Chapitre XXV
Le caillou rebondit six fois à la surface de l'eau et agita son miroir d'ondulations iridescentes, avant de sombrer dans un « ploc » sonore. Ce lumineux après-midi dorait la clairière et l'étang vaseux. Une brise agréable berçait les herbes folles, les genêts, les boutons d'or, faisait bruire les frondaisons sur le pourtour.
Assise sur un rocher chauve dont le pied baignait dans l'eau, Elenore jeta un nouveau galet qui but la tasse après quelques ricochets. Où sont-ils ? Je ne vais tout de même pas attendre ici jusqu'au crépuscule... Sa jument broutait calmement, dans l'ombre près de la lisière de la forêt. Les chiens paressaient sur un lit de fleurs sauvages.
Avant le début de la chasse, elle avait convenu avec Tris de se retrouver là si d'aventure ils venaient à être séparés. Mais le soleil redescendait peu à peu vers les cimes des arbres et pas trace de lui, ni des princes. Elenore soupira. Sa traque l'avait éloignée des autres mais, certaine de tenir une piste, elle n'en avait pas démordu. La princesse tourna la tête pour regarder sa prise. La jeune biche, encore empennée de deux traits, la gorge ouverte, reposait à côté de son rocher. Pfiou ! Je vais devoir la remettre toute seule sur ma monture. Déjà que ça n'avait pas été simple de l'amener jusqu'ici.
Elle aurait voulu que Tristifer fût auprès d'elle. Dans ce coin tranquille, au calme, ils auraient pu passer un peu de temps ensemble. Toutefois, elle comprenait qu'il eût choisi de rester aux côtés du prince. Léo tenait là un fervent protecteur. Si Aldric venait à mourir, Tris deviendrait assurément Bluteynir de son héritier, un « vrai » Bluteynir. Il n'aurait plus à douter de sa légitimité pour avoir pris la place de son père. C'était bien là le plus gros défaut de ce beau garçon athlétique et plein d'honneur. Trop tracassé...
Cependant, ces derniers temps, il avait tellement changé. Que de progrès depuis cette triste époque, pourtant récente, où il s'abîmait dans les jeux d'épées, où il parlait à peine, souriait moins encore. Elenore était heureuse de le voir s'épanouir depuis qu'il s'était voué à Léoric, depuis le Daeraborn. Et depuis que nous nous sommes retrouvés.
Elle ne s'était pas doutée que ce jeune homme réservé cachait un amant passionné. En Terre Sainte, quelques années plus tôt, il s'était montré timide. À croire qu'il n'avait pas connu de filles avant ça. En revanche, depuis quelque temps, il se montrait ardent et insatiable. Après cette nuit enflammée, la princesse avait même douté d'être en mesure de prendre part à la chasse. Et lui, il saute du lit et il court faire ses exercices. Un sourire apparut sur son visage. En fin de compte, son beau Bluteynir représentait davantage qu'un amusement passager. Elle n'osait y croire, elle n'y avait jamais vraiment cru, mais Elenore était en train de tomber amoureuse.
Tout à coup, le son d'un cor s'éleva et provoqua l'envol de quelques passereaux. Il s'agissait d'un rappel, la chasse était terminée. La princesse fronça les sourcils. Il était encore tôt. Elle se redressa, bondit de son rocher, puis récupéra les rênes de sa monture pour la ramener vers sa biche. Ses chiens aussi s'étaient mis en alerte et trottinaient en direction de l'appel, mais sans quitter la clairière. Elle prit une grande inspiration, souleva sa proie. Elle devait peser le même poids qu'elle. La princesse remonta tant bien que mal sur son petit promontoire afin de regagner de la hauteur et jeta la dépouille en travers de la selle.
Après avoir repris son souffle, elle quitta l'étang et mena sa jument par la bride dans les profondeurs des bois. Tout autour, la forêt bruissait, grouillait de vie. Pépiements et joyeux trilles, vrombissements et stridulations, craquements et chuchotements, le silence vibrait au calme rythme de la nature. Lorsqu'un bruit attira son attention, plus fort, tout proche. Du bois mort cédant sous un sabot. Les chiens dressèrent aussitôt l'oreille.
« Qui va là ? » demanda-t-elle.
Une grande silhouette, celle d'un robuste cavalier, émergea des ombres. La longue poignée d'une claymore saillait dans son dos. Il s'agissait de Sturr, un grand rouquin barbu, garde royal. « Princesse, je suis chargé de prévenir ceux que je croise que la chasse est finie. Le roi rappelle tout le monde à l'orée.
-Sais-tu pourquoi ? Nos invités sont fatigués ? suggéra-t-elle avec une pointe d'ironie.
-Je crains que non. Il s'agit de quelque chose de plus grave. Je ne sais pas exactement, mais je crois qu'il s'agit du prince Léoric. »
La poigne glacée d'un mauvais pressentiment étreignit soudain Elenore, lui fit dresser les cheveux dans la nuque. « Et ser Tristifer ? Sais-tu où il est ?
-Non, ma dame.
-Bon, merci Sturr. Prends ceci avec toi, veux-tu ? » Elle fit tomber sa biche au sol. Puis elle remonta en selle. « Je dois savoir ce qu'il se passe ! »
Et un bon coup d'éperons l'élança vers l'orée de la forêt.
Nouvel appel de cor. Nouvelle appréhension. Au mépris du mauvais terrain, elle imposa le galop à sa monture et traça sa route. Quelques branches basses lui fouettèrent le visage. Avant même de les voir, elle entendit le rassemblement des seigneurs. Il régnait parmi eux une effervescence particulière. Les chevaux qui piaffaient, les valets qui couraient soulevaient une brume de poussière.
Elle quitta le couvert des bois pour s'enfoncer dans cette cohue. Bien vite, elle fut forcée de mettre pied à terre. Sturr lui avait dit que la situation était grave, pourtant elle percevait des rires, d'enthousiastes éclats de voix. Pas une atmosphère de deuil en tout cas... c'est déjà ça. Elenore aperçut le visage de lady Amelyn Loredall et ses craintes s'aiguisèrent. La jeune femme était pâle, ses traits exprimaient de l'effroi. Sans ménagement, la princesse bouscula un chevalier arborant une clé dorée et se fraya un passage vers elle.
Elle déboucha dans un espace formé autour de la lady, du seigneur Malvin, du roi et de ses Bluteynirs. Sauf Tris. Les deux enfants, Soren et Benjohr, étaient présents eux aussi et jetaient des regards inquiets. Aldric avait une expression sévère, plus sévère qu'à l'accoutumée. Il était contraint d'élever la voix pour parler à Dagan et couvrir la clameur. « Rassemble les gens, nous remontons au château. Laisse quelques hommes en arrière pour accueillir les retardataires et les informer.
-Très bien, mon roi. Voulez-vous que je reste avec eux ?
-Ce ne sera pas nécessaire. »
Elenore s'approcha de son frère, plus anxieuse que jamais. « Que se passe-t-il ici ? Il est arrivé quelque chose à Léo ?
-Par les dieux, j'aimerais bien savoir ce qu'il s'est passé au juste. Lady Amelyn nous a rapporté les événements, mais je peine encore à y croire.
-Quels événements ? J'étais encore avec eux il n'y a pas si longtemps. »
Le roi soupira. « Léoric et Aymerad ont décidé de se battre. » Elle en resta sans voix. Le front d'Aldric se creusa de profonds sillons. « Aymerad a tué Hardi, le chien de Léoric. La situation a dégénéré et ils ont convenu de se battre en duel. Ils veulent s'affronter devant l'arbre à serments.
-Quoi ? Tu te moques de moi... Léoric veut se battre en duel, dis-tu ?
-Et le prince Aymerad en a établi l'enjeu », intervint lady Amelyn d'une voix blanche. Elenore porta son attention sur elle, de plus en plus abasourdie. « Le vainqueur doit remporter ma main, dit-elle avec un sourire triste. J'ai beau protester, supplier, personne ne m'écoute. Mon destin ne m'appartient plus. Il est soit question d'honneur, soit question de responsabilités. Dès l'instant où les deux princes se sont mis d'accord... »
Sa voix se brisa et la princesse éprouva de la pitié. Personne n'avait jamais décidé pour elle. Léo n'aurait jamais fait une chose pareille de lui-même. Elle observa Aldric et devina que des préoccupations bien plus grandes agitaient ses pensées. « Où sont-ils à présent ? demanda-t-elle.
-Léoric est parti enterrer son chien. Tristifer, Eyled, Dolf et Ulwän sont avec lui pour l'aider. Le prince Aymerad, pour ce que j'en sais, est au château. Il se prépare en vue de l'affrontement.
-Et son père ?
-Furieux, tu peux l'imaginer. Tybelt a filé sur les traces de son fils. Je pense qu'il compte mettre un terme à tout ceci... Nous verrons. »
Tant qu'il nous évite une guerre...
Ils prirent bientôt tous la direction du château. La tête du cortège, autour du roi, opposait un funeste silence à la queue, que la perspective du duel excitait. Elenore ne pouvait leur en vouloir, ce genre d'empoignade l'aurait pareillement stimulée en d'autres circonstances. Songeuse, elle se surprit à désirer ardemment la victoire de son neveu. Lui et Amelyn formaient un si joli couple. Heureusement, il se débrouillait bien à l'épée, dans cette discipline il était le meilleur des princes helmïns. Il n'y aura probablement pas de combat, de toute façon. En tout cas, si elle avait pu trouver le prince Aymerad sympathique et drôle, si elle avait du moins eu l'occasion de rire à quelques-uns de ses bons mots, la princesse ne ressentait plus pour lui que de l'aversion. Elle connaissait Léoric et suspectait qu'il subissait davantage les événements qu'il ne les avait provoqués.
Ils cheminaient sur le pavé que les fers des chevaux faisaient sonner. Et tandis qu'ils regagnaient les hauteurs de la ville, le soleil s'abaissait et projetait de longues ombres dans lesquelles s'amassaient les curieux. Il n'y avait guère de vivats, cette fois. Eux aussi paraissaient sentir que quelque chose clochait.
Lorsqu'ils franchirent le grand portail, la reine Elza et Lyra les attendaient en haut des marches qui menaient au donjon. La première était de marbre, la seconde froissait sa robe et lançait des regards humides et anxieux.
« Aldric, dis-moi que tu vas mettre un terme à cette folie », souffla la reine.
Mais Elenore constata avec surprise qu'il n'y avait pas d'agressivité dans sa voix, pas de ton accusateur, juste de la peur. La peur d'une mère pour son enfant.
« Je crois que le roi Tybelt ne va pas ménager ses efforts dans ce sens, répondit-il. Pour ma part, j'attends de voir ce que notre fils a à dire avant de décider de l'attitude à adopter.
-C'est vrai que Léo va se battre à mort ? » demanda Lyra.
Aldric lui sourit. « Jusqu'au premier abandon, ma chérie. Je suppose que, s'ils doivent vraiment en passer par là, aucun des deux ne souhaitera mourir pour autant. »
Les tripes d'Elenore firent des nœuds dans son ventre. Elle en avait des nausées. Décidément, elle ne le sentait pas ce duel.
Il y avait foule dans les jardins baignés de crépuscule. La noblesse des deux royaumes s'était réunie pour assister à l'issue du « combat des princes », comme l'appelaient déjà les chevaliers qu'Elenore avait pu croiser. Les seigneurs, toujours en habits de chasse, n'avaient pas pris le temps de se changer pour ne rien manquer du drame. Et, sur les remparts, la roture n'était pas moins curieuse. Gardes et serviteurs s'y disputaient les meilleures places.
Un cercle s'était formé autour de l'arbre à serments, ce chêne séculaire, biscornu, noueux, dont les racines entremêlées enserraient une pierre runique. Le cœur sacré du château. Naguère encore, Elenore y jouait avec sa nièce, lui inculquait des rudiments de combats et partageait de grands éclats de rire. À présent, dans ce jour agonisant, maquillés de lueurs sanglantes, les lieux étaient soudain sinistres, menaçants.
Une voix tranchante couvrait les murmures de l'assemblée. La princesse s'approcha, à la suite d'Aldric, de sa reine et des enfants, suivie de lord Malvin, de lady Amelyn, de Dagan, de Wilforc. Lenmahr Grimsïn et d'autres notables faisaient déjà partie du cercle. On leur ouvrit un passage, comme ils arrivaient, et découvraient un roi Tybelt d'une humeur noire et un prince Aymerad d'une splendeur flamboyante. Sur un corselet de mailles, il portait un plastron, un gorgerin, des gantelets et des jambières, le tout couvert de feuilles d'or et finement ciselé de motifs arborescents, de vignes et de torsades. Sous son bras était coincé un heaume, doré également, et orné d'ailes délicates. Il ne s'agissait pas d'une tenue de guerre complète. Il compte conserver une certaine mobilité, devina Elenore. Mais avec tout cet or, il pourrait bien éblouir son adversaire... Par contre, il n'était pas armé, rien à la main et aucun fourreau à la ceinture.
« ... Père, c'est le prince Léoric qui a tirer le fer le premier, répondait le prince, et le mariage avec lady Loredall était presque entendu.
-Par Dieu et par Lucian ! Si tu savais comme je me fous que tu aies tirer le fer au clair le premier ou non, de même que de ton dernier béguin ! »
La reine Clarys se pencha vers son époux. « Majesté, voyons, nous sommes en société.
-La paix ! Si toute la cour helmïn peut constater ma colère et voir à quel point je suis opposé aux lubies de notre fils, je dis : fort bien ! » La reine porta une main à sa bouche, médusée. Il cloua à nouveau le prince d'un regard empli d'éclairs. « J'avais bien précisé que tes désirs de fiançailles n'étaient pas une priorité et ne seraient envisagés qu'au terme de mes négociations avec le roi Aldric. Nous sommes venus jusqu'ici pour organiser des noces, avec la famille Thorn, pas pour enterrer un prince.
-J'ai proposé un duel au premier sang, pas... »
Son père leva la main pour lui imposer le silence. « Tu vas cesser ceci tout de suite ! Tu t'inclines et nous cessons d'en parler, comme si tout ça n'avait pas eu lieu. »
Aymerad baissa la tête, mais à la façon dont il serrait les dents et les poings, Elenore devina que sa colère n'était pas moins grande que celle de son père. Derrière lui, le prince Marius observait cet échange avec une curiosité certaine, presque de l'amusement. Quant à la princesse Cristal, elle paraissait absente, les yeux perdus dans la foule de courtisans. Auprès d'eux, le fameux magister masqué observait la scène en silence.
C'est cet instant que choisit Léoric pour faire son apparition. Lui aussi, il s'était préparé pour le duel. Il portait des protections similaires à son adversaire, un haubert, un gorgerin, des braconnières et des jambières, des gants maillés. Toutefois l'acier n'empruntait pas ses reflets à l'or. Elenore lui trouva l'air si jeune. Moins grand, il était aussi moins épais qu'Aymerad. À sa suite venaient Eyled, Ulwän Grimsïn, Dolf Daganson et Tristifer Kohl. Ils affichaient tous une mine sombre, mais déterminée.
Léo vint les rejoindre à l'intérieur du cercle. Le regard qu'il échangea avec Aymerad en disait long sur leurs sentiments réciproques. Le roi Tybelt se tourna vers le jeune prince et fit un effort perceptible pour se radoucir. « Prince Léoric, Dieu merci vous voici. Le combat n'aura pas lieu.
-Avec tout le respect qui vous est dû, Votre Grâce, le combat aura bel et bien lieu. Je me suis engagé, j'ai engagé mon honneur sali et nous nous tenons ici devant l'arbre à serments.
-Voyons, réfléchissez. Nous sommes ici pour entériner la paix entre deux royaumes, pas pour créer la discorde. Les enjeux dépassent nos simples personnes.
-Vous avez raison, cela dépasse les préoccupations mortelles. Votre fils m'a insulté, au vu et au su de tous et a pris la vie de mon chien par jeu, sans prétendre s'excuser. Je ne puis laisser faire cela. Je ne vais pas laisser souiller la part immortelle que les dieux m'ont cédée. Un guerrier du clan Thorn respecte ses engagements et ne se déshonore pas, qu'il soit fermier ou qu'il soit roi. »
Le roi Tybelt, muet, se tourna vers son homologue helmïn en quête de soutien. Son regard disait de façon très claire : « J'ai maté mon fils, à votre tour. » Mais une expression étrange flottait sur les traits d'Aldric. Elenore le connaissait par cœur et ce qu'elle pouvait lire sur ce visage mariait la fierté à la résignation.
« Mon fils a fait son Daeraborn, dit-il, c'est un homme à présent, il est libre de ses choix. » Il regarda la reine Elza qui, pétrifiée, savait être impuissante à déjouer la marche du destin. Comme s'il était appelé à se répéter. « Et je ne peux décemment pas lui interdire de livrer un combat que je livrerais moi-même de grand cœur.
-Alors c'est ça... le fameux honneur helmïn. » Tybelt prit une profonde inspiration. « Je respecte vos traditions et je respecte un tel dévouement au « clan ». Aussi, mon fils s'inclinera-t-il de bon gré devant votre courage, ainsi que Daranath Draggenfand le fit devant Lional Melkarande, aux premiers jours de l'empire. »
Le prince Marius paraissait fort diverti et poussa une exclamation. « Eh bien voilà mon frère, point de pari qui tienne ! Pourquoi ai-je donc précisé que ton adversaire te battrait après avoir été blessé le premier ? Tu as réussi à perdre sans même tenir une épée.
-Impossible, Père ! rétorqua Aymerad, ignorant la saillie. Surtout pas après ce beau discours du prince Léoric sur l'honneur et la vertu. Le « clan » Melkarande ne vaut-il donc pas que l'on se batte pour lui ? Ce qu'un Helmïn peut faire, un Lyvalien le peut aussi ! »
À bout de nerfs, le roi Tybelt pinça les lèvres et ferma les yeux. Tremblant d'exaspération, il se pinça l'arête du nez, comme en proie à une intense réflexion. L'instant ne dura pas et, lorsqu'il redressa la tête, ses traits étaient rassérénés. « Dans ce cas j'ai une proposition à faire, qui devrait pouvoir contenter toutes les parties. Comme je l'ai dit, nous ne sommes pas venus de Havre-Noble pour enterrer un prince, pour entacher durablement des rapports que nous désirons au contraire voir fleurir. » Il planta ses yeux dans ceux d'Aldric. « Donc voici ce que je propose : que les deux princes se choisissent chacun un champion. Nos héritiers seront ainsi préservés. Après tout, il est question de l'avenir de nos deux royaumes. Vous n'êtes pas d'accord ? »
Le roi Aldric observa son fils. Visiblement, ce dernier n'était pas d'accord de laisser à un autre le soin de laver son honneur. Aymerad, par contre, s'était calmé et envisageait cette option plus favorablement. Les reines également partageaient un soulagement évident à l'évocation de cette alternative.
« Je suis d'accord », répondit Aldric. Et, comme Léoric protestait : « Cela s'est déjà vu, fils. Et le roi Tybelt a raison, des guerres ont été déclarées pour moins que la mort d'un prince. Choisissez-vous donc des champions. »
Un énorme brouhaha s'éleva tout à coup, mêlant les propositions pour devenir champions, les commentaires et les spéculations. Plusieurs prétendants sortirent du lot en faveur de chacun des princes. Pour Léoric, Tristifer fut le premier à se présenter, puis vinrent Dagan et Ulwän. Elenore attrapa la main de son amant et secoua la tête pour le dissuader, mais il retira sa main. Rien ne lui ferait changer d'avis. Aussi la princesse se présenta-t-elle avec eux, une lueur rebelle dans les yeux. Tris fronça les sourcils.
Le duc Godefroy Belcastel, voyant Ulwän parmi les candidats de Léoric, se rua aussitôt auprès d'Aymerad en bombant le torse. Un fort beau jeune homme aux cheveux châtains et dont la poitrine était ornée d'une licorne cabrée lui proposa aussi son épée. Elenore nota aussitôt l'émoi de la princesse Cristal. Enfin, parmi quelques chevaliers en quête de gloire, son attention fut attirée par le mystérieux homme au masque d'ébène, lui aussi postulant.
« Mon prince, clama Tristifer, mon épée ne vous faillira pas ! Vous connaissez mon talent au combat et mon inébranlable loyauté. Je me suis juré de vous servir et protéger, laissez-moi être votre champion !
-Je suis moi aussi un Bluteynir de votre famille, revendiqua Dagan. Vous le savez, j'ai grandi dans les quartiers les plus pourris de Tursommar avant d'être pris au service de votre père le roi et d'apprendre l'épée auprès des meilleures lames du royaume. » Il fit craquer les jointures de ses doigts et esquissa un sourire. « Dans un combat sans limite, dans un combat à outrance, je n'ai pas mon pareil.
-Je suis ton ami, Léo, dit Ulwän d'une voix ferme. Nous avons fait notre Daeraborn ensemble, nous sommes presque frères. Mais je ne suis pas un prince et par conséquent j'ai le droit de me proposer. Nul autre que moi ne sera plus fidèle à ce que tu aurais accompli toi-même au cours de ce combat. Tu peux compter sur moi. »
Elenore leva le menton et s'avança à leurs côtés. « J'ai beau être une princesse, je ne pèse rien en comparaison du royaume, mon neveu. L'avenir ne repose pas sur mes épaules. Choisis-moi, et montrons à ces étrangers ce qu'une femme helmïn peut faire à l'un de leurs hommes ! Donnons-leur une leçon ! »
Sur le visage du prince la révolte le disputait à l'amertume. Il observait chacun de ses fidèles candidats, les poings serrés, la nuque tendue. « Merci... Merci à chacun d'entre vous. Je suis navré, c'est moi qui devrais livrer ce combat. Vous m'êtes tous chers et aucun de vous ne devrait avoir à souffrir pour ma bêtise...
-Cessez cela tout de suite, mon prince, intervint Tristifer. L'honneur n'est jamais une cause idiote. Vous l'avez dit vous-même, c'est au-dessus de nos conditions mortelles. Pour ma part, je suis ravi de pouvoir vous protéger en me battant à votre place. Je suis heureux d'avoir enfin l'occasion de racheter mon échec de Terre Sainte. Donnez-moi satisfaction, donnez-moi la paix, je vous en prie, que votre père ne m'ait pas épargné pour rien. Choisissez-moi. »
Un spasme d'émotion crispa brièvement la bouche de Léoric. Il s'approcha du Bluteynir et le prit dans ses bras. Le cœur d'Elenore cessa de battre. Le prince étreignit Tristifer et son souffle trembla, puis il retrouva la maîtrise de sa voix. « Qu'il en soit ainsi, Tris, tu seras mon champion. Toutefois écoute-moi. J'ai confiance en toi, je t'aime, mais je t'en conjure, ne meurs pas aujourd'hui, pas maintenant, pas pour ça. »
Le Bluteynir lui sourit, mais ne répondit rien. Tris ! Bon sang, écoute ton prince ! Comme s'il l'avait entendue, il se retourna. Le doute ne l'habitait pas, pas plus que la peur. Même sa mélancolie l'avait déserté. Il tendit la main et lui effleura les doigts. « Je vais me préparer », dit-il simplement.
Et elle le regarda s'éloigner vers le donjon.
Du côté d'Aymerad, un débat faisait rage.
« Pas ton oncle, disait le roi. Il a suffisamment fait parler de lui, je ne veux pas d'embarras supplémentaire.
-De toute façon, je crois qu'il est beaucoup moins enthousiaste depuis que le fils Grimsïn n'a pas été choisi. »
Et le duc de rétorquer : « Il me reste bien assez d'enthousiasme pour faire saigner n'importe quel adversaire !
-Merci Godfroy, mais si Père s'oppose à ce que je te choisisse pour champion, je m'oppose quant à moi à la candidature de sieur Lucas. J'ai subi suffisamment d'affronts de sa part. »
Sieur Lorathän recula humblement. Restait l'étrange magister, immobile, impassible, parmi une clique de capitaines et chevaliers. Le prince arqua un sourcil dubitatif. « J'apprécie ton dévouement, Alester. Je suis impressionné par tes connaissances autant que par ta ruse. Mais sérieusement, que vaux-tu à l'épée ? Crois-tu que je vais remettre mon honneur et mon futur mariage entre les mains d'un rat de bibliothèque ?
-Sire, je puis vous assurer que je ne vous ferai pas honte. J'ai été mercenaire avant de conduire mes pas en Ascalia pour étudier. J'ai écumé maints champs de bataille en Rhovéa, en Tybeldän, j'ai combattu des païens elmyréens, même si ce n'était pas en croisade. »
Tybelt renifla. « Après avoir été mercenaire d'épée, vous êtes donc devenu mercenaire de plume.
-On peut le formuler ainsi.
-C'était à quelle époque ? demanda Aymerad. N'es-tu pas trop rouillé ?
-Je n'ai jamais cessé de pratiquer mes exercices et, quoi que vous puissiez en penser, mon corps est aussi affûté qu'une lame. »
Le prince pouffa. « Des exercices ? Et quand ça, en pleine nuit ? »
L'autre ne répondit pas et son masque ne permettait pas de discerner ses réactions. Était-il amusé ou vexé ? Impossible à dire. À côté de lui, le duc Godfroy s'esclaffa. « On peut quand même se fier à ce qu'on voit. Votre mystérieux ami ne m'a pas l'air bien épais sous son manteau, et y voit-il seulement clair derrière les fentes de son masque ? Remarquez, pour affronter un borgne... »
Alester garda le silence et préféra agir. D'un seul mouvement d'une rapidité déconcertante, il se saisit de l'épée d'un chevalier proche, la fit glisser hors du fourreau et en posa la pointe juste sous le gras menton du duc. Celui-ci déglutit et le défia du regard. Un rictus amusé apparut sur son visage. « Vous êtes rapide, certes, et après...
-Prince Aymerad, déclara le magister, s'il vous faut être convaincu, je me propose de me mesurer à n'importe quel autre champion qu'il vous plaira de nommer avant de livrer le duel en votre nom.
-Alester ! Plus je te connais, plus tu me plais. Tu es plein de surprises et j'aime ton panache, mais je ne vais pas prendre le risque de fatiguer ou de blesser mon champion avant le duel. Je te désigne donc pour le remporter à ma place. Quel spectacle ça va être ! Ne me déçois pas. »
L'homme masqué s'inclina et prit à son tour la direction du donjon pour se préparer au combat.
Les ultimes braises du jour moururent sur les jardins. L'obscurité s'épaissit autour du grand chêne. Tandis que les champions s'armaient, les valets apportèrent des torches et des coupes à feu, qu'ils plantèrent en cercle, à intervalles réguliers, pour délimiter une arène. L'attente était insupportable. Vivement que tout ceci soit terminé. Elenore, bien sûr, espérait la victoire du Bluteynir, mais plus que tout, ce qu'elle désirait en cet instant, c'était retrouver la quiétude de ses bras.
L'assistance s'était quelque peu calmée entre-temps. Dorénavant, les spéculations se faisaient en chuchotant, comme si les ténèbres avaient rendu secrets les propos échangés. Et, lorsqu'une nouvelle clameur s'éleva, Elenore comprit que les champions étaient de retour.
Ils s'avancèrent tous deux entre des haies de gardes des deux royaumes et pénétrèrent le cercle de torches. Les flammes vacillantes jetaient sur leur acier des reflets agités. À l'instar des princes, ils avaient opté pour une bonne maille complétée de pièces d'armures aux endroits vulnérables. D'une main, Tristifer tenait un bouclier rond à ombon, de l'autre, un spangenhelm dont les protège-joues figuraient chacun un croissant de lune cerné d'entrelacs. Alester, quant à lui, était couvert d'une maille noire et luisante. Il portait un gorgerin, mais point de heaume, et il avait néanmoins troqué son masque de bois contre un exemplaire en acier, noir également, fermement harnaché à l'arrière du crâne. À son côté, un jeune homme lui portait un écu frappé de l'aigle Melkarande.
Le magister retira son manteau d'un ample mouvement. Le drapé du vêtement évoqua une aile sombre à Elenore. Ensuite l'homme masqué reçut un paquet enveloppé d'une étoffe satinée et le rapporta pour le présenter aux yeux de tous. Les plis du tissu révélèrent deux superbes épées aux fils d'acier étincelants et filigranés, dont les gardes ciselées et incrustées l'une de saphirs, l'autre de rubis, accrochaient des étincelles d'or en dépit de la faible luminosité.
Alester s'approcha de son adversaire, bras tendus. « Ces lames sont le produit du plus fin ouvrage que l'on peut trouver en Lyval et, probablement, dans le monde. Je vous en prie, choisissez-en une, je prendrai l'autre.
-Je n'ai pas besoin de votre fin ouvrage, il m'est méconnu. » Le Bluteynir défit son baudrier d'arme, dégaina une épée toute simple, ni ornementée, ni damasquinée, et jeta le fourreau à la périphérie du cercle. « Si vous le permettez, je préférerais choisir de l'acier que je connais, une bonne épée helmïn dont la poignée est habituée à ma main et que j'entretiens moi-même.
-Comme il vous plaira. »
Le magister opta pour l'épée aux saphirs et remit l'autre à sieur Gérald, maître d'armes de la maison royale lyvalienne.
Les deux combattants se tournèrent vers le vieux chêne, au pied duquel se tenait ser Wilforc, mains tendues vers le ciel. « J'en appelle aux dieux ! clama le dwynath. Soyez témoins du combat qui ce soir oppose ces deux champions, pour l'honneur et l'amour. Que triomphe le plus brave, au nom du prince le plus méritant ! Sur l'arbre, la pierre et le fer. »
Tristifer s'agenouilla, saisit la lame de son épée qu'il brandit devant lui, et posa les lèvres sur la garde. Alester l'imita. Enfin, chacun gagna une extrémité de l'arène. Ils s'équipèrent de leurs boucliers et se firent face.
La princesse Elenore détailla son amant. Son œil valide, sous le casque, était calme et concentré. Sa main ferme. Les deux hommes tournèrent l'un autour de l'autre et se rapprochèrent selon une double spirale. Tris n'aime pas passer à l'offensive le premier, se souvint-elle. Quelques assauts lui suffisaient généralement pour percevoir les faiblesses importantes, les manques les plus flagrants chez l'ennemi. « Commencer par esquiver, prendre soin de discerner le mouvement, la vitesse, la précision », disait-il. Le cœur de la princesse battait à tout rompre dans sa poitrine. Son regard rivé aux deux guerriers, elle était à l'affût du moindre détail.
Soudain, avant même de constater un mouvement de la part du magister, elle vit les genoux du Bluteynir fléchir, juste un peu. L'épée d'Alester décrivit un arc d'une incroyable rapidité et Tristifer eut besoin de toute sa détente pour bondir de côté. La lame frôla son nasal. Aussitôt, l'arme dessina une nouvelle courbe tout aussi meurtrière. Cette fois, il s'accroupit de justesse. Quelques pas en arrière ramenèrent le champion helmïn hors de portée de son adversaire. Et ils reprirent tous deux leur ronde, dans un silence oppressant, sous les yeux d'une assemblée fébrile.
D'un bond fulgurant, Alester revint à la charge. Sa brillante épée mordit dans le bois du bouclier. Puis il enchaîna avec un puissant coup d'écu. Tristifer avait beau être retranché en position de parade, solidement campé sur ses jambes, la force de l'impact le projeta quelques pas en arrière. Il chancela, mais ne tomba pas. Des éclats de stupeur jaillirent parmi les nobles et sur le rempart. Tris éprouve la force et l'adresse de l'autre, se rassura Elenore. Peut-être même tente-t-il de lui faire croire à sa supériorité pour lui faire commettre une imprudence. Tristifer se battait avec sa tête au moins autant que ses muscles. Mais pour l'instant, il reculait. Et son opposant ne laissait, bien sûr, rien paraître derrière son masque obscur.
Tout à coup le magister entama une nouvelle série d'assauts, deux coups destinés à être parés immédiatement suivis d'une frappe au genou puis à la gorge. Le Bluteynir laissa sa jambière encaisser la troisième attaque, un grognement lui échappa, et se pencha de côté pour préserver son gorgerin. Car le choc, même absorbé par l'armure, aurait pu le laisser suffocant. Mais alors, tandis que jusqu'ici il s'était cantonné à la défense et à l'observation, il enchaîna une série de ripostes d'une précision que seul son entraînement intensif justifiait. Sa lame était un prolongement de son bras. Tout en pivotant autour de l'homme au masque, il cingla tour à tour à l'aisselle, à l'aine et derrière le genou droit. Si les deux premiers coups crissèrent sur la maille serrée, le dernier entama le cuir de la botte et des protections, y traça un filet de sang. Des vivats explosèrent. Alester fit volte-face et rugit en tailladant rageusement, mais Tris était déjà loin. En bordure d'arène, il rajustait sa prise sur ses armes et reprenait son souffle. Ses grandes goulées d'air gonflaient son haubert à un rythme maîtrisé. Pas une parcelle du Bluteynir n'échappait à son contrôle, il était focalisé. Elenore ressentit une intense fierté.
La blessure du magister devait être superficielle, car il ne boitait pas. Il redressa son écu devant lui, juste sous son nez d'acier et, dorénavant, il se montra plus circonspect. Plus circonspect, mais donc aussi moins offensif. Ses attaques suivantes, qu'il porta avec force, rapidité, mais sans rien dégarnir, tranchèrent du vent sans inquiéter Tristifer outre mesure. Ce dernier tenta également quelques bottes qui égratignèrent l'aigle de l'écu ou les mailles noires. L'assemblée, silencieuse, laissait parler l'acier et retenait son souffle. Vas-y Tris, montre-lui !
Et puis, enfin, le champion lyvalien se créa une nouvelle occasion. Il lança une série d'attaques appuyées sur le bouclier à ombon, arrachant des éclats de bois, suivies d'un puissant coup d'écu tel que celui qui avait fait chanceler le Bluteynir au début du combat. Tris ne fut pas dupe, mais, contraint de dégarnir son flanc tandis qu'il roulait de côté pour amortir l'assaut, offrit une ouverture à l'œil aiguisé de son adversaire. Le fer chatoyant darda avec force. Nulle cotte n'aurait pu prémunir qui que ce soit d'un coup aussi vif, et le champion helmïn, contraint à l'impossible, s'incurva avec souplesse, sacrifia une ou deux mailles du flanc sans plus, referma son bras droit tel un étau sur la belle épée incrustée de saphirs. Et, de son bras gauche, il abattit la tranche de son bouclier rond juste sous les yeux du masque. La tête d'Alester fut projetée en arrière. Il lâcha un cri et un jet de sang gicla sous son menton. S'ensuivirent de nouvelles acclamations.
Comme le Bluteynir réarmait son bras pour asséner un nouveau coup de bouclier, l'autre dégagea sa lame d'une saccade et recula hors de portée. Elenore crut discerner de la surprise dans le regard masqué. Nul doute que Tristifer lui est supérieur. Comment avait-elle pu en douter ? Personne dans le royaume ne pouvait rivaliser. Heureux étaient ceux qui pouvaient se prévaloir de lui arriver à la cheville.
Du côté de la famille royale lyvalienne, les sentiments étaient partagés. Le prince Aymerad, bien entendu, était tendu et frustré. Il se mordait la lèvre, mais n'osait invectiver son champion, sans doute désireux de ne pas le distraire. Le roi Tybelt affichait une mine sévère mais calme. La princesse Cristal, entre deux œillades pour le combat, jetait de longs regards appréciateurs au beau et jeune chevalier à la licorne. Marius se délectait du spectacle et paraissait réellement impressionné par la performance des champions. Et la reine, sans émotion apparente, observait attentivement le duel.
Du côté de sa propre famille, les réactions étaient beaucoup plus unanimes. Le roi, ses enfants, ses Bluteynirs, et même la reine, scrutaient la moindre passe d'arme avec intérêt. Bien que prêts à goûter la victoire, ils bridaient leur enthousiasme, dans l'angoisse d'un soudain revirement.
De nouveaux échanges, scandés par le chant du fer, ramenèrent Elenore vers son amant. Les deux hommes tournaient, virevoltaient, en une danse où l'acier embrassait l'acier, où le bois heurtait le bois, où l'acier mordait le bois. Les assauts se succédaient, plus fulgurants les uns que les autres, au point que, durant un instant, la princesse éprouva des difficultés à dissocier les lames des deux champions. Elles vibrèrent, s'entrechoquèrent et les deux combattants lancèrent une redoutable attaque simultanément. La rencontre des deux épées produisit une stridence déchirante et la force du magister renversa Tristifer sur le dos.
Mais le déchaînement guerrier n'était pas terminé. Profitant que son adversaire était au sol, Alester plongea, pointe en avant. Tristifer roula, décocha un coup de pied dans l'écu pour créer une faille et taillada. Le fer du premier manqua le col et vrilla l'épaule du second, tandis que celui du Bluteynir tranchait au-dessus du genou. Deux gerbes sanglantes éclaboussèrent l'herbe de l'arène.
Les deux champions se séparèrent et regagnèrent le pourtour du cercle sous une rumeur d'excitation. Elenore sentit son cœur se serrer. Tris... tu es blessé. Le souffle court, son amant fit jouer son épaule meurtrie. Il planta son épée dans le sol et détacha la sangle de son casque. Sans cesser d'observer son adversaire, il le jeta sur le côté, libérant une chevelure humide de transpiration. À l'aide d'un coin de son tabard, il s'épongea le front. Puis il rajusta son bandeau sur son œil et récupéra sa lame, à nouveau prêt à en découdre, le moindre muscle tendu.
En face de lui, le magister au masque noir paraissait éprouvé, mais pas essoufflé. Ses blessures aux jambes rendaient son pas moins sûr et du sang maculait son gorgerin, néanmoins rien ne laissait penser qu'il fût près d'abandonner.
Les deux guerriers se remirent à tourner.
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