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Chapitre 12 : Prune

                   

Mardi 12 décembre : Prune

            Prune n'aimait pas le mardi pour bien des raisons. Pour commencer, elle avait sport, ce qui aurait pu être renommé « torture » tant leur professeur semblait s'amuser à les voir souffrir quand ils couraient autours du stade, tel des hamsters prisonniers d'une roue infernale, sans aucune autre option qu'avancer, encore et encore. Ensuite, elle avait un nombre proprement indécent d'heures de philosophie. Certes, elle s'y attendait en choisissant la filière littéraire, mais personne ne l'avait prévenu qu'elle devrait apprendre les théories de ces philosophes alors qu'elle venait de souffrir le martyre et de cracher ses poumons. Et enfin, pour terminer cette journée atroce, elle avait option arts. En soi, Prune adorait l'art plastique, dessiner, c'était son dada. Seulement, devoir dessiner après une aussi longue journée, de dix-sept à dix-neuf heures, cela relevait plus du cauchemar que du rêve.

En sortant du cours ce soir là, elle se retrouva seule au milieu des sombres couloirs du lycée. Elle avait aidé sa prof à ranger les pots de peintures qu'un de ses camarades avait laissé en vrac, et était donc sortit en retard. D'habitude, cela ne la dérangeait pas, de marcher dans les couloirs déserts. Mais ce soir, l'ambiance était oppressante, presque menaçante. La lune, réduite à un fin cartier, n'éclairait que périodiquement à travers les carreaux, cachée par les nuages en mouvement.

La jeune fille sentit son cœur s'accélérer et elle frissonna. Elle eut l'horrible impression qu'elle était seule au monde, abandonnée de tous. Comme si, pendant ce cours d'arts plastiques, une bombe nucléaire avait atterri sur le pays à son insu, faisant disparaître la population entière excepté cette classe d'arts. Elle savait que c'était irrationnel et tout bonnement impossible, mais une petite part d'elle ne pouvait s'empêcher d'avoir peur.

Quand elle sortit du bâtiment, l'adolescente pu constater que rien de tout cela n'était arrivé : les lampadaires étaient tous allumés, tout comme les fenêtres des immeubles et maisons environnantes. Des voitures passaient par moment, bref éclat de bruit au milieu du silence environnant. Soudain, un coup de klaxon retentit et Prune se retourna d'un bond. C'était sa mère, qui lui faisait signe à bord de la voiture, une vieille coccinelle verte rongée par les âges mais miraculeusement en parfait état, comme si une bonne fée avait lancé un sort d'immortalité au moteur. Cette bonne fée était surement son père, qui bichonnait ce véhicule tous les week-ends, mais la jeune fille se plaisait à imaginer une histoire fantastique à cette auto.

-       La journée c'est bien passée ? lança négligemment la femme à la jeune fille, qui s'installait difficilement sur le siège avant, embourbée par son gros manteau, son sac et son carton à dessin, qu'elle avait oublié de déposer à l'arrière.

Prune soupira, avant de lui répondre les banalités habituelles, qu'elle allait bien, qu'elle avait passée une bonne journée, mais très longue et fatigante, comme tous les mardis. Elle s'enfonça ensuite dans son mutisme, tandis que sa mère râlait contre les autres automobilistes, contre ses collègues, contre la météo... Contre tous ce qui lui passait par la tête apparemment. L'adolescente fit mine d'écouter, mais à vrai dire elle était plongée dans ses pensées, à des kilomètres de la réalité étriquée de sa mère.

Elle pensait à Neil, comme toujours ces temps-ci. Où était-il, que faisait-il ? Était-il seulement en bonne santé ? Voir même tout simplement en vie ? Prune ne voulait envisager cette hypothèse, mais elle ne pouvait se voiler la face non plus : Neil avait disparu depuis douze jours maintenant, tout était possible. Surtout le pire...

En arrivant chez elle, la jeune fille monta directement dans sa chambre, après avoir attrapé un petit bout de baguette dans la cuisine au passage. Une fois dans sa pièce à elle, son petit cocon, son univers, elle se laissa tomber lourdement sur son lit. Ses yeux se fermèrent tous seuls, et des larmes jaillirent d'entre ses cils clos. Elle retient un reniflement, avant de se laisser aller, soudain désespérée. Elle avait beau se répéter que Neil était vivant, elle ne pouvait plus ignorer la vérité. Il devait être mort à l'heure qu'il était. Il était peut-être même mort depuis le tout début, depuis le premier décembre, quand personne n'était encore très inquiet. Désormais, son cadavre gisait surement au bord d'une route gelée, caché par la boue et la neige sale, fondue. Il devait être mort, mort mort mort mort mort. Mort. Mort. Mort.

Étrangement, se répéter ces mots, encore et encore, arrêta ses pleurs. Ses sanglots se tarirent vite, et elle se retrouva immobile sur son lit, à ressasser cette longue et monotone litanie de mots, à présent vidée de son sens. Ce n'était plus qu'un étrange son, une plainte lugubre venue des tréfonds de son âme. Mort. Mort, mort, mort. Mort.

Comme un automate, la jeune fille se releva soudainement, et sans y réfléchir réellement, elle attrapa son violon. Elle n'y avait pas touché depuis un certain temps, depuis la disparition de Neil à vrai dire. Elle le prit délicatement, le posa sur son épaule, et toujours sans y songer, elle accorda son instrument. Quand cette tâche fut achevée, elle releva son archet, souffla, puis le reposa sur les cordes en expirant lentement. Le temps paru figé, comme capté par son archet, prisonnier des quelques instants précédents le début du morceau. Son poignet fut prit d'un spasme, avant de s'agiter immédiatement après. Une longue plainte lugubre sortie de l'instrument, comme s'il pleurait lui aussi le disparu. Prune ferma alors les yeux et le rythme se modifia, s'accélérant progressivement pour finir en une guigne effrénée. Au yeux d'un observateur extérieur, Prune aurait semblée possédée, comme si ce n'était plus elle qui jouait de la musique, mais bien son violon qui la contrôlait elle. Elle était en réalité transportée par la musique, purement et simplement, comme Ulysse envouté par les sirènes. Sauf que Prune était à la fois les marins ensorcelés et les sirènes charmeuses, elle contrôlait la danse tout en se laissant mener par elle.

Finalement, elle reposa son archet et son instrument d'un geste souple, avant de se jeter sur son bureau et d'attraper une feuille de partition. D'un geste fébrile, elle y transposa la mélodie qu'elle venait de créer, presque instinctivement. Elle y avait déjà travaillé des heures et des heures durant, et le désespoir qui l'avait envahi avait terminé son travail à sa place, y injectant exactement l'émotion qu'il y manquait.

Elle soupira de soulagement. Jouer de la musique avait toujours eut un effet cathartique sur elle. Il aurait simplement fallu qu'elle s'en souvienne un peu plus tôt, cela lui aurait sans doute éviter de craquer. Mais d'un autre côté, si elle ne l'avait pas fait, elle n'aurait jamais réussi son morceau...

Son regard se posa à nouveau sur sa partition toute fraiche. À tête reposé, elle y voyait de nouvelles nuances, tout ce qui avait fait que cette fois-ci, son morceau était réussi. Il avait une âme, alors qu'auparavant ce n'était qu'une suite de notes associée mélodieusement, mais sans aucun sens, aucune émotion.

Sa mère l'appela soudain à table et elle se crispa. Pourquoi fallait-il toujours qu'on trouve le moyen de la déranger alors qu'elle était en plein élan créatif ? À croire que sa mère le faisait exprès ! Elle descendit néanmoins de mauvaise grâce, elle n'avait pas vraiment le choix après tout. Si elle sautait un repas, ses parents lui poseraient forcément tout un tas de questions sans fin, d'ailleurs ils ne le lui permettraient surement pas sans une bonne excuse. Chez eux, les repas étaient sacrés, c'était de véritables moments de réunion de famille à trois. Et puis, si elle le sautait, elle aurait faim dans la nuit de toute façon, elle se connaissait assez bien pour savoir que son estomac était un petit monstre des plus vorace.

Une fois à table, son père lui servait une bonne portion de lasagne à la Gille comme il aimait le dire, préparées par ses soins avec sa recette de famille top-secrète. Prune se réjouit d'être descendu finalement. Tant pis pour son inspiration, sa gourmandise était plus forte, et pour rien au monde elle n'aurait ratée les lasagnes de son père. Cette journée se terminait de façon beaucoup moins dramatique qu'elle n'avait commencée, finir son morceau et manger ce plat, cela faisait déjà deux très bons points.

Ses parents commencèrent à parler de leur travail respectif, l'adolescente se plongea donc dans ses pensées. Elle n'avait pas besoin d'écouter, ils parlaient toujours de la même chose, à quelques nuances près.

-       Prune ? Prune !

À ces mots, elle releva soudainement la tête, surprise. Ses parents l'incluaient rarement dans ce style de discussion, d'habitude ils parlaient entre eux et elle, elle pensait à tout et rien en jouant avec ce qu'elle avait dans son assiette.

-       Tu pourrais être un peu plus attentive, se plaignit sa mère.

-       Désolée, marmonna la jeune fille, pas désolée pour deux sous.

-       Nous disions, ton père et moi, qu'il fallait que tu réfléchisses très sérieusement à ton avenir maintenant. Les inscriptions pour les études supérieures commencent peu de temps après les vacances de noël si je ne me trompe pas.

Elle se trompait, mais Prune ne lui fit pas remarquer. Sa mère avait peut-être tord sur la forme, elle avait raison dans le fond. Il devenait urgent que l'adolescente choisisse ce qu'elle voulait faire l'année prochaine. Mentalement, elle s'était toujours dit « plus tard », mais là, le fameux plus tard arrivait à la vitesse d'un bolide, et si Prune ne se bougeait pas un peu, elle allait rater le coche et se retrouver sur la touche. Et cela la terrifiait littéralement.

-       Hm... éluda-t-elle.

-       Sérieusement Prune, il faut impérativement que tu t'y mettes !

-       Pourquoi pas la prépa littéraire, comme on en avait parlé cet été, ajouta son père, plus conciliant.

Le problème, c'est que la jeune fille avait tout sauf envie de faire une prépa. L'idée n'était pas mauvaise, mais pour faire quoi après ? Sans motivation valables, elle savait qu'elle n'y arriverait jamais, surtout si cela s'avérait aussi dur qu'on le disait.

Ce qu'elle voulait faire elle, c'était un truc artistique plus tard. Quoi, elle ne le savait pas vraiment, mais l'art était la seule chose qui l'intéressait réellement. Elle adorait la littérature, mais le dessin et la musique avait une place tout aussi importante, voir plus, dans son cœur. Le problème, c'est qu'elle ne savait pas ce qu'elle préférait. Et dans tout les cas, ce n'était pas de « vrais » métiers, pas de ceux qui apportent une situation financière stable, de quoi avoir une bonne mutuelle, acheter une maison en banlieue et de vivre avec un mari, deux enfants et un chien. Ce n'était absolument pas ce qu'elle voulait, cela relevait plus du cauchemar pour elle, mais c'est ce que ces parents attendaient d'elle. Ils la voyaient déjà professeure de français ou bibliothécaire, elle en était persuadée.

Prune elle, se rêvait plus peintre ou musicienne, ou les deux. Mais le mot clé ici était « rêver », elle savait qu'elle n'avait qu'une infime chance d'y parvenir. Malheureusement...

Ce qu'il fallait maintenant, c'est qu'elle trouve des études pas trop complexes, de quoi lui laisser du temps pour dessiner et composer, mais qui lui permettrait quand même d'avoir un bon métier à l'arrivée, au cas où. Bref, c'était mission impossible.

Elle finirait surement à la fac, c'est ce qui lui semblai le plus réaliste vu ses notes, ni exceptionnelles ni mauvaise, et surtout le mieux au niveau financier. Elle pourrait y étudier les lettres, ou l'histoire... Quelques choses qui l'intéressait, et qui lui permettrait, au pire, de devenir prof. Elle en soupirait rien qu'en y pensant, passer le reste de sa vie dans un lycée, quelle horreur ! Mais c'était la solution la plus raisonnable, et peut-être qu'elle pourrait trouver quelque chose de mieux pendant son cursus...

-       L'université, ça me semble bien, lança-t-elle enfin à l'adresse de ses parents.

Ils lui sourirent, surement heureux qu'elle ait enfin une réponse à leur donner à ce sujet. Ils passèrent le reste du repas à lui parler de plan d'avenir et d'études, au plus grand désespoir de la jeune fille, qui ne voulait désormais plus que cette journée trop longue se termine enfin.

Quand elle remonta dans sa chambre pour se coucher, Prune eut soudain une excellente idée. Elle enfila un gros pull en laine et attrapa son violon, avant de descendre le plus discrètement possible les escaliers. Elle n'était pas le genre de fille à faire le mur pour aller en soirée alors que ses parents l'avaient interdit – ses parents à elle étaient plutôt du genre à la pousser à voir ses amis, ils la jugeaient trop introvertie. Non, elle avait seulement pris l'habitude de descendre toutes les nuits à une époque, pour se glisser en cachette dans le bureau de son père et y lire secrètement. C'est pourquoi elle savait exactement quelles marches grinçaient, quelles portes étaient dures à ouvrir en silence et dans quels meubles elle risquait de se cogner dans le noir. Après des années d'entrainement, elle était devenue presque virtuose dans cette discipline et pouvait se déplacer les yeux fermée dans toute la maison sans aucuns problèmes.

Une fois en bas, elle se chaussa toujours dans le noir et en silence, avant d'attraper ses clés et de sortir en essayant tant bien que mal de ne pas faire de bruit. Lorsqu'elle fut sortie avec succès, un sourire victorieux apparu sur son visage.

Elle contourna ensuite sa maison et marcha jusqu'au fond de son jardin. Elle s'arrêta au pied du grand chêne centenaire, qui prenait pied dans sa propriété mais dont les branches dépassaient en large majorité chez Neil. C'est pourquoi ils avaient fait de cet arbre leur lieu de rassemblement secret, c'est là qu'ils avaient passé de nombreuses journée de beau temps, à lire, écouter de la musique ou tout simplement discuter ensemble. C'était le bon temps, quand Neil était encore là.

Prune soupira de nostalgie, avant de se redresser, pleine de détermination. Elle cala son étui de violon sur son épaule, non sans crainte, avant d'attraper une branche par l'autre bras et de se hisser sur la première branche. Elle y parvient après de nombreux essais infructueux, elle n'était plus aussi agile qu'avant. Une fois à mi hauteur, elle s'installa confortablement, si on pouvait le dire ainsi, entre deux banches qui formaient presque un siège. Elle voulu regarder les étoiles, mais malheureusement le ciel était devenu nuageux. Alors elle sortit délicatement son instrument de sa pochette, avant de le poser sur son épaule. Elle inspira, puis commença à jouer. C'était son morceau, celui qu'elle venait de composer un peu plus tôt dans la soirée.

Tout en jouant, de petites larmes se mirent à glisser de ses paupières closes, mais elle ne s'arrêta pas pour autant. Et une fois le morceau finit, elle recommença, encore et encore. Elle voulait rester sur cet arbre, leur arbre, à l'infini, jusqu'à ce que Neil revienne, où alors qu'elle le rejoigne.

Quand elle reposa enfin son archet, épuisée, elle remarqua que la neige s'était mise à tomber, comme si le ciel, à sa façon, rendait lui aussi hommage au disparu.


❅❅❅

J'aime bien ce chapitre, sûrement parce que, si on replace le dessin et la musique par l'écriture, Prune c'est moi haha ! D'ailleurs, je n'y connais pas grand chose en musique, donc si jamais le passage du violon peut être amélioré, n'hésitez pas !

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