Chapitre 2 : L'ombre du renard
La douleur lui tordait les os, lui vrillait les muscles et lui broyait l'estomac. Le corps de Louis souffrait. Du premier tendon jusqu'aux derniers ligaments. Il aurait pu parier que sa boîte crânienne exploserait car elle semblait coincée dans un étau. Ses bras étaient couverts de cathéters et le froid se faufilait le long de ses jambes. La souffrance était paradoxalement si torturante qu'il ne la ressentait même plus. Était-il mort ?
Louis. Vous êtes en vie. Je sais que vous êtes réveillé et que vous êtes conscient. N'ayez pas peur d'ouvrir les yeux, l'opération s'est très bien passée.
La voix assurée et rassurante du Docteur Éléonore Argier tira Louis de ses derniers délires. Ses paupières étaient lourdes, mais il réussit à distinguer la femme qui l'entourait après quelques battements de cils.
Même si Louis voyait encore trouble, il devina sans difficulté la pièce dans laquelle il était allongé. La salle de réveil. Il devait être le seul patient, parce qu'il n'entendait que le bruit si agaçant et si languissant des machines.
Le visage encore masqué du Docteur Éléonore Argier se tenait au-dessus de Louis. Tout lui revenait désormais en mémoire : l'opération pour agrandir ses jambes et sauver son genou, la douche au désinfectant qui puait, l'anesthésie. Le réveil était brutal.
Louis peinait à retrouver ses esprits. Il savait qu'il avait été drogué par ces merdes d'analgésiques, d'antalgiques et d'antidouleurs. Il sentait en plus la gerbe monter : être allongé n'était définitivement pas une position faite pour lui... Mais soudainement, son cerveau reprit conscience.
Le premier réflexe instinctif de Louis fut de bouger ses orteils. Sa moëlle épinière était intacte. Les connaissances et les techniques de la médecine étaient prodigieuses.
Comment vous sentez-vous ?, demanda Éléonore en enlevant immédiatement son stéthoscope du cou pour écouter le cœur de Louis. Votre rythme cardiaque est un peu trop élevé.
Qu'est-ce que je peux bien y faire ?, répondit-il en grognant. Il n'arrivait pas à croire que... Pourquoi vous a-t-il fallu encore une fois que vous me rameniez à la vie bordel ? Éléonore contourna le lit, pour s'asseoir sur le côté droit :
Votre cœur n'a jamais cessé de battre, Louis, expliqua-t-elle en le fixant son regard droit dans le sien.
Vous faites chier, ronchonna-t-il en se passant sa main droite sur le visage, couvrant ses yeux. La lumière artificielle des néons accentuait son mal de tête.
N'oubliez pas : 5 jours de convalescence. Je ne vous reverrai que le matin où nous rejoindrons Hyacinthe. Prenez des forces et ne ruminez pas trop, le somma-t-elle en se levant doucement du matelas.
Qui est Marius ?
Éléonore Argier s'attendait à toutes les demandes exceptée celle-ci... C'est pourquoi elle se retourna brusquement vers Louis, et le froncement de ses sourcils trahit son inquiétude.
Pardon ?
Si avec votre sœur, vous m'avez caché que cet homme est l'époux de Hyacinthe..., menaça-t-il en essayant de se redresser sur ses coudes.
Vous avez subi une intervention chirurgicale de plusieurs heures, et ce qui vous intéresse en priorité, c'est... Marius ? Éléonore Argier traversait une véritable confusion.
Vous avez pas répondu à ma question, insista-t-il en sentant la vague de reflux gastrique dans son œsophage.
Vous verrez directement avec Hyacinthe, conclut-elle sèchement en tournant les talons.
Attendez, j'en ai pas fini avec vous ! Louis dut s'interrompre, posa ses doigts devant sa bouche et...
Il recracha une goulée de sang, dans la bassine qu'Éléonore avait eu le temps de saisir sur la table de chevet. Elle mit également sa main sur l'occipital de Louis, et il apprécia ce geste. Réconfortant et consolateur.
Marius est une personne que vous apprécierez, j'en suis certaine. Cependant, avant de focaliser votre attention sur lui et d'imaginer des scénarios irréalistes, profitez de ce temps de repos pour découvrir le programme de Hyacinthe qu'elle a concocté rien que pour vous. Elle s'est donnée du mal, respectez son travail. Son ton était tranchant, et sa réaction distante et impénétrable. Elle vous a laissé une lettre Louis, révéla-t-elle en lui montrant d'un geste de la tête une belle enveloppe sur la table de nuit.
"Louis". Une écriture ronde et chaleureuse, à l'encre noire. Une enveloppe lavande, et un cachet rouge aux armoiries de la famille : un renard. La malice, la capacité d'adaptation et une stratégie : celle d'être agile et réactive, pour s'adapter aux changements. Que cachaient les sœurs Argier ?
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