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19.

Me réveiller le lendemain matin, avec le gamin dormant à côté de moi me donna un étrange sentiment de malaise, comme invraisemblable et inexplicable. Je ne gardais aucun souvenir de la nuit passée et de le voir ainsi collé à mon corps, dans ce petit lit pour une personne, me rendit confus.

J'étais bloqué entre lui et le mur de ma chambre, dans l'incertitude de savoir si je devais bouger et le réveiller ou patienter. Je choisis de ne pas attendre et me relevai d'un coup. Kim Taehyung se réveilla, en remuant, les cheveux en bataille, et lorsqu'il ouvrit les yeux, ses pupilles s'écarquillèrent en me voyant aussi près. Véritablement surpris, il se redressa subitement avant de tomber du lit dans un mouvement de panique.

Je m'enquis de sa chute tandis qu'il faisait une grimace en se massant le coccyx.

-Pourquoi tu fais le surpris ? m'étonnai-je, c'est toi qui as dû monter dans le lit cette nuit...

-Je ne me souvenais plus que j'étais là, maugréa-t-il.

-Il faisait trop froid au sol ?

-Non, rien à voir, je l'ai fait pour toi. Tu fais des cauchemars à chaque fois et tu dors mieux quand il y a quelqu'un près de toi.

À demi assis, la couette remontée jusqu'à mes épaules, je levai un sourcil sceptique :

-Hein ? Certainement pas.

-Si je te le dis.

-Autant admettre que toi, tu ne voulais pas dormir seul...

-Mais pas du tout !

-Ou alors tu voulais dormir à côté de moi, remarquai-je en fronçant les sourcils.

Pourquoi ferait-il une chose pareille ?

-Certainement pas ! cria-t-il soudainement.

Ses joues avaient rougi et soudain contrarié, il se leva et sortit rapidement de la chambre devant mon regard ensommeillé et mon esprit peu allumé. Je me frottai les yeux avant de consulter mon réveil.

Le gosse n'allait pas devoir faire la gueule longtemps, on était déjà à la bourre.

Jaehyo, qui m'attendait devant le petit portillon de la demeure familiale, comme chaque matin, parut véritablement surpris en voyant Kim Taehyung à mes côtés. Surpris d'abord puis bien moins enthousiaste face à cette idée. Il ne posa néanmoins pas de question et, sur la durée du trajet, n'évoqua alors que sa nouvelle petite amie, Eunha, et ses inquiétudes quant à lui proposer un rencard digne de ce nom.

Ce ne fut qu'en arrivant près du lycée qu'il sembla avoir une prise de conscience soudaine et me donna une grande tape dans l'épaule :

-Bon anniversaire, mec !

Ah oui, tiens.

Kim déguerpit rapidement une fois le portail de l'établissement passé et je n'eus même pas le temps de lui rappeler qu'on pouvait déjeuner ensemble ce midi.

Un peu plus loin, en arrivant en classe, Minho me sauta dessus en chantonnant, d'une voix franchement instable, un Happy Birthday mal articulé tandis que Wooji se contenta d'une simple salutation sans s'étendre. Évidemment, l'indiscrétion du plus grand d'entre nous entraîna la fuite d'une information que j'aurais souhaité conserver secrète pour la journée. J'essuyais péniblement, pendant dix minutes, les messages de bon anniversaire de la part de mes camarades de classe.

-La majorité, mec ! s'enflammait Minho. Tu te rends compte de tout ce que tu vas pouvoir faire ?

-Il parle de porno, me précisa Jaehyo platement.

-J'avais compris, hasardai-je.

-Je te rappelle que la majorité c'est aussi le droit de vote et le permis de conduire, argua Wooji.

-Yoongi, tu vas pouvoir emmener ta petite amie en rencard en voiture ! scanda le plus grand du lot sans écouter ce que son ami lui disait.

Il était véritablement sur une autre planète.

-Quand je pense qu'il faut encore que j'attende l'année prochain avec la mienne....

-Tu comptes faire quelque chose ? interrogea le plus petit de la bande.

-Pas vraiment...

-Hoseok n'est pas encore arrivé, je crois, supposa Jaehyo, sinon il aurait déboulé pour faire une chorale avec Minho et te chanter ça toute la journée...

Je m'arrachai un sourire tandis qu'ils filaient à leur place alors que la matinée de cours débutait par l'entrée de notre professeur principal.

Cet anniversaire n'emplissait pas vraiment mes pensées, j'étais par contre bien trop concentré par ce qui s'était passé hier entre Kim et les quatre gosses de deuxième année, dont l'affreux Park Jimin qui semblait responsable de tout cela. Que pouvais-je faire de plus ? M'en remettre à ces profs désuets et sans intérêt qui ne voyaient que leur petite routine et qui ne souhaitaient surtout pas faire de vagues ? Certainement pas.

Je devais parler à Hoseok.

Lorsque l'heure du déjeuner arriva, je me levai précipitamment et, sans même prévenir qui que ce soit, et quittai la classe rapidement. Dans le couloir adjacent aux salles de classe, mon ami sortait d'une autre classe avec son grand sourire plein de joie. Il m'enlaça amicalement :

-Joyeuse majorité, hyung !

-Merci, éludai-je. Je vais retrouver Kim. Tu viens avec moi ?

-Tu veux que je déjeune avec vous deux ? s'étonna-t-il.

-Oui, il faut qu'on reparle d'hier, c'est important !

Les sourcils de mon interlocuteur se froncèrent immédiatement et il perdit complétement son sourire avant d'acquiescer malgré tout, après quelques secondes de latence :

-Je récupère mon repas et je te rejoins.

-On se rejoint dans la salle d'art alors.

J'étais confiant à l'idée qu'à nous trois nous allions trouver une solution. Pourtant, plusieurs minutes plus tard, le gamin, lui, m'accueillit par un :

-Je ne veux pas reparler d'hier.

-Bien sûr que si !

-Bien sûr que non ! répliqua-t-il farouchement.

-Kim, insistai-je, ce qui s'est passé hier était très grave et...

Il se boucha aussitôt les oreilles devant mes yeux ébahis par tant d'insubordination. Ma mine prit alors une tournure plus agacée que je ne l'étais jusque-là :

-Je le fais pour toi !

-Pour moi ou pour toi ? rétorqua-t-il durement. Tu n'agis que dans ton intérêt !

-Ça, ce n'est pas vrai et tu le sais ! Les choses ne peuvent pas rester comme ça ! On ne peut pas fermer les yeux sur des horreurs pareilles ! Tu devrais être le premier à le dire à le revendiquer parce que c'est toi qui subis ça !

-Je...

Il avait tremblé et d'un geste nerveux tira sur ses mèches de cheveux, devenues trop courtes pour cacher son visage à présent :

-Je ne veux pas avoir plus de problèmes...

-Tu n'en auras pas, assurai-je d'une voix plus calme.

-Bien sûr que si et tu le sais ! Comme si les choses étaient faciles... ironisa-t-il.

-On peut pas les laisser s'en sortir en sachant qu'ils sont coupables, qu'ils font du mal aux autres...

-Est-ce que ce n'est pas le propre de la société pourtant, d'agir ainsi ? Est-ce que ce n'est pas ce que les humains sont : bêtes et méchants ?

Touché.

Je me laissai tomber sur une chaise, interrompu dans mon laïus, sidéré. Incapable de savoir ce qu'il fallait répondre à ça. Ce fut à ce moment à qu'Hoseok toqua et fit coulisser le battant pour entrer. Même si Kim avait l'habitude le voir, il se recroquevilla un peu, baissant la tête comme un animal effarouché en le voyant arriver.

-Qu'est-ce que tu leur as dit, aux gamins, hier ? l'interrogeai-je soudainement sans lui laisser le temps de s'installer.

Mon ami souffla en s'asseyant à côté d'un pupitre où se trouvait une ébauche de peinture orange plutôt suspecte.

-Ce qui devait être dit. Je les ai réprimandés.

-Et tu crois que ça a suffi ?

-Oui, je pense.

Pas moi.

-Ce Park quelque chose semble doué pour mentir.

-Hyung, commença Hoseok en prenant un visage un peu ahuri, Jimin est vraiment quelqu'un de gentil, d'intelligent et de serviable...

-Ou pas.

Je voyais bien que mes propos ne lui plaisaient pas, cependant il admit :

-Je n'aurais jamais cru qu'ils feraient ça, ce sont pourtant des hoobaes vraiment amusants et très agréables. Ils sont bons élèves, ils participent à des clubs sportifs...

-Ils cachent bien leur jeu !

J'étais énervé et mes gestes demeuraient secs et brutaux en ouvrant ma boîte de repas. Ma génitrice avait dessiné un foutu bonhomme avec deux yeux et un sourire en omelette roulée au milieu du riz.

Putain.

-Kim ne veut pas porter plainte ! Dis-lui, toi !

Hoseok et le gamin se fixèrent en coin comme s'ils tenaient ainsi une conversation silencieuse entre eux dont j'étais exclu. J'attendis, mais rien ne vint.

-Tu n'es pas d'accord avec moi ? demandai-je brusquement.

-Si, je pense qu'il faut dénoncer ce genre de comportements. Mais je crois que c'est l'une des choses les plus difficiles à faire, répondit doucement Hoseok.

-Pas forcément...

-Hyung, que toi tu t'en sentes capable c'est très bien, mais je doute que pour d'autres ce soit aussi simple.

Kim acquiesçait à tout ce qu'il disait et les voir ainsi de connivence ne me plut étrangement pas. C'était comme si à l'heure actuelle rien ne me plaisait plus et que tout m'irritait, davantage.

-Tous les autres deuxième année ont assisté à ça et personne n'a rien dit ! scandai-je.

-Parce qu'ils ont peur que ça puisse se retourner contre eux... Tu sais bien comment ça marche, comment les individus changent de cible.

-Je sais, je sais que beaucoup ne peuvent exister que par l'appartenance à un groupe et qu'ils ne veulent pas se sentir rejetés de ce même groupe, avouai-je d'un geste de la main. Mais que les professeurs ne fassent rien, qu'on ferme délibérément les yeux, qu'on ne fasse que convoquer les parents alors qu'on sait pertinemment qu'aucun d'entre eux ne mettra la scolarité de leurs enfants en danger, ça me débecte !

J'étais maintenant trop agacé pour déjeuner et refermai brutalement le couvercle sur ce sourire dégueulasse qui semblait me rire au nez.

-Tout prévaut à la réussite scolaire. Chaque géniteur paye une petite fortune les écoles et plus encore les universités et même si leur propre enfant est un monstre, on fermera les yeux pour qu'il puisse suivre le grand modèle de réussite sociale. Ainsi les parents deviendront eux-mêmes un grand modèle de réussite sociale aux yeux des autres famille. Le serpent se mord la queue.

-Hyung... tenta Hoseok soudain plein de désarroi.

-Ça ne vous afflige pas ? m'énervai-je, que ça soit ainsi, qu'on vive dans un univers aussi conformiste ? Aussi lisse ? Qu'on gomme tout ce qui dépasse ? L'école ne fera rien simplement parce que les parents de ces gamins pourraient se retourner contre eux et les accuser de mettre en danger la scolarité de leur fils. Ça va faire tapage alors chacun ferme bien sa gueule pour que rien ne change et que tout persiste...

-Hyung...

-Il faut se battre ! Il faut faire péter ces soi-disant directives de bonnes pratiques de merde ! Mettre un coup de pied dans cette fourmilière à la con !

Le silence me répondit et si Kim me fixait avec un rejet, les sourcils froncés, l'air peu aimable, Hoseok paraissait éberlué :

-Qu'est-ce qu'il y a ?

-Comment ça qu'est-ce qu'il y a ? Je viens de te le dire !

-Que ça te soit injuste, je comprends bien, et que tu te sentes pieds et mains liés pour faire quelque chose, d'accord. Mais pourquoi ça te met autant en rage ?

-Pourquoi toi ça ne te met pas en rage ? m'écriai-je.

-Je vais tacher de les surveiller un moment mais de là à hurler dans la salle d'art à l'heure du déjeuner, il y a un grand pas...

-Je ne hurle pas !

Ma gorge me fit mal et je soufflai durement. Je devais me reprendre. Hoseok marquait un point : rien ne pourrait être fait, rien ne serait fait. L'heure n'était même pas encore à internet, aux réseaux. Pour que les choses changent il devait y avoir de la visibilité. Visibilité impossible à obtenir à l'heure actuelle. Mais c'était si frustrant, si cauchemardesque que de se sentir impuissant.

Une main se posa sur mon poignet, je sursautai. Kim se tenait à côté de moi sans que je ne l'aie vu se lever, trop concentré sur mon débat intérieur. Debout face à moi, il lâcha :

-On clôt ce sujet

-Non...

-Si.

J'allais m'insurger mais il m'arrêta :

-Je ne veux pas en reparler et je ne porterais pas plainte pour quoi que ce soit.

-Mais...

Ça me dépassait complétement et c'était si affreux de ressentir cette impression de totale impuissance. Pourquoi devais-je ressentir de la souffrance et de la paralysie à chacun de mes gestes, chacun de mes pas, depuis mon retour ? Comme si j'étais empêtré dans un marais gluant duquel je n'arrivais pas à sortir.

-Ils vont continuer de te faire subir ça...

Les pupilles de Kim tremblèrent légèrement et pourtant il resta droit et presque digne en me répondant :

-Je sais, peut-être...mais si je fais quelque chose, pire ce sera. Je préfère subir même si c'est lâche.

Son pouce caressa mon poignet et je trouvai son geste étrange, comme si j'avais soudain oublié tout ce qui pouvait relever du contact humain.

-Merci.

Bêtement, je me sentis complètement con. Ma rage diminua soudainement et je le fixais, un peu hébété, arrêté par ce simple mot comme soudain soulagé de quelque chose. Derrière lui, Hoseok s'arracha un petit sourire tandis que je clignais des yeux.

-C'est suffisant de savoir que quelqu'un me croit et ait envie de me protéger.

Et ce fut tout, le gamin revint à sa place et termina son repas sans m'accorder le moindre regard. Mon meilleur ami leva ses baguettes pour m'inviter à manger et dans un silence qui me gêna, où je me sentais ahuri et étourdi, je repris mon bento.

Ce ne fut qu'en sortant de la salle plusieurs minutes plus tard, que je me demandai si je ne vivais pas là un anniversaire complétement différent de la dernière fois. Est-ce que quelque chose était véritablement en train de changer ?

Alors que je prenais conscience d'une différence dans la grande chronologie de ma vie, Kim murmura :

-Je crois que j'ai envie de peindre à nouveau maintenant...

Et je sus, soudain, qu'il se sentait plus dans la vie que dans la mort et que sur ce fil d'incertitudes sur lequel il marchait, il venait de pencher du bon côté. Du mien.

Et ce fut le plus intense soulagement de ces derniers mois.

*******

Les semaines défilèrent beaucoup plus rapidement que ce que j'avais imaginé.

Mon anniversaire était à présent loin et le printemps s'était pointé puis avec lui, les beaux- jours.

Les putains de beaux jours de merde.

Une certaine routine s'était installée au fil des semaines. Un ronron rassurant dans une seconde vie qui ne l'était pas tout le temps. L'intensité des cours me faisait me concentrer exclusivement sur mes révisions. Je continuais de rejoindre Kim Taehyung dans sa salle d'art où la plupart de ses tableaux demeuraient noirs et d'un réalisme à la fois fascinant et morbide. Malgré tout, je préférais voir ses pensées noires sur un tableau blanc que conservées à l'intérieur de son esprit.

Il continuait de me faire peur. Parfois ses mots, son discours m'angoissaient littéralement comme si j'étais toujours sur un socle prêt à basculer. Il passait régulièrement dormir dans la demeure de mes géniteurs, suffisamment pour que j'aie l'impression de faire une colocation dans ma propre chambre. Il n'était pas plus causant qu'habituellement mais ça maintenait un lien. Inhabituel, certes, mais important quand même. Je lui avais presque greffé mon ancien téléphone au corps et l'avais aidé à pouvoir taper des messages sur un clavier T9. Depuis il était joignable.

Mais il parvenait à m'ignorer quand même.

Néanmoins, si l'approche d'un ciel bleu, de températures agréables, de chants d'oiseaux parmi les arbres ne m'enchantait pas, c'était parce qu'on approchait de l'instant « fracture ». Ce moment où tout allait basculer ; et j'ignorais exactement ce que je devais faire.

Ou comment le faire.

Je commençais à porter une attention toute nouvelle à mon géniteur comme si je cherchais à capter le moment semblable à mes souvenirs.

Ce qui était cruel avec l'esprit, c'était que parfois, les choses les plus importantes demeuraient floues quand on y repensait et dans ma situation actuelle, c'était tout sauf aidant. Néanmoins je m'apercevais avec recul aujourd'hui, qu'il s'absentait de plus en plus souvent. Il était de plus en plus régulièrement en « réunion » tard le soir ou en « séminaire » le week-end, et que ni le moi de l'époque, ni ma génitrice dans le déni le plus total, nous nous étions posé des questions. Quand on ne regardait pas là où il fallait, on ne voyait rien.

Il y avait aussi le problème Kim Namjoon. L'idée de revoir cet étrange personnage, son aura étouffante et la frayeur qu'il m'inspirait ne m'enchantait guère. Pourtant n'était-ce pas ce qu'il avait promis : que si j'intervenais pour changer quelque chose il apparaitrait et, avec lui, le sentiment abominable d'avoir eu conscience de ma propre mort ?

Il restait alors la dernière question, est-ce que cela devait être différent ?

« C'est n'est pas parce que ça ne peut pas changer que ça ne peut pas être différent. »

Cette formule m'empoisonnait l'existence, j'y pensais sans cesse et je peinais à rester concentré sur mes cours et mes révisions, tout en demeurant alerte face aux humeurs mélancoliques de Kim. Mon cerveau semblait avoir trop de choses à gérer.

Je pouvais tout lâcher, baisser les bras, abandonner, mais non seulement ça ne me ressemblait pas, mais en plus j'étais incapable de laisser les choses se faire patiemment, calmement et avec sagesse. Je n'avais aucune sagesse, je n'étais qu'un nid de vengeance et de regrets, je n'étais que le fruit des conséquences de cette autre vie qui se reportaient sur celle-ci.

-Alors, tu vas choisir quoi ?

Je relevai la tête, tiré de mes pensées, pour faire face à la bouille de renard de Wooji qui avait emprunté le siège de mon voisin pour s'installer sur le pupitre juste devant le mien. Nous étions à la pause de l'après-midi, le temps de quelques minutes de liberté entre deux cours, les fenêtres étaient ouvertes et les uniformes affichaient à présent tous des chemises à manches courtes.

-De quoi donc ? répondis-je sans comprendre ce qu'il voulait me dire.

-Pour la fiche d'orientation pour l'année prochaine, reprit-il en désignant d'un coup de menton le papier entre mes mains.

Ah oui. C'était là l'origine de la fuite de mes pensées. J'étais rattrapé par la réalité. Voilà que le milieu d'année approchait, les congés d'été mais aussi l'anticipation de la suite.

-Je ne sais pas encore...

Je ne me souvenais même plus de ce que j'avais écrit la dernière fois, parce qu'après tout, ça ne s'était jamais réalisé.

-Tu ne m'as pas l'air emballé, remarqua-t-il.

Je haussai les épaules avant de découvrir qu'il était seul. Le grand dadet toujours à ses côtés faisait rire la galerie à quelques rangées devant nous et Jaehyo devait être encore parti voir Eunha puisqu'ils avaient décidé de se voir au moins cinq minutes par pause et par jour entre deux couloirs.

-Je suis un peu en prise avec beaucoup d'autres choses, admis-je. Et toi alors, qu'as-tu inscrit sur ta fiche ?

-Fac d'histoire.

Un souvenir me revint et j'eus soudain la certitude que j'avais déjà eu cette conversation avec lui, quelque part dans ma vie. Il était passionné par les seigneurs médiévaux et possédait toute une collection de statuettes de samouraïs.

-Oui, logique.

-Pourquoi tu n'inscris pas la faculté de mathématiques ? Ce n'est pas ce que tu voulais faire au départ ?

Était-ce vraiment ça que je voulais faire à l'époque ? Pourtant, en fixant l'encart sous mes yeux, je ne m'en sentis pas légitime. Si rien ne changeait, que je le remplisse ou non n'aurait aucun impact.

-On a une semaine pour rendre le document, me fit-il remarquer.

-Je sais...

Je ramassai la feuille dans mon sac et nos regards se croisèrent, me poussant à froncer les sourcils :

-Tu veux dire autre chose ?

-Non, pas vraiment, éluda-t-il en haussant les épaules. Je ne fais pas toujours des remarques.

À peine.

Pourtant il finit par demander ce qui semblait le démanger depuis que nous étions arrivés :

-Tu comptes t'inscrire à Daegu ou à ailleurs pour la fac ?

Je haussai les épaules à mon tour :

-Je ne sais pas encore, ça ne fait pas grande différence je pense.

-Si.

Il avait sa petite mine, celle qui ne disait rien qui vaille. Il avait beau avoir sembler minuscule, un petit visage de renard et l'aspect d'un collégien, il était souvent le plus sévère des trois autres et le plus rigoureux et organisé.

-On ne se verra plus si tu t'en vas.

-C'est vrai, remarquai-je.

-J'ai l'impression que ça t'importe peu... Les semaines passent et je me dis que si tu t'en vas sur la capitale, on ne te reverra jamais.

Je fronçai les sourcils en me redressant, soudain contrarié d'être mis devant un constat négatif. Vrai, mais négatif tout de même.

-Pourquoi tu es persuadé de ça ?

-Ça se voit, tu agis avec détachement depuis l'année dernière et tu ne te préoccupes que de Hoseok ou du hoobae de deuxième année.

-Tu ne vas pas être comme Jaehyo et me faire chier avec ma relation avec Kim... maugréai-je.

-Non, asséna-t-il de manière intransigeante, mais admets quand même que c'est vexant.

-Pour vous ?

-Évidemment pour nous.

-Je ne pensais pas que tu me portais dans ton cœur à ce point-là, ironisai-je.

-Arrête de faire l'adulte et le mec au-dessus de tout, persifla-t-il, tu le sais très bien.

-Mais il n'y a que toi pour le dire.

-Y a toujours que moi pour te dire les trucs qui fâchent, c'est pour ça qu'on a tant de mal à s'entendre.

Touché.

-Je ne vais pas te faire une déclaration d'amitié, répliquai-je, ce serait ridicule.

-Mais sais-tu au moins ce que c'est, l'amitié ?

Il se leva d'un coup et s'en alla ainsi, me poussant à fermer les yeux et soupirer lourdement.

Ma fierté eut du mal à l'admettre, pourtant il avait raison.

Je ne savais plus que c'était.

Le lendemain soir, allongé sur le dos dans mon lit je tenais en hauteur, au-dessus de mes yeux, cette même feuille d'orientation et son encart vide sans parvenir à faire le tri dans mon esprit.

D'un seul coup d'œil, de là où j'étais et si, en penchant la tête sur le côté, j'apercevais ma frise chronologique coincée entre mes livres posés debout sur mon bureau.

Et si le loupais le coche ?

Et si je me trompais sur la date et qu'à force d'avoir peur, il se produisait exactement ce que je redoute ?

Tout n'était question que de détails, d'ajustements, et pourtant j'étais persuadé que ce que Kim Namjoon voulait était tout simplement que je lâche prise, que j'accepte cette fatalité.

Que j'accepte le désastre sans chercher à le rattraper.

Et ça m'était insupportable.

Le bruit d'un gros vibreur résonna dans ma couette. D'une main, à l'aveugle, je tâtonnais avant de saisir mon nouveau téléphone, les prémices des smartphones tactiles, et m'aperçus que Kim Taehyung avait envoyé un message.

Il n'utilisait toujours qu'un seul smiley : le smiley pas content.

« Peux pas venir pour ce weekend. »

Pourquoi ? tapai-je en fronçant les sourcils. C'était nouveau, ça ? Il était le premier à s'incruster dès qu'il pouvait et là, soudainement il ne pouvait plus.

« Parce que. »

Parce que quoi ?

« Pare que c'est comme ça. Tu es chiant. »

Est-ce qu'il allait bien tout de même ?

« Oui, arrête d'être stressant. »

-Je suis stressant si je veux, grognai-je en rédigeant ma pensée.

Et voilà que me revenait le smiley pas content à la figure dans le message suivant. Je lui rappelai qu'il pouvait m'appeler s'il y avait quoi que ce soit.

Ainsi j'allais passer mon premier week-end depuis deux mois, complètement seul. Je relevai la feuille à nouveau, l'air toujours aussi circonspect avant de soupirer lourdement et relever tout mon corps.

Debout devant mon bureau, j'observais la fenêtre et la rue du quartier ainsi que le jour qui descendait derrière les habitations, tintant le ciel de rose et de bleu pastel. Ce serait vraiment plus chouette si Kim peignait cela plutôt que ses tableaux obscurs, réalistes, morbides et angoissants.

Mais visiblement ses goûts et les miens étaient diamétralement opposés.

Je soupirai à nouveau.

Qu'est-ce que je devais faire maintenant ?

Autant je n'avais pas hésité pour la scène du toit, autant là j'étais rempli de doutes et je nageais à l'aveugle. J'en voulais à Kim Namjoon de m'avoir laissé planté là, sans guide, sans code, sans règle avec seulement la certitude inébranlable que je pouvais mourir à nouveau.

Je ne savais pas quand, ni comment, mais tout pouvait recommencer à zéro.

Je clignai des yeux, mon corps se redressant brutalement car devant la maison, marchant avec sa sacoche à la main, mon géniteur rentrait de sa journée de travail. Son téléphone sonna avant qu'il ne passe le portail et il décrocha. J'avais tant envie de lui mettre un poing dans la figure, le poing que je n'avais jamais pu lui envoyer. Celui de la colère et la rage constante, celui de l'enfant abandonné. Je le voyais vivre sa vie sans se préoccuper ni de moi ni de ma génitrice, l'air de se trouver invulnérable alors qu'il était sûrement au téléphone avec sa maitresse, devant la maison. Maîtresse qu'il allait rejoindre bientôt pour refaire une autre vie comme si celle-ci n'avait jamais existé.

Et moi, moi je me prenais la tête pour saisir les responsabilités de mes deux exitances tandis que lui tournerait la page, notre page, sans aucun remords.

Enfoiré.

Les larmes me montèrent et mes poings se serrèrent et j'eus envie de hurler à qui pouvait l'entendre que je n'en pouvais plus de cette phrase, de ce que ça impliquait.

Soudain ma décision fut prise et les narines frémissantes, le cœur en rage, je quittai ma chambre en claquant la porte, dévalai l'escalier jusqu'à celle de l'entrée et sortis me confronter à l'air frais de la soirée, chaussons aux pieds, sans me préoccuper de quoi que ce soit d'autre que de lui, à cinquante mètres, au téléphone, tâchant d'être le plus discret possible.

Qu'il aille se faire foutre, putain.

Il fallait qu'il morfle comme j'avais morflé ces trente putains dernières années à cause de lui, à cause de ce qu'il avait fait. Alors son nez, j'allais le casser, et si je pouvais l'envoyer à l'hôpital j'allais le faire aussi parce que ça, ça devait arriver, je me l'étais juré.

Je m'avançai d'un pas décidé, vibrant de rage, le poing serré, avec l'envie de rugir. Il me vit, sembla surpris de cela, ainsi il écourta sa conversation.

Lui, mon père, lui qui me ressemblait tant, lui auquel j'allais de plus en plus ressembler en vieillissant. Sa petite taille, ses petits yeux noirs, son nez rond, sa peau claire et ses cheveux comme les miens. C'était comme une malédiction, un châtiment divin, de devoir avoir le même visage que lui pour le haïr encore plus tout comme j'allais me haïr moi.

-Yoongi ?

« C'est n'est pas parce que ça ne peut pas changer que ça ne peut pas être différent. »


Je me figeai brutalement, la phrase avait résonné dans mon esprit mais pas avec ma voix et un frisson de terreur me prit encore cette fois.

Je me mis à regarder partout autour de moi, dans tous les détails, du petit jardinet propret, de la petite haie, du portillon, de la rue vide, de ses lampadaires qui s'allumaient. Il était là, je le sentais, je l'entendais, et pourtant cette abominable création que devait être Kim Namjoon ne se montra pas. Le sang battait à mes temps et mes mains se mirent à trembler.

-Yoongi, tout va bien ?

Mes yeux étaient fous de rage mais mon cœur se mettait déjà à ralentir doucement.

Oui, ça ne pouvait pas être différent.

Ça ne pouvait plus l'être, c'était trop tard maintenant.

Ce n'est pas lui que je devais changer.

Mais moi.

-Pourquoi tu es sorti avec tes chaussons tout d'un coup ? Il y a un problème ? c'est ta mère ? s'inquiéta-t-il.

Je lâchais prise, définitivement.

J'abandonnais la colère, la vengeance, toutes ses émotions négatives.

-Je suis au courant.

Il releva la tête, confus :

-De quoi donc ?

-De toi et de ta maîtresse.

Il blanchit soudainement, et je le trouvai étrangement ridicule, mal habillé dans ce costume sans charme avec sa sacoche dans sa main. Il me parut étrangement fragile.

Comme un gamin.

-Je suis au courant de tout et maintenant, il faut qu'on en parle.

Et plus que je ne le vis, je sentis la présence invisible et oppressante de Kim Namjoon s'effacer et avec elle, toute ma rancœur.

Tout le passé.

Toute ma colère d'enfant abandonné.

Mes épaules s'abaissèrent et mon esprit devint soudain limpide.

Oui, ainsi ça ne sera pas différent mais ça aura changé.



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Chapitre corrigé par automnalh

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