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Chapitre 51 - Mémoires (partie II)


— Voilà le plan de Rama. Te convient-il ?

— Oui.

— Bien.

Il avançait sur la passerelle sans se préoccuper de moi.

— Je ne pensais pas trouver un soutien aussi fiable de ton côté, Walkaerys, résonna sa voix suave. Tu m'en vois ravi. Nul doute que ton père approuverait ce choix, lui aussi.

— Ne parle pas de lui.

Les pas s'arrêtèrent. La tête se tourna, courba les mèches blanches qui dégagèrent un œil noir percé de bleu.

— Je sais que c'est sous la lame d'un de tes hommes qu'il est tombé, murmurai-je.

Statique. Amusé. Meyram me toisa un instant avec cet air dont il avait le secret, puis il continua sa route.

Les échos se mélangeaient sous ce dôme. Dans les bruits de nos pas, les croassements déformés se mêlaient aux cris de la ville. Mal assurée, je jetai un nouvel œil sur les environs. Les ombres me jouaient des tours derrière les colonnes. Mais des doubles portes, au losange d'or, il n'y avait toujours personne.

En revanche, sur les marches du trône de pierre, on avait laissé trainer une sorte de long et fin tronc noir. A peine Meyram posa-t-il une chausse sur les escaliers, ses branches se mirent à bouger. 

Je dégainai le couteau de ma cuisse.

— Qu'est-ce que c'est ?

Le Roi d'Utopie riait, maintenant. Grave, calme, comme s'il se moquait doucement de mes enfantillages. Le tronc se divisait en jambes, en un buste. J'eus du mal à y croire, mais c'était un corps qui se relevait des marches.

Tranquilles, les longs doigts fissurés de Meyram se posèrent sur une tête masquée.

— Je te présente Narayan.

Un masque noir cachait le visage du tronc. Des guenilles sombres enrubannaient sa peau sous l'armure, se défaisaient par endroit en loques effilées. Assis en silence sur le marbre, il semblait regarder le Roi, qui glissait maintenant sa main sur son crâne.

— C'est un gentil garçon.

— Et où est Rama ? lançai-je.

— Allons, Walkaerys...

Il se moquait de moi, j'en étais sûre à présent. J'allais m'offusquer, mais ma conviction s'effondra au moment où son regard glissa vers les escaliers. A côté de Narayan, à cheval sur les marches, il y avait une longue lame miroitante.

— Tu ne veux pas savoir la réponse, termina Meyram avec douceur.

Il cessa les caresses sur la tête noire. Sans un mot, les yeux de verre du grand tronc le suivirent sur les escaliers.

Serein, ce Roi l'était toujours. Ni plus ni moins qu'auparavant, la marche inchangée, aussi placide que les immenses statues qui nous observaient.

Mes mains vibrantes se serrèrent sur le couteau.

A quoi venait-il de penser ?

Où était ce Rama ?


Où était-elle ? Que faisait-elle ?

Angelina se posait ces questions, les yeux figés sur la plume noire, levée au bout de sa main.

Elle avait du retard. Alors, elle avait sorti cette plume, comme si elle lui fournirait une explication. Elle rêvait, son esprit parcourait Vendomeland, divaguait dans les cieux, jusqu'au seul endroit où une telle plume aurait pu se trouver. Quand elle y pensait, la tige se mettait à trembler.

Elle finit par poser la plume sur les draps. La recouvrit d'un coussin.

Elle se frottait les mains.

Le vent de la nuit, silencieux, décollait les rideaux dans une danse mystique. La lumière de la lune luisait sur le blanc immaculé de la chambre. Le château et la Prairie dormaient. Il n'y avait aucun bruit.

Mais une aura se dégagea hors de la torpeur. Oubliant la plume, elle tira ses couvertures, se laissa glisser sur le sol, avança d'un pas pressé vers la fenêtre. Elle fixait le rebord, à travers les rideaux. Aucune ombre sur le marbre, aucune main en train de se hisser. Alors, elle écarta les voiles, et...


— Bonsoir, Altesse.

Angelina sursauta quand ma tête apparut à l'envers dans l'encadrement de la fenêtre. Je la vis reculer, maladroite, coller quelques doigts sur sa bouche.

— Comment... ?

A la suite de mes cheveux, je laissai basculer les ailes vers le sol, complices de cette entrée innovante.

— Je voulais vous surprendre. C'est réussi, souris-je.

— Mais jouer les acrobates ne doit pas être très agréable, répliqua Angelina.

— C'est vrai.

Ma tête se pencha en avant.

— Peut-être que vous pourriez m'aider à trouver la position plus confortable.

Par les grades. Elle souriait. Montée sur la pointe des pieds, elle avança une main, caressa ma joue froide du bout des ongles. Mes mains serrées sur la statue au-dessus de sa fenêtre se comprimèrent davantage, je sentis mon cœur se réchauffer. Mon cou chercha tant à s'étendre qu'il en aurait quitté mes épaules.

Mais encore si loin de moi, Angelina se figea.

— Cessez de jouer, Lyruan, chuchota-t-elle. Descendez donc, je commence à trembler.

Je me sentis faire la grimace. Mais j'obtempérai, relevai le buste en m'appuyant sur la statue, redescendit aussitôt, les jambes devant. Quand mes genouillères se posèrent sur le rebord de marbre, je n'attendis pas un instant de plus. Mes bras se tendirent vers elle, elle approcha en souriant, jusqu'à se blottir contre moi.

Sentir son odeur. Sentir son cœur, son souffle contre mon épaule. Toutes mes préoccupations me quittaient pour s'envoler avec la brise. Elle serra mon plastron de ses bras osseux, je glissai une main entre ses cheveux.

— On sort ? murmurai-je.

Son visage, enfoui quelque part dans mon cou, ne laissa pas entendre de réponse.

— Il fait bon, il n'y a personne, nous pourrions sortir.

— La Garde est là...

— Votre pouvoir nous aidera.

Je portai son corps chétif contre moi, pour nous asseoir sur le rebord de la fenêtre. A demi-mot, Angelina protesta :

— Lyruan, non, je ne me sens pas bien. Rentrons.

— Arrêtez le temps, répondis-je sans vraiment avoir l'air de l'écouter.

— S'il-vous-plaît...

Elle tremblait. Son regard allait et venait entre mon visage et le sol de sa chambre, qui s'éloignait. J'avais pris mon envol. Le vent balayait son visage, jetait ses mèches sur ses épaules dans une danse chaotique. Elle fixa mes plumes, le vide, les étages qui se succédaient, puis sa main hésitante chercha ma peau, se colla sous la chemise. Une lumière verte entoura ses doigts.

Le temps se suspendit. La brise nocturne s'interrompit, même l'odeur de l'herbe mouillée sembla se figer. L'air prit cette teinte légère et habituelle, tandis que nous montions vers le ciel.

— Où allons-nous ? fit la voix tremblante de ma passagère.

— Voir les étoiles, répondis-je avec un sourire.

— Je connais les étoiles...

— Je suis sûre que non.

Les fenêtres sombres défilaient. Les armures immobiles sur les toits rapetissaient. Je montai au-dessus des pointes, au-dessus des flèches, jusqu'à surplomber la plus haute tour du château. Là, je posai pied sur le toit.

Avec précaution, Angelina s'avança sur la pente. Elle tremblait tellement, la voir glisser ne m'aurait pas surprise. J'attendis qu'elle s'arrime à la pointe de la tour, puis m'accrochai, une main sur la sienne.

— Regardez, soufflai-je.

Nous étions au sommet du royaume. Au loin, sur la ligne d'horizon, les nuages de Terremeda poudraient de blanc un gouffre noir. La Prairie, d'un vert-gris sous la lune, offrait tous ses bâtiments à nos pieds. Et au-dessus de nous, la voûte céleste. Immense, rare trésor, brillant de ses milliards de joyaux.

Le regard d'Angelina s'était envolé. Les étoiles vertes rejoignaient leurs sœurs dans les confins du ciel. Les flammes voltigeaient, s'envolaient au fond de ses yeux, qui jamais n'avait été autant parcourus d'étincelles. La lumière renaissait dans la nuit. Je voyais son âme s'illuminer.

Comment rester impassible ? J'aurais encore pu avoir mille autre choses dans la tête, l'armée, mon frère, la Garde Royale figée sur les toits. Mais cette lueur dans ses yeux plongeait le reste dans l'obscurité. Arrimée à elle comme à la pointe de la tour, la tête dans le ciel et les pieds sur les nuages, je glissai une main au creux de sa taille.

Elle me regarda. Je ne réfléchis plus. La nuit et ses étoiles disparurent. La douceur sembla s'élever de l'air lui-même quand les lèvres d'Angelina joignirent les miennes.

En haut de cette tour, loin au-dessus de ce monde d'obligations, de tensions, de mensonges, cachées dans une dimension dont nous étions les deux déesses, le temps sembla s'arrêter une seconde fois. Le froid de la nuit devenait tendre chaleur. Ses mains se fondirent dans mon uniforme, les miennes dans sa robe. Un soupçon de vent revint, il fit voler nos cheveux, mêlés entre eux comme nos âmes l'étaient.

Nos fronts se touchèrent.

— Vous êtes tellement plus qu'une déesse à mes yeux, murmurai-je.

Un doigt frêle se posa sur ma bouche.

— Ne parlez pas de déesse ici.

Le vent ne soufflait plus. Mais Son Altesse se remettait à trembler. J'avais assez été égoïste pour la soirée, sans attendre, je hissai ses jambes sur un bras, tint son buste de l'autre. Mes ailes s'étendirent, d'un bond en arrière, je nous fis tomber le long de la tour.

L'air verdissant se dissipa au grès des battements des plumes. Le vent souleva nos cheveux, puis les voiles des fenêtres, les rideaux des baldaquins. Ses jambes fragiles glissèrent entre les draps, son buste s'entendit sur un parterre de coussins.

Je disposais les rideaux autour de la couche, quand sa voix s'éleva dans l'ombre.

— Les rites du sanctuaire commencent demain. Nous ne pourrons pas nous voir avant quelques jours.

Sans lever les yeux, je me contentai de marmonner, en m'attelant à libérer les voiles d'un cordage. Mon silence sembla la perturber, elle glissa d'une petite voix :

— La nouvelle ne vous déplaît pas trop ?

— Ça ira, Altesse. J'ai à faire. Si vous vous absentez, j'en profiterai.

Je lui souriais, mais menton levé, je remarquai qu'elle, elle ne souriait pas. Mes traits s'affaissèrent aussitôt. Les doigts empêtrés dans les voiles, je finis d'étendre les rideaux, en cherchant quelque chose à répondre. 

Quand je retournai vers la fenêtre, seul le vent avait rompu le silence.

— Bonne nuit, soufflai-je finalement sur l'embrasure.

— Lyruan ?

A genoux sur le rebord, je m'apprêtais à sauter. Bien sûr, je me retournai. 

Entre deux voiles des baldaquins, le visage neutre d'Angelina s'était figé dans ma direction. Ses mains jointes tenaient une plume noire.

Mes yeux s'agrandirent. 

Elle me fixait, elle ne disait rien. Je sentis ce qu'elle savait. Ce qu'elle taisait. Elle me voyait retourner sur cette île, pendant qu'elle serait aux mains des Serviteurs.

Cette île.

— Je...

Comment lui expliquer ? Comment lui avouer ? Je restais sur mon rebord, les ongles plantés dans le marbre, sans parvenir à rassembler mes pensées.

— ... Je te promets de revenir.

Mon cœur l'avait prononcé seul. C'était faible, sans valeur si la confiance n'était plus, mais je me sentis incapable d'ajouter autre chose.

Une dernière fois, je la regardai. Une dernière fois, je m'arrachai à ses yeux, avec l'impression d'y laisser mon âme. Une dernière fois, je sautai dans l'air de la nuit, m'éloignai de sa fenêtre, un mètre infâme après l'autre.


A peine la fenêtre d'Angelina quittée, je me retrouvais aux abords d'une autre.

— Si, il faut que tu partes.

Krishna levait un sourcil intransigeant.

— Dépêche-toi, s'impatienta-t-il.

— Tu ne me donneras donc pas d'explications ?

— Nos îles sont proches. Qui sait ce que Sa Majesté décidera, il faut que tu partes.

— Mais tu disais que ce serait étonnant que...

— Tu te mets en danger.

Son brutal changement de ton m'interrompit. Je pris une seconde pour observer les bras croisés de l'intendant, et ce doigt, qui pianotait sur la cape noire pliée contre son coude. Ses yeux dorés flirtaient avec le ciel brumeux derrière moi.

— ... Très bien, marmonnai-je. Je pars.

— Parfait, sourit-il.

Sans le regarder davantage, je me tournai vers la ville noire.

— A la prochaine fois, susurra Krishna, tandis que des vagues de plumes apparaissaient à mes côtés.

Mes sandales montèrent sur la rambarde du balcon sans corbeaux. Les oiseaux noirs volaient ailleurs, renversés par le vent, soulevés dans les nuages. Des silhouettes braillaient avec eux, ailes rentrées, tirées dans les airs par des voiles rudimentaires. L'île était sur le qui-vive. Sans un au revoir, d'une pression sur la pierre, je m'éjectai dans le vide.

Les sifflements du vent ne cachèrent pas le bruit de la porte, qui claqua à peine mes pieds au-dessus des tours basses. Cheveux dans les yeux, je tournai la tête. Balcon désert. Pas de visage aux fenêtres.

Les plumes se plièrent. Les ailes se courbèrent. L'élan pour Vendomeland se coupa aussi vite qu'il était né, je fis demi-tour dans les airs. 

Je filai dans ce vent bas, qui m'amenait vers l'étage sous le balcon. Un mur y était fissuré entre deux colonnes. Ailes rentrées, mains arrimées sur la pierre, je glissai dans un couloir vide, qui sentait la poussière et les bougies éteintes. L'ombre des murs m'accueillit avec sa fraîcheur habituelle, hors de la chaleur qui montait de l'île.

Je dus attendre guère plus d'une minute. A peine mon cœur commençait-il à ralentir, qu'une ombre ailée s'approcha dans les nuages.

Mes lèvres grimacèrent.

« Je te connais trop bien, intendant... »


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