Une famille
Je sentis que quelqu'un me secouait l'épaule pour me réveiller. Je papillonnai des paupières pour voir où je me trouvais. Tout autour de moi, les dunes s'élevaient pour pratiquement toucher le ciel. Je me frottais les yeux et souris à mon oncle. Il me rendit mon sourire pour retourner à son occupation. Il préparait du thé et je me relevais en faisant une petite grimace. Le sol du bateau n'était pas très agréable et je sentis tous mes membres craqués à chacun de mes mouvements. Je m'étirais et je dus cligner des yeux pour m'habituer à la lumière du soleil. Je rejoignis Akash, il me tendit une tasse de thé bien chaud et un morceau de pain. Je croquai un morceau et profitai du paysage.
_ Tu as bien dormi ?
_ Hum ? Oui, mais j'avoue avoir eu du mal à m'endormir. Savoir que je suis à côté du palais d'argent me rend toute chose.
Je me tournais pour voir le palais qui apparaissait petit à petit entre les tumultes de sable. Ça avait vraiment un côté mythique. Mais ce lieu restera toujours ancré dans mon cœur car c'était là que j'avais compris mes sentiments pour Baskar. Je les avais ensuite cachés pour que personne ne le remarque. Je devais avouer qu'il me manquait terriblement, cependant j'étais contente qu'il m'est laissée partir. J'avais besoin de réponses mais je n'arriverai par à y répondre en restant coincée à l'intérieur du Palais. Je bus une gorgée et jetai un regard sur Akash qui semblait lui même dans ses pensées. Il était en débardeur et je vis qu'il avait de nombreuses cicatrices au niveau de ses avant-bras. Il porta son attention sur moi et remarqua immédiatement mon visage horrifié devant tant de blessures. Que pouvait-il faire pour en avoir autant ?
_ Elles ne sont pas très belles n'est-ce pas ?
_ Comment ? Pourquoi as-tu autant de cicatrices ?
_ C'est dû à mon boulot, je prend de nombreux risques...
_ Ce qui explique ta blessure à l'épaule ?
Il acquiesça et je me levais. Je devais nettoyer sa blessure. J'enlevai l'ancien bandage et après mettre occuper de tout, je remarquai que je n'avais pas assez de bandage et qu'à partir de demain je ne pourrais plus le soigner. Akash se pencha par dessus mon épaule et grimaça.
_ Il va falloir qu'on aille en ville pour en acheter des nouveaux...
_ Mais la garde ?
_ Ahaha, ne t'inquiète pas pour ça ma nièce. Je connais une personne qui va nous aider mais avant ça, il va falloir te camoufler. Surtout ta peau blanche et tes cheveux châtains.
Je le suivis du regard tandis qu'il sortit un tissu noir dont les bords étaient sertis de magnifiques bordures dorées. Il revint vers moi avant d'entourer ma tête du tissu, il créa ainsi une sorte de capuche qui cachait mon visage et mes épaules nues. La longue robe noire que je portais, permettait de finir l'ensemble. Le tissu qu'il m'avait donné semblait être de la soie et il sentait très bon. Akash posa sa main rocailleuse et abîmée sur ma joue et je croisais de nouveau ce regard si triste. Comme le Roi, mon oncle voyait en moi, mon père, son frère. Ils étaient une famille qui avait été brisée et je ne savais pas comment la réparer. Mon oncle était si mystérieux, il semblait si fort et puissant mais en même temps, il était doux et triste. J'avais supposé, hier soir, avant de dormir, qu'il cherchait peut être à me protéger de quelque chose ou de quelqu'un mais qu'il maquillait cela comme un besoin de me donner des réponses. J'avais rapidement oublié cette pensée. Il fallait que je pense à ce moment là. Après huit mois derrière des remparts, j'étais de nouveau libre. Je déglutis et finis de boire mon thé pour humidifier ma gorge sèche. J'étais stressée, il était sur que le Roi avait envoyé sa garde pour me retrouver et j'avais peur que Akash subisse sa colère.
_ Allons-y. Aïlla ? Ça ne va pas ?
_ Peux-tu me promettre quelque chose ?
Il se mit bien droit et fronça légèrement les sourcils tout en remettant sa capuche. Il cacha ensuite sa cicatrice qui lui allait pourtant bien. Il hocha la tête attendant ma demande.
_ Si Aditya nous rattrape, ne te laisse pas attraper et fuis très loin.
Il ne dit rien, il baissa la tête comme pour réfléchir puis s'avança vers moi. Sans que je m'y attendre, il embrassa mon front comme pour sceller cette promesse. Je fermai les yeux, puis je montai sur le bateau. Il actionna la voile et on alla vers une ville. Je tenais d'une main le tissu en soie pour éviter qu'il s'envole. Il ne fallait pas que l'on me remarque et reconnaisse. Petit à petit, je vis apparaître des bâtiments en terre cuite et en pierre de taille. Des banderoles de toutes les couleurs rehaussaient le blanc des bâtiments. Tout le monde était en pleine effervescence, et je me demandai pourquoi je n'avais pas pu découvrir plus tôt une ville comme ça. Akash fit accoster le bateau un peu à l'écart, il me prit la main et m'éloigna immédiatement de la foule.
_ Tu ne me quittes pas d'accord ?
_ Oui.
_ Certains soldats s'habillent en civil pour avoir plus de champs libre et pour piéger plus facilement, m'expliqua t-il en me tirant la main.
Comment pouvait-il savoir tant de chose. Il m'emmena dans une ruelle très belle, j'y découvris une boutique d'armes. Je pris une grande inspiration quand il ouvrit la porte. Je me sentais un peu à l'étroit, entourée par toutes ses armes. Je sortis mon téléphone tandis que Akash s'approchait du comptoir. J'hésitais à l'éteindre, mais si il essayait de m'appeler ? Non, si il faisait ça il pourrait me repérer. C'était avec tristesse et incertitude que j'éteignis mon portable sous le regard de mon oncle. Sa présence englobait toute la pièce et je ne pourrais pas mentir sur le fait que mon oncle était très intimidant. Soudain un homme assez vieux sorti de l'arrière-boutique. Sa longue barbe et son visage abîmée représentaient de longues années de dur labeur. Cela me fit mal au cœur. Il ne me remarqua pas tout de suite et plaça sa grosse main sur l'avant-bras de son ami.
_ Est-ce que ça va ? On m'a prévenu que tu avais été blessé !
_ Je vais bien, on m'a soigné à temps. Dajir, laisse moi te présenter ma nièce, Aïlla.
Je m'avançais en retirant ma capuche, le visage du vieux Dajir se fissura à chaque pas. Une profonde tristesse se peignit sur son visage. Il ouvrit la bouche avant de la refermer, il quitta son comptoir pour en faire le tour, il se plaça devant moi. Je lui souris avant de paniquer, car tout d'un coup, il tomba à genoux devant moi. Cela surpris autant moi que mon oncle. Celui-ci s'abaissa au niveau de Dajir pour passer sa main sur son dos. Le vieux marchand d'arme releva la tête et je vis qu'il pleurait à chaudes larmes. Je me baissai pour prendre ses mains et pour l'aider à se remettre sur ses deux pieds. Cela me faisait du mal de le voir aussi touché. Bien que je ne savais pas vraiment pourquoi il avait agi ainsi.
_Tu... je suis désolé, princesse.
_ Hum, je ne suis pas princesse, je suis qu'une simple jeune fille Dajir.
_ Vous ressemblez tellement à votre père, je comprend pourquoi le roi a voulu vous garder auprès de lui. Vous avez la prestance d'une reine et un regard hypnotisant. Vous avez la même aura que votre père.
Je ne pus rien dire, cet homme avait également connu mon père. Je me sentais tellement larguée sur lui. Je détournais la tête avant de voir des hommes venir vers la boutique, je remis ma capuche et Dajir essuya ses larmes. Akash me tira le bras pour me cacher derrière lui. Je m'accroupis pour mieux disparaître de la vue des hommes. J'émis pourtant un hoquet en reconnaissant mon garde du corps. Son visage était fermé et il semblait de mauvaise humeur. Je pouvais bien l'imaginer, le Roi avait dû incendier tous les gardes du palais.
_ Dajir, nous avons une demande de la part de Roi, si vous voyez un homme suivit d'une femme européenne, vous devez immédiatement prévenir la garde. Et vous ?
_ Ne faites pas attention à moi jeune garde, je ne suis qu'ici pour parler à un vieil ami.
Akash lui sourit alors que l'autre le fusillait du regard. Il s'en alla pourtant après avoir balancer une affiche sur le comptoir. Je pus ensuite sortir de ma cachette.
_ Nous allons devoir nous en aller rapidement Akash, sinon on se fera rapidement rattraper.
_ Tu as raison, Dajir, j'aurais besoin de certaines choses.
Tandis que Akash faisait une liste de ce qu'il nous fallait et que Dajir s'en allait pour tout chercher. Je me baladai dans la boutique. Je touchai du bout des doigts une arme. Je tenais un sabre dans les mains quand mon regard se porta sur un poignard dont la lame devait faire une quinzaine de centimètres. Je le pris et caressai le fourreau qui était finement décoré. Il représentait la naissance de la vie. Le dieu Dielli était visible ainsi que sa femme la déesse de la nuit Nisha. J'étais tout simplement subjuguée par cette arme. Je n'entendis même plus ce que les deux hommes disaient derrière moi. Je fis glisser la lame de son fourreau. Elle était lisse et des signes dans le dialecte du royaume sillonnaient la lame avec finesse.
_ Eh bien, vous avez du goût.
Je sursautai un peu, mais souris à Dajir qui venait de se placer à côté de moi.
_ Une légende raconte que ce poignard est rempli de magie, il appartenait à ton grand-père. Tu as fait un bon choix. Tu le mérites.
_ Mais...
_ Vous avez un long et dangereux voyage qui vous attend, vous devez vous protéger.
Long ? Vraiment, je ne pus refuser le cadeau de Dajir et nous dûmes nous en aller rapidement. Je montais sur le bateau, je tournais la tête pour me figer. Une bouffée de chaleur monta au creux de ma gorge. Le Roi et Baskar se trouvaient à une centaine de mètres de moi et Lise était accroché aux bras du prince. Une pointe de jalousie serra mon cœur. Akash suivit mon regard et grimaça de nouveau.
_ Ne fais pas attention à eux Aïlla et puis si ça peut te rassurer, Baskar semble vouloir tuer cette femme.
Je ne dis rien et restai à me morfondre, Akash poussa une dernière fois le bateau avant de sauter dessus.
_ Ce sera un long voyage ?
_ Hein ? Ahaha n'écoute pas ce vieux Dajir, nous nous dirigeons dans un endroit spécial. Nous avons juste un peu plus d'une demi-journée de bateau donc tu peux dormir.
_ Tu es sur ? Je ne...
_ Tu ne me déranges pas ma belle repose toi, tu as l'air exténuée.
Je m'allongeais sur le sol du bateau. Je serrais contre moi le poignard de mon grand-père. Je me sentais connectée à cette arme pour je ne sais qu'elle raison. Je fermais les yeux, imaginant ma vie si mon père était encore en vie.
Je regardai le ciel se coucher tandis que je me redressai sur le bateau. J'avais fait un drôle de rêve mais pour une fois il n'était pas flippant. Je ne me retrouvai pas avec les mains en sang comme d'habitude. Je remettais bien le tissu sur ma tête tout en posant mes yeux sur mon oncle. Il était occupé à maintenir la voile nous permettant d'aller assez vite. Les dunes se faisaient plus petites dans cette région du Royaume. De nombreux oasis apparaissaient ainsi que des usines de pétrole. Je savais que le royaume avait fait sa richesse sur les réserves inépuisables de pétrole qui traversaient leur sous-sol mais il devait bien avoir autre chose. En plus de 700 ans d'existence, les Rois du Royaume de Dielli avaient réussi à maintenir une paix et une puissance qui rendaient les pays occidentaux envieux. Quel pouvait-être leur secret ? Son armée était une des plus puissantes après les États-Unis mais même eux n'osaient pas s'en prendre au royaume. Cela devait être génial de vivre dans un pays où il n'y avait pas de conflits. Enfin si il y en avait mais ils étaient rapidement matés par les rois.
_ Aïlla ? Tu as l'air songeuse. Il y a un problème ?
_ Non pas vraiment je me posais juste quelques questions sur le Royaume... Comment faites-vous pour ne subir pratiquement aucuns conflits ?
Akash relâcha un peu sa poigne sur la corde et le bateau ralentit, tandis qu'une ville apparaissait à travers les dunes qui devenaient orangées avec les rayons du soleil couchant.
_ Ce qui rend notre Royaume si puissant, ce n'est pas sa violence ni même sa frappe militaire. Non c'est notre humanisme et nous cherchons pas à rentrer dans un conflit. La neutralité nous a permis de garder à l'écart le pays de n'importe quel conflit. Notre force est dû à la confiance que nous nous donnons les uns aux autres mais également à notre souverain qui ne nous laisse jamais tomber. Bien sur de nombreux conflits existent dans nos terres, mais ils ne nous empoisonnent pas et nous les combattons. Quand le pays a un problème, c'est tout le peuple qui se met à l'œuvre pour vaincre ce problème.
_ Le royaume de Dielli est vraiment à part, pourquoi nous n'avons pas cela en occident.
_ Car nous, nous ne nous laissons pas atteindre par la colère.
_ Oh. Ce village est très joli.
Je souris en voyant des maisons de pierre blanche se dresser devant moi. On accosta, nous récupérâmes nos affaires et nous rejoignîmes une sorte d'auberge. À l'intérieur, il faisait très bon, et mon regard se posta partout autour de moi. Ce devait être une ancienne grange ou maison de famille aisée. La salle principale était surmontée par une grande mezzanine mise en place avec des poutres de bois de Ristas, une autre espèce d'arbre du Royaume de Dielli. Cette espèce était caractéristique par sa couleur rouge pâle et cette couleur permettait de faire ressortir les pierres blanches craies. Je ne pouvais pas m'empêcher d'être subjugué par cette maison. Akash s'approcha du comptoir après avoir bien remis ma capuche en place. Je le suivis et plaçai mon regard sur un grand cadre représentant une famille. La mère, le père et les deux enfants, deux garçons. Ce qui me frappa, ce fut la couleur des yeux des trois hommes de cette famille. Des yeux verts hypnotisant comme ceux de ma famille. Akash regardait aussi ce portrait et je remarquai tout de suite que son poing s'était serré autour du pommeau de son sabre. Une femme d'une trentaine d'années nous rejoignit. Elle était très belle, elle portait une robe grise qui mettait en valeur son ventre arrondi. Elle devait être enceinte. Sa peau basanée mettait en valeur ses yeux noisettes qui pétillaient. Quand elle vit Akash, elle courut pour se fourrer dans ses bras.
_ Akash ! J'ai cru que tu ne reviendrais plus ici ! Mon père commençait à se faire un sang d'encre en voyant que tu avais été fiché !
_ Charvi (belle femme), la grossesse te va à merveille.
La belle Charvi fronça les sourcils devant mon oncle. Elle le poussa et lui donna un coup sur la tête avec le magazine qu'elle tenait dans la main.
_ Tu es toujours aussi insensible ! Tu ne te rends pas compte de combien on a eu peur pour toi. Espèce de mercenaire de pacotille ! Tu as de la chance d'être sous la protection de notre bon roi Suraj ! Pas de nouvelles et tu reviens comme ça et elle c'est qui ?!
_ Si je te le dis, tu voudras me jeter au feu.
Je clignais des yeux plusieurs fois devant cette scène de ménage. Cette femme avait un caractère bien trempé. Ce devait être le genre personne qui ne fallait pas embêté. Elle me fusilla du regard avec ses beaux yeux noisettes. Akash me fit un sourire d'excuse tout en se massant la tête. Tout à coup, une lueur se mit à briller au fond de ses yeux, de la joie ? Je ne connaissais mon oncle que depuis quelques semaines mais cela me faisait du bien de le voir sourire aussi honnêtement. Alors que Charvi faisait la moral à mon oncle, je vis du coin de l'œil un homme aux cheveux gris venir vers nous. Son visage était marqué par le temps, mais il semblait plus jeune que Dajir et également en meilleure forme. Dans une tenue assez décontractée et un turban dans les cheveux, son regard marron s'illumina en découvrant Akash.
_ Akash !
_ Ekram (l'honneur). Je suis heureux de te voir.
_ Et moi ? J'ai cru faire une crise cardiaque en voyant que tu étais recherché par la garde royale. Qu'as-tu encore fait !?
Les deux hommes se firent une accolade. Ils avaient tous les deux un sourire imprimé sur leur visage. Charvi était émue de voir ses retrouvailles. Moi, je restai à l'écart je n'avais pas à interférer dans cet échange. Ces trois-là devaient partager un lien fort, car il y a bien longtemps que je n'avais pas vu des personnes aussi contentes de se revoir. Enfin à part moi quand j'avais revu Jeremy. J'avais senti mon cœur battre à la chamade dès que j'avais croisé son regard.
_ Bien maintenant tu me réponds Akash, qu'as-tu fait ? Et qui est cette jeune femme ?
Mon oncle se tourna vers moi avant de me rejoindre. Il passa son bras autour de mes épaules et me serra contre lui comme pour m'assurer que j'étais en sécurité. Par réflexe je fermai les yeux d'aise.
_ Je suis allé rendre visite à ma nièce et j'ai malheureusement pas été très bien accueilli.
_ Ta nièce ? Tu veux dire que...
_ Oui, la jeune française est la fille de Sapan mon frère, il fallait que je la vois de mes propres yeux.
_ Et ? Alors ?
_ C'est elle.
Il me fit signe d'enlever ma capuche. Je le fis dévoilant ma peau clair, mes cheveux châtains clair, ainsi que mes yeux verts pâles. Charvi et Ekram restèrent interdits pendant quelques secondes avant que des larmes coulent sur les joues de l'homme. Charvi retint un sanglot en plaçant sa main devant sa bouche. Elle s'approcha de moi en posant sa main libre sur ma joue. Elle devait avoir l'impression de rêver. À son tour, des larmes coulèrent sur ses joues et elle me prit dans ses bras à ma plus grande surprise. Je lançai un regard d'incompréhension à mon oncle.
_ Ekram et Charvi sont de la famille. Laisse moi te présenter, mon oncle qui est également ton grand-oncle. Et Charvi est ma cousine. J'imagine que Regina a dû te faire croire que Sapan n'avait plus aucune famille.
Je ne dis rien et mon silence le réconforta dans son idée.
_ Elle nous en a toujours voulu de l'avoir ramené ici. Alors quand Sapan nous a quitté, elle... je ne pourrais jamais oublié le regard qu'elle nous avait lancé. J'ai compris à ce moment là qu'elle allait faire disparaître notre existence de ta vie, murmura Ekram en prenant mes mains dans les siennes. C'est incroyable, j'ai vraiment l'impression d'être face à mon neveu.
_ Je... je suis enchantée de vous rencontrer.
Ma voix se brisa juste après, alors tout était un véritable mensonge. Je retins un hoquet alors que mes larmes ne voulaient pas s'arrêter de couler. Maman avait dû faire ça pour me protéger. Mais se rendait-elle compte du mal qu'elle avait apporté ? Akash me prit dans ses bras pour me soulager. Il caressa mes cheveux en murmurant dans la langue du Royaume. Ekram tenait toujours mes mains.
_ Tu dois être la Aïlla du prince Baskar, je comprend mieux pourquoi il est tombé amoureux de toi. Tu es vraiment belle. S'exclama Charvi. Mais vous devez avoir faim ! Je vais tout de suite vous préparer une table.
_ Non ne t'inquiète pas ma fille, je vais le faire, va montrer à Aïlla sa chambre. Vous nous rejoindrez plus tard. Viens avec moi Akash, il faut qu'on parle tous les deux.
Charvi attrapa ma main et m'entraîna à sa suite. On monta à l'étage, juste en face de moi se trouvait une rangée de porte, mais ma grand-cousine ne s'arrêta devant aucune d'elles. Au contraire, elle se dirigea vers le mur, elle actionna une poulie qui servait de pot de fleur. Le mur s'ouvrit devant mes yeux ébahis. Des escaliers se trouvaient juste derrière. Je les montai tout restant impressionnée par les tapisseries qui décoraient les murs blanc. Tout en haut, l'escalier se coupa en deux et on se alla sur la droite. Charvi ouvrit une porte en bois massif et en rentrant dans la chambre, je restais abasourdie. Un grand lit se trouvait au milieu de la pièce, bien que la décoration était assez masculine, la chambre était très chaleureuse. Les murs étaient peints en bleu clair, des écritures en or étaient rajoutées par dessus et j'avais comme l'impression d'être dans une histoire des milles et une nuits. J'enlevais totalement le voile noir qui entourait mon cou pour le poser sur le lit. Derrière une armoire blanche se trouvait une salle de bain dans les tons bleus également. Je ne savais plus quoi dire, c'était tellement beau. Charvi s'avança vers moi alors que je m'asseyais sur le lit, comme vidée.
_ Ça doit te faire un choc.
_ Je... oui, toute mon enfance, on m'a raconté que les membres de la famille de mon père n'étaient plus. Je croyais également que mon père était mort durant un accident et qu'il se serait éteins dans les bras de ma mère. J'ai tellement l'impression d'avoir vécu dans un véritable mensonge. Cette sensation est atroce.
Charvi s'installa à côté de moi et m'entoura de ses bras maternels. Elle fit comme mon oncle et caressa mes cheveux. Ce geste avait toujours eu le don de m'apaiser. Principalement lors de jours de tempête où l'orage faisait rage.
_ Je suis sûre qu'ils ont fait ça pour te protéger.
Je me tournai vers elle, elle me sourit tout en replaçant sa main sur mon visage. C'était vrai que l'on avait un petit air de ressemblance.
_ J'ai connu ton père, enfin il était mon cousin, toute mon enfance. Il avait 8 ans de plus que moi. Il était une personne adorable et qui avait le cœur sur la main. Il est mort lorsque j'avais 15 ans. Ça a été un choc pour nous tous, déjà que quelques années plus tôt ses parents nous avaient quitté dans l'incendie.
_ L'incendie qui a fait la cicatrice à mon oncle ?
_ Oui, nous nous trouvons juste au dessus des ruines. Mon père a souhaité rendre hommage à sa sœur. La chambre où tu es est celle de ton père, c'est lui qui a fait la décoration. Il souhaitait qu'un jour tu découvres son univers, il voulait être ton guide.
Je ne faisais que de l'écouter. Je n'avais plus de force. Voyant que j'étais devenue muette, Charvi décida de me laisser seule. Elle me promit de laisser de la nourriture de côté si j'avais faim dans la soirée. Je tombai en arrière, mon corps rebondi avec le matelas. Je me sentais las, je fermai les yeux et de nouveau des larmes coulèrent. C'était des larmes de rage. J'avais envie de crier ma douleur, tout mon univers venait de s'effondrer avec la rencontre de la famille de mon père. Je me sentais blessée et bafouée. Je plaçais mes mains sur mon visage, cherchant à faire tarir mes larmes. Mais je n'y arrivais pas. Je rentrai dans les draps sans me déshabiller. Je me sentais totalement vidée et c'était avec l'esprit en pleine tempête que je m'endormis en étant secouée par des sanglots. Avant que je tombe totalement dans le sommeil, une personne était rentrée dans la chambre, avait remonté la couette et s'était penchée pour m'embrasser le front. Un geste tendre qui rapporta de la chaleur dans mon cœur.
Le lendemain matin, je descendis les escaliers après avoir pris une bonne douche. Cela faisait plus de 4 jours que j'avais quitté le palais. J'avais compris en me levant et en voyant le lit vide, que cet arrogant et crétin de prince me manquait terriblement. Je rajustai le tissu noir sur mes cheveux en voyant des personnes au le rez-de-chaussé. Je baissai les yeux pour ne pas me faire remarquer. Ekram me vit et laissa patienter les clients. Un autre homme vint s'occuper du groupe et les emmena dans le chemin inverse. Ekram vint vers moi, il me sourit.
_ As-tu bien dormi, Aïlla ?
_ Mon sommeil a été un peu agité, mais après toutes ces révélations hier, ça ne m'étonne pas vraiment.
Une pointe de tristesse passa dans les yeux de mon grand-oncle. Il plaça sa main sur mon dos et me fit signe de le suivre.
_ Tu dois avoir faim, Akash t'attend en haut.
Je hochais la tête, je traversai la salle de restauration en rasant les murs pour ne gêner personne. Je trouvais des escaliers en colimaçon. Je les montai et rejoignis mon oncle qui buvait un café en regardant les dunes à travers une large fenêtre. Il me remarqua et se leva. Il fut près de moi en quelques pas, il me prit dans ses bras et m'emmena ensuite à la table. Il y avait beaucoup de chose dessus, autant des condiments occidentaux que des plats traditionnels.
_ Tu devrais manger, ma belle. Tu n'as rien mangé hier soir.
J'inclinai la tête et me pris une tasse de thé froid. Je humai l'odeur et souris malgré moi, c'était un thé au cidre de biokas. L'image de Baskar vint s'ancrer dans mon esprit.
_ Akash ?
_ Hum ? Fit mon oncle en portant son attention sur moi.
_ Aujourd'hui, j'aimerai bien que tu répondes à certaines de mes questions.
Il fronça légèrement les sourcils mais il vit rapidement où je voulais en venir.
_ On va le faire maintenant. Finis ton thé et rejoint moi au rez-de-chaussé.
Il se leva et me laissa seule. Je pris un morceau de corne de gazelle et bus d'une traite mon thé. Je descendis rapidement les escaliers pour rejoindre mon Oncle qui plaçait ses armes sur sa ceinture tout en discutant avec Charvi. Celle-ci me fit un magnifique sourire en me voyant. On se salua puis je partis avec Akash. Je m'attendais à prendre le bateau mais il prit le chemin inverse. Je restai derrière lui. Mon regard se baladait partout. Cette ville n'avait rien à voir avec la capitale. Elle était calme, plus petite mais tellement belle. Elle avait gardé son charme d'antan. Les boutiques semblaient vivantes et la place du centre-ville était finement décorée. Je ne m'attardai pas plus dessus et repris ma marche. Soudain mon oncle s'arrêta et je regardai par dessus son épaule pour savoir où nous étions. Ma respiration s'arrêta quand je vis de nombreuses tombes s'aligner sur des kilomètres. On rentra et se fut devant un superbe mausolée de cinq mètres de haut que l'on se stoppa.
_ Tu es devant le mausolée familiale.
_ Ah ?
_ Il est utilisé depuis la création de notre famille, tes grand-parents et ton père y sont enterrés.
Il s'agenouilla devant et caressa une fleur qui se trouvait juste devant.
_ Ce qu'à fait mon frère était un acte héroïque, il est maintenant devenu un héro national mais également une légende. Les historiens du royaume aime raconter son histoire et maintenant que tu es là, tu as ravivé son histoire. Bien que depuis 22 ans des personnes viennent de partout pour se recueillir sur sa tombe.
_ J'avais compris ça. Mais pourquoi alors toi, tu es présenté comme mort dans les archives.
_ Je vois que tu t'es renseignée. Viens avec moi, allons nous asseoir là-bas.
On s'assit sur un banc un peu à l'écart des allées. Comme l'avait dit mon oncle, des personnes vinrent juste après nous devant la tombe de ma famille. Ils déposèrent des fleurs avant de s'en aller.
_ Tu as dû entendre parler de l'incendie.
_ Oui, je me posais des questions sur les différentes brûlures que tu avais. Je suis tombée sur une archive où se trouvait une note de mon père. Je me rappelle ce qu'il disait :« Juste après l'incendie, je pus sauver mon frère qui était gravement blessé au visage. C'est à l'hôpital qu'il me demanda de faire comme si il était mort. Il devait faire quelque chose et il ne devait pas être reconnu. Il avait des soupçons sur cet incendie. Je décidais d'accepter sa demande. Il s'en alla ensuite, je cherche à le retrouver. Mais je sens que ce n'est pas moi qui doit le retrouver et connaître la vérité sur l'incendie. Peut être ma fille ? »
Akash trembla un peu en m'entendant réciter ces paroles. Il ferma les yeux avant de les plonger dans les miens.
_ Il fallait que je trouve qui avait fait ça. Rien ne pouvait prévoir qu'un incendie allait détruire notre maison. Je rappelle très bien que de nombreuses personnes tournaient autour de chez nous, toujours les mêmes. C'est à ce moment là que j'ai eu des soupons sur leurs motivations. Au moment où j'ai voulu prévenir mon père, il y a eu un bruit de déflagration. Je n'ai pas eu le temps d'arrêter mon père, il est parti en courant pour rejoindre ma mère. Je les cherchais quand j'ai perdu connaissance. Sapan est arrivé à ce moment et m'a sauvé à temps. J'ai ensuite décidé de me faire passer pour mort. Je suis alors devenu une sorte de pirate. J'ai recherché sans relâche ceux qui avaient volé la vie de mes parents.
_ Qui savait que tu étais en vie ?
_ Peu de monde, mes amis les plus fidèles, Ekram, Charvi et également Sadiva...
Je tiltai en entendant ce prénom, Sadiva était le frère aîné du Roi. Il était mort le même jour que mon père en cherchant à protéger sa belle-sœur et son neveu.
_ Malheureusement, il est mort. Ce qu'il faut savoir, Aïlla c'est que je ne suis pas quelqu'un de bien, j'ai du sang sur mes mains. J'ai tué des personnes.
_ Mais je suis sure que c'est pour une bonne raison, Akash. Je te fais confiance et pour moi tu es plus comme un héro. Tu te donnes corps et âme pour essayer de découvrir la vérité. Et il faut savoir que le chemin vers la vérité peut parfois faire couler du sang. Cette blessure en est la preuve.
Je lui souris en posant ma main sur son épaule meurtrie. Son visage triste changea un peu et il me sourit à son tour. Il plaça sa main sur la mienne et on resta ainsi dans le silence.
_ Tu vas y retourner n'est-ce pas ?
_ Oui, murmurai-je.
Je savais qu'il ne le voulait pas, mais je devais le faire car, si je passai un autre jour sans Baskar j'allai devenir folle, j'en étais sûre.
_ Je n'aime pas te savoir entre ses quatre murs.
_ Je suis amoureuse de lui Akash, je ne peux pas renier les sentiments que j'ai pour lui.
Akash se releva et je retrouvai l'homme mystérieux. Il me tendit sa main pour m'aider à me lever. On sortit du cimetière. Il serra ma main comme pour dire qu'il me faisait la promesse de me ramener auprès du prince. Il me fit découvrir sa ville natale. Il me raconta les nombreuses bêtises qu'il avait fait avec mon père. Comme la fois où ils avaient eu la bonne idée de libérer un troupeau entier de mouton dans le centre-ville lors du passage de l'ancien Roi. Ils avaient dû aider pendant deux jours entiers à retrouver tous les moutons. Ou bien la fois où sous un coup de colère mon père avait fait une prise de judo à Akash, celui-ci était parti en arrière et était tombé sur le lit. L'ossature du lit avait éclaté sous le poids de mon oncle. Mon grand-père les avait réprimander car c'était la cinquième fois qu'ils détruisaient un lit en à peine un an. Je ne pouvais pas m'empêcher de rire devant ces anecdotes qui sans le vouloir me réchauffait le cœur. Après toutes les révélations qui m'étaient tombées dessus en à peine deux jours, j'avais peur de découvrir de nouvelles choses sur moi. Je savais que Akash ne me disait pas tout. Alors qu'il venait de m'offrir un bouquet de fleur pour le mettre sur la tombe de mon père je le stoppais en lui attrapant la manche.
_ Aïlla ?
_ Qu'as-tu trouvé sur l'incendie ?
_ De nombreuses choses, mon père était l'ancien commandant en chef de la garde royale. Il avait une grande renommée, et j'allais prendre sa suite. Après de nombreuses recherches, je suis tombé sur quelque chose d'intéressant. L'armée rebelle serait derrière tout cela.
À l'entente de ce nom, je me mis à frissonner. La blessure que le psychopathe m'avait infligé c'était soudainement mis à me brûler.
_ Et j'ai encore plus envie de les détruire en sachant ce qu'ils t'ont fait.
Il plaça sa main sur l'arrière de mon crâne pour m'approcher de lui, d'un geste doux il me serra contre moi. J'étais contente de savoir qu'il s'inquiétait pour moi. Mais je ne voulais pas qu'il soit blessé par ma faute. Après la visite de la ville, je rejoignis Charvi qui voulait m'accompagner sur la tombe de notre famille. Akash décida de rester avec Ekram à l'entrée du cimetière. Charvi prit mon bras et c'était en discutant tranquillement que l'on déposa les fleurs. Elle se mua ensuite dans le silence d'une longue prière. Je fermai à mon tour les yeux, le soleil commençait à se coucher et le vent devint un peu plus fort. Des bruits de pas se firent entendre tout autour de nous. Je rouvris immédiatement les yeux pour découvrir un groupe d'hommes nous entourer. Certains n'étaient pas des habitants de Dielli. Je suivis leur regard et remarquai tout de suite qu'ils avaient pour projet de s'en prendre à Charvi. Je me plaçai devant elle pour la protéger. Je touchai le pommeau du poignard de mon grand-père. Je ne savais pas comment m'en servir mais j'allais de faire mon mieux. Un violent coup de vent souleva ma capuche et ma peau et mes cheveux furent dévoilés.
_ Et bien, mes camarades, comme nous avons de la chance...
_ La parfaite concubine du prince est juste devant nous.
_ Maître Addam va bien être content.
Je me raidis en entendant ce nom. Les hommes nous sautèrent dessus. Charvi se mit à hurler de toute ses forces pour prévenir mon oncle et son père. Les deux ne tardèrent pas rappliquer. Un homme avait réussi à plaquer mes bras derrière mon dos et je gesticulais frénétiquement pour me libérer. Il m'attacha et me traîna à l'écart tandis que Ekram avait récupéré sa fille. Les hommes étaient beaucoup trop nombreux et mon oncle fut rapidement débordé. Il se défendait à merveille faisant valser des doigts et des membres sur le sol. Mais je sentais que l'on me tirait par l'arrière pour m'éloigner.
_ AKASH ! Criai-je.
L'homme plaça sa main sur ma bouche et me fit quitter le cimetière. Une fois assez éloigné de lieu de l'attaque, il me jeta au sol avant de se placer au dessus de moi. Je savais ce qu'il allait faire, il allait me violer. Ses mains commencèrent à se balader sous le tissu de ma robe. Je hurlais à en perdre la voix. Il sembla en avoir marre et je le vis lever la main sur moi. Il voulait m'assommer pour ensuite s'amuser en toute tranquillité. Je fermai les yeux en attendant le coup mais rien ne vint. Je me sentis plus légère comme si on m'avait libéré d'un poids. J'ouvris les yeux et tournai la tête vers la gauche. L'homme se faisait massacrer par un autre. La tenue noir du nouvel arrivant me disait quelque chose. Les râles de douleur me donnèrent la nausée. Quelqu'un me souleva et je paniquais un peu avant de voir que c'était Akash. Il me libéra des liens dans mon dos. Il me serra dans ses bras et me détourna du massacre qui avait lieu à un mètre de moi. Je tremblais de tout mon corps. Soudain, plus aucun son se fit entendre. Je relevais les yeux vers l'homme qui m'avait sauvé. J'avais l'impression de me trouver devant un loup, mais le voir me fit pleurer de plus belle. Sans attendre il ouvrit ses bras et je sautais dans ceux-là. Il fit tomber une pluie de baiser sur mon visage et sécha mes larmes avec ses pouces abîmés.
_ Baskar...
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Bonjour tout le monde, voici le chapitre du mois, j'espère que vous allez l'aimer. C'est pour l'instant le plus long chapitre que j'ai écris pour cette histoire.
Je vous fais de gros bisous \(^v^)/
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