Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 6 - La Tombée


Un vent glacial se levait de tous les côtés. Une froide paralysie saisissait jusqu'au muscle le plus enfoui. Le souffle manquait, repoussé par les airs transformés en murs de glace, qui frappaient le dos, les jambes, le ventre, la tête. Les pensées n'existaient plus, prises dans l'étau qui enserrait le crâne, où s'entassaient des sifflements suraigus, des migraines mordantes. L'inconscience flottait, délivrance inaccessible, dans une chute infinie.

Alors que je m'en pensais incapable, j'ouvris les yeux.

Galliem, la chambre, la Boussole, je papillonnais dans l'air gelé en quête d'un signe familier, mais tout s'était évaporé. En face, des lignes épaisses et floues barraient un paysage vaporeux et froid, assailli par les larmes qui décollaient de ma peau vers les nuages.

Les nuages ?

Mon cou grinça quand je glissai le visage vers l'arrière. Une corde rêche m'érafla la joue, ma peau eut l'air de s'ouvrir comme de la glace grattée à l'aiguille. Je passai sur les ombres blanches qui couraient derrière mon dos, cherchai au-delà.

Sous mon corps à l'abandon au milieu du ciel, il y avait un parterre de champs, un toit solitaire, un potager à frèzes.

Le sol se rapprochait. Mes doigts frigorifiés jusqu'à l'os se comprimèrent sur les cordes qui m'entraînaient. Un cri perça le vent, le mien. Je hurlais à m'en décrocher la mâchoire, un son puissant, improbable, et pourtant, je ne le connaissais que trop bien. Les épis de blés dansaient en vagues tranquilles sous ce vent qui m'étouffait. Le vide du ciel dégagé s'engouffrait dans l'esprit, dans le cœur. Les nuages n'étaient plus que des méandres lointains, pâles et filandreux, dont le blanc se teintait de noir.

Le noir. La nuit tombait au milieu du jour, ténèbres immaculées, au centre desquelles jaillissait un losange parfait, tracé de fins rayons verts.

Je hurlai.


Ly !

Une paire de mains me secouait par les épaules. Ma tête se renversa une ou deux fois, mais à la troisième, je saisis Galliem par le poignet.

Arrête.

Toi, arrête, s'exclama-t-il. Ça va pas de me faire des frayeurs pareilles ?

­Qu'est-ce... qui s'est passé ?

Ce n'était qu'une demi-question, j'en avais conscience. Un grognement étouffé entre les lèvres, je terminai de me soulever de la mokette, m'adossai au rebord du lit. J'aurais aimé avoir autant de pattes que les aréniés, histoire de malaxer mon crâne à la hauteur de ses attentes. Galliem ne fut d'aucune aide ; les yeux ronds, il m'observait sous tous les angles.

Tu as trop appuyé sur la Boussole, tête de Mignoche. Ces trucs ont passé l'âge d'être étanches !

... Etanches ?

Heureusement, le mécanisme rattrape tes bêtises. Il y a l'air de rester du pouvoir.

Pourquoi ai-je vu le cauchemar ?

Hein ?

Avec sa panoplie d'histoires, Galliem m'avait donné l'impression d'avoir réponse à tout. Mais bien sûr, il ne savait pas pour le cauchemar.

Le cauchemar, le cauchemar, cette horreur virtuelle, cette abomination nocturne, qui me torturait depuis mon arrivée ici. Rien n'avait manqué : le vide, la chute, la douleur, il s'était ravivé dans toute sa splendeur, foudroyant de réalisme.

Mes pieds tremblèrent sur la mokette. Je serrai les mains sur mes orteils pour les arrêter, ou le cacher à Galliem, je ne savais pas. Je voulais oublier ce que je venais de voir, mais ces images étaient tant ancrées dans mon esprit, qu'une vie de souvenirs n'aurait pas été de trop pour les déloger. Seul ce losange lumineux n'était jamais apparu.

Je louchai sur mon sautoir écaillé, abandonné au sol. A côté du bijou de bronze, la petite aiguille de la Boussole poursuivait ses tours fébriles, l'éclat de sa lumière estompé.

Un losange vert..., murmurai-je.

Qu'est-ce que tu racontes ?

Galliem, je peux te poser une ques...

Une minute.

Depuis quand parlais-je sa langue ? Mon regard se posa instinctivement sur l'oiseau, mais celui-ci attendait les yeux brillants, comme si rien ne l'étonnait.

Après tout, peu importe. Je me malaxai les tempes de plus belle.

Comment suis-je partie de Van-Ameria ?

Ah...

A sa place, j'aurais été rassuré de voir que je commençais à croire ces histoires de royaume. Pourtant, son visage trahit qu'il n'était pas enchanté. Ses fins sourcils se froncèrent, ses yeux se rabattirent sur la Boussole, toujours affolée.

Je sais pas, confia-t-il d'un filet de voix. J'étais pas là. C'est des soldats sous tes ordres qui t'ont vue Tomber.

La lumière verte dansait dans les ombres de ses yeux.

Moi, la dernière fois que je t'ai croisée, tu partais encore pour le château. En pleine nuit. Va savoir ce que t'allait y faire, hein ?

Son rire de belette gardait un fond de fébrilité.

Mais sinon, tu es Tombée lors de l'attaque.

Quelle attaque ?

Tu penses qu'on est soldats pour faire de la décoration ?

Je ne sus pas quoi répondre. Galliem non plus, visiblement. Ses paupières commençaient à glisser sur ses yeux.

Silencieux et nerveux sur sa cheville blessée, l'oiseau tangua dans les franges de cuir, avant d'entreprendre de se lever. Cette fois, il se passa de mon aide. Suivre son visage vers les hauteurs du plafond suffisait pour que je voie apparaître des nuages.

Bien figée sur la mokette, je l'observai du coin de l'œil sautiller vers la fenêtre. Il avait l'air de vouloir l'ouvrir. Dehors, la nuit était si avancée que les premières éclaircies se repéraient au-dessus des champs.

La poignée obtempéra dès la deuxième tentative de l'oiseau. Mains sur les vitres, il sembla chercher l'air frais, puis appuya sa sandale sur le rebord.

Attends ! bondis-je aussitôt. Où vas-tu, on est à l'étage !

Oui, d'ailleurs, je pense que je vais dormir en haut, réfléchit-il en se penchant sur le vide. On continuera demain – il bailla – si tu veux. Tu restes là, je suppose ?

Que... ?

Je te laisse la Boussole. Elle a l'air cassée, mais elle fonctionnait très bien quand je suis parti. Peut-être que si on la touche pas, elle se réparera toute seule.

Quoi ?

A trois bonnes lampes de chevet de mes jambes, l'aiguille verte tournait toujours à tout va. Ses tracés lumineux, même affaiblis, auraient rendu jalouse l'ampoule jaune du plafond, ou même les étoiles.

Un bruit de drap qu'on secoue retentit derrière la fenêtre. Je m'y rivai de nouveau.

Galliem n'était plus sur le rebord. Il avait disparu.

... Galliem ?

La fenêtre vide resta silencieuse. Une main jetée sur le pendentif, je me précipitai à l'embrasure. Le vent de la nuit souleva mes cheveux détachés, je les tins pour scruter le sol noir, le chemin de gravier, le pas de la porte, éclairé de la lumière de la tévé qui perçait les fenêtres du salon. Les deux ou trois mètres de hauteur me toisaient malgré l'obscurité. Je serrai le rebord, des frissons sous la peau.

L'oiseau ? Tu es là ?

Oui, qu'est-ce qu'il y a ?

Je levai la tête.

Qu'est-ce que tu fiches sur le toit ? m'étouffai-je.

Tes vieux y sont pas, je vais pas me gêner, répliqua le bout de sandale qui dépassait de la gouttière.

Comment es-tu monté ? m'étonnai-je encore, tétanisée par l'idée de me pencher d'un pouce de plus.

Par l'Angevert, j'ai sauté ! Rassure-moi, tu te souviens de ce que c'est, sauter, courir, marcher, respirer ?

Un soupir me traversa les narines. Mains comprimées sur l'encadrement, je ravalai un retour d'insolence, tandis que du toit résonnait un « Bonne nuit, sœurette ! ».

Les battants passèrent sous mes doigts. Au moment de claquer la fenêtre, je changeai d'avis, car à l'approche de ce qui me servait de sommeil, un peu d'air frais ne serait pas de refus.

Je retrouvais ma chambre vide. L'impassible bureau reflétait la lumière du plafond, les ampoules des étagères s'alignaient dans un garde-à-vous de verre, le lit attendait, draps à fleurs gentiment pliés. La pièce vivait autant que Jeanne devant le feuille-thon d'après manger, pourtant j'avais l'impression qu'un ouragan s'y était invité il n'y a pas si longtemps.

Mes orteils tremblaient toujours lorsqu'ils avancèrent sur la mokette. Il sembla s'écouler une heure avant que je ne parvienne au lit, et que je me laisse tomber sur le matelas. Ma conscience voulait garder les derniers événements à distance, une barrière commençait à s'ériger. Là, je dérivai sur la Boussole abandonnée au milieu de la chambre, et la réalité me frappa plus fort qu'une bourrasque en plein ciel.

Non, ça, ce n'était pas un rêve.

Enfermée sous le verre, la petite lumière verte voltigeait, la pointe d'argent embrasée. Elle aurait pu paraître penaude, ainsi échouée sur le sol, si on oubliait ce sentiment de déjà-vu qu'elle dégageait, et qui me soufflait de reconsidérer toutes mes priorités.

« La magie de l'Angevert. » avait expliqué Galliem.

Je n'avais aucune fichtre idée de ce que c'était.

« Van-Ameria. »

Me recroqueviller sur les draps ne m'aidait pas à y voir plus clair. Un lieu lointain, avec un château, j'avais l'impression qu'il en existait une bonne quantité. Les pays montrés à la tévé possédaient-ils une armée ? La question semblait de première importance, mais en m'imaginant la poser à Jeanne, l'idée fana comme les rosiers en ivère. Elle n'aurait sans doute pas plus de réponse à me donner que pour ces gens qui sautaient des zavions, et hors de question qu'elle s'inquiète.

« Galliem. »

J'avais beau chercher, il n'y avait plus que lui. Mais il était dur de reconnaître que cet énergumène, allongé quelque part au-dessus de ma tête, devenait mon seul informateur dans cette folie. Sitôt après m'être fait la réflexion, le mot « frère » voulut s'ajouter, et un frisson me dressa sur les draps. J'éteignis l'ampoule d'un poing écrasé sur lintérupteur qui surplombait le lit.

Tout ça faisait trop pour ma mémoire engourdie.

« Peut-être qu'il ment », tentai-je.

Même les pensées étouffées dans l'oreiller, j'étais persuadée du contraire. Tiraillée par les questions, je rouvris les yeux, pour me jeter une dernière fois sur la seule lumière de la chambre. Les lueurs vertes, doublées dans le maigre reflet du miroir, éclairaient la mokette et les fleurs basses des tapisseries. Tant qu'à faire, j'aurais aimé qu'elles éclairent mon esprit.

Doucement, je faufilai mes jambes entre les draps. Mues par un réflexe, mes mains s'agrippaient déjà à tout ce qu'elles trouvaient : le matelas, l'oreiller, le sommier.

Un simple sifflotis de brise aurait suffi pour que je me précipite claquer les battants. Mais toutes mes nuits gâchées en décidèrent autrement. D'un ordre silencieux et implacable, la fatigue força mon corps à s'abandonner.

Le noir acheva de remplacer les éclats de jade. Puis de l'obscur naquit la blancheur, le vide, le froid.

Je passai la pire nuit de ma vie.

Des cris, un réveil en catastrophe, le bruit du vent dans la chambre, le noir sous les paupières, puis de nouveau une chute et des cris. Mon lit se retourna plus qu'une terre labourée, dégagé de ses draps à grands coups de pieds, enfoncé par mes poings compressés, que je retrouvai tremblant sur le matelas chaque fois que mes yeux se rouvraient.

Ce qui finit par arriver. Alors que je reprenais mon souffle, un mouvement lourd secoua les meubles. La chambre s'ouvrit, laissa apparaître ciel et bourrasques, déversa armoire, bureau et pluie d'ampoules au-dessus d'un immense champ de pelouse. Je surplombai des tours étincelantes, des constructions blanches, des silhouettes en rangs, des murailles, des ornements, des sculptures, de l'obscurité, des losanges, des lumières, de...


Je bondis dans mon lit, réveillée.

Des murs, un plafond, un sol. Le vent s'infiltrait toujours entre les fenêtres, accompagné de longs rayons de soleil. Aux bourrasques se mêlaient les chants des cornèyes, qui virevoltaient dans l'air, en valse avec de lointains caquètements de poules.

A côté de cette joyeuseté, je martelais l'air à grand bruit. Des gouttes perlaient tant sur mes tempes que je sentais une averse couler dans le col de la chemise de nuit. Une main accepta de lâcher l'oreiller, pour m'essuyer en tremblant les joues, les yeux, le front. J'étais trempée.

De retour vers mon nez, mes doigts se pressèrent soudain de part et d'autre de mes yeux. J'enfonçai la tête dans ma paume. De l'eau revenait sur mes joues, ce n'était pas de la sueur.

Une question naissait dans mon esprit. Je la tournai dans tous les sens, dans une lutte entre ce que j'avais toujours cru savoir, et l'évidence qui grandissait. Le besoin de vérité me fit reprendre contenance. Je m'assis sur le lit, essuyai mes joues d'un revers de main.

Galliem ? murmurai-je.

J'avais entendu bouger les tuiles. Sans lever les yeux vers la tête hirsute qui se penchait à l'envers dans l'encadrement, je gonflai les poumons, pour expirer d'une traite :

Quand tu dis que je suis Tombée de Van-Ameria, ça signifie que j'ai chuté dans le vide ?

D'une oreille, je l'entendis pousser les vitres, s'étirer, frotter ses sandales sur la mokette. Ses anneaux tintèrent dans ma direction, il dut voir mon état, ce qui expliquerait qu'il retienne ainsi sa réponse.

Réponse dont je me doutais.

Ouais, ma vieille.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro