Dehors le ciel était ensoleillé, les oiseaux piaillaient calmement berçant doucement le jeune prince endormi dans son grand lit à baldaquin. Ses longues mèches blondes s'étalaient harmonieusement sur son oreille de soie tandis que son doux visage reposait sur une de ses mains : le prince était d'une grande beauté. Grondant légèrement, un rayon de soleil vint percer insolemment les nuages afin d'éclairer la pommette ainsi que l'œil droit du bel endormi le sortant, hélas, de son somme réparateur. Puis, au même instant, quelqu'un vint ouvrir brusquement la porte sans quémander une autorisation pour pénétrer les lieux.

La paroi lambrissée rencontra le mur de bois noble gravé de dorures étincelantes. La clenche métallique laissa, au passage, une nouvelle marque sur la surface boisée déjà bien abîmée à cause des moultes interventions brutales de cette petite tornade brune qui s'engouffrait dans la chambre princière. L'odeur de l'Orchidée se diffusa dans le lieu faisant grommeler le petit noble somnolant qui enfonça un peu plus son visage dans sa couverture satinée : cette fragrance était le début des problèmes et l'annonce du commencement de la journée.

« - Debout Dongju ! On a cours de bienséance et un entraînement dans moins d'une heure et tu n'es pas prêt !

- Laisse-moi, abruti.

- Yah ! D'où tu parles comme ça à ton jumeau.

- Je te parles comme je veux. Maintenant, laisse-moi dormir et... AAAAAAAAH ! »

Les draps furent vivement tirés par Dongmyeong qui avait un sourire rayonnant sur le visage tout en dégageant cette odeur particulière de défi et taquinerie. Les cuisses fuselées et pâles de Dongju furent dévoilées au grand jour, ce dernier ne dormait qu'avec un simple short bleu ciel et un t-shirt blanc légèrement transparent et, bien évidemment, ce fut à cet instant précis qu'arriva une pauvre servante qui ne savait plus où regarder.

La pauvre femme avait poussé un petit cri aigu tout en camouflant ses yeux de ses petites mains légèrement halées. Elle se couvrit d'excuses étant navrée d'avoir assister à un tel spectacle sans l'accord de son prince mais la servante n'eut pas le temps de dire plus de choses que Dongju sortit de son lit d'un seul bond en se mettant à courir après son jumeau, hilare.

« - Son Dongmyeong ! Tu es un prince mort !

- C'est ça petit cul. Attrape-moi si tu peux avec ton endurance de coquille saint jacques !

- Yah ! Viens là ! Tu vas finir en frites ! »

Dongju, toujours en short et t-shirt, parcourait les couloirs du château en hurlant des insultes, toutes plus bêtes les unes comparées aux autres, à son frère qui avait une longueur d'avance : Dongmyeong était le plus studieux, il suivait tous les cours de sport et combat avec attention tandis que Dongju, lui... Il faisait acte de présence. Le petit prince n'aimait pas réellement se battre, il n'était pas très bon dans ce domaine. Il était plutôt un orateur, il maniait parfaitement les mots, savait motiver ses troupes bien qu'il délaisserait aussi cette tâche à son jumeau : Dongmyeong était prédisposé à devenir un grand Roi.

Le jeune Dongju, lui, serait un excellent bras droit. Toujours de bons conseils, sa stratégie et son don d'adaptation était un atout de taille pour son frère qui savait motiver les troupes à la perfection et puis son végétal de prédilection était une arme bien plus forte que celui de Dongju. En effet, comme toute la famille royale, les jumeaux étaient liés à une plante de leur naissance à leur mort et cette dernière leur apportait des capacités hors du commun.

Dongmyeong était lié à l'Orchidée, son odeur était un véritable perturbateur endocrinien puisqu'il pouvait insuffler des émotions à une personne tout en mélangeant ses pensées. Sa capacité de manipulation mentale s'était considérablement développée ces dernières années, faisant que peu y résister, à l'exception de son jumeau qui se trouvait immunisé. L'enfant orchidée avait un énorme potentiel et, à côté de lui, son frère se sentait bien faible.

Dongju était un enfant du Lotus, une fleur sacrée que tous protégeaient avec ferveur. Hélas, les pouvoirs liés à cette dernière étaient moindres : la guérison. Une chose bien utile en arrière-plan mais en première ligne sur le champ de bataille... Son végétal n'aiderait pas le jeune garçon à remporter des combats. Le prince avait bien tenté de découvrir les secrets enfouis de la fleur de Lotus, comprendre si elle pouvait lui offrir des capacités offensives mais rien : il était un défenseur, un protecteur, un bras droit et non un futur roi. C'était ce que Dongju avait fini par s'ancrer dans la tête et il s'était habitué à cette idée : Dongmyeong prendrait le trône et lui aiderait comme il peut, c'était ainsi.

« - Allez, plus vite petit.

- On fait la même taille Dongmyeong ! Accepte-le !

- C'est faux, mon sourcil dépasse le tien.

- C'est parce que tu es un être narquois mon cher frère ! »

Tout en envoyant sa réplique, Dongju jugea plus intelligent et rapide d'emprunter la rampe de l'escalier principale au lieu de descendre les marches. Ses fesses glissèrent sur la rambarde de bois tandis que son jumeau dévalait le perron sans se douter de la menace qui allait surgir. À peine Dongmyeong eut-il posé son pied au rez-de-chaussée que son frère bondit sur lui en gardant l'élan de sa descente faisant basculer les deux garçons à la renverse.

Ce fut une chance qu'aucun ne vint se fracasser le crâne sur l'escalier, dans leur euphorie ils n'avaient pas remarqué la dangerosité de leur course-poursuite qui avait fait arrêté bons nombres de cœurs chez les servants qui ne savaient comment gérer les jeunes adultes de vingt-et-un an. Dongju et Dongmyeong se chamaillaient comme des enfants, l'un au-dessus de l'autre, les cuisses de l'un toujours mises à nues faisant rougir plus d'une soubrette alors que l'autre voyait son haut fluide se soulever laissant apparaître sa musculature dessinée : le personnel ne savait plus où regarder.

« - Haha ! Arrête, Dongju ! Haha !

- Tu es piégé maintenant, sale petit cochon !

- Je... Haha ! Je ne suis p-pas un cochon, le pauvre Dongmyeong peinait à retrouver son souffle sous les attaques de chatouilles de Dongju.

- Si ! Tu es un petit cochon qui ne sait pas manger !

- Non, ce... Et toi tu es une vraie mule ! Avec ton caractère... HAHAHA !

- Répètes un peu, Prince ! »

Dongmyeong se débattait dans tous les sens, des larmes joyeuses perlant de ses glandes lacrymales alors que sa bouche était grande ouverte dévoilant ses dents blanches. Les assauts de son jumeau étaient traîtres, ses mains s'activaient sur sa peau crème allant titiller les zones les plus sensibles faisant tordre dans tous les sens sa propre victime : Dongmyeong était la marionnette de son double.

« - Mon dieu ! Les garçons, qu'est-ce que vous faites encore ! Et Dongju, qu'est-ce donc que cette tenue ! »

Arrivant sans crier gare, la reine Son débarqua dans la pièce avec sa longue robe victorienne aux teintes bordeaux. Sa longue chevelure rousse tombait avec grâce sur ses épaules, sa peau atteinte de vitiligo était parfaitement maquillée tout en mettant en valeur son visage si unique qui était devenu la force de la jeune femme. La Reine dégageait un grand charisme et une élégance sans pareil, sa tête était toujours haute mais son regard s'emplissait d'une douceur sans pareil : elle était la souveraine que tout peuple espérait.

La mère, dépassée par la puérilité de ses fils, s'avança vers eux afin de les redresser tout en époussetant leurs vêtements légèrement poussiéreux après s'être roulé sur le sol comme des petits chiots. Elle soupira en observant de haut en bas ses enfants puis la Son ébouriffa la chevelure des jumeaux en les sermonnant gentiment.

« - Ce n'est pas bientôt fini ces enfantillages tous les deux ? Vous avez vingt-et-un je vous rappelle, il serait peut-être temps d'arrêter non ? Bien que je ne sois pas contre de garder mes petits bébés pour moi, ajouta la Reine en souriant.

- C'est Dongmyeong qui a commencé !

- Non ! C'est Dongju qui m'a traité de...

- Tututu ! On agit en adulte et il n'y aura pas de c'est X ou Y qui est en tort. Vous êtes tous les deux responsables, j'en suis certaine.

- Mais !

- Pas de mais, Dongju. Allez, vous devez vous préparer pour votre entraînement du matin. Surtout toi, la reine pointa son fils encore en pyjama. Tu devrais te couvrir un peu, tu vas tuer de gêne une personne en te baladant ainsi dans le château, surtout que nous allons recevoir de la visite. »

Le concerné rougit en prenant conscience de son accoutrement et, après avoir fait une révérence maladroite à sa mère, Dongju partit en quatrième vitesse vers sa chambre afin d'enfiler une tenue un peu plus décente. Les joues colorées de pourpres, le garçon s'enfuit sous les éclats de rire de sa famille et il ne put penser qu'une chose : cette journée commençait mal.