Chapitre 1
"La femme n'est-elle pas le commencement et la fin de toutes choses ?" - Rodolph Girard
Je me faufile entre les gradins et les supporters du Pepsi Center, stade de basketball de Denver, dans le Colorado. Un important match se dessine, les Nuggets affrontent les Suns de Phoenix. Tout se passe bien puisqu'au bout du deuxième temps, nous menons, 42 contre 33. Je suis en ébullition, c'est aussi le cas de Chuck et d'autres supporters. Nous avons beau savoir qu'un retournement de situation est vite arrivé et qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, il n'empêche que l'ambiance globale du stade est très détendue.
A travers les haut-parleurs résonnent les paroles de Sorry de Justin Bieber. C'est typiquement le genre de chanson que je me retrouve à fredonner sans forcément l'apprécier et qui reste coincée dans ma tête durant de longues heures. Peut-être mon "Ça" cherche-t-il à me faire passer un message.
— Là Martin ! Y a deux petites places libres ou alors une grande place libre. M'indique Chuck en forçant sa voix.
Je lève les yeux cherchant la ou les places libres mais ne les trouvant pas, je me résous à simplement suivre mon ami, ce qui n'est pas tâche facile. Plus court que moi, il se fraie un chemin avec une certaine dextérité, se mêlant à la foule de jerseys et casquettes bleu nuit et jaune.
Ça y'est, j'ai repéré les sièges tant espérés. Ils sont moins bien situés que les précédents mais j'espère ne pas trop m'avancer en disant qu'ici au moins, nos voisins de derrière ne s'amuseront pas à nous lancer des popcorns ou à nous coller leurs emballages de sucettes dans le dos. Je déteste les enfants et je me demande ce que font les parents dans des cas comme ça. Avec Chuck, nous n'avons pas perdu de temps à discuter avec eux. En voyant la tête des trois morveux, nous avons vite compris que c'était peine perdue, qu'ils ont un cerveau plus petit que la moyenne et que toute discussion ne mènerait à rien.
— Puisque j'y pense, si j'avais frappé ce gosse, tu m'aurais passé les menottes?
— Je suis flic, il se retourne en souriant, faire appliquer la loi et être impartial c'est mon job.
— Techniquement t'es encore en formation. T'as déjà eu l'occasion de passer les menottes à quelqu'un?
— Hum... oui, mais jamais dans un domaine professionnel, si tu vois ce que je veux dire.
Je ne m'entends pas rire à cause du brouhaha mais je ris pourtant bien, tellement, que je ne fais plus trop attention à où je mets les pieds et qu'une de mes basket heurte inévitablement un objet.
Je baisse rapidement les yeux avant de constater que je viens de renverser un gobelet en plastique qui devait être plein de soda et qui est maintenant entrain de se déverser au sol. Je m'agenouille et tente de limiter la casse mais je crains que ce soit déjà trop tard. Une flaque marron s'étale et je regarde le propriétaire du récipient impuissant. C'est un homme imposant, aux cheveux grisonnant. Au premier abord, je ne sais pas s'il souhaite m'étrangler ou si ça lui est égal.
—Je suis désolé, je vais vous en acheter un autre. J'adopte une attitude innocente.
—Ne t'en fais pas mon garçon. Entame la femme assise à ses côtés. Tu lui rends plus service qu'autre chose, Roger ne devrait plus boire ce genre de boissons depuis longtemps.
—Encore navré... je hoche la tête.
Tenant tout de même à mettre la main sur le couvercle de la timbale, je reste accroupi cherchant à distinguer un couvercle dans cette flaque marron dont se dégage une forte odeur de cola et de cerise. L'homme avait certainement opté pour un Dr Pepper à la cerise.
Il se trouve que le couvercle a fini sa route juste à côté d'une Dr Martens bleu-marine. Je fais glisser mes yeux sur les jambes auxquelles elles sont reliées et mon regards s'attarde sur leur longueur. Elles ont beau être recouvertes de longues chaussettes noires, je les trouve tout de même impressionnantes. Je remonte alors mes yeux sur le visage de la jeune fille. Elle a la peau métis, des cheveux bouclés parsemées de mèches blondes. Son visage semble triste ou alors ennuyé. Je crois qu'il s'agit de la fille de l'homme au gobelet et qu'elle n'est pas vraiment ravie d'être ici, préférant certainement une soirée entre amis à une sortie en famille.
Je rebouche la timbale, et m'en vais rapidement m'asseoir à côté de Chuck, essayant de ne plus me faire remarquer. Je me retrouve donc entre Chuck et la fille. Je la regarde rapidement du coin de l'oeil, elle n'a pas bouger depuis mon arrivée et fixe le centre du terrain sur lequel des cheerleaders font des figures acrobatiques.
—Oh et devine qui j'ai revu par hasard pas loin de mon boulot? Relance Chuck.
—J'en sais rien, Allie?
—Non et c'est tant mieux. J'ai revu Maë!
—Ah...
Je ne sais pas à quoi Chuck s'attendait, évoquer mon ex petite-amie est loin de me faire plaisir. Quand nous étions au lycée, beaucoup d'yeux étaient tournés vers nous, nous avons été élus reine et roi du lycée lors de notre tout dernier bal de promo. C'est peu après cela que ça s'est brouillé entre nous.
Nous avions pourtant planifié nos vacances d'été à la mesure près, choisi notre compagnie aérienne ensemble, réservé une suite dans un somptueux hôtel qui affichait des promotions très intéressantes, acheté divers livres touristiques à propos de la jolie ville paradisiaque de Tulum, au Mexique. Et puis nous avons dû tout annuler à la dernière minute.
Quelques nuits après le bal du lycée, elle s'était ramenée chez moi avec une idée en tête, me quitter. Quand elle s'expliquait je la regardais incrédule attendant le moment où elle me dirait "Je plaisante bébé" mais il n'est jamais venu. Elle est partie les yeux humides de larmes, me laissant, moi, le garçon de ses rêves, comme elle aimait m'appeler, debout, le coeur blessé.
J'ai fini par apprendre, qu'elle s'était rendue à une soirée la veille, m'avait trompé et a préféré prendre les devants avant de se faire larguer.
J'ai mal vécu notre rupture. Au départ, j'avais plus mal à son égo qu'autre chose puis elle a commencé à me manquer, elle me manque toujours en réalité. Mais même si elle me manque, notre rupture me semble maintenant logique. Je n'aurais jamais fini ma vie avec mon amour de lycée, qui est au passage une connasse arrogante.
— Elle m'a demandé si tu voyais quelqu'un ces temps-ci? Dit le jeune flic tout en fouillant dans sa poche.
— Et qu'est-ce que tu lui as dit ?
— Que je n'en savais rien. Il hausse les épaules. Je lui ai dit honnêtement que l'on en parle pas. Mais ce n'est pas pour autant que ça ne m'intéresse pas. Donc tu vois quelqu'un ?
— Peut-être... je me contente de répondre, sourire en coin.
— Martin Mystère.
— C'est exactement ça, mon rire sonne faux mais heureusement, personne ne s'en rend compte puisqu'il est couvert par les cris des supporters.
Je n'ai personne dans ma vie en ce moment. Je n'ai eu personne après Maë, à vrai dire. Ça ne m'attriste pas, mais je n'ai pas envie que mon ami pose de questions et puis au lycée j'étais habitué à la drague, alors je crains d'inquiéter mon entourage pour pas grand chose. Je ne fais pas grand chose pour changer la situation, j'en ai un peu marre des filles de la fac, qui se donneraient à moi au cours d'une soirée sans même me connaître. Je ne sais pas trop ce que j'attends, peut-être Maë, sûrement une autre.
— Hot-dog ou chips? Me propose Chuck.
— Hot-dog bien évidemment.
Chuck se lève et je finis par me retrouver seul, à côté de la fille aux Dr Martens, elle fixe toujours aussi intensément le centre du terrain. Afin d'occuper mon temps, je sors mon portable, décidant de filmer un peu ce qui m'entoure. C'est quelque chose que j'ai toujours aimé faire, filmer, créer des souvenirs passer des heures à les regarder. Je filme au moins une vidéo par jour et c'est toujours un bonheur de voir ce que je faisais dans ma vie tel jour, avec qui...
Après avoir capturé l'instant, j'ouvre ma galerie et fais glisser mon doigt afin de la remonter. J'en lance une un peu au hasard.
"Maë : Bien-sûr que je sais faire du golf ! Pas toi ?
Martin (déçu) : Sérieux? Moi qui me faisais une joie de t'aider à pratiquer ton swing.
Maë : Ça ira. Mais merci pour la proposition. Oh mais tu me filmes encore? Pourquoi tu me filmes toujours?
Martin : Je te filme parce que j'en ai envie et tu es tellement belle, ce serait dommage de se priver.
Maë : Tu n'es vraiment pas comme je l'imaginais, tu sais.
Martin : Oh et comment m'imaginais-tu?
Maë : Tu avais l'air arrogant, vantard et pas super sympa avec les filles.
Martin : Et comment je suis en vrai?
Maë : Différent. Du coup, deux options s'offrent à moi, sois tu tiens à moi, sois tu es un putain de bon acteur.
Martin : Hum... je crois qu'à ta place j'opterais pour la réponse B."
Cette vidéo, elle date du début de troisième année de lycée. Nous ne sortions pas encore ensemble mais nous savions que ça ne tarderait pas. Nous nous amusions à flirter ensemble par messages ou au lycée et en soirée quand personne ne nous observait. Nous étions déjà très proches. Qui aurait cru qu'à l'université nous nous comporterions comme deux parfaits inconnus. Je ne peux faire autrement que l'insulter mentalement, cela même si elle m'a fait vivre deux putains de belles dernières années de lycée.
Au-dessus du bruit des supporters s'élève la voix du présentateur :
— Kiss cam !
Je verrouille mon portable comme alerté et remonte la tête vers un des écran géant. Quand je tombe sur mon visage en gros plan, mes yeux s'écarquillent, ma bouche s'entrouvre et je me retourne immédiatement vers la fille aux Dr Martens.
Je crois qu'elle n'a rien remarqué, elle ne voit pas que nos têtes sont en gros plan sur ces écrans entourés de coeurs rouges. Peut-être même qu'elle n'a pas remarqué ma présence à ses côtés tellement elle est loin dans ses pensées.
Je lui tapote alors l'avant-bras et ça lui vaut un sursaut. Elle se retourne vers moi, les yeux verts panique et a un geste de recul. Elle se reprend néanmoins et m'observe d'un regard fuyant, tantôt elle regarde mon nez, tantôt mes cheveux, tantôt ma pomme d'Adam mais jamais elle n'ose un contact frontal avec mes yeux.
— Allez! Un bisous. Relance le présentateur.
Le stade se met à gronder d'avantages en encouragements, même l'homme au gobelet m'encourage de l'embrasser, alors je crois qu'il ne s'agit pas de sa fille. Elle regarde autour d'elle, sa fréquence respiratoire semble augmenter, tout le monde la regarde, tout le monde nous regarde.
— Ne les regarde pas, je lui conseille en posant mon index sur sa joue, réorientant sa vision vers moi. Ce sera sûrement moins stressant.
Je crois que depuis qu'elle me regarde de nouveau, elle a bloqué sa respiration. Je l'observe un peu mieux, elle semble jeune, peut-être autant que moi. Je pose mes mains de part et d'autre de son visage et d'ici, je peux sentir que son pouls est élevé et que sa peau est chaude. Je la tiens légèrement mais faisant tout de même en sorte qu'elle ne s'échappe pas. On ne sait jamais, je n'ai pas envie de devenir la risée de la Kiss Cam, fuit par une jolie fille et moqué par tout le stade.
— Plus vite on leur donnera ce qu'ils souhaitent, plus vite aurons nous la paix. Je lui dis.
Je lui souris pour la mettre à l'aise mais moi aussi je suis un peu hésitant. C'est finalement elle qui s'avance vers mes lèvres y déposant un baiser, je glisse mes mains dans son dos et elle glisse une de ses mains sur ma mâchoire nous permettant je mieux apprécier ce baiser forcé.
Je me dis que c'est drôle que la première chose que je connaisse de cette fille aux Dr Martens soit ses lèvres, pas son prénom, pas le son de sa voix mais ses lèvres. Je ne sais pas si je les trouve exquises ou si c'est juste une impression.
— Très mignons! Merci les gars! Fait la voix du micro après que nous nous soyons décollés.
Je tente de lui sourire pour la remercier de ce baiser et peut-être faire connaissance mais elle détourne trop rapidement les yeux, intimidée, je crois.
— Wow mec, c'était torride ! Plaisante Chuck en revenant, hot-dogs gras aux bras.
— T'as vu ? Je m'étonne bêtement.
— Oui, tout le stade vous a vu mon chou. Tiens Casanova, il me tend un des hot-dogs.
Je le remercie, sentant déjà mon ventre gargouiller. Je repense aux yeux tristes de la fille de la Kiss Cam quand je suis arrivé à cette place et crois que je veux la connaître. Je me tourne donc vers elle, mais elle n'est déjà plus là. Je me lève précipitamment pour suivre sa trace, mais il m'est impossible de distinguer la brune dont je ne connais que les lèvres. Je m'assois déçu de savoir que je ne la reverrais certainement plus jamais et puis le match reprend.
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Hey!
J'espère que vous allez bien,
Et que ce chapitre vous a plu!
C'est le premier !!! Jsuis trop contente de vous le poster, de vous faire rencontrer Martin, d'ailleurs lol le prénom dites moi ce que vous en penser, moi-même je ne sais pas s'il faut le prononcer à la française ou à l'américaine, personnellement je le prononce à la française.
N'hésitez pas à me faire des retours positifs ou constructifs ❤️
Cœur cœur
Noémie =)
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