le fils du Roi Hatake, Iruka s'était souvenu. Il ne devrait pas se sentir seul. De plus, Iruka connaissait le nombre exact de majordomes qui servaient la cour royale. De nombreuses fois ils s'étaient fait chasser des jardins royaux par ces derniers. Ce jour, Iruka avait alors choisi un endroit intime caché au milieu de verdures luxuriantes, espérant ne pas être chassé. Mais il y avait ce garçon. Ce garçon, le prince Kakashi, Prince de cette famille adulé par le peuple de Konoha. Alors pourquoi prince Kakashi semblait se sentir si seul ?

Lui, a une grande famille, avait envié Iruka en l'observant.

Iruka s'était assis en face de lui, comme s'il n'était pas un intrus dans les jardins royaux, et avait laissé ses pieds nues et sales se faire caresser par l'eau tempéré du bassin. Le prince Kakashi n'avait rien dit, alors Iruka avait prit ça comme un accord de sa part. Rien d'extraordinaire ne s'était passé lors de cette première rencontre. Mais Iruka s'était demandé comment un regard pouvait être aussi triste lorsque les sakura étaient en fleur. Ce n'était pas logique.

Curieux, Iruka avait voulu découvrir pourquoi Kakashi se sentait si seul. Et il l'avait appris. Il l'avait appris, mais plusieurs mois plus tard. Car Iruka était revenu plusieurs fois. La plupart du temps, ils ne parlaient pas, et Kakashi passait son temps à lire des livres. Mais de temps en temps, Iruka racontait au prince Kakashi sa journée à l'académie des Ninja. « Un jour, je serai assez puissant pour arrêter la guerre, » disait-il souvent. Iruka parlait souvent de la guerre, sans vraiment comprendre de quoi il parlait. Il savait juste qu'elle était là, et que ceux qui y partait, eux, n'était plus là, et ne revenaient jamais. Kakashi écoutait, d'une oreille attentive mais ne répondait jamais.

Ici, il y trouvait la quiétude et la compagnie de quelqu'un de calme. Alors, cela suffisait à Iruka pour se sentir bien. Il savait qu'il n'avait pas le droit, mais aussi que Kakashi ne l'avait jamais chassé, et avait-il semblé, ni même prévenu les majordomes de la demeure Hatake. Sinon, il se serait déjà pris un coup de pied sur les fesses, comme d'habitude. Iruka s'était souvent demandé pourquoi. Iruka appréciait le prince Kakashi, mais si ce dernier ne lui répondait jamais. Il n'avait jamais entendu le son de sa voix, et Iruka s'était même demandé si Kakashi n'était pas muet.

Souvent, quand Iruka rentrait chez lui après son escapade, il s'endormait dans le dortoir de l'orphelinat en se demandant s'il avait trouvé un ami, ou bien si le prince Kakashi était juste muet, et ne pouvait donc pas lui demander simplement de dégager de son jardin. Iruka préférait la première réponse, car elle le faisait sourire. Lorsqu'il s'ennuyait à l'Académie, il regardait le ciel, et se demandait souvent ce que le Prince Kakashi faisait. Jamais il n'avait été vu à l'Académie, ni même dans les rues de Konoha. Quand il quittait l'Académie, Iruka ne pensait qu'à retourner se faufiler dans ce qu'il avait appelé son refuge. Et juste avant de s'y faufiler, il priait pour que Kakashi soit là.

Et Kakashi était là à chaque fois.

Ainsi, Iruka avait souhaité de nombreuses fois prendre son courage à deux mains et lui demandé : « est-ce que tu m'aimes bien ? » mais jamais il n'avait osé. Iruka n'était pas timide, mais si jamais Kakashi était muet, alors Iruka ne voulait pas le mettre mal à l'aise.

Iruka, avait l'habitude des gens méchants, et il ne pleurait plus quand on lui jetait divers objets à sa simple vue. Ou même si l'on se moquait de lui car il marchait pied nu. Il s'en fichait un peu, des chaussures. Les autres enfants de l'orphelinat en portaient, eux. Mais celles d'Iruka étaient devenu trop petites depuis longtemps, depuis qu'il avait soufflé sa sixième bougie. Non, Iruka ne pleurait plus devant les gens, car Iruka se disait qu'après tout, il devrait agir comme un grand garçon. Ou tout du moins, le faire croire. Pourtant, la première fois qu'il avait entendu la voix de Kakashi, Iruka avait presque pleuré.

« Pourquoi tu viens toujours dans mon jardin ? » avait demandé Kakashi.

Iruka avait appris ce jour-là que le prince, n'était pas muet. Et même que le prince Kakashi avait son propre jardin à lui tout seul ! Et il avait même une voix de grand garçon ! Mais le jeune Iruka, aurait voulu, que le prince Kakashi lui dise quelque chose de plus gentil.

Iruka aimait beaucoup le prince Kakashi.

Mais le prince Kakashi ne semblait pas aimer Iruka.

Nerveusement, Iruka s'était gratté le nez, et avait tenté de toute ses forces de ne pas pleurer. Si même le prince Kakashi ne voulait plus le voir, alors Iruka se demandait bien qui le voudrait. Le jeune orphelin Iruka se sentait si seul.

Iruka n'aimait pas mentir, mais il voulait que Kakashi continu d'être son ami. Kakashi était son ami hein ?

« Parce que tu es mon ami ? »

Iruka jouait nerveusement avec ses doigts de pieds, quand il avait redressé son regard de la pelouse pour regarder Kakashi. Le prince Kakashi avait haussé les épaules en déviant son regard sombre. « Je ne sais pas. Je n'ai jamais eu d'ami. »

Une nouvelle fois, le jeune orphelin avait vu quelque chose dans les yeux gris du jeune prince, avant qu'il n'ait détourné le regard. Il avait le regard rongé par la solitude, et Iruka ne comprenait toujours pas pourquoi. Iruka n'aimait pas voir la solitude dans les yeux du prince Kakashi. Alors, il avait souhaité lui prendre la main pendant qu'il ne regardait pas.

Mais quand il vit leurs mains cotes à cotes... Le prince Kakashi avait la peau si pâle ! Et la peau si propre ! Il n'avait même pas de morceau de terre sous les ongles. Alors Iruka ne fit rien, et se rappela soudain, à quel point le monde dans lequel ils vivaient était différent.

Pourtant, dans chacun de leurs yeux, se lisait la même solitude.

Ce rendez-vous aussi simple était-il, était devenu son point de repère. Car dans le regard de Kakashi, il y avait quelque chose de différent.

Peut-être était-ce parce que Kakashi ne savait pas ? Iruka préférait que Kakashi ne sache pas. Sinon, peut-être que lui aussi, le regarderait comme s'il était indésirable.

« Moi non plus, » avait avoué Iruka, en jouant nerveusement avec ses doigts. « C'est pour ça que je viens ici. »

Le prince Kakashi s'était retourné face à l'orphelin, laissant ses jambes tomber dans le bassin des poissons.

« Tu habites en ville, » avait déduit le jeune prince ces dernières années. « Il y a du monde en ville, et tu sembles avoir l'âge d'être à l'Académie. Alors pourquoi tu n'as pas d'amis ? »

Iruka avait laissé la brise de printemps caresser le silence. Quelques brins d'herbes bien malheureux s'étaient retrouvés entre ses petits doigts soudain nerveux, avant qu'il ne réponde à la question de son prince : « Je crois que les gens ne m'aiment pas beaucoup. ». En réalité, c'était un fait, et non une supposition.

A l'entente de la petite voix qui avait fait quelques ratés, le jeune prince Kakashi avait redressé son visage du bassin.

Le mystérieux garçon était parti.

Le jeune prince Kakashi n'avait pas voulu faire fuir le jeune garçon. S'il devait être honnête avec lui-même, il l'appréciait beaucoup. Il n'en avait jamais parlé à sa nourrice ni aux majordomes, car il était certain qu'ils l'auraient chassé. Il y a quelques années, au détour de certains couloirs du château, le prince avait déjà entendu parler les jardiniers d'un jeune garçon qui n'avait de cesse de se faufiler dans les jardins.

Tous les jours depuis leur première rencontre, le prince avait attendu le mystérieux garçon dans son jardin. Et le jeune brun s'était toujours montré. Et bien qu'il s'était souvent demandé pourquoi quelqu'un qui avait le droit de vivre en dehors de l'enceinte du château, prendrait plaisir à venir s'y enfermer, il n'avait jamais rien dit. C'était peut-être parce qu'il avait peur de la réponse, après tout. Le prince Kakashi ne connaissait rien du monde extérieur. Il avait le droit de regarder par les fenêtres, et souvent durant les cours d'histoire ennuyeux de Hiyashi-sama, le prince Kakashi essayait de trouver le mystérieux garçon, du haut de sa tour. Il était devenu au fils des ans, la représentation de la liberté. Le jeune garçon avait même le droit de se balader à pied nu ! Kakashi, lui, devait toujours porter ces chaussures inconfortables.

Le prince Kakashi ne voulait pas que le jeune garçon brun ne revienne jamais. Car si Kakashi ne savait pas ce qu'était un ami, il était par contre certain que le mystérieux garçon pourrait lui apprendre.

Sa nourrice lui expliquait souvent que la famille de Kakashi étaient tous les gens du château. Les majordomes, les membres du conseil, les professeurs de l'art de la guerre, et ses parents, le roi et la reine Hatake.

Pourtant, Kakashi se sentait seul, dans ce grand château, d'où il n'avait jamais eu le droit de sortir en dehors de grands évènements. C'était à peine s'il avait l'autorisation de voir ses parents, en dehors des heures de repas.

Raison pour laquelle le prince Kakashi, aimait le jeune garçon mystérieux qui lui rendait visite dans son jardin. Mais Iruka n'était pas venu pendant plusieurs jours, et cela n'était jamais arrivé depuis le premier jour de leur rencontre.

En attendant le retour du garçon, qu'il espérait, le prince se demandait lors de son temps libre, quelles pourraient être les raisons qui faisaient croire à Iruka que les gens ne l'aimaient pas. Le jeune brun était quelqu'un de gentil, de jovial. Et le prince trouvait que ses sourires pourraient réchauffer le cœur de n'importe qui prenant la peine de l'observer. Le prince en avait alors déduit que si les gens n'aimaient pas le garçon, c'est parce qu'il ne le regardait pas.

Kakashi avait hâte de regarder de nouveau le jolie sourire du garçon mystérieux.

Kakashi avait soufflé sa dixième bougie entre deux cours d'art de la guerre le jour où le sourire est revenu dans son jardin.

« Pourquoi tu ne venais plus dans mon jardin ? » le jeune prince avait demandé au jeune garçon qui s'était allongé près du bassin, les bras croisés derrière sa tête.

« Tu sais, je croyais que tu étais muet, » avait commencé le jeune garçon à l'étonnement du prince. « Mais tu m'as parlé et la première chose que tu m'as dit, c'est que c'était ton jardin et que tu ne savais pas pourquoi je venais. », avait-il continué en regardant le ciel, puis il avait ajouté plus bas : « J'ai cru que tu voulais que je parte et que je ne revienne jamais. »

Le prince Kakashi s'apprêtait à répondre que si, mais le mystérieux garçon continua. « Mais tu as dit que tu n'avais pas d'amis. Alors j'ai essayé de comprendre pourquoi, avant de revenir. » avait-il dit en fronçant les sourcils. « Tu es le prince Kakashi ! Tu vis dans un grand château avec plein de monde qui s'occupe de toi ! »

Kakashi acquiesça, même s'il n'avait pas de réponse à apporter.

« Et pourtant, tu ne souris jamais. »

Une brise automnale fit s'envoler quelques feuilles d'automnes timides, et le prince Kakashi replia ses genoux contre son torse dans le silence.

« Toi, tu souris toujours, » murmura Kakashi, envieux. « C'est pour ça que je croyais que tu avais des amis »

« Je souris que quand je suis avec toi, parce que tu es mon ami, même si je suis pas le tien, » avoua Iruka. « Donc je me suis dit que pour être ton ami, il fallait que je te fasse sourire. C'est pour ça que je suis revenu. »

« Merci, » répondit le prince Kakashi. « Je peux te demander quelque chose ? " avait-il demandé et le mystérieux garçon acquiesça dans un joli sourire en se redressant en position assise. « Comment tu t'appelles ? »

Ses cheveux étaient sales. Ses joues, aussi, semblaient pleine de terre. Le prince Kakashi n'avait jamais vu tant de tâches sur les vêtements d'une personne. Et pourtant, lorsque la brise vint faire danser la queue de cheval du garçon, le prince s'était dit qu'il était mignon. Et même s'il lui manquait au moins quatre dents, son sourire était le plus beau que Kakashi n'avait jamais vu, lorsqu'il lui avait répondu : « Je m'appelle Iruka ! Et toi ? »

« Tu sais déjà comment je m'appelle. » avait répondu le prince mais Iruka avait simplement haussé les épaule et répondu :

« Je veux que tu le dises pour moi. » La voix du petit garçon était apaisante et sa main sale avait prit la sienne. Alors Kakashi lui avait répondu :

« Je m'appelle Hatake Kakashi. »

Et pour la première fois, Kakashi avait souri.

Le jeune Iruka fut certain que le temps s'était arrêté.

Malheureusement, le temps ne s'était jamais arrêté, et avait continué de faire défiler les printemps. Les printemps où, les fleurs de cerisiers ne cessent de s'envoler. Emportant avec elles, l'espoir de deux garçons, de deux mondes différents.