Chapitre 21
Naseok se réveilla au bout d'un petit moment. Je n'aurais pas su dire si c'était moins d'une heure ou plus d'une heure. Ça me parut être dans les alentours d'une heure, en tout cas. Addy et Miach s'étaient endormis, assommés par la chaleur et la déshydratation. Ryker n'était pas dans un meilleur état mais il se forçait à garder les yeux ouverts à cause de Ghur. Et moi, je surveillais tout le monde en même temps.
Lorsque Naseok commença à se réveiller, je fus la première à réagir. J'avais guetté ce moment. Je me sentais de plus en plus mal, épuisée, assoiffée, affamée. Dès que je sortirais de ces fichus marais, je boirais jusqu'à exploser. Et je mangerais à en vomir aussi. Et je dormirais pendant une semaine.
Cependant, pour le moment, tout cela n'était qu'un merveilleux rêve. Il fallait déjà réussir à empêcher Ghur de massacrer Naseok et de pousser ce dernier à nous montrer la sortie des marais. Étrangement, j'avais la sensation que la seconde partie serait plus compliquée à achever que la première.
- Espèce de sorcière, marmonna Naseok. Pourquoi c'est moi que tu as assommé alors que c'est lui qui a commencé ?
- Parce que j'étais sûre de t'avoir du premier coup, répondis-je simplement.
Si mes compagnons rirent légèrement, le Unseelie me fusilla du regard. Et Ghur était trop occupé à le fixer pour réagir.
Il se redressa en se massant l'arrière du crâne, luttant contre les grimaces de douleur qui menaçaient de le trahir. Il me donna envie de rire tant il était évident que j'avais créé une sacrée en taille dans sa fierté enplus de l'avoir assommé.
- Maintenant que tu es réveillé, il est tant de se remettre en route, repris-je en me redressant. Tu vas nous faire sortir d'ici et rapidement.
Il ouvrit la bouche pour rétorquer mais je l'interrompis.
- Nous n'avons plus assez d'eau pour tout le monde et encore moins de vivres. Alors fais ton choix. Tu seras le premier à mourir d'entre nous si tu ne te décides pas à nous servir de guide comme tu as dit que tu le ferais.
- Selon l'autre grand idiot, je serais le Traître, répliqua-t-il. Tu comptes vraiment me faire confiance ?
- Il n'est pas question de confiance mais de choix. Et je ne compte pas te le laisser. Alors, soit tu nous fait sortir d'ici, soit tu meures ici. Seul.
- Sans moi, vous ne pourrez jamais sortir d'ici en vie.
- On se débrouillera, fais-moi confiance là-dessus.
Nous nous affrontâmes du regard et il fut le premier à se détourner. Je l'aurais cru plus résistant que ça. Toutefois, je compris rapidement pourquoi il s'était détourné. Miach s'était mis à tousser. Il semblait de plus en plus mal en point. C'était le moment de me servir du point faible, que je le veuille ou non.
- Quoi que, j'ai peut-être eu tort sur un point. Peut-être ne seras-tu pas le premier à mourir. Miach risque de te voler la place. Il a besoin de soins, de nourriture et de repos. Et ce n'est pas ici qu'il aura quoi que ce soit.
Naseok m'aurait incendiée du regard s'il l'avait pu. Quoi que, quelque part, j'étais à peu près sûre qu'il en avait la capacité. Je savais que j'allais le payer. Mais que voulait-il que je fasse ? Il fallait que nous sortions d'ici au plus vite. Je regrettais un peu d'avoir eu à utiliser Miach comme argument cependant, il ne m'avait pas laissé le choix.
- Il se pourrait qu'il y ait une autre solution, soupira Naseok. Le grand abruti là m'a donné une idée.
Ghur grogna face à l'insulte et je vis ses ongles se transformer en griffes. Je roulai des yeux en me levant pour me placer entre eux.
- Quelle autre solution ?
- Il (Naseok pointa Ghur du doigt) n'avait pas précisé qu'il avait une affinité avec la terre. S'il l'avait précisé avant, nous n'en serions pas là.
- Quel rapport ?
- Tu ne connais vraiment rien de la Faerie alors que tu y as passé des semaines.
Ce fut mon tour de le fusiller du regard. Il avait totalement raison, évidemment. Comment aurais-je pu apprendre quoi que ce soit alors que j'étais prisonnière ? Je n'étais là que pour chanter et restaurer leurs terres. Ils n'allaient pas me laisser apprendre quoi que ce soit sur leur race pour me donner des armes contre eux.
- Chaque Fae et Demi-Sang a une affinité avec l'un des quatre éléments. Tu connais au moins les quatre éléments ?
- Évidemment !
- Avec toi, on ne sait jamais... Toujours est-il que tout ce qui est Fae ou Demi-Fae a une affinité et celle de la grosse brute, là, c'est la terre. Et s'il sait s'en servir autrement que pour se transformer, il peut nous créer un pont qui nous fera éviter la Maison de la Honte.
- Pourquoi devrais-je me fatiguer alors qu'il serait plus simple de sortir par là ? grogna Ghur en croisant les bras.
- Combien de fois vais-je devoir le dire ? C'est la Maison de la Honte, bon sang ! On a tous plus de chance de mourir en passant par là que si tu te bougeais un peu pour nous créer un pont !
- Je n'ai pas vraiment envie d'écouter le Traître.
Il tourna la tête sur le côté, refusant de regarder Naseok plus longtemps.
- Je ne suis pas ce putain de taré, compris ? explosa le Unseelie. Oui, je suis entré dans la Maison de la Honte et j'en porterai la marque toute ma vie. J'ai vu des choses que je n'aurais jamais dû voir. J'ai réussi à fuir de justesse et je ne retenterais pas ma chance une seconde fois. Surtout pas si je peux l'éviter. Alors crée-nous un pont et barrons-nous d'ici. C'est ce que tout le monde veut, non ?
Addy hocha la tête, comme si son avis une quelconque importance aux yeux de Naseok. L'attention de tout le monde se tourna vers Ghur qui serra les poings. Ce fut assurément le regard de la jeune princesse qui le convainquit. Il grogna avant de s'éloigner de nous. Il ferma les yeux et inspira profondément. Je l'observai longuement alors qu'il se concentrait pour accéder à sa magie.
- S'il essaie la magie silencieuse, on est pas sortis de l'auberge, marmonna Naseok, visiblement agacé.
- Parce qu'il faut absolument chanter pour accéder à la magie ? demandai-je.
- Les plus puissants peuvent s'en passer mais je doute que ce fêlé soit suffisamment puissant pour ça. Il faut qu'il chante, gêné ou pas. Sans ça, il ne saura jamais nous créer un pont suffisamment stable pour que nous passions tous.
- Pourquoi ne l'aides-tu pas, alors ? intervint Miach.
- Je ne peux pas. Mon affinité est avec le feu. Si je lie ma magie à la sienne, je vais ruiner sa construction à cause de la lave. Il y a trop de chaleur, trop de feu autour de nous pour que mon alliance n'en soit pas nuisible.
Je hochai la tête comme si je comprenais exactement ce qu'il voulait me dire. Ce qui n'était pas vraiment le cas. Au contraire. Je n'étais pas certaine de comprendre quoi que ce soit à cette histoire d'affinités.
- Et toi, Régicide, tu connais ton affinité ?
Je secouai la tête.
- Avant que tu n'en parles, je ne savais même pas que ça existait.
- Il est assez rare à la Cour d'avoir des Faes qui parlent de leurs affinités. Ils préfèrent garder ça secret pour surprendre leur adversaire au besoin. Mais la plupart du temps, les Faes normaux ne vivant pas à la Cour ne s'en cachent pas puisqu'ils les utilisent dans la vie de tous les jours.
- Et comment je la découvre, mon affinité ?
Utiliser la magie n'était pas quelque chose que j'avais envisagé de faire et encore moins envie de faire. Toutefois, ça pouvait toujours être utile. Je n'étais plus au milieu des humains. Si je pouvais avoir une arme, je devais la maîtriser, quelle qu'elle soit. Même si c'était la magie. J'en avais en moi. Je ne pouvais le nier. Je l'avais trop souvent ressentie lorsque j'étais emprisonnée à la Cour, forcée de chanter pour le Roi Noir et ses sujets.
- Tu peux la trouver à force d'utiliser ta magie. Ce que tu n'as jamais fait.
- Je n'ai servi que vaisseau, admis-je. Il m'a forcée à chanter pour conjurer la magie pour lui l'utiliser. Mais je n'ai jamais utilisé la magie. Je n'en ai pas.
- Bien sûr que si, tu en as. Tu es à une Demi-Sang. J'entends la magie dans ton sang. Ne cherche pas à le nier.
Je ne répondis pas. Il se tourna vers moi et me regarda un long moment mais je continuai de fixer Ghur qui luttait pour créer un semblant de pont, la sueur roulant sur son front. Il était en pleine concentration, les mâchoires serrées, les poings serrés, le corps entièrement raide. Il n'allait pas y arriver. C'était une évidence. Il allait échouer. Il n'était pas assez puissant.
Je ne pouvais pas le laisser échouer. Il fallait que nous sortions des marais et Naseok ne nous laisserait pas sortir de l'autre côté. Ce pont était notre seule chance. Alors il fallait que je l'aide. Si le Roi Noir avait pu se servir de la magie que je conjurais en chantant, Ghur saurait sûrement le faire aussi. Et tant pis si Ryker me voyait en plein exercice. Il m'avait déjà entendu chanter. Cependant, il n'avait jamais réalisé ce que mon chant pouvait provoquer.
J'allais me placer à côté de Ghur qui ne tourna même pas la tête vers moi. Il était si concentré sur ce qu'il faisait qu'il ne m'avait pas vue. J'inspirai profondément avant d'unir ma voix à la sienne. La magie se mit aussitôt à monter en moi comme une marée violente et pleine de rage. Ma tête se mit à bourdonner, m'empêchant presque d'entendre ce que je chantais. Je ne connaissais pas les mots mais il suffisait que je suive mon instinct pour savoir quels mots prononcer. Le fait que la chanson soit en ancien langage ne changeait même rien. Tout était purement instinctif. C'était en moi. Lorsque je chantais, c'était difficile de le nier.
Au demeurant, quelque chose clochait. La magie continuait de monter en moi mais elle demeurait inutilisée. Ghur ne venait pas piocher dedans à l'envi comme l'avait fait le Roi Noir. Il ne semblait pas y avoir accès. Ou alors, il ne savait tout simplement pas comment faire.
Je liai ma main à la sienne. Il tressaillit, sans pour autant relâcher son attention de son œuvre. Je fermai les yeux pour me mieux me concentrer. La magie en moi devenait bien trop forte pour que je puisse la garder. Il fallait que je l'évacue. J'aurais cru que lier ma main à la sienne aurait permis à nos magies de se mélanger. C'était une idée simpliste mais je n'avais aucune idée de la façon de procéder pour l'obliger à puiser dans mes ressources au lieu de s'épuiser tout seul.
La nausée commença à me brûler la gorge. Mes jambes commençaient déjà à trembler tant je me remplissais de magie. Si je ne l'évacuais pas, elle allait m'incinérer.
- Écoute sa mélodie !
La voix de Miach me parvint comme un écho désagréable par-dessus ma voix et celle de Ghur. Je ne saisis pas où il voulait en venir. Je naviguais à contre-courant, tentant de résister à la panique qui commençait à m'enserrer la poitrine et à m'étouffer.
- Écoute sa mélodie, bordel ! Écoute-la et connecte-toi !
Sa mélodie ? Je chantais la même ! En y réfléchissant bien – autant que je pouvais, en tout cas, dans l'état où j'étais –, je ne chantais pas réellement avec Ghur. Je suivais son rythme et ses paroles mais je ne chantais pas avec lui.
Je m'arrêtais pour l'écouter correctement. La magie pulsait dans mon chacune des cellules de mon corps, me soulevant l'estomac, me donnant le tournis. Je me forçai à me concentrer pour pouvoir réellement chanter avec lui et lui prêter ma magie.
Lorsque je me remis à chanter, tout fut différent de la première fois. Je sentis la magie de Ghur dans l'air, vis l'image qu'il avait en tête, me retrouvai à lutter contre la force de la lave qui voulait détruire ce qu'il construisait... C'était comme si j'étais une nouvelle part de lui, une partie détachée à laquelle il venait de se relier. Ce n'était pas ouvertement désagréable mais je détestai chaque seconde où il puisa dans la magie que je créais.
Et puis, ce fut fini. Mes jambes cédèrent sous moi alors que je toussais et crachais de la bile, la tête bourdonnante comme si un essaim d'abeilles s'y était logé. Addy vint m'apporter sa gourde mais je secouai la tête. Je ne pouvais pas prendre ce qui restait de son eau. Nous n'en avions déjà plus énormément...
- Bois, Sixtine, insista-t-elle.
- Non, ça va, ne vous en faites pas.
- Bois et arrête de me vouvoyer.
J'ouvris la bouche pour refuser à nouveau mais Ryker ne me laissa pas le temps de prononcer le moindre mot.
- Bois et dépêche-toi.
Je levai les yeux vers lui mais il regardait le pont devant nous. Tout en buvant à la gourde de la princesse, j'observai ce que j'avais aidé à créer. Ce n'était pas du tout l'idée que j'avais eu en tête. J'avais imaginé un pont solide, en bois massif, qui passerait par-dessus la rivière de lave fumante. Au lieu de ça, je faisais à un pont superficiel formé de quelques mottes de terre, un vrai travail de boucher. Je ne comprenais même pas comment ça tenait en place.
Avec toute la magie que nous avions utilisée, il n'avait réussi qu'à créer quelques plate-formes en terre meuble qui commençaient déjà à s'effriter à cause de la lave. J'avais l'impression d'être passée sous un troupeau de chevaux et j'avais droit à ça ?!
- C'est une blague ?! lâchai-je. C'est tout ce que tu as réussi à créer ?!
Ghur ne répondit pas. Il m'ignora royalement. Toutefois, la raideur dans sa nuque et ses poings serrés tendaient à dire qu'il était plutôt embarrassé par sa médiocrité.
- Traversons avant que son truc ne s'effondre, lança Miach avec un dédain manifeste pour la construction bancale de Ghur.
Naseok eut un rictus moqueur tout en soulevant le Demi-Sang. Addy rejoignit le Unseelie qui n'osa même pas la regarder. Si je n'étais si énervée, j'aurais pu trouver ça drôle ou même mignon. Au lieu de ça, j'avais juste envie de le pousser dans la lave.
Je me relevai, tentant de stabiliser mes jambes tremblantes.
- Vas-y en premier, me dit Naseok. Tu n'as que toi à porter contrairement à nous. Et je doute que tu veuilles que petit prince joue les cobayes.
Je le fusillai du regard.
- Dis plutôt que tu sais que je suis plus agile que toi.
Il roula des yeux sans répondre. Je me forçai à me relever, à faire face à ce que Ghur avait réussi à créer. Ce n'était vraiment pas grand-chose et je doutais de parvenir à traverser sans finir dans la lave. Mais il fallait que j'essaie. Il fallait que je lutte contre mon corps déshydraté et épuisé pour que Ryker et Addy aient une chance de s'en sortir. J'inspirai profondément et tendis le pied vers la première plate-forme. Elle m'apparut plus stable que je ne l'aurais cru. Le seul problème était la lave qui tentait de passer par-dessus. Du moment que je restais bien au milieu, ce n'était pas trop dangereux mais il ne fallait vraiment pas s'approcher des bords.
- Ça va, Sixtine ? cria Addy.
- Oui, oui, ça va, répondis-je.
Je n'étais pas si sûre que ça mais je ne pouvais pas lui dire. Au milieu de la rivière, la chaleur était mille fois plus étouffante et la sueur venait me piquer les yeux. Le peu d'eau que je venais de boire s'était déjà évaporée et je me sentais plus mal que jamais. Mieux valait que je ne m'attarde pas trop sur ce pont de fortune ou je n'irais jamais jusqu'au bout.
Je scannai le flot bouillonnant pour trouver le meilleur moment avant de m'approcher du bord et de sauter jusque sur l'autre plate-forme. Celle-ci vacilla sous moi, me faisant perdre l'équilibre. Je chutai sur le côté, ma main glissa sur le rebord de la plate-forme et frôla la lave. J'eus à peine le temps de la retirer pour éviter de finir avec une main en moins.
Je me redressai au plus vite, me retrouvant à genoux au milieu d'une soucoupe qui se baladait sur les flots. Je dus utiliser de bien plus de forces que je ne l'aurais cru pour réussir à me remettre debout. Je considérai les trois plate-formes qui me restaient à passer avant d'arriver de l'autre côté. Je doutais de réussir à atteindre le bord du canyon sans tomber. Pourtant, ce n'était pas comme si j'avais le choix. Je ne pouvais pas faire demi-tour alors le seul chemin était celui devant moi.
Je sautai jusqu'à la seconde plate-forme, réussissant à rester debout. Je n'eus pas le temps de réfléchir qu'il fallut que je saute à nouveau pour éviter la lave. Il ne m'en restait plus qu'un mais c'était le pire que j'avais à faire. Il y avait au moins quarante mètres à franchir en un seul saut et je n'avais même pas d'espace pour prendre de l'élan.
Aussi ne réfléchis-je pas et me jetai dans le vide. J'entendis quelqu'un crier derrière moi mais je ne pris pas le temps de regarder. Je continuai de courir pour passer le dernier morceau de rivière. J'atterris violemment au sol, mes jambes cédant sous moi. Je m'écrasai sur le côté, mon bras prenant presque tout l'impact. Je serrai les dents pour ne pas crier mais je ne pus pas retenir un gémissement de douleur.
- Sixtine ! Sixtine ! Ça va ?
Je me relevai en agitant la main. Je n'avais plus le souffle pour répondre.
- J'y vais avec Miach ! entendis-je Naseok dire.
Il ne laissa personne réagir avant de s'élancer vers le premier terre-plein. Il ne prit pas le temps de s'arrêter pour évaluer la distance et l'élan, il sauta derechef. Je le vis perdre son équilibre sur la seconde butte de terre. Accroché à Miach comme il l'était, il n'avait pas ses mains pour se stabiliser et le poids supplémentaire n'était pas fait pour l'aider. Ma main vint se plaquer sur ma bouche, retenant un cri d'horreur. Il allait tomber droit dans la lave. Ils allaient tous les deux brûler vifs.
Mais Naseok invoqua sa magie. La lave s'éleva, droite et raide, lui permettant de retrouver son équilibre. Il put poser sa main dessus sans se brûler, sans même paraître souffrir. Miach s'en éloigna au maximum, ne paraissant pas supporter la proximité de la lave.
Et puis, tout naturellement, Naseok reprit son cheminement jusqu'à moi. Il ne chercha même plus à faire le moindre effort. Il utilisa la lave pour forme des ponts entre les plate-formes de terre qui lui permirent d'avancer en toute facilité. Je me frottai les yeux pour m'assurer que je ne rêvais pas. Il arriva à côté de moi et déposa Miach à terre avec douceur et prudence.
- Pourquoi tu n'as pas dit que tu pouvais marcher sur la lave ? l'apostrophai-je, furieuse.
- Parce que je l'ignorais. Mon affinité avec le feu est forte mais je ne pensais pas pouvoir survivre à ça sans m'être transformé. Je n'avais jamais tenté ma chance avant.
- Pourquoi ?
- Parce que j'ai vu mon père mourir par les flammes. Il a voulu tester les limites de son pouvoir pour le Roi Noir et il a fini consumé par le feu. Ma mère m'a dit de ne jamais faire comme lui. De toujours me transformer avant de jouer avec le feu. Mais là... Je n'ai pas eu le choix.
Je hochai la tête sans répondre. Son geste avait tenu du réflexe. Certes. Je n'en étais pas moins agacée.
- Tu ne peux pas aider les autres à traverser, au moins ?
Il secoua la tête.
- J'ai atteint mes limites.
Il me montra ses pieds rougis, une brûlure superficielle blessant sa peau. Il ne pourrait jamais faire trois allers-retours supplémentaires sans finir incapable de marcher.
Ghur plaça Addy sur ses épaules comme il l'aurait fait avec une écharpe pour pouvoir libérer une main, voire deux, au besoin. Il était bien plus lourd et gauche que Naseok mais il parvint à rester debout sur la seconde plate-forme. Son affinité avec la terre devait jouer en sa faveur. Ce qui me fit réaliser que les Unseelies étaient de grands égoïstes...
Ryker fut le dernier à passer. Seul et isolé, alors que la lave reprenait ses droits sur la terre soulevée par Ghur, il allait devoir se dépêcher. Tout comme moi, il allait devoir se débrouiller tout seul pour traverser.
Il enchaîna les deux premiers sauts sans s'arrêter. Son second saut fut si peu stable que je sus directement que son atterrissage allait être compliqué. Je le vis tomber dans la lave, se faire avaler par les remous furieux qui avalait ce qui restait de la seconde plate-forme.
Et je hurlai.
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