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11 : Le panier au pied de l'arbre


C'était pourtant une tâche que je répétais chaque année. Il ne manquait pas que tous les étés, je sous-estimais à quel point la cueillette était épuisante. Jusqu'à midi, ça allait, car le soleil frappait de l'autre côté de la maison. Marin et moi avions ramassé les cerises en silence, non pas parce qu'on rien à se dire mais parce qu'on était placés aux opposés de l'arbre. Comme il était bien plus grand, il cueillait en hauteur, perché sur un escabeau. Je ratissais le bas sur l'échelle accolée au tronc. Vers 11 heures 30, Henna nous a ramené du thé à la menthe et a déclaré la pause syndicale jusqu'à 13 heures. On s'est assis dans l'herbe au pied du cerisier. Marin était en nage. Le soleil commençait à passer par-dessus la maison.

─ J'ai l'impression de m'être fait arnaquer, a-t-il déclaré. Pourquoi c'est moi qui suis au soleil ?

─ On échangera cet après-midi, lui ai-je promis.

Le thé à la menthe et la tonne de sucre à l'intérieur ont été salvateurs. J'ai reposé ma tête contre l'écorce et j'ai fermé les yeux, les muscles des bras en compote.

─ On est bien niveau cueillette, quand même, a affirmé Marin. À deux, je veux dire.

J'ai rouvert les yeux pour épouser les paniers à côté de nous. On en avait rempli un et recouvert le fond d'un autre. En réalité, on était plus que bien. D'habitude, la matinée n'était pas aussi productive. Entre ceux qui arrivaient en retard, ceux qui allaient aider à préparer le repas pour échapper à la corvée et le manque conséquent d'escabeaux, il n'y avait jamais plus de deux personnes à la cueillette. On était très bien.

─ Et vous comptez faire quoi de toutes les cerises après ça ?

─ Eh bien, ai-je répondu, déjà, tu repartiras avec un gros Tupperware rempli de quoi te nourrir uniquement de cerises pendant une semaine.

─ Super, moi qui avais des problèmes de transit.

J'ai roulé les yeux.

─ Puis après, généralement, on les distribue aux voisins, à la famille quand elle vient et ce qui reste, on en fait de la confiture.

Marin s'est contenté d'acquiescer, l'air impressionné.

─ C'est bon, ai-je plaisanté, tu peux le dire. Ce qu'on fait ne sert à rien et c'est du temps perdu. J'ai essayé de pousser ma grand-mère à en vendre au moins un peu, mais elle refuse, elle préfère tout donner.

─ Quoi ? Non ! Je trouve ça super cool. À quoi ça servirait de les vendre alors que ça rend service à la communauté ?

J'ai écarquillé les yeux avec exagération :

─ Marin ! La redistribution des richesses, la haine des riches, le service à la communauté. Est-ce que tu serais un... un communiste ?

Il a éclaté de rire.

─ Tu sais quoi ? Oui. Donnez-moi toutes les cerises de ce monde pour que je les partage avec équité.

─ En plus, les cerises sont rouges. Tout est vraiment lié.

─ Elles sont bonnes, au moins ?

Marin s'est avancé à quatre pattes vers le panier et en a pris une poignée. J'ai attrapé une cerise esseulée dans sa main, et on a mis les fruits dans nos bouches au même moment. La mienne était mûre à souhait, sucrée sans trop l'être, acide comme il le fallait. Marin a opiné du chef, d'accord avec moi.

─ Très bonnes, a-t-il conclu. Validées les cerises de la grand-mère d'Alma.

J'ai craché le noyau dans ma main avant de le jeter dans les massifs de fleurs d'à-côté. Marin a expulsé le sien sur l'herbe dans un souffle calculé.

─ Et si ça fait un autre cerisier ? a-t-il demandé.

─ Tu reviendras dans vingt ans le cueillir.

─ J'espère que tu auras récupéré tes amis d'ici-là, sinon, ça va faire du boulot.

Je me suis tue sur le coup, et mon silence a été révélateur de mes sentiments. Marin s'est excusé aussitôt.

─ Pardon, c'était une blague à la con.

J'ai secoué la tête avec fierté.

─ Tant pis pour eux, ils savent pas ce qu'ils perdent.

─ Beaucoup de cerises, si tu veux mon avis.

J'ai pouffé tristement. Le blanc s'est immiscé, j'ai terminé mon thé à la menthe et avec la chaleur de l'eau, les premières gouttelettes de sueur perlaient au sommet de mon front. Même du fond du jardin, on reniflait les odeurs de cuisine. Le jour des cerises, ma grand-mère préparait un rfissa au poulet. C'était un des principaux arguments de vente.

Agacée par le silence et l'ambiance qui retombait, j'ai relancé :

─ Eh, Milo... C'est ton meilleur pote ? Ou c'est juste ton pote ?

Marin a haussé les épaules.

─ C'est un bon pote. C'est pas mon meilleur pote, mais c'est un bon pote.

─ Il m'a dit que t'étais son meilleur pote.

─ On a commencé à se parler il y a trois mois à tout casser. On se croisait au lycée mais rien de plus sinon, on fréquentait pas les mêmes personnes.

J'ai froncé les sourcils. J'avais cru qu'ils se connaissaient depuis des années. C'était donc pour ça que je n'avais jamais rencontré Marin jusque là.

─ Ah ouais ? Vous vous êtes rencontrés comment ?

─ Hum...

Il a paru gêné, grignotant ses cerises en évitant mes yeux.

─ Il a appris que je venais bosser ici cet été, alors on a sympathisé. Puis il était déjà pote avec mon ex, on était encore ensemble à l'époque. C'est comme ça que j'ai eu le job, d'ailleurs, ses parents connaissaient le patron, et quand on s'est séparé, j'avais déjà signé le contrat.

J'ai repensé aux mots d'Antonia sur le bateau, et j'ai su qu'il me mentait, ou du moins, me cachait une partie de la vérité. Je voulais lui arracher la vérité mais je ne savais pas comme m'y prendre.

─ Et Clément ? Comment tu connais Clément ? Il va pas au lycée avec vous.

─ Alma, je bosse dans le seul bar qui ferme à 2 heures. Je connais tous les jeunes de cette ville, surtout ceux qui restent tout l'été. Puis, il faut pas un bac + 4 pour voir à quel point il est con. On retient plus facilement les cons.

Logique, ai-je pensé. J'ai commencé à croire qu'il n'avait rien à cacher, et qu'Antonia s'était trompée. J'ai soupiré en repensant au plongeon de Clément dans le port. Par prudence, je l'avais bloqué de partout, pour ne recevoir aucune insulte mal placée.

─ Crois-moi, je l'ai appris à mes dépends, ai-je répondu.

Il a ricané.

─ Ouais, j'ai cru comprendre que t'avais un type très précis de mecs.

─ Tiens donc ? Et c'est quoi ?

─ Les mecs qui ont tout l'air de gros connards, mais qui sont assez gentils avec toi pour te faire oublier qu'ils le sont.

J'ai pincé les lèvres, blessée dans mon ego. J'ai balbutié quelques secondes avant de rétorquer :

─ Tu sais quoi ? En temps normal, je serais fâchée. Mais comme c'est vrai, je ne vais rien dire.

─ Je ne dis pas ça pour te rabaisser, hein. Je suis exactement pareil. Je suis le clown de service en amour.

J'ai levé les yeux sur Marin, il crachait plusieurs noyaux de cerises à la fois. Mes yeux se sont attardés sur son crâne rasé et la naissance de sa barbe sur ses joues, sur son nez pointu et le tatouage qui dépassait du col de sa chemise. Elle était trop petite pour lui, comprimant ses épaules et ses bras, faisant ressortir le dessin de ses biceps.

─ Ça dérange pas ta grand-mère si je fume ?

Mon pouls s'est accéléré, j'ai vite détourné les yeux.

─ Non, vas-y.

Il s'est levé pour aller chercher ses cigarettes dans sa voiture. J'ai posé ma tête contre le tronc du cerisier, avant d'expirer longuement.


Le repas a laissé un poids sur nos estomacs. Henna nous encourageait sans cesse à en reprendre, sans penser que derrière, on avait encore deux paniers de cerises à remplir. Le soleil était passé par-dessus le toit de la maison, irradiant le jardin de lueurs chaleureuses. Les papillons butinaient les fleurs colorées, les oiseaux pépiaient leur mélodie de mi-journée. Le décor aurait été une parfaite cinématographie pour ces films aux couleurs saturées qui se déroulaient sur la riviera italienne, ceux où l'héroïne était séduite par un homme qui avait le double de son âge. Après le café, Henna a dit qu'elle allait faire une sieste, j'avais bien envie de l'y rejoindre.

Marin a cassé ma fainéantise. Un café, une cigarette et il était reparti. C'était une véritable machine de travail. Je lui ai proposé de prendre sa place sur les branches les plus hautes et les plus exposées au soleil, il a refusé. J'ai insisté, il a refusé de nouveau. J'ai laissé tomber. On a rempli le second panier en moins d'une heure. Ma grand-mère est venue nous apporté de l'eau. Le ciel était d'un bleu profond et le soleil prenait un malin plaisir à transformer le jardin en solarium. Le thermomètre sur le tronc du cerisier indiquait 32°C. Je transpirais à des endroits improbables – la moustache, entre les cuisses et sous les seins, rien de plus désagréable. Marin est redescendu de l'escabeau, une grosse tache dans le dos de sa chemise.

─ Je peux l'enlever ? m'a-t-il demandé.

─ De ?

─ La chemise.

J'ai marqué un temps, surprise de la requête.

─ Fais comme chez toi.

Il a déboutonné sa chemise à fleurs, a bu deux grands verres d'eau d'une traite et est remonté sur l'escabeau. De mon côté, je suis restée plantée au milieu du jardin, abasourdie. Ce devait être l'atmosphère étouffante et le manque de vent. J'ai été me rafraîchir à l'intérieur en ramenant les verres et la carafe. Ma grand-mère faisait des mots croisés sur la table du séjour, un ventilateur vrombissait dans un coin de la pièce, tournant sur son pied alors que les pales distribuaient l'air.

─ Il est gentil, ton ami, a commenté Henna.

─ Oui.

─ Tu pourras le réinviter à manger s'il veut.

─ C'est qu'il travaille beaucoup.

─ Tu pourras le réinviter quand même.

Sur ce, elle m'a adressé un clin d'œil que j'ai fait mine de ne pas remarquer. Je suis retournée au jardin. Il était presque 15 heures, et il nous restait une bonne heure de cueillette pour récupérer toutes les cerises accessibles. Après, quand il ne resterait que celles trop hautes ou qui tombaient de l'autre côté du terrain, on en aurait terminé. J'allais m'y remettre quand une silhouette sombre est apparue au détour de la maison. J'ai suspendu ma marche, fixant au loin Émerante, elle aussi immobile.

Elle débarquait chez moi après un coup de poignard dans le dos et trois jours de silence. Elle était culottée. Mais elle était aussi une de mes plus proches amies ici, et le souvenir de ma rancœur était trop loin dans mon esprit pour la ranimer. J'ai marché à sa rencontre, devinant au plus je m'approchais l'air triste dans son regard.

─ Ne me crie pas dessus, a-t-elle dit.

─ Je n'allais pas te crier dessus.

─ Je peux vraiment tout t'expliquer.

Je l'ai encouragée d'un geste de la main, Émerante a refusé.

─ Non, pas là, tu veux pas aller sur la plage. Attends... Alma, pourquoi il y a un mec torse nu dans le cerisier de ta grand-mère ? Est-ce que c'est aujourd'hui la récolte ? On a loupé la récolte ? On a loupé le rfissa ?

J'ai haussé les épaules avec nonchalance. Pour le coup, ce n'était pas ma faute.

─ Si tu veux me dire un truc, dis-le moi ici, je ne peux pas aller sur la plage.

Émerante a hésité, avant de me prendre le poignet pour m'emmener sur la pelouse devant la maison. Sa décapotable était garée à la va-vite derrière la voiture de Marin. Elle s'est assise dans l'herbe verte, de la même couleur que sa robe volante. C'était la teinte qui faisait ressortir sa peau avec le plus d'intensité. Émerante était une femme splendide, à force de la côtoyer, j'avais parfois tendance à l'oublier.

─ OK, a-t-elle soupiré, bon...

─ Trois secondes, l'ai-je interrompue. Parce que j'ai l'impression que tout se mêle dans sa tête, alors je vais te rappeler toutes les questions auxquelles je veux des réponses.

Elle a arqué un sourcil.

─ J'étais pas venu ici pour croiser la police, mais vas-y, fais toi plaisir.

J'ai tiré une grimace, en toutes circonstances, elle se devait d'arborer ce mépris bienveillant.

─ Est-ce que c'est toi qui a bloqué Milo sur mon téléphone ?

─ Oui.

─ Quand ?

─ Quand tu as laissé ton téléphone dans ma voiture.

─ Pourquoi ?

Le regard d'Émerante a fui le mien. Puis, elle s'est laissée tombée en arrière, dans l'herbe.

─ Je déteste Milo. Je déteste ce putain de mec.

Elle tremblait. Je n'avais pas être dans sa tête, je voyais à travers ses yeux la panique qui la secouait. J'aurais voulu l'encourager et la rassurer, mais j'avais l'estomac aussi noué qu'elle. À son comportement, on aurait cru que mon voisin avait fomenté de détruire le monde.

─ Bon, t'es chiante, parle.

Émerante s'est massée les paupières.

─ OK, allez. Tu vois le début de l'été. Genre le début de juillet. Moi j'arrive le premier, et Antonia vient la semaine d'après, et toi celle d'encore après.

Elle a guetté une réaction, je ne lui en ai donné aucune.

─ On vous attend, avec Milo. On se fait chier parce que personne n'est là, même pas les mecs du centre. D'habitude, on se fait chier pendant une semaine sur la plage et on se fout de la gueule des gens. On fait pas de soirées, parce que les soirées, c'est pour la bande de copains. Mais cette année... il y avait un soir où mon père était pas là, alors je l'ai invité à manger.

Le temps a ralenti, m'enfonçant dans une nouvelle dimension, où l'air se muait en eau et chacune de mes pensées se dissociait de ma personne. Je ne m'imaginais que trop bien la suite. J'ai arraché nerveusement une touffe d'herbe à ma portée, la bouche entrouverte comme un putain de poisson. Émerante s'est redressée.

─ On s'est juste embrassé, Alma. On s'est juste embrassé, je te le jure. Rien d'autre, je te le jure. On s'est juste embrassés et tout de suite, on a dit que c'était trop con, et que ça n'aurait jamais dû arriver. On s'est dit que le plan de l'été, c'était lui et toi. Moi, j'étais grave chaude, je voulais que tu sortes avec lui. C'est pour ça que je t'ai aidée, je te le jure. Puis... puis, je sais pas, il a commencé à m'envoyer des messages, à me dire qu'il pensait à moi, qu'il était paumé. Et le soir de l'averse, quand il est pas venu à la soirée, et que toi, t'étais occupée à draguer un autre gars, je lui ai dis de passer plus tard chez moi. Puis... puis, en fait, tu nous as pas suivi, et j'ai laissé Antonia chez elle, et Milo m'a rejoint... J'ai retrouvé ton portable, et sur le coup... il m'avait servi de belles paroles, je voulais y croire. Alors je l'ai bloqué pour avoir mes chances. C'était trop con, c'était trop, trop con.

Émerante a repris son souffle après son monologue haletant. Je fixais l'herbe arrachée devant moi, à l'ouest. Tous les mots, je les avais entendus et compris, pourtant, ils n'étaient pas réels. C'était comme une histoire qu'on me racontait pour m'endormir, ça n'avait rien de tangible. Pourtant, tout concordait. La distance de Milo, l'investissement dérangeant d'Émerante dans notre relation, le soir où il était parti à la hâte de chez Marin... J'avais eu tous les indices sous mon nez depuis le début, et j'étais parvenue à les rater.

─ Alma, s'il te plaît, dis un truc, tu me tues, là.

─ Après, il a fait quoi ? Après le soir où vous vous êtes vus chez toi, Milo a fait quoi ?

─ Il... il a redit que c'était une erreur, et qu'il était paumé par rapport à toi. Là, il ne me parle plus.

Face à mon silence, Émerante s'est d'autant plus justifié, usant de tous les moyens pour être sûre d'avoir ma sympathie.

─ Je ne veux pas que tu m'en veuilles... Alma, il... c'est ce mec, aussi, il matrixe les gens. J'étais coupable, et il réussissait à rentrer dans mon cerveau et me convaincre que je faisais rien de mal. Sois pas fâchée, entre lui et toi, sur la vie de toute ma famille, je te choisis toi.

Je ne parlais toujours pas.

─ Alma...

Puis, c'est enfin sorti.

─ Je suis désolée pour toi, Em'. Tu mérites tellement mieux que lui. T'accroche pas à un pauvre mec comme lui. Même ma henna a dit qu'elle le sentait pas.

J'ai dévisagé Émerante, les yeux humides. Dans un sourire doux, elle m'a pris dans ses bras. C'était un des meilleurs câlins de ma vie. Et dire qu'un gars sans cervelle avait tenté de me priver de ça. Dans le cocon de l'étreinte, mon amie m'a chuchoté à l'oreille :

─ Maintenant, tu peux me dire pourquoi il y a un mec torse nu dans le cerisier de ta grand-mère ?

─ C'est une longue histoire. 

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