(4) Où ils prennent rendez-vous.
— Coussin pour le dos ?
— Check !
— Chemises de nuit fois deux ?
— Check !
— Peignoir et claquettes ?
— Double check !
— Sous-vêtements ?
— Attends... oui, et oui... Check !
— Coussinets d'allaitement ? Ah bon ? s'étonne Tom en levant les yeux de la liste.
— Oui, au cas où. C'est Caro qui me les a donnés, il lui en restait une boîte. Et puis, ça peut servir juste pour la montée de lait, j'explique, un peu gênée.
— Ok. Tenue d'intérieur ?
— Check !
— Tenue de sortie ?
— Check !
C'est pire que de partir en vacances. Il faut penser à tout. Et en double. Mes affaires, celles de la petite. Et faire deux sacs différents, car nous en aurons un pour le séjour à la maternité, mais aussi un petit pour la salle de naissance avec la première tenue de notre fourmi, et aussi de quoi patienter pour Tom et moi : livres et magazines, lecteur mp3, eau, en-cas, brumisateur pour les coups de chaud. Les deux petits sacs sont prêts, rangés dans le placard de l'entrée. Scotché au mur à côté, la liste de ce que nous devrons ajouter pour le grand départ : brosse à dents, chargeur de téléphone, livre de chevet, appareil photo.
C'est Tom qui s'est occupé de laver, faire sécher et même repasser les futures affaires de notre fille. Pour ce faire, il est obligé de s'assoir sur un tabouret de bar, puisqu'il ne peut pas tenir debout sans sa canne, ni repasser de la main gauche. C'est loin d'être pratique, mais c'était important.
Il a mis les draps dans son berceau, installé le tour de lit sur les barreaux, posé la gigoteuse au milieu et les doudous tout autour. Dans les tiroirs de la commode, il a rangé les bodies, les petits gilets, les chaussettes et les grenouillères en velours tout doux.
Nous avons eu un mal fou à choisir les pyjamas à prendre à la maternité, tous nous paraissaient plus mignons les uns que les autres. Il a d'ailleurs tenu à ajouter une petite robe adorable offerte par Emma, en dépit des recommandations de Mme Humbert qui nous avait conseillé de ne prévoir qu'un lot conséquent de bodies et grenouillères, bien plus confortables et pratiques que les mini-vêtements.
Ce soir, c'est dimanche soir, et la Saint-Valentin ; double bonne raison de se faire un dîner aux chandelles. J'ai insisté pour cuisiner, parce que j'ai le pressentiment que ce sera le dernier avant la naissance. Depuis ma promenade et mon après-midi à la librairie, il y a quatre jours, les contractions se sont intensifiées, et plusieurs fois, nous étions prêts à partir pour la maternité, mais elles se sont toujours arrêtées avec un antispasmodique ou un bain chaud. Pourtant, je sens que c'est pour bientôt.
Pour faire plaisir à mon amour, j'ai pioché dans le livre que je lui ai offert à Noël, dans les recettes de Cuncettina, et ai choisi de préparer des involtini, ces roulés de veau au jambon cru, sauge et fromage, que j'accompagne de champignons sautés et d'un écrasé de pommes de terre à l'huile d'olive. Mon mari est enchanté, comme à chaque fois que je fais l'effort de cuisiner. C'est plutôt bon, et Tom ne tarit pas de compliments, ne relevant que le positif, alors que la viande est un peu trop cuite, et les pommes de terre pas assez. Mais c'est lui. Il ne voit que le beau et le bon.
Après le dîner, nous rejoignons le canapé, et Tom me fait la lecture. Je passe déjà mes journées à lire, me reposer, ou regarder la télé, alors le soir, j'ai mon compte et je trouve parfois les soirées un peu longues. Ma mère m'a suggéré de me trouver un hobby calme, le coloriage ou le tricot par exemple, mais ça ne me dit rien du tout (du tout), d'autant que je sais que cet ennui prendra fin dans quelques semaines, voire quelques jours. Je ne me voyais pas du tout non plus investir dans une console de jeu, ça ne m'a jamais attirée, et Tom non plus d'ailleurs. Alors, il me fait la lecture. Je m'allonge, ferme les yeux, et me laisse porter par sa voix grave et basse. Après mûre réflexion, il a sélectionné, « en attendant Bojangle », un roman que j'avais lu et beaucoup aimé à sa sortie. C'est avec grand plaisir que je le redécouvre autrement, et avec Tom cette fois.
Je rouvre les yeux et observe mon mari, plongé dans l'ouvrage. Ses lunettes sur son nez droit, ses joues rondes et sa fossette, son visage que j'aime tant. Je me redresse et m'approche de lui. Il relève les yeux, surpris, et s'interrompt, alors, sans un mot, je lui prends le livre des mains, le pose par terre, procède de même avec ses lunettes, avant de l'embrasser. Si je dois accoucher bientôt, autant en profiter avant, car selon mes amies, entre la fatigue, le post-partum et le retour de couche, c'est pas demain la veille que je laisserai à nouveau Tom m'approcher après la naissance. Et cela fait un mois et demi qu'il ne s'est rien passé entre nous. Qu'on regarde la télé ou qu'on bouquine côté à côte, avant de s'endormir après un baiser ou un câlin platonique comme seul rapprochement. Cela ne me suffit clairement plus. Il me rend mon baiser, avec plaisir, me semble-t-il, mais quand mes caresses se précisent, il me repousse doucement.
— Babe, souffle-t-il, tu sais ce qu'a dit le médecin...
— On s'en fiche, je suis à plus de huit mois.
— C'est encore un peu tôt... murmure-t-il alors que je mordille le lobe de son oreille, son point faible. Enfin d'habitude.
— Je trouve, au contraire, que c'est bien tard. Ça fait six semaines qu'on n'a rien fait, et ensuite, ça ne va pas être pour tout de suite non plus...
— Lou, sois raisonnable.
Pour le coup, je suis calmée. S'il y a bien une chose que je déteste entendre, c'est « sois raisonnable ». C'est déjà assez vexant qu'il me repousse, malgré toute sa délicatesse, mais là, c'est la goutte d'eau. Je me recule et le considère, l'air mauvais.
— C'est pas parce qu'on fait l'amour que je vais accoucher dans la soirée, je te signale. Mais c'est bon, rassure-toi, j'ai plus envie. Je vais me coucher.
Je me lève du canapé aussi vite que me le permettent mon ventre et ses huit kilos, mais Tom m'attrape par la main et m'arrête. Il se lève à son tour et me fait face, ses yeux dans les miens.
— Ne sois pas fâchée...
— Quand tu dis ça, j'ai l'impression d'être déjà une mauvaise mère, et que tu es le seul qui penses à notre bébé.
Il reste silencieux un instant, se mord les lèvres pour trouver comment formuler sa pensée. Insupportable. Je m'apprête à le planter là, quand il reprend, tout doucement.
— Ce n'est pas du tout ce que je pense, et tu le sais bien. On ne va pas revenir sur le sujet. Mais c'est tellement plus facile pour moi, que pour toi, enfermée dans ce corps, à devoir faire attention à tout... j'essaie juste de prendre le relais...
— C'est-à-dire ?
— Tu es privée de tant de choses, la bouffe, le sport...
— Le sexe...
— Oui, aussi. Tu as des tas de soucis liés à la grossesse, tu peux à peine mettre tes chaussures...
— Tom, tu es sur la mauvaise voie pour me calmer, là.
— Mais si, attends. Ce que je veux dire c'est que... euh... Rien que de supporter tout ça, tu es déjà une maman formidable...
— Je n'ai surtout pas le choix.
— Si, si, tu as le choix ; il y a plein de futures mères qui fument, boivent un verre de temps en temps, n'arrêtent jamais de manger du parmesan ou de la mousse au chocolat. Toi, tu t'abstiens, c'est toi qui dis non à tout, tout le temps, pour notre fille. Alors là, pour une fois, c'est moi.
Cet argument est absurde. Complètement tiré par les cheveux. Et pourtant, cela me fait fondre, parce qu'il essaie, maladroitement certes, mais amoureusement, comme toujours, de me rassurer. Ma colère s'effondre aussi vite que le soufflé au fromage que j'avais tenté de préparer il y a quelques semaines.
— Je crois qu'on n'est pas tout à fait dans le vrai, mais peu importe. Allez, ce n'est pas grave. On fera l'amour dans trois mois, c'est pas si important.
— Dans cinq jours.
— Quoi ?
— Vendredi, tu seras à trente-cinq semaines, la fourmi ne sera plus considérée comme prématurée. Franchement, ça se tente, non ? argumente-t-il avec son petit sourire qui me fait complètement craquer.
— On prend rendez-vous pour coucher, là ? je demande, sans pouvoir m'empêcher de sourire à mon tour.
— Absolument. Ça nous rappellera notre première fois, quand tu m'as invité à dormir chez toi, et qu'on savait tous les deux ce qui allait se passer.
Je n'aurais pas cru, mais j'adore l'idée. Je me mets sur demi-pointe, et chuchote à son oreille :
— Parfait. Compte sur moi pour faire monter la tension d'ici là...
💫💫💫
Nous prévoyons notre petite soirée du vendredi avec l'excitation d'un premier rendez-vous : cinéma d'abord, une séance assez tôt, puis dîner en amoureux, Tom m'a demandé de lui cuisiner le même repas que lors de notre première nuit ensemble. Voilà des années que je n'ai pas mangé de poulet à l'ananas, d'ailleurs le mélange ne me dit plus rien, mais pour lui, je veux bien faire l'effort. Et puis, si on suit le même schéma qu'il y a treize ans, on n'avait pas mangé grand-chose. Dans notre quotidien morne et plat, c'est un bel objectif, que nous attendons avec impatience.
Le jour venu, pourtant, je fais moins la maligne.
Tout est prêt pour notre « rendez-vous ». La femme de ménage est passée dans la matinée et l'appartement est impeccable. J'ai cuisiné le fameux dîner réclamé par Tom tandis qu'il se chargeait du dessert. Il ne me reste plus qu'à me préparer. Sauf qu'assise sur le bord de la baignoire, presque essoufflée d'avoir seulement enduit mon corps de crème hydratante, je me sens découragée. J'ai de plus en plus de mal à me baisser, je dois choisir des chaussures pratiques à enfiler, car je ne peux pas me contorsionner, et je me félicite tous les jours d'avoir opté pour l'épilation au laser il y a quelques années. Mon meilleur investissement, selon moi, surtout en ce moment où même mettre des chaussettes relève de l'exploit. Je me lève, non sans difficulté et efface la buée du miroir pour m'observer. Je ne ressemble à rien. Je pèse exactement le poids que je faisais quand Tom m'a connue, sauf que je n'ai plus mes joues rondes, mes fesses rebondies, seul mon ventre pèse. Par rapport au reste de mon corps, il me paraît complètement disproportionné. Et pour finir, je porte ma plus belle lingerie, c'est à dire une immonde culotte de grand-mère, et un soutien-gorge noir qui moule lamentablement mes deux mamelles. Monter la tension, laissez-moi rire. Je doute de pouvoir faire un quelconque effet à mon mari. Peut-être en éteignant la lumière ?
Il doit lire dans mes pensées, car il frappe à la porte de la salle de bains, et entre doucement.
— Tout va bien, Babe ?
Je soupire et me rassois, alors il prend place à côté de moi.
— Qu'est-ce qui ne va pas ? insiste-t-il.
— Je suis horrible. Je suis grosse, j'ai des vergetures sur les seins malgré cette crème à mille dollars — une belle arnaque, si tu veux mon avis — et de la cellulite sur les cuisses alors que je me bats contre depuis dix ans. Et quand je me regarde, là... je me dis que tu dois me trouver repoussante.
Je ne sais pas pourquoi, peut-être parce que je connais Tom, je m'attends à un éclat de rire, à son bras autour de mes épaules et ses lèvres sur ma tempe, sa voix qui me dit : « Bécasse, va ». Mais rien ne vient, et j'ai envie de pleurer.
Enfin, il prend la parole, beaucoup trop tard selon moi, et d'une voix hésitante.
— Pas du tout... tu es magnifique.
— Quel enthousiasme, raillé-je, au bord des larmes.
— Lou, murmure-t-il. Tu n'y es pas du tout. Je ne sais pas comment te dire ça tout en restant délicat... Hum... En effet, tu es très enceinte... mais pour moi, ça ne change rien.
— Quoi ? Ça veut dire quoi, ça ?
— Ça veut dire que j'en ai rien à faire de ta prétendue cellulite, ou des vergeture que toi seule vois. Moi, ce que je perçois, c'est ta voix, ton odeur, le grain de ta peau, ton regard gris, et tout ce qui me rend fou depuis la première fois que je t'ai aperçue dans cet amphi. Je te l'ai déjà dit.
— Mais c'était avant que je ne ressemble à un cachalot... Ce serait normal, tu sais. L'un de nos amis, dont je tairai le nom, a refusé de toucher sa compagne tout au long de sa grossesse et...
— Je sais qui c'est, se marre Tom. C'est Clément, et il me l'a raconté. Il est fou, il ne sait pas ce qu'il rate. Je ne suis pas Clément, Lou, et si tu ne me crois pas, je vais devoir être très trivial et poser ta main sur ma braguette pour que tu comprennes que même dans ces horreurs de sous-vêtements, tu me fais toujours le même effet.
— Ah non, je glousse, enfin convaincue.
De ce point de vue, Tom est plutôt réservé, presque pudique, très british. Il ne fait pour ainsi dire jamais preuve d'humour graveleux, même quand Clément et Thibault s'en donnent à cœur joie. Il n'est pas bavard au lit, reste discret sur ses besoins et ses envies, et même les fois où je l'ai poussé dans ses retranchements pour connaître ses fantasmes, il y a quelques années, il a usé d'un langage délicat plein de métaphores pour se faire comprendre. Je me dis que s'il en est à utiliser ce type d'arguments qui lui ressemblent si peu, je veux bien lui faire confiance.
— Alors, je sors et je te laisse finir de te préparer, parce que sinon ce sera beaucoup plus rapide et moins romantique que prévu.
Il m'embrasse, avec une tendresse pas vraiment en adéquation avec ses déclarations, et quitte la pièce, non sans un dernier sourire craquant. Une merveille. Cet homme est une merveille.
J'enfile la plus belle de mes robes de grossesse, me maquille avec soin, et brosse mes cheveux qui n'ont jamais été si beaux que ces derniers mois, il faut bien qu'il y ait des avantages à être enceinte. Je n'irais pas jusqu'à dire que je me trouve jolie, mais au moins je suis présentable pour sortir.
— À quelle heure est la séance ? demandé-je en montant dans sa voiture.
— À dix-neuf heures quarante-cinq, mais on a quelque chose à faire avant, on doit passer à la librairie.
— Ah oui ? m'étonné-je, mais il ne me répond pas, se contentant d'un sourire mystérieux.
J'essaie bien de trouver de quoi il s'agit, mais il refuse de me lâcher le moindre petit indice. Une fois garés, nous marchons jusqu'à notre boutique. Elle est fermée, et il n'y a plus personne, Lola et Yanis ont dû partir il y a quelques minutes. Le rideau de fer n'est pas baissé. De toute évidence, ils étaient au courant que l'on passerait après leur départ. Devant la vitrine, Tom sort de la poche de sa veste un foulard, destiné à me bander les yeux.
— Euh, t'es sûr, là ?
— Oui, pourquoi ? C'est une surprise, précise-t-il.
— C'est pas un de ces trucs fétichistes pour notre soirée en amoureux, hein ? Parce que j'ai rien contre, mais je ne crois pas que ce soit le bon moment.
— T'es bête, se moque-t-il. Non, c'est pas un machin fétichiste, weirdo.
— Alors, d'accord, je fais, rassurée, et je le laisse me nouer le foulard sur les yeux.
Une fois mes yeux bandés, je l'entends déverrouiller la porte, il allume les lumières, puis vient prendre ma main pour me guider à l'intérieur. Je me demande bien ce qu'il me réserve... une soirée romantique ici ? une baby shower à l'américaine avec tous nos amis ?
Je tends l'oreille, mais je n'entends rien. Nous faisons quelques pas, une vingtaine peut-être, vers le fond, à gauche, puis il s'arrête.
— Garde les yeux fermés, murmure-t-il à mon oreille en faisant glisser le bandeau. Attends, ne bouge pas... C'est bon, tu peux les ouvrir.
J'obéis, et ce que je vois me coupe le souffle. Immédiatement, les larmes me montent aux yeux. Je fais tout ce que je peux pour les retenir, mais peine perdue, elles dévalent mes joues et je me réfugie dans les bras de Tom pour sangloter. Je repense à notre dispute d'il y a trois mois, notre plus grosse dispute depuis qu'on s'est remis ensemble. Et ça, c'est sans doute la plus belle preuve de confiance qu'il pouvait me donner.
La librairie a été réagencée pour libérer un petit coin, à gauche de la caisse, derrière le salon de thé. Et dans ce petit coin a été installé un grand parc en bois clair, garni d'un tapis d'éveil et d'une multitude de petits jouets et de doudous. À côté, un transat en hauteur, tourné vers le comptoir, n'attend que notre fille.
Ses bras refermés sur moi, ses lèvres sur mes cheveux, il me berce doucement, attendant que je me calme.
— Fucking hormones, hein, sourit-il, alors je ris et c'est lui qui sèche mes larmes avant de m'embrasser.
— Oui, mais pas que... mon amour... je ne sais pas quoi te dire... c'est... c'est...
Ma voix s'étrangle à nouveau et j'articule avec peine un simple « merci ».
— J'y ai beaucoup réfléchi, depuis notre dernière... hum... conversation. Je m'en suis tellement voulu, Babe, tellement voulu. Ma réaction ne me ressemble pas, ce n'est pas ce que je pense... je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Je n'ai en aucun cas le droit d'interférer dans ta vie professionnelle, et ce n'est pas ce que je veux. Je sais que la librairie fait partie de ta vie, autant que notre fille. Que l'une ne s'oppose pas à l'autre, mais qu'elles peuvent être complémentaires. Et si tu veux venir travailler ici, une heure ou huit, la semaine suivant la naissance ou trois mois après, tu pourras la prendre avec toi. Si tu en as envie, hein, parce que je compte prendre mon rôle de père au foyer très au sérieux. Mais si tu veux, tu pourras... voilà ce que je voulais te dire.
— Je t'aime, Tom.
— Moi aussi, je t'aime. Et le plus important pour moi, c'est que tu sois heureuse. Si ton bonheur, c'est d'être ici, avec la petite, plutôt qu'à la maison, eh bien c'est ce qu'on fera. Il y a aussi une table à langer et un chauffe biberon dans l'arrière-boutique, on achètera ce qu'il faut pour que tout soit... Lou, ça va ?
— Je ne sais pas... c'est bizarre, je crois... je crois qu'il faut que j'aille aux toilettes.
— D'accord, fait-il, décontenancé.
Je me sauve le plus vite possible jusqu'aux WC installés au fond de la cellule, et assise, sur les toilettes, je dois bien me rendre à l'évidence : je fuis.
Je reviens vers Tom, planté au milieu de la grande pièce, qui m'interroge du regard.
— J'ai bien peur qu'on ne doive rentrer à la maison, j'ai besoin de me changer...
— Ah. Ne t'en fais pas, me rassure mon amoureux, qui a lu quantité de bouquins et magazines sur la grossesse. Ce n'est pas grave, ça arrive très souvent en fin de grossesse, avec le poids du bébé sur la vessie et le périnée.
— Quoi ? Mais non ! je m'écrie, indignée.
— Il n'y a pas de honte, Babe. Et si on fait vite, on ne devrait louper que les bandes annonces.
— Tom. Je te remercie de ta compréhension, vraiment. Mais ce ne sont pas des fuites urinaires. Et on ne va pas pouvoir aller au cinéma.
Il me dévisage un moment, et j'ai presque l'impression de voir le cheminement de mes paroles jusqu'à son cerveau. Puis il comprend, enfin, et écarquille les yeux.
— Mais non !
— Eh si, je crois bien que la poche des eaux est fissurée. Il faut qu'on passe chercher les affaires, et qu'on aille à l'hôpital.
— Oui... oui ! Vite !
Tom prend ma main, et boite du plus vite qu'il peut jusqu'à la porte vitrée, s'arrête un moment, et se tourne vers moi :
— Du coup, on ne va pas faire l'amour non plus ?
Je secoue la tête.
— Je ne crois pas, non.
— Holly shit, à trois heures près...
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