C'est à moi, ça!
Nous nous mettons en quête des documents dès la première heure. Selon les chiffres, il nous reste cinq lieux à découvrir. Petit problème : Il en reste six sur la carte, dont deux à proximité l'un de l'autre, du côté du forum. Après il nous reste encore les ruines du mont Palatin, les thermes de Caracalla. Le dernier cercle se trouve dans le grand parc de la Villa Borghese.
En un rien de temps on élimine le forum romain. On retrouve juste deux mots, comme lors de notre visite au Colisée. Le premier est Terre Creuse, le second Atlantide. Nous pouvons faire nos recherches sans être inquiétés : nous sommes les premiers touristes, les seuls à poireauter à l'entrée quelques minutes avant l'ouverture. Personne ne semble nous suivre et nous avons le site rien que pour nous. Nous sommes tout joyeux et confiants en quittant le lieu. Jusqu'à ce qu'on tombe sur les gardiens à la sortie. Ils semblent nous observer de loin, les sourcils froncés. Mais ils ne s'approchent pas de nous. Nous faisons comme si de rien n'était, rassemblant notre courage alors que cette vision nous fichait une trouille du tonnerre. On décide de se diriger vers le lieu suivant, en reprenant notre technique des tours et détours dans toute la ville, au cas où quelqu'un se serait mis à nous suivre.
Pendant notre tour de cache-cache, Frida décide de se rendre à un kiosque de journaux. Son sang se fige sur place. Elle se met à trembler. Elle me pointe du doigt les journaux de la devanture. Nos visages sont affichés en grand sur la première page. On traduit les titres, qui balancent tous la même rengaine : meurtre à Velletri, voici les suspects. Les photos avaient été prises la veille, certainement d'un des appartements de l'immeuble de Friendley.
Nous stoppons notre route et retournons à l'hôtel. Je me mets à googler nos noms et celui de Velletri sur le Net. Via les quotidiens belges, je vois que mon identité était confirmée par la multitude d'empreintes digitales que j'avais laissées dans le pied-à-terre de la victime. Ils n'avaient pas encore formellement identifié Frida, mais la police le soupçonnait, bien que sa voiture avait été retrouvée dans le sud de l'Italie. Merde, la horde de skins allait se ramener de nouveau à Rome, si elle n'était pas déjà sur place. De toute façon, seules des brutes dans leur genre auraient pu fracasser Friendley de cette manière.
Frida a une idée, tellement bête ou évidente que je n'y avais jamais pensé. Elle me fait aller acheter de la teinture pour cheveux. Du blond pour mes cheveux bruns, du noir pour ses beaux cheveux blonds soyeux. Elle me fait prendre également une fausse moustache. Le printemps pointait son petit nez dans la péninsule italienne, et avec nos cheveux maquillés et munis de lunettes de soleil nous sommes devenus méconnaissables. J'ai l'impression d'être comme Cole, dans l'armée des 12 singes, déguisé pour échapper à la police qui le prenait pour un forcené. On repart, en toute hâte, visiter le reste des lieux afin de quitter Rome le soir même.
Nous visitons d'emblée le mont Palatin et les thermes. Je suis toujours subjugué par les vestiges de cette vieille civilisation qui avait dominé le monde pendant des siècles. À nouveau, on récupère deux mots : capitale et Saint Yves d'Alveydre. Nous ne sommes pas beaucoup plus avancés. Il faudra faire une recherche sur ce nom-là, dès que l'on pourra se poser quelque part.
Il ne nous reste plus que les jardins de villa Borghese, qui étaient énormes. Quatre-vingts hectares à fouiller. Avec tous les chiffres épuisés, nous n'avons aucune indication. Avec toutes nos aventures, nous y arrivons en milieu d'après-midi. Le jardin, magnifique, regorge de monde qui se promène. Le temps est agréable avec ses petits rayons de soleil encore trop faible pour cuire un être humain. Mais je fais face à un grand découragement : le parc est réellement immense. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin.
Frida, cependant, m'indiqua qu'il reste une pseudo ruine romaine dans le parc. La face d'un vieux temple dédié à Esculape, qui avait été reconstruit au dix-huitième siècle. Le temple originel, lui, avait été détruit pour faire place à une grande église.
L'intuition féminine frappe encore en plein dans le mille. Le premier lieu que l'on fouille dans le parc. La fameuse façade est à l'écart des sentiers principaux, bien visible cependant de l'autre côté d'un étang. Elle est purement décorative, uniquement là pour faire joli, témoigner de la grandeur passée du temple érigée en l'honneur d'un dieu de la médecine suite à une épidémie de peste. Il y a cependant un gros hic.
Un type est là, en train de fouiller lui aussi. Vêtu d'un long pardessus noir qui enveloppe un costume tout aussi sombre. Son visage, qui fait penser à une fouine, est surmonté de lunettes cerclées et d'un chapeau tout aussi noir. L'exemple typique du nazi des services secrets d'Indiana Jones dans les aventuriers de l'arche perdue. Et il se tient là, tranquillement à fouiller l'endroit que nous convoitons. D'un coup, il sort un attaché-case, en tout point identique à celui qu'on avait récupéré la veille. Je tente le tout pour le tout, en poussant désespérément dans son esprit.
« Hé, mais c'est à moi, ça ! »
Le gars stoppe son mouvement, et semble étonné. Mais la poussée ne fonctionne pas. Bien au contraire, je me retrouve à nouveau face à cette sensation, ce mur qui bloque mon don. Désespéré, j'agrippe la mallette, et tente de la tirer vers moi. Je répète la même sentence encore et encore tout tirant de plus en plus fort pour qu'il lâche prise. Le type en face commence à baliser sévère. Ses yeux virent du bleu océan au bleu noirâtre des tempêtes. J'esquive son premier coup et réplique d'un crochet du droit. Mais je l'effleure à peine. Je vois son poing se lever, prêt à s'abattre sur moi. Je l'esquive à nouveau en plongeant, l'attirant avec moi dans ma chute. Lorsqu'il touche le sol, je me jette sur lui. Je n'arrive plus à contenir mes coups. Je suis emporté par la colère, je n'ai plus peur, je veux juste qu'il paye pour tous les autres. Je le frappe de mes poings, à n'en plus finir. Je suis interrompu subitement par la voix de Frida qui hurle en allemand.
Je ne comprends pas tous les mots. J'ai juste quelques notions d'allemand appris sur le tas pendant mon passage à Fribourg. Je comprends les mots « contrôle », « malade », « puis donnez mallette ». La voix de Frida, dans la langue de Goethe lui donne un air autoritaire et menaçant. Je dois dire, je trouve cela plutôt sexy. Mais pour le gaillard en face, ça ne fait pas le même effet. Il me bouscule, comme si mes poings l'avaient à peine effleuré. Il se lève en trombe et part en courant sans demander son reste. La mallette gît là, à côté de moi.
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