Une fois leurs enfants et petits-enfants repartis, Jim se laissa choir sur son fauteuil en lâchant un soupir de fatigue.

« Enfin ! Je me demandais combien de temps j'allais pouvoir tenir dans ces conditions... »

« Comment ça ? Ils ne sont pas turbulents ! » répondit Sebastian

« Au contraire, ils sont adorables ! C'est juste que... »

Le criminel consultant se passa une main dans ses cheveux noirs aux tempes grisonnantes.

« Sebby, c'est le début de la fin : je vieillis ! »

« N'en fais pas tout un plat ! Moi aussi, je vieillis ! »

« Non mais toi, tu es encore en forme ! Regarde un peu, tu as encore ta musculature alors que moi... j'ai l'impression de devenir un vieux décrépi ! »

« Je dirais plutôt que tu es comme du vin : tu te bonifies avec les années ! »

Cette remarque fit sourire le criminel consultant : Sebastian avait toujours le mot juste pour lui remonter le moral. Après tout, il était le seul à qui il pouvait montrer ses faiblesses sans avoir à craindre une trahison.

« Tu es bien aimable, Sebby ! »

« C'est la vérité : et puis, pour un vieux, tu as toujours ton esprit génial ! »

« Au moins une bonne nouvelle. Le jour où je débloque, achève-moi ! »

« Ne dramatise pas ! Allez, viens ! J'ai une petite idée pour te remonter le moral ! »

Intrigué par le sourire malicieux de son mari, le criminel consultant se leva et suivit l'ex-militaire jusque dans le garage de la maison où les attendait sagement une superbe moto Suzuki noire.

« Une petite minute... Tu fais encore de la moto, à ton âge ? »

« Bah oui, j'en fais. Le jour où je n'en fais plus, tu peux me considérer comme foutu. Allez, mets ce casque et grimpe ! On va faire un tour ! »

« Si tu insistes...  » répondit le psychopathe en enfilant le casque.

Une fois les deux hommes installés, Seb démarra la bécane qui partit à toute allure dans les rues de Londres. D'abord surpris par ce départ rapide, Jim laissa progressivement une sensation de liberté grimper dans ses veines. Cela faisait des années qu'il n'avait pas ressenti des tels frissons...

« Plus vite, Sebastian ! On va voir jusqu'où ta machine peut aller ! »

« Une mise à l'épreuve, boss ? Dans ce cas, c'est parti ! » répondit l'ex-militaire qui accéléra aussitôt.

Tout en zigzaguant entre les voitures, les deux hommes avaient l'impression de retrouver une partie de leur jeunesse. Ils sentaient qu'ils retrouvaient cette énergie et cet enthousiasme de leur adolescence : l'âge où la rébellion devient votre étendard et vos idéaux, votre armure contre les mauvaises langues... Soudain, des sirènes de police se firent entendre derrière eux.

« Et merde ! Il a fallu qu'ils viennent tout gâcher, ces abrutis ! »

« Accroche-toi, Jim ! On va essayer de les semer ! »

« De quoi tu... AAAAAAAAH ! » s'écria le criminel lorsque son conjoint fit un virage serré et prit la première route qui se présenta à lui. Malheureusement, les voitures de police continuaient de les suivre...

« Mais ce n'est pas vrai : ils nous collent au train ! »

« Est-ce que par hasard, il n'y aurait pas Lestrade ? »

Jim se retourna avant de répondre

« La réponse est oui : cet emmerdeur n'est pas encore à la retraite ! »

« Tant pis, il va falloir qu'on prenne un raccourci... Oh ! Le jardin botanique : on va passer par là ! »

« Bonne idée ! »

Et sans attendre, Sebastian fit vrombir et fonça comme une flèche à travers le parc, sans renverser les piétons qui venaient flâner – un miracle en soi. Slalomant entre les arbres et les passants, le mercenaire faisait de son mieux pour ne pas tuer quelqu'un... 

« SEB ! ATTENTION ! »

Mais hélas, le pilote réagit trop tard et nos deux fous du guidon finirent la tête la première dans l'étang ! Un spectacle ahurissant pour les badauds présents dans le parc qui firent des  yeux ronds en voyant Sebastian Moran et Jim Moriarty - deux personnes âgées, faut-il le préciser - émerger de l'eau et retirer leurs casques.

« Désolé, Jim... Jim ? »

L'ex-colonel fut surpris de voir le criminel consultant hurler de rire comme un gamin.

« Oh yeah!  WOUHOU ! Alors ça, c'était de la course-poursuite ! On recommence quand tu veux, Sebby ! »

Le mercenaire ne put s'empêcher de rire devant l'hilarité de son mari... Une crise de fou rire qui fut interrompue par un Lestrade remonté comme une pendule.

« De tous les cinglés du volant que j'ai coursé dans ma carrière, vous êtes certainement les plus dangereux ! On peut savoir ce qui vous est passé par la tête ? »

« Laisse tomber, Greg : tu ne pourrais pas comprendre ! Va voir ailleurs si j'y suis ! » ordonna Jim, vexé qu'on ait gâché son plaisir

« Il devient plus en plus cinglé avec l'âge ! » grommela le policier qui se frappa le front.

« Tu ne pensais pas sérieusement qu'il allait s'assagir ? » ricana Sebastian.

Soudain, une petite voix s'exclama 

« Papy Tigre ? Grandpa ? Mais qu'est-ce que vous faites dans la mare aux canards ? »

Les deux amateurs se retournèrent pour voir leur petit-fils Eliott, 7 ans, les regarder avec une expression de stupeur sur son adorable visage. Arriva sa petite sœur, Helen (5 ans), talonnée par ses parents Hamish et Alexia, puis suivirent Maximilian, sa femme Sophia et leurs enfants Arthur (6 ans) et Wendy (3 ans).

« Mais qu'est-ce que vous fichez tous les deux ? Vous avez voulu essayer le saut de l'ange version GP ou quoi ? » demanda Maximilian.

« C'est ce que je me demandais aussi...  » soupira Lestrade.

« Si ma mère les voyait, elle serait pliée ! » ricana Sophia.

« Pitié Sophia, ne dis rien à cette cinglée de dominatrice qui te sert de génitrice ! » s'énerva Moriarty.

« Peu importe : sortez de là avant de choper une pneumonie ! » ordonna Alexia, passablement énervée.

Non sans difficulté, les deux hommes sortirent de l'étang sous les yeux stupéfaits de la foule. Mais n'allez pas croire qu'ils regrettaient cette escapade digne d'ados en manque de sensations fortes : tant qu'ils étaient ensemble, ils ne deviendraient jamais réellement vieux... 

Et voilà pour l'avant-dernière lettre (OMG déjà 😱😱😱😱) de l'abécédaire en espérant qu'il vous aura plu !

Pour la dernière lettre de l'alphabet, Z, je ne vous demande pas de deviner le mot, mais la chanson qui va avec. Indice : des adieux... 

Je vous dis à la prochaine fois et merci encore de votre suivi !

Bisous ! 😘