Obscurité
Nous avons tous des parties sombres dans notre vie. Ce sont de mauvais moments ou encore des choses inexpliquées avec de graves conséquences. Nous avons peur de nous enfoncer dans les ténèbres mais c'est là où certaines réponses se trouvent.
***
Dallas, assise au pied de son lit regardait le miroir, regardait Charlize. Elles s'étaient écoutées mutuellement. Chacune avait découvert les émotions de l'autre qui se ressemblaient grandement. Le reflet aussi était assis contre un mur invisible, son regard demeurait le même qu'auparavant. Cette joie qu'il dégageait tout comme la douceur et l'amour. Mais un éclat de tristesse les assombrissait.
La jeune adolescente brulait de toucher sa sœur mais elle se doutait que sa main sentirait juste le froid du miroir si elle s'y aventurait. Sa sœur était sa vie, sa sœur était dans l'au-delà. Deux choses opposées. Dallas n'avait pas pleuré pendant que sa jumelle lui racontait ses derniers instants, pourtant l'envie de crier était toujours là. Et plus forte cette fois.
Ce qu'elle voulait tellement à ce moment ci ? Avoir des réponses. Ces réponses qu'elle attendait depuis sept ans maintenant.
- Si tu veux savoir des choses, je suis tout à toi, lança Charlize vivement, de toute façon, je n'ai que toi.
Dallas, la tête baissée, esquissa un sourire qui laissa pénétrer une larme dans sa bouche.
- Est-ce que tu t'es battue pendant tes derniers instants ? demanda-t-elle en ravalant un sanglot.
- Si je me suis battue ? répéta sa sœur avec un air ironique. Corps et âme, oui ! Je ne supportais pas l'idée de te quitter ! Mais j'ai tout perdu dans mon combat. Les douleurs m'accablaient, mon cœur me lançait, mon sang m'inondait et mon souffle était coupé ! La dernière chose que j'ai entendue pendant ma vie est notre sœur Katheryn qui marmonna « S'il-te-plaît, reste, ne la laisse pas. » à mon oreille. Et même pas ta voix, je l'ai attendue pourtant. Tant que j'ai pu.
Le regard de la jumelle semblait mélanger colère et tristesse tandis que celui de la jeune brune mêlé chagrin et amour. Ce qui ne manquait pas à Charlize non plus, elle tant remplie d'amour dans l'ancienne époque.
- Quelle a été ton ultime pensée ?
Les larmes de l'adolescente se vidèrent suite à cette question. Elle les essuya avec sa manche de sweat-shirt dont la couleur se ternie immédiatement.
- Nous, répondit Charlize pour combler le vide, toi et moi. Dans tous les environnements possibles. Notre jardin, la plage, la montagne, notre salon, notre chambre, la forêt enneigée, ... Mais je ne nous voyais que quand nous rions, que nous étions joyeuses, et pleines de gaieté.
Soudain, Dallas entendit la porte d'entrer se claquer. C'était Katy. La jeune fille se leva en sursaut.
- Est-ce que mes yeux sont rouges ? interrogea-t-elle son reflet.
- Un peu mais ça devrait aller.
L'adolescente prit son portable et s'allongea sur son lit pour avoir l'air de faire quelque chose. Elle jeta un petit coup d'œil dans le miroir, Charlize avait disparue. Puis Katy entra et s'assit à coté d'elle.
- Tout va bien ? Tu te sens bien ?
Questions devenues typiques de sa sœur depuis quelques jours.
- Oui, docteur Hudson. Je ne constate rien d'anormale, dit-elle avec un sourire forcée.
- Ne te moque pas de moi. Je te parle en tant que sœur, parce que je suis inquiète pour toi.
- On en a déjà parlé, Katy. Je vais bien.
- Je voudrais tellement en être sure ...
Katy savait toujours comment Dallas se sentait intérieurement sans que celle-ci ne lui dise quelque chose. Comme si elle arrivait à la lire tel un livre ouvert.
- Une nuit de la semaine dernière, tu m'as fait très peur quand tu m'as dit l'avoir vu.
- J'ai fait un cauchemar, c'est tout.
- Tu ne me dis pas tout, Dallas. Et tu ne te sens pas bien.
- Katy, je ...
- Tu as le droit de ne pas me parler mais je ne veux pas que tu sois mal. Tu n'es pas obligée de me parler à moi. Avec Addison, ça s'est bien passé tout à l'heure, non ? Je sais que c'est une personne de confiance et très à l'écoute des gens. Soulage-toi de ton poids mais ne fais pas de bêtise, d'accord ?
Dallas acquiesça d'un signe de la tête avant que Katy sorte de la chambre. Et la jeune fille alla s'asseoir au pied de son lit pour revoir son reflet. Celle-ci affichait un regard réconfortant. Dallas la revoyait petite, qu'elle avait changé depuis ! Son visage affiné, ses lèvres roses et pulpeuses, ses yeux aux couleurs si vives, si claires, ses cheveux blondis, la rendaient encore plus belle.
Son téléphone dans la main, glissa sur l'icône message et alla sur ceux de Charlize, les plus vieux de son répertoire. La tête sa sœur dans la petite fenêtre du correspondant était en fait celle de leur première visite à Disneyworld, que Dallas ne pourra jamais oublier. Toute cette magie et cette fantaisie resteront gravées en elle.
Et les textes datant de 2010, remplis de cœurs et de lèvres, demeuraient peu nombreux, car à quoi bon s'écrire puisqu'elles faisaient absolument tout ensemble. Dallas en relut certains à voix haute : Je t'aime ma sœur ! Tu es la meilleure ma Dalli !, Gros bisous ma chérie ! ... Puis, elle tourna l'écran vers sa jumelle.
- Je voulais tant te dire tout ça en fasse pendant tellement de temps ! marmonna-t-elle.
Puis elle alla tout en bas de l'historique. Et elle vit le message, l'ultime, le dernier : Tout va bien, je suis avec Katy à l'hôpital. Qu'est ce que tu fais ? Et elle retint un rire.
- Passé un temps, je me disais que ce message pourrait avoir une réponse, mais je l'attends toujours et je l'attendrai tout le temps.
- Et moi j'aimerai tellement avoir pu te la donner, chuchota Charlize en versant une larme de glace.
Dallas avait envie de se lever, de taper contre le mur, de briser le miroir, de détruire tout ce qui était autour d'elle tant elle restait en colère de ne pas pouvoir toucher Charlize alors qu'elle souhaitait plus que tout l'embrasser et la serrer dans ses bras.
- Pourquoi tu n'es que dans ce miroir ? Pourquoi ?
- Je suis autour de toi, je ne suis nulle part. Je me trouve dans le monde et enfermé dans ce miroir. Je voie tout, je ne voie que toi. J'entends les bruits de la terre, j'entends ta voix. Je suis libérée, je suis enchainée. Mon cœur bat encore mais s'est arrêté. Mon souffle existe mais n'est autre que le fruit de mon imagination. Mon corps est réel mais imaginaire. Je vie, je suis morte. Je te parle, je communique avec le monde. Je suis au ciel, je suis sur cette planète. Je suis une étoile, je suis un grain de poussière. Je représente le passé et le futur. Je suis le soleil et la lune. L'argent et l'or. La lumière et l'obscurité. Je suis tout, je ne suis rien.
Dallas étendit ses jambes et la regarda droit dans les yeux. Elle commença à marmonner :
- Je suis ta sœur, je ne le suis plus. Je suis perdue mais j'ai retrouvée ma voie. Je te parle, je ne parle à personne. Je te vois mais je n'en suis pas sure. J'entends les bruits qui m'entoure et ceux qui viennent de plus loin encore. Je crie mais on ne m'entend pas. Je pleure et je ris. Je veux rester, je veux partir. Je veux vivre, je veux mourir. Je suis mais je n'existe pas.
***
L'obscurité est d'une sombre clarté. Elle a une part de lumière, et une plus noire. Ceux que nous savons et que nous ne savons pas. Au fond, nous ne savons jamais tout, et la partie obscure reste. Mais n'est-ce pas mieux ainsi ?
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