Un. [Will]
La pluie ne semble pas vouloir cesser de tomber, et pourtant, il pleut depuis plus d'une heure maintenant. Je ne suis pas vraiment trempé, mais je commence vraiment à en avoir assez de slalomer entre les flaques d'eau et les passants tous aussi pressés les uns que les autres.
Je rentre dans le premier café qui ne me paraît pas trop plein à craquer et sans vraiment réfléchir, je m'assieds à la première table simple qui est libre. J'aurais peut-être dû mieux choisir mes voisins de tables. Le couple assis à ma gauche semble dans un moment difficile, la fille fixe le type sans qu'aucun sentiment n'apparaisse sur son visage fin. Ses yeux, parfaitement maquillés, scrute l'homme face à elle d'un air rempli de dédain et lorsque je porte discrètement mes yeux sur le malheureux, je peux très rapidement m'apercevoir qu'il n'est pas bien du tout.
Je suis journaliste depuis mon arrivée à New York il y a maintenant trois mois et je peux très vite me rendre compte qu'il tremble et que la seule raison pour laquelle il garde la tête baisée doit être parce qu'il pleure, ou du moins, il ne doit pas aller très bien.
"Qu'est-ce qu'il vous faudra?"
Je sursaute, beaucoup trop plongé dans mon observation du couple à ma gauche, je n'ai pas entendu le serveur arriver.
"Un latt-cappuccino. Un cappuccino."
"De suite."
Je secoue ma tête, incrédule. Je sors mon ordinateur de mon sac à dos, heureusement imperméable. Je jette un rapide coup d'il sur ma gauche, le type est debout, il s'en va.
Il ne se retourne même pas quand il passe derrière elle. Il me semble que la brunette est entrain de plier un papier de la forme d'un chèque. Je fronce les sourcils, vraiment intrigué. Je ne me rends compte que je fixe la jeune fille que lorsque ses yeux croisent les miens et qu'un petit sourire narquois prend place sur ses lèvres.
"Je vous encaisserai après."
Une fois encore, je ne l'ai pas vu venir. Je décroche mon regard de la brunette, elle ne sourit plus et se lève, sans même adresser un sourire ou un geste de politesse au serveur qui se tient toujours debout à côté de moi. Elle s'en va en adressant un bruyant "à demain" à l'homme vêtu d'une chemise blanche et d'une cravate qui se tient à l'entrée du café, probablement le patron.
"Toujours le même cinéma. C'en deviendrait presque lassant." Il soupire en roulant des yeux, récupérant cependant l'argent qu'elle avait déposé dans le petit pot en verre sur la table.
S'il n'avait pas parlé, je ne pense pas que je me serai attardé d'avantage sur cette fille, bien que son manège m'ait intrigué. Mais les paroles du serveur avait complètement ajouté une curiosité supplémentaire à cette affaire. En plus de ses traits avantageux, et de son charme, ce chèque m'avait donné envie d'en savoir plus sur elle.
Alors que je dois fixer le serveur depuis cinq minutes maintenant, il s'avance vers ma table.
"Je vous remets du café?"
"S'il vous plaît oui."
Il s'exécute, zieutant les allers-venus des consommateurs et remplissant une nouvelle fois ma tasse d'un café bouillant duquel s'échappe une maigre fumée blanche.
"Désolé monsieur, dites-moi si vous avez besoin de quoique ce soit."
Je ne sais pas ce qu'il me prend, mais je réponds instantanément.
"Le couple qui était là, vous les connaissez?"
"Ce n'est pas un couple si vous voulez mon avis," il répond en riant, nerveusement, "elle vient là presque tous les jours avec une nouvelle personne, c'est presque comme les meubles maintenant, elle a ses racines ici."
Je ris à mon tour, le laissant s'en aller vers d'autres tables, je jette un coup d'œil à l'extérieur du café, une pluie battante s'abat toujours sur la ville, je soupire en trempant mes lèvres dans le liquide chaud. J'ai quitté Seattle en espérant laisser le mauvais temps derrière moi, mais le mauvais temps n'en avait apparemment pas fini avec moi.
-
Je m'étais finalement décidé à quitter le café, quitte à affronter l'eau, je m'en fichais, il fallait que je travaille sur mon prochain article, un fait divers qui avait échappé aux yeux des New-Yorkais mais qui allait faire parler de lui - et par la même occasion, faire parler du Journal qui m'emploi.-
Le visage de la brunette me revenait sans cesse dans l'esprit et je ne sais pas vraiment pourquoi, mais dans un sens, la sensation que son trafic au café n'était rien de banal trottait dans mon esprit comme une évidence dont je n'arrivais pas à me débarrasser.
Je m'abritais du mieux que je le pouvais le long des murs, tentant de mon mieux de ne pas me cogner aux passants pressés ou bien aux poubelles qui traînaient au devant des magasins. Chaque chevelure brune qui me rappelait celle du café, me faisait me retourner et perdre cinq bonnes minutes histoire de ne pas passer pour une psychopathe à , suivre chacune d'elles.
Arrivé chez moi, j'en étais à présent certain: il fallait que je retourne à ce café et que je retrouve cette fille, juste pour m'assurer qu'elle n'avait rien de si exceptionnel que ça.
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