Parents
Samedi 1 juin, jour 107 - 16e semaine
-P...Papa? Maman? Qu'est ce que vous faites là?
-Nous avons eu une petite discussion avec Marion, tout simplement. Me répond froidement mon père. Alors comme ça, vous n'étiez pas de "simples amies" mais étiez engagée dans une "relation sodomite"? Dis moi que c'est un mensonge, ma fille...
Je déglutis difficilement, et retiens Joy qui semble bien partie pour aller lui retourner sa vision d'une "relation sodomite" dans la gueule.
-Je ne vois plus Marion depuis des mois, nous nous sommes fâchées. Dis-je.
Mon coeur bat à 100 à l'heure. Je marche actuellement en terrain miné. La question est, comment m'en sortir tout en donnant le moins d'informations possibles? Je n'ai pas non plus envie de mentir à mes parents de la sorte, mais ce début de conversation... ne m'inspire pas vraiment pour la suite, et c'est un euphémisme.
-C'est ce que nous avons pensé. Commence ma mère. Notre fille engagée dans une telle relation? Impossible. Et pourquoi Marion dirait-elle ceci à ton sujet, dans ton dos? Vous deviez forcément avoir eu une dispute. Cependant... elle nous a également dit d'autres choses, légèrement plus vérifiables.
Elle tend un doigt accusateur vers la courbe marquée de mon ventre, impossible à camoufler désormais au vu de sa taille. Évidemment... ceci, n'est pas quelque chose que je peux cacher. Et comment leur expliquer que ces enfants n'ont pas de père, et que leur mère est une des deux femmes se tenant à mes côtés? Devrais-je leur dire que je ne connais pas le père? Mais ce serait... encore pire. C'est le moment où je souhaiterais qu'Auguste ou Robin soit là pour se faire passer pour des petits amis modèle, mais... ce serait vraiment injuste pour Mei. Et je ne pourrais pas cacher la vérité indéfiniment.
-Qu'y a-t-il, ma fille? Continue ma mère, dure et froide. Tu ne dis rien?
-Mais il n'y a rien à dire, non? Vous voyez une femme enceinte? Moi, je ne vois rien du tout. Plaisante Joy.
-Je ne vous ai pas adressé la parole, jeune femme. La coupe ma mère. Êtes vous l'une des mauvaises fréquentations de ma fille qui l'ont poussée sur ce chemin de dépravation?
Joy est surprise de l'attaque, mais éclate de rire.
-Je suis très probablement pas la meilleure fréquentation du monde, dit-elle entre deux sanglots de rire, mais je suis rassurée que votre fréquentation n'ai pas rendu votre fille semblable à ce que vous êtes.
-Jeune fille, je vous demande de parler poliment à ma femme ou je...
-Ou vous allez faire quoi? Venir me frapper? Je vois déjà les titres, "Un vieil homophobe frappe une pauvre lesbienne aveugle dans la rue, la nation en émoi..."
-Joy... s'il te plait. Dis-je.
-Bieeen, bieeen, appelle moi quand tu auras besoin de quelqu'un pour les remettre à leur place. Bougonne-t-elle.
Mes parents reviennent à moi, et je vois que l'intervention de Joy ne leur a pas plu... du tout. Dans mon dos, je sens cependant la main de Mei qui enserre la mienne discrètement pour me communiquer du courage.
-Ainsi, ma propre fille a fini engrossée avant le mariage! Rugit mon père d'un seul coup. Impensable! J'ai toujours dit que c'était une terrible idée de la laisser aller habiter seule, mais alors là...
-Ce n'est pas digne de l'éducation que nous t'avons donnée, Anna... tu nous met dans l'embarras! Continue ma mère sur un ton plus doux.
-Je suis désolée, Maman. Mais je compte bien les garder, et...
-Aaah, ça oui tu vas les garder! Éructe mon père. Ne me dis pas qu'en plus, tu as osé pensé à l'avortement! C'est contraire à tout ce que les écritures nous enseignent, Anna, ne t'en rends u seulement pas compte?
-Je crois que si ils apprennent le reste ça va mal finir, vu comme ils s'énervent déjà. Murmure Joy.
Je sais qu'elle a raison. Et je sais que je dois leur dire la vérité. Mais comment faire... je suis simplement paralysée par la peur. Mes parents sont une forme d'autorité que je n'ai quasiment jamais discutée, encore moins combattue, et je me retrouve démunie face à ces deux être que j'aime tant et qui me font pourtant tant souffrir...
Mon père soupire longuement, et se tient l'arête du nez entre les doigts. Puis il reprend.
-Je n'ai pas envie d'en connaître les détails. Nous verrons plus tard ce que l'on peut faire pour le père, et si l'on peut organiser un mariage avant la date limite. Mais ce coup là, Anna, tu t'en souviendras! Allez viens.
-Mais... pour aller où?
-Je te ramène à la maison. J'ai voulu t'écouter et encourager tes désirs d'avenir, et c'est ainsi que tu me remercie? Tu reviens à la maison dès maintenant.
-Mais... et la fac?
-C'est TERMINÉ, Anna. Tu vas être mère. Tu crois peut être qu'une mère à le temps d'aller étudier? Bien sûr que non! Et je vois également qu'il reste un certain nombre de choses à corriger avec ton attitude avant que tu n'élève cet enfant à ton tour.
-Allez, viens mon Ange. Me dit ma mère en me tendant une main accompagnée d'un sourire compréhensif. Nous allons récupérer tes affaires dans ta chambre.
Je tremble. De peur ou de colère, je ne saurais le dire, mais je suis incapable de bouger. C'est comme si une chape de plomb s'était abattue sur le petit monde que j'ai construit ici, loin des strictes lois de la maison. Je ne veux pas partir... je ne veux pas aller avec eux. Mais quelles seront les conséquences... si je leur dis non maintenant? Ce sont mes parents! Je ne peux pas... je ne peux pas leur dire!
-Je suis la mère des enfants, et en cela, j'ai mon mot à dire. Coupe Mei en s'interposant.
Elle tremble légèrement, mais a un air résolu sur le visage. Celui de ma mère se décompose, et son sourire affable disparait.
-Quelle est cette idiotie...
-Je suis une femme transgenre. C'est de ma faute si votre fille est enceinte, et j'en prend l'entière responsabilité. Je l'aime, et je tiens à éduquer ces enfants avec elle car ils sont les miens. Si vous désirez absolument que cette alliance soit conclue par un mariage et que Anna est d'accord, je n'y vois pas d'inconvénient, mais je vous en prie, laissez la continuer à aller en...
-SILENCE... ABOMINATION! L'interrompt mon père. Comment une chose comme toi, qui salit le travail de notre créateur, peut elle seulement OSER poser un doigt sur ma fille? Comment OSE TU m'adresser la parole, toi qui est dans le faux, toi qui suit les traces du démon? Arrière! Je ne veux pas entendre parler de toi! Et Anna... viens tout de suite, je crois que tu as encore plus trespassé les règles que je ne le pensais.
-Non.
Ces mots sont sortis de ma bouche avant que j'ai pu les retenir. Ils sont sortis si naturellement que je m'en étonne moi même.
-Pardon? Me demande mon père, interloqué.
-J'ai dit: non, je ne te suivrais pas. Non, je n'arrêterai pas d'aller en cours pour devenir une "bonne mère" selon vos critères dépassés, et non, je ne rentrerai pas à la maison avec vous.
-Comment ose tu...!
-Eh oui, j'ose! J'aime les femmes, papa, maman, et j'ai toujours aimé les femmes, et je l'assume parfaitement! Oui, Marion n'était pas une simple amie, elle était ma petite amie pendant trois longues années! Et maintenant, je sors avec Mei, une femme trans magnifique et si gentille, de qui j'attends deux jumelles! Je suis amie avec un couple gay et avec une lesbienne aveugle, je fais des études en sciences. Et je continuerai à vivre ma vie de cette manière, n'en déplaise à vos croyances d'un autre temps.
-Tu dépasse les bornes, je...!
Ma mère l'interrompt pour me regarder droit dans les yeux.
-Anna... écoute moi, ma chérie... nous sommes ta famille. Tu ne peux pas nous abandonner comme cela.
-C'est marrant, j'ai plutôt l'impression que c'est vous qui l'abandonnez. Crache Joy à son intention. Vous me faites pitié, j'aurais honte d'avoir des parents comme vous.
-Anna! Ma chérie!
C'est Mei qui s'interpose cette fois ci.
-Anna a fait son choix de vivre avec nous. Dit-elle. Il ne tient qu'à vous de l'accepter au lieu de fuir.
Face à ces oppositions, ma mère laisse finalement tomber son masque.
-Très bien, petite peste! Vis dans le péché si cela te complais à ce point! Mais ne compte plus sur nous pour quoi que ce soit. D'ailleurs... ne nous parles même plus! Tu n'existe plus! J'espère que tu as de quoi payer ton loyer et ta nourriture! Allons y.
-Pas avant que je lui ai donné une leçon. Gronde mon père en s'approchant, menaçant.
-Ne la touchez pas! Préviens Mei.
-Déguerpis, vile chose. Répond-t-il en la frappant à la tempe.
Il lève ensuite la main pour me frapper. Mais un coup de pied vient le frapper au torse et l'envoie en arrière, lui coupant la respiration.
-Je crois que t'as oublié un truc, vieux cinglé. Jubile Joy. T'es un vieux crouton croulant, et moi une ceinture noire. Quand j'entends le nombre de conneries que vous débitez tous les deux, je me demande qui est le plus aveugle ici. Maintenant dégagez. Vous voulez plus de votre fille? C'est que vous la méritiez pas de toute façon. Et laisse moi te redire un truc, le vieux... tu retouche une seule fois à une de mes potes, et tu pourras aller jouer aux osselets avec ton seigneur au ciel avec tous les os que je t'aurais brisé, pigé?
Mon père se relève, me jette un dernier regard dédaigneux, puis s'en va sans se retourner, et ma mère en fait autant. Des larmes inondent mes yeux et mes joues alors que je les vois disparaître au bout de la rue... peut être définitivement. J'éclate en pleurs dans les bras de Mei, à peine consolée par ses caresses et par la main supportive de Joy sur mon épaule.
J'ai été rejetée... par mes propres parents...
Comment vais-je pouvoir vivre avec ceci sur le dos?
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