En voyant que la chambre de Hwanwoong était déserte, Youngjo n'avait pas hésité une seconde à rebrousser chemin en direction du jardin royal car il se doutait que son amant se trouvait encore dans le lac à attendre sa venue. Fatigué par sa longue et éreintante journée de travail, l'aîné avait la démarche un peu lourde et ses semelles étaient plus traînées sur le sol que soulevées.

Il arrivait, au cours de sa route, qu'un domestique vienne lui demander si tout allait bien car il paraissait bien pâle mais le garçon répétait que ce n'était rien, une simple journée de travail se terminant avec un mal de tête un peu dérangeant mais il n'y avait pas à s'inquiéter. Finalement, après ce trajet qui lui semblait infini, Youngjo arriva dans les jardins royaux et un maigre rictus apparut sur ses lèvres lorsqu'il pénétra l'endroit : ce lieu était un peu devenu le sanctuaire des amoureux, leur point de rencontre.

« - Je suis sur la berge, bébé. »

Le Djegur pensa ses paroles tout en observant l'étendue bleu devant lui, il prit appui sur un arbre car son énergie se vidait un peu plus à chaque seconde mais un soulagement traversa son visage lorsque Hwanwoong sortit des flots avec un magnifique rictus sur le visage. Ses cheveux châtain étaient trempés, tombant nonchalamment sur son front et camouflant faiblement ses prunelles océaniques, ce qui donnait un charme au Bymehet. Sa peau cristalline brillait légèrement à cause des derniers rayons de soleil reflétant sur les gouttes d'eau perlant sur son épiderme.

« - Sublime. »

Un simple soupir s'échappa des lèvres de l'aîné à l'instant où son petit-ami mit un pied sur la berge tout en secouant sa tête de gauche à droite pour sécher ses cheveux. L'eau s'évapora hâtivement de son corps à cause des chaleurs importantes et cela rappela à Youngjo que l'été approchait.

« - Va falloir que tu ailles te baigner plus souvent dans les semaines à venir.

- Hm ? »

Interloqué, le petit avait son t-shirt dans les mains alors qu'il lançait une interrogation avec son regard à son copain qui lui souriait gentiment. Hwanwoong était adorable avec cette expression douce et innocente sur le visage, le Djegur voulait le préserver ainsi à jamais. Personne ne devait tâcher davantage la candeur de son amant.

« - L'été approche et, de ce que j'avais remarqué les deux dernières années, tu vas plus souvent te baigner car tu ne supportes pas les températures d'ici malgré le temps qui passe. Je me trompe ?

- Non, pas du tout. »

Hwanwoong laissa un sourire s'échapper de ses lèvres après avoir fini de se vêtir puis il s'approcha de son petit-ami qui était toujours accoudé à son arbre.

« - Très observateur mon cher Youngjo. Depuis tout ce temps, tu m'espionnes.

- Avoue que tu faisais la même chose, taquina l'aîné en oubliant sa migraine.

- Hm... Je ne sais pas, peut-être bien. Qui sait ? »

Youngjo attrapa le petit par la taille afin de le coller à lui. Leurs torses s'entrechoquèrent doucement et immédiatement leurs cœurs se mirent à battre dans cette harmonie qui était la leur. Leurs regards se perdirent, leurs souffles s'échouèrent sur leur épiderme et leurs ventres se retournèrent tandis que la tentation grandissait à une vitesse faramineuse.

« - Toi. »

L'aîné susurra à l'oreille de Hwanwoong qui frémit tout en resserrant sa poigne sur le haut de son amant qui prenait un malin plaisir à baisser sa voix de quelques octaves.

« - Toi, tu sais. »

Enivré par les sentiments, le Bymehet ne put maintenir le contact visuel plus longtemps alors ses iris furent cachés derrière ses paupières tandis que sa lèvre commençait à être vivement mordue.

« - Youngjo... »

Un gémissement s'échappa de la bouche du petit alors que son copain rapprochait davantage leur corps. Leurs nez se frôlèrent légèrement, tendrement ce qui esquissa un sourire au Djegur qui continua dans sa lancée en déposant son front à celui du plus jeune mais jamais Youngjo n'aurait imaginé que ce geste aurait brusquement tout stopper.

« - Tu es brûlant, ma parole ! »

Presque dans un sursaut, Hwanwoong ouvrit brusquement les yeux tandis que leur petite bulle d'intimité éclata dans cette exclamation soudaine. Le Bymehet dévisagea son copain qui ne comprenait pas la soudaine tournure de la situation mais il ne put rien dire car le petit déposa le dos de sa main sur son front en faisant une grimace inquiète.

« - Tu as de la fièvre, Youngjo ! Tu aurais pu me prévenir que tu ne te sentais pas bien, je serais venu dans la chambre et je ne t'aurais pas fait marcher jusqu'à là et, et-

- Je vais bien, bébé. Calme, ce n'est rien. Je vais bien.

- Ton front est brûlant. Comment peux-tu dire que cela va ? Je suis sûr que tu as un bon quarante-trois de température ! »

Toute la panique était visible dans les iris de Hwanwoong qui recommençait à mordiller sa lèvre mais, cette fois, c'était à cause du fait qu'il était anxieux et stressé par l'état de son aîné. Ce dernier attrapa doucement ses mains en souriant pour le rassurer mais cela ne marcha pas réellement puisqu'une légère grimace déforma le doux visage de Youngjo pendant une fraction de seconde.

« - Foutu migraine !

- Youngjo ! »

Inquiet et légèrement frustré par le fait que son copain n'ait rien dit sur son état, Hwanwoong commença à gentiment tirer sur le bras du Djegur pour l'amener vers la sortie du jardin et le concerné ne s'opposa pas : il n'en avait plus la force. Sous la lumière artificielle des lampions des couloirs, la pâleur maladive de Youngjo ressortait plus fortement ce qui tourmenta davantage le petit. Ce dernier ne put s'empêcher de rapprocher son copain de lui tout en passant un bras autour de la taille du Djegur pour le soutenir légèrement et l'aider à marcher.

« - Si tu oses me dire que tu vas bien dans la soirée, je te fous mon pied au cul. »

Ce commentaire lâcha un petit éclat de rire à Youngjo qui lança un regard amoureux à son petit copain qui tentait de détendre maladroitement l'atmosphère. Hélas, le stress de Hwanwoong ne le quitta pas et la route semblait infinie pour les deux garçons car, à chaque pas effectué, l'état du malade semblait s'empirer.

D'une simple pâleur et fièvre, des premiers troubles respiratoires apparurent avec tout d'abord un essoufflement prononcé malgré un faible effort physique, et ces derniers se transformèrent en légère quinte de toux. Puis, Youngjo transpirait aussi et jamais Youngjo ne transpirait. Même sous plus de cinquante degrés, aucune goutte de sueur n'était visible sur son épiderme alors le voir actuellement en nage dans les bras de Hwanwoong était quelque chose de vraiment inquiétant.

« - On y est. Tiens encore un peu, ok ?

- Cela va, kof, le faire. »

La porte se dressa devant eux, le Bymehet se sentit soulagé face à cette future délivrance et, d'un coup de main, un filet d'eau vint ouvrir sa chambre. Entrant dans le lieu, Hwanwoong vint immédiatement déposer son petit copain sur le matelas et ses mains commencèrent à s'activer en retirant les habits de Youngjo.

Doucement, il enleva d'abord les souliers de son aîné puis son pantalon qu'il peina à déboutonner à cause de ses mains tremblantes de panique mais Youngjo l'avait rassuré en déposant fébrilement sa main sur son épaule.

« - Cela va aller. Demain j'irais mieux, juste un peu de fatigue. »

Les larmes envahirent le regard du Bymehet qui essayait, tant bien que mal, de les chasser car cela flouter sa vision. Le pantalon de Youngjo alla reposer sur une chaise non loin et l'autre revint pour emmitoufler son copain dans les draps. D'une main tremblante, Hwanwoong vint déposer sa paume sur le front de son copain mais ce dernier était encore plus chaud que tout à l'heure.

« - Tu as intérêt à aller mieux demain. »

Tout ceci pourrait ressembler à un reproche mais, en réalité, c'était plus un commentaire maladroitement taquin camouflant la forte inquiétude du petit qui ne savait que faire. Youngjo attrapa le poignet de son amant, il tira dessus mais sa force était si faible que le cœur du Bymehet se serra.

« - Arrête de t'inquiéter. Ce n'est qu'une petite fièvre qui va passer avec du repos.

- Tu ne tombes jamais malade, Youngjo. En plus de deux ans, je ne t'ai jamais vu aussi mal... »

Un sourire vint se dessiner sur les lèvres du plus vieux, ce qui surprit le Bymehet qui ne comprit ce soudain rictus.

« - Tu vois. Toi aussi tu m'espionnais durant tout ce temps. »

Hwanwoong rougit tandis que ses lèvres s'étiraient joyeusement : il avait été pris la main dans le sac.

« - Tss... Même malade tu me sors des bêtises.

- Comme-ci j'allais me laisser abattre par ça. »

Le Bymehet roula des yeux face au côté tête brûlé de son compagnon puis il se pencha doucement pour lui voler un baiser avant de susurrer tendrement quelques mots.

« - Je vais chercher de quoi baisser ta fièvre. Essaye de dormir, d'accord ? »

Youngjo hocha simplement de la tête tout en fermant ses paupières qui c'étaient brusquement alourdies. La main du Bymehet passa fugacement dans la chevelure rougeoyante du somnolent avant de quitter son chevet afin de chercher ce dont il avait besoin dans la salle de bain, soit une bassine d'eau froide et un gant de toilette.

Pendant ce temps de préparation, le Djegur sombrait profondément dans les limbes du sommeil. Tout était uniformément noir, le monde des rêves n'était pas présent bien au contraire : Youngjo se sentait soudainement étouffer. Le gant de toilette fut déposé sur son front et, maintenant, il suffisait d'attendre que la fièvre finisse par passer et tout irait mieux.

« - N'est-ce pas ? »

Emmitouflé à son tour dans les draps, Hwanwoong n'avait pas mangé à cause de l'inquiétude le rongeant et il s'était alors allongé au côté de son copain en sueur. Ses prunelles inquiètes se déposaient sur le corps du Djegur gesticulant imperceptiblement en grimaçant faiblement et le petit joua avec ses mèches rubis tout en susurrant des mots rassurant dans l'espoir que cela puisse apaiser son petit-ami dans son sommeil.

« - Je n'aime pas te voir ainsi... »

Dans cette dernière plainte, le petit se fit happer par le sommeil à son tour et sa main s'échoua au côté du visage de Youngjo qui sombrait de plus en plus dans les ténèbres de son esprit. Puis, après de longues minutes passées dans les ténèbres, des flashs apparurent dans l'esprit du garçon du feu. Il voyait des flammes, beaucoup de flammes tout autour de lui.

« - Youn... »

Le concerné eut un sursaut dans son inconscient, ses lèvres se pinçaient tandis que ses poings se serrèrent et sa fièvre s'accentua fortement. Les flashs s'accentuèrent, certaines gerbes de flammes prirent des teintes étranges allant du bleu pour devenir ensuite d'une blancheur éclatante. Et, ces flammes blanches rencontrèrent des noires et les gerbes se dévorèrent l'une et l'autre, formant une danse à la violence inouïe donnant la sensation que l'une essayait d'annihiler l'autre.

« - Jo... »

Gigotant de plus en plus, les premières plaintes vinrent s'échapper des lèvres du garçon dont les mains cherchaient une accroche, une ancre... Il ne savait pas quoi mais il voulait qu'on le sorte de là, qu'on puisse l'extirper de ce cauchemar.

« - Youngjo ! »

Les gerbes de flammes explosèrent, un cri retentit dans la détonation et le Djegur savait parfaitement à qui il appartenait. Son cœur hurla en réponse, ses mains vinrent en quête de cette paume réconfortante tandis que l'angoisse montait exponentiellement en lui.

« - Viens. »

Nouvelle explosion, nouveau hurlement déchiré qui lui arracha quelques larmes alors que son bras continuait de se mouvoir avec panique dans les draps à la recherche de son accroche.

« - Viens sinon... »

La gorge serrée, ses plaintes étaient rauques et douloureuses tandis que sa fièvre était extrêmement haute. Si haute que son corps dégageait une chaleur surprenante augmentant la température dans la pièce de plusieurs degrés : lentement, Youngjo perdait le contrôle.

« - Sinon il payera pour toi. »

Un cri. Puissant, déchirant. Il avait empli la pièce extirpant Hwanwoong de ses songes troublés mais il n'y avait pas que lui qui était sorti de son sommeil. Le hurlement de Youngjo avait résonné dans les couloirs, passant les tournants pour résonner dans les chambres de l'aile opposée.

Les deux rois sursautèrent dans leurs draps. Cependant, Geonhak était le plus retourné car ils connaissaient ce cri, car il l'avait entendu une seule fois dans sa vie et cela lui rappelait le pire des souvenirs.

Sans même prévenir Dongju, qui était encore dans les vapes, le Roi sortit des draps et courut vers les quartiers de Hwanwoong puisqu'il se souvenait que son bras droit lui avait parlé d'une soirée au côté du petit. Geonhak piqua le sprint de sa vie, Dongju l'appelant un peu en retrait puisqu'il ne comprenait pas la tournure de la situation mais le Ajri ne s'arrêta pas pour l'attendre : la peur de perdre son meilleur ami le rongeait, il ne savait pas pourquoi mais entendre ce cri déchiré l'avait terrorisé.

Poussant vivement la porte, qui finit par s'encastrer dans le mur, Geonhak crut arriver dans un champ de bataille. Un tas de cendres éteintes à la va-vite était visible là où, anciennement, se dressait une table avec un repas tandis qu'une trainée d'eau était dessiné sur le parquet qui ondulait déjà.

Sue le lit, on discernait le corps de Hwanwoong totalement paniqué, les membres tremblant alors qu'il retenait difficilement ses larmes. La gorge serrée, Geonhak porta plus d'attention sur le corps que le Bymehet serrait fermement dans ses bras et il ne sut comment réagir face à la scène.

Là, collé contre le torse du petit, sanglotant comme il ne l'avait jamais vu, Youngjo gémissait avec le visage déformé par la terreur et la souffrance pure. Ses mains agrippaient le haut de pyjama de son petit-ami qui l'enlaçait le plus fermement possible afin de signaler sa présence, lui assurer que tout allait bien et qu'il était là.

La scène était désolante, déchirante... Geonhak avait l'impression que quelqu'un venait de mourir, que Youngjo avait perdu un fragment de lui et qu'il s'effondrait sous ses yeux. Jamais il ne l'avait vu ainsi, jamais son meilleur ami n'avait été aussi mal en dix-neuf ans d'amitié. C'était déstabilisant, extrêmement troublant de discerner cette facette fragile du Djegur qui pleurait à s'en briser les cordes vocales.

Puis, Dongju arriva avec un léger retard. Essoufflé, l'esprit ailleurs, il déposa un regard sur la scène par-dessus l'épaule de son mari pétrifié et le Tokësor ne put retenir son commentaire.

« - Il s'est passé quoi ici ? »