Tarenn se mira dans l'eau de sa vasque. Il se trouva plutôt élégant, et acquiesça d'un air entendu. Lorsqu'il sortit de son logement, qu'il avait investi quelques nuits auparavant, il trouva Gadriel en train de l'attendre sagement devant.

- Tu n'as pas fait l'effort de te changer? Lança t il à son frère.

- Mais si... ça ne se voit pas? Répondit Gadriel

Tarenn soupira. Son frère avait surement fait un effort, mais effectivement cela ne se voyait pas. Il portait une chemise noire, un plastron fait de cuir brun clair, son pantalon habituel couleur beige sable, avec par dessus des bottes aux semelles toutes crottées. En somme une simple tenue de chasseur.

- Non pas vraiment... répondit Tarenn, las de son frère négligent.

Une panthère sortit des jambes du chasseur, montrant ses crocs en guise d'avertissement.

- Tu ne vas tout de même pas emmener ta bête? Gronda L'Archidruide.

- Et pourquoi pas?

- Ne soit pas stupide, ils ne vont pas accepter qu'une bête sauvage entre dans le Donjon... libère la dans le parc, tu la retrouveras plus tard.

Gadriel fit une moue de désapprobation, mais libéra tout de même la panthère qu'il avait dressé pour le soulager dans ses missions. Cette dernière s'étira, puis d'un pas lent s'éloigna des deux Elfes et s'allongea sur le flan dans un dernier effort. Son frère le regarda à présent

- Toi par contre tu n'as pas lésiné sur ta tenue... Celle du cercle Cénarien? Rien que cela !

- Il faut être le plus présentable. Je suppose que les humains vont faire de même .

- Archidruide? Nous sommes tous prêts, dit une voix féminine

Celle qui venait de les rejoindre, était la prêtresse et seule femme du groupe. Tarenn vit son frère rougir légèrement à l'apparition de cette dernière. Il fallait dire qu'elle était magnifique dans sa robe blanche. Des reflets bleu pouvaient apparaitre en fonction des mouvements de la prêtresse. Cela lui donnait un air mystique. Elle avait mis sur sa tête une tiare ornée d'un gros saphir en son milieu et de multitude de petites diamants qui descendaient sur les branches. Elle avait relevé ses cheveux, faisant un chignon haut et laissant quelques mèches descendre en cascade sur ses épaules.

- Aladriss vous êtes à couper le souffle, dit Tarenn tout en lui baisant la main

La jeune femme rougit aux compliments de son chef de groupe, et il continua :

- Il est évidant que vous allez faire tourner des têtes à cette soirée... et pas qu'humaines...

Il se retourna et fit un clin d'œil à son frère qui se sentait son embarras monter monté en lui.

- Merci Archidruide...Bien que cela ne fasse pas parti de mes intentions...

Elle se délia de la main de Tarenn et se mit à marcher la première, permettant ainsi à Gadriel d'être de nouveau seul avec son frère.

- Mais qu'est qui t'as pris?

- De quoi? Dit Tarenn en feignant l'innocent

- Tu te moques de moi? Tu m'as mis la honte de ma vie!!

- Allons, ce soir c'est la fête, profitons en! Enfin non profites en pour l'inviter... J'ai bien vu les regards furtifs que tu as sur elle depuis qu'elle nous accompagne. Elle t'attire... et je pense qu'elle n'est pas insensible à tes «charmes».

Gadriel se renfrogna, et partit en trombe rejoindre les autres. Tarenn l'entendit bougonner, cela le fit sourire. Il se mit en route pour le rejoindre, fermant ainsi la procession qu'avait entamé son groupe pour monter vers le Donjon.
Leur passage ne passa pas inaperçu dans les rues de Hurlevent. Les habitants curieux, murmurèrent leurs fascinations à leur égard.

Ils arrivèrent enfin devant la grande porte du Donjon. Après s'être assurés qu'ils étaient bien invités - Un comble pour l'Archidruide- Ils entrèrent en grande pompe. Cependant Tarenn ne les suivit pas, et lança des coup d'œil inquiets vers les rues de la ville.

- Qu'attends tu? lui demanda Gadriel s'arrêtant dans son élan.

- Notre petit guide. Il semblerait qu'il ne soit pas encore arrivé.

- Tarenn... (Gabriel se mit à sa hauteur) A mon tour de te mettre la honte... Je trouve que tu t'intéresses trop à ce prêtre...

- Et?

- Tarenn... c'est un humain!!

- Et ?

- Ha... je laisse tomber.

Gabriel croisa les bras, essayant de faire comprendre à son frère qu'il n'était pas d'accord avec cette idée, mais Tarenn n'en fit pas de cas. Le regard porté vers les rues commerçantes, il attendait avec impatience le jeune Hamza.

- Tiens en parlant du loup, il arrive «ton petit homme» dit Gadriel sur un ton moqueur.

Tarenn aperçut une petite silhouette marchant de bon cœur. Quand celui ci les aperçut à son tour, il se mit à accourir. L'Archidruide se fit la réflexion qu' ils faisaient beaucoup courir leur pauvre petit guide.

Alors que ce dernier était presque à leur hauteur, il se prit les pieds dans le bas de sa robe, et commença à partir en avant. Avant même que Gadriel ne fasse un mouvement, Tarenn, lui, était déjà parti pour le rattraper.

Le prêtre s'écrasa le nez contre le torse de l'Archidruide, et émit un petit bruit étouffé suivi un mot qu'il n'aurai jamais cru entendre de sa bouche.

- Hé bien, tu aimes atterrir dans mes bras... susurra le druide dans l'oreille du prêtre.

Tarenn vit les joues de son guide s'empourprer une nouvelle fois. Cela l'amusait énormément. Hamza le repoussa et se pencha en avant pour s'excuser.

- Veuillez pardonner ma maladresse... Je ne suis pas comme cela d'habitude. Je suis si confus.

- Redresse toi jeune Hamza, je te pardonne, dit Tarenn en apposant ses deux main sur ses épaules.

Gadriel le fusilla du regard.

- Quoi donc mon frère?demanda Tarenn

- Rien... allons y, ils nous attendent à l'intérieur, répondit Gadriel sur un ton frisant la colère.

Le chasseur partit devant eux. Sa marche trahissait qu'il était remonté contre quelqu'un. Tarenn se retourna vers Hamza et lui expliqua :

- Mon frère est quelque peu... rustre

- Je pense surtout qu'il ne m'aime pas, se désola Hamza

- Non, tu n'y ai pour rien (mentit il) Il se comporte comme cela à cause de moi, je l'ai légèrement agacé avant de venir ici. Il m'en veut un peu, mais cela lui passera.

- Agacé? demanda Hamza surpris

Tarenn mit dans la confidence :

- Il s'est pris d'affection pour la prêtresse de notre groupe, je lui ai juste suggérer de l'inviter ce soir.

Pour la première fois, le druide entendit le rire du jeune homme. Celui ci était si frais, si innocent, qu'une succession de frissons parcoururent son corps. C'était un véritable plaisir de l'entendre rire ainsi.

- Ce n'est que cela? Demanda Hamza entre deux gloussements.

- Hélas oui...

- Il est timide ?

- Oui, assez... En faite, pour tout te dire, malgré son age, il n'a pas eu encore de compagne dans sa vie. La prêtresse est plus jeune. Je suis pratiquement sûr qu'elle n'en a pas eu elle non plus.

Le rire du prêtre s'estompa, et un silence s'en suivit. Tarenn voyait bien qu'Hamza était sur le point de lui demander quelque chose, mais qu'il hésitait. Finalement il lui posa la question :

- Et vous? Avez vous une compagne?

Tarenn hésita, mais bizarrement ce soir il était ouvert aux confidences.

-Oui, autrefois...Mais la guerre est passé par là et...

Il s'arrêta de parler. Alors qu'il sentait que l'émotion allait le submerger, une main délicate et bienveillante se posa sur son bras.

- Décidément, je suis vraiment impardonnable. Je vous fais ressasser de mauvais souvenirs, dit Hamza le regard plein de compassion.

Tarenn avait juste qu'une envie : le prendre dans ses bras pour le remercier d'une telle prévenance. Mais il ne pouvait pas se permettre ce genre de geste, qui plus ait devant le Donjon de Hurlevent. Il se reprit, et lui fit un léger sourire pour le rassurer.

- C'était il y a longtemps, depuis de l'eau à couler sous les ponts, et mon cœur s'est apaisé...

Le seul geste qu'il s'autorisa était de poser sa main sur celle du jeune homme et de tapoter dessus pour lui montrer que tout allait bien pour lui. Hamza sembla soulager de le voir le sourire et il retira sa main.

- Allons y, sinon les autres vont se demander ce que nous fabriquons, dit le prêtre.

Il passa devant Tarenn et entra dans le Donjon. l'Archidruide en profita pour le regarder plus attentivement. Il avait fait un effort vestimentaire. Il avait troqué sa robe bleu et sa capeline blanche, pour une robe vert foncé, ornée de différents motifs cousus avec du fil d'or. L'ouvrage était très soigné, et il se demanda si c'était lui l'auteur de cette facture. Il le rattrapa pour lui poser la question :

- Tu portes une robe magnifique, est-ce toi qu'il la conçu?

- Ma robe? Ho non ! Je suis un piètre couturier, c'est une amie qui me l'a confectionné...

- Amie? demanda Tarenn

- Oui, elle est très douée. Moi je le suis plus avec les fleurs, je suis herboriste. Ensemble, nous nous aidons mutuellement, elle me fait des habits, et moi je lui fournis les fleurs nécessaires pour ses teintures.

- Mutuellement... dit Tarenn avec une pointe de jalousie dans sa voix qu'il ne réussit pas à réprimander.

- Il y a un souci? Vous pensez que cela ne conviendra pas pour la réception? demanda Hamza tout en regardant sa robe.

Il n'avait apparemment pas entendu la nuance dans la voix de Tarenn.

- Ho non, aucunement, elle est magnifique, un bel ouvrage et ... elle te va parfaitement bien.

Hamza écarquilla les yeux, et rougit encore une fois.

- Heu, hé bien je lui dirais...

Il était visiblement gêné d'un tel compliment de la part du druide.

Quand ils arrivèrent enfin dans la salle du trône où se déroulait la réception, les Elfes de la nuit étaient déjà pris d'assaut par des humains curieux d'un tel spectacle. La plus part des invités étaient des gens de la cour de Hurlevent, mais il y avait aussi quelques Nains et de Gnomes. Le roi Varian était d'ailleurs en grande conversation avec ce qui devait être les chefs respectifs des délégations des deux autres races. De loin, il vit Tarenn et lui fit signe de les rejoindre.

- Je pense que ton roi veut me parler, dit Tarenn en se penchant vers Hamza.

Le prêtre hocha la tête.

- Très bien, il fallait s'en douter que notre roi voudrait vous parler, et toute façon je dois retrouver quelqu'un à cette réception, Nous nous reverrons plus tard, dit il joyeusement.

Tarenn fronça des sourcils. Une nouvelle pointe de jalousie monta de nouveau en lui. Il grogna, puis se rattrapa rapidement pour ne pas éveiller les soupçons.

- Bien, alors à plus tard... dit il sur un ton un peu trop sec à son gout.

Il tourna les talons et alla rejoindre le roi. Mais il était quelque peu froissé par la réaction qu'il avait eu en vers Hamza.