Chapitre 25 : Deal
Malgré son stress, Lidonna s'était endormi assez rapidement. Elle était retournée dans sa chambre. Elle avait eu besoin d'être seule. Elle avait fermé les yeux et elle avait sombré. Elle ne s'était pas retrouvé dans de monde entre-deux, investie par son pouvoir. Elle n'avait pas cherché à l'être. Et comme le lui avait dit Xander, elle était directement dans la tête de Nick.
Le garçon était là. La dernière fois qu'elle l'avait vu, il la prévenait en hâte pour l'attaque de l'infirmerie et elle lui avait fait tout un tas de reproches, à raison. L'image qu'il lui renvoyait était celle d'un jeune homme extrêmement fatigué et lassé. Ses traits étaient creusés et sa silhouette était devenue squelettique. Ses yeux violets étaient soulignés par des poches d'une couleur de la même teinte. Il allait mal ça crevait les yeux. Nick, dont le sourire avait frappé Lidonna dès leur première rencontre, ne souriait plus. Plus personne ne souriait dans son entourage.
Ils se fixaient, sans parler. Nick n'était pas effrayé, ou heureux. Son regard était dur. C'était inhabituel pour Lidonna. Malgré tout ce qui s'était passé, le garçon gardait une tendresse à son égard. Mais aujourd'hui il n'y avait plus que de l'abattement dans son attitude.
Ils étaient séparés par quelques dizaines de centimètres à peine. Ils étaient si proches et tendus. Lidonna n'osait pas parler et Nick ne le voulait pas. Pourtant elle allait bien devoir formuler sa demande.
Elle avança soudainement d'un pas, mais le garçon eut immédiatement un mouvement de recul inverse.
« Je suis tellement désolée ! s'exclama-t-elle soudain. Je n'aurais pas du douter de toi. Je n'aurais pas du te juger si hâtivement. J'ai été une amie affreuse...
— Tu me manques. » murmura-t-il.
Son visage s'était légèrement adouci et il commença à avancer. Lentement. Douloureusement. Puis il posa une main sur l'arête de la joue de la rouquine. Sans quitter son regard, elle posa sa propre main sur la sienne. Même dans un rêve, le contact chaud de sa peau l'apaisa. Retrouver son ami la soulageait. Elle se rendait compte que lui en vouloir déployait en elle trop d'efforts qu'elle ne voulait plus fournir.
« Ta tête est vide. » fit-elle soudainement remarquer pour briser le silence.
Nick se décolla et fit un tour sur lui-même pour observer les lieux.
« Ouais... Effectivement... Attends, je vais voir si on peut changer ça. »
Il ferma les yeux. Et soudainement, ils se retrouvèrent dans une jolie prairie fleurie. Ils s'assirent dans les marguerites et les pâquerettes blanches.
« Pourquoi un champ de fleurs ?
— Parce que c'est joli. »
Elle ne pouvait pas le contredire. Mais cet échange court de banalité la mettait un peu mal à l'aise. Elle n'était pas venue pour ça et Nick n'était pas décidé à entretenir la conversation. Alors Lidonna se lança :
« J'aurais du t'écouter pour l'attaque de l'infirmerie.
— Lidonna...
— En réalité on t'a écouté, mais on a mal compris.
— Arrête.
— C'est Loïs... »
Nick se leva brutalement.
« Arrête je ne veux rien savoir, ne me dis rien !
— Quoi ? Pourquoi ? On a besoin de ton aide ! »
Elle se leva à son tour, incrédule. Elle n'aurait jamais cru que Nick réagirait de cette manière. Elle était persuadée qu'il allait les aider...
« Je t'en supplie, c'est une question de vie ou de mort.
— Arrête, Lidonna, arrête !
— Elle a été... continua-t-elle malgré tout.
— Lidonna ! Qu'est-ce que tu ne comprends dans le mot «arrête» ? gémit Nick extrêmement mal à l'aise.
— Et toi qu'est-ce que tu ne comprends pas quand je te dis que si tu ne nous aide pas Loïs va...
— JE NE PEUX RIEN TE DIRE ILS ME FONT PASSER AU DÉTECTEUR DE MENSONGE ! »
Le décor revint immédiatement à ce noir infini du début. Le garçon était dans une détresse émotionnelle. Ces deux éléments soudains et brutaux stoppèrent immédiatement Lidonna. Quels arguments invoquer face à ça pour pouvoir le convaincre ? Elle était persuadée qu'en tant que Brouilleur tous ses petits secrets étaient en sécurité... Il fallait qu'elle réfléchisse pour qu'il accepte mais il ne lui laissa pas le temps :
« Et tu ne dois rien me révéler. Ce détecteur de mensonge est de la vraie torture. J'ai du leur avouer que je les avais trahi tellement je souffrais. Je ne peux pas vous aider. »
Lidonna se réveilla. Immédiatement deux phrases envahir son esprit : « On croit en toi. On sait que tu réussiras. » Et pourtant elle venait à l'instant d'échouer. Comment était-ce possible ? Elle avait été sûre que le plus dur serait d'atteindre Nick, pas d'obtenir son aide. Mais visiblement, Harrgos avait trouvé un moyen de plus pour le contraindre à leur être fidèle. Après le chantage concernant la vie de la mère du jeune, voilà qu'il le torturait... Son propre fils...
Lidonna ne connaissait rien à ce monde, comment aurait-elle pu imaginer qu'ils possédaient un détecteur de mensonge torturant. Mais elle ne pouvait laisser la nuit passer et retrouver les garçons en leur avouant qu'elle avait échoué... Ils lui avaient fait confiance. Et honnêtement elle avait cru en elle-même. Visiblement, ils avaient tous les trois eu tort...
Elle se leva légèrement paniquée. Elle ne pouvait pas baisser les bras. Ils avaient besoin de l'antidote. Elle n'obtiendrait rien de Nick. Elle devait passer par quelqu'un d'autre. Immédiatement elle pensa à Dæxor et se ravisa de suite. Il était trop instable, trop à la botte de son père et elle était persuadée qu'il n'avait pas l'autorité de leur donner l'antidote. Il ne leur serait donc d'aucune aide, la rouquine en était intimement convaincue. Elle devait donc s'adresser à la source directe de tous leurs problèmes : Harrgos lui-même.
La yazi que lui avait dessiné Xander s'était effacée, alors Lidonna allait devoir utiliser son pouvoir. Cette idée était probablement inconsciente. La jeune femme le savait. Elle allait très certain se faire passer un savon. Mais elle n'en avait strictement rien à faire. Si cela lui permettait d'obtenir l'antidote, alors elle ne regretterait rien.
Elle avait conscience qu'elle devrait lui donner quelque chose en retour. Mais elle était prête à tout. Enfin... Peut-être pas. Que ferait-elle s'il lui demandait de trahir les Papillons ? Elle ne devait pas y penser. Elle verrait sur le moment.
Son cœur battait fort et vite. Lidonna avait peur. C'était normal. Mais sa peur ne la contrôlait pas. Elle prit une grande inspiration et son courage à deux mains : elle dessina sur son avant bras la yazi qui lui avait permis de s'endormir toute la semaine puis elle s'allongea avec la volonté de faire appel à son pouvoir.
Lidonna était debout dans ce lieu qui lui était désormais familier et où son pouvoir embrassait l'espace. Ici elle se sentait bien. Elle se sentait puissante. Plus de peur ni d'angoisse. Elle était forte et elle était déterminée.
Le lien qui la menait au chef des Ombres était d'un blanc translucide mais très épais. Elle n'avait aucune relation avec lui, mais il semblait pourtant simple à atteindre. Elle ne fut absolument pas étonnée. Il prévoyait tout. Il devait probablement l'attendre. Mais surtout, il avait déjà établit le lien entre eux en étant déjà venu dans la tête de Lidonna.
La jeune femme avançait d'un pas rapide et assurée. Elle avait hâte. Elle voulait le confronter.
Quand elle arriva face à lui, Harrgos était égal à lui-même. Souriant, fier, charismatique. Son sourire digne d'une pub de dentifrice remontait directement jusqu'à ses yeux zinzolin en une lueur satisfaite. Il était grand, impressionnant. Sa tenue était parfaite, rien ne dépassait. Ses cheveux noirs jais étaient plaqués sans un seul défaut. Son costume de la même couleur était intégralement ajusté à sa carrure carrée.
Face à la confiance en lui de son interlocuteur, Lidonna perdit toute assurance. Mais elle ne devait par perdre sa contenance. Elle était impressionnée, certes, mais elle ne devait pas lui montrer.
« Lidonna ! Bienvenue dans ma tête ! Pour une fois que nous sommes dans la mienne et pas la tienne ! »
Cette remarque la mit assez mal à l'aise. Lui savait particulièrement bien utiliser son pouvoir, la jeune femme avait peur qu'il soit au courant de ses moindres secrets, mais comme elle ne se souvenait d'aucune de ses interventions dans sa tête, elle ne pouvait savoir.
« Tu devrais sourire !
— Je ne devrais rien du tout non, répliqua-t-elle acerbe.
— Si, tu devrais être plus agréable si tu veux obtenir ce que tu es venue chercher. »
Harrgos menait la barque, comme d'habitude. C'est elle qui avait besoin de lui et pas l'inverse. Mais elle n'avait aucune envie de s'écraser devant lui.
« Je n'aurais pas eu à venir ici si...
— Nick avait bien voulu t'aider ? Oui, je sais.
— Quoi ?! Non ! Ce n'est pas...
— Tu n'es pas obligée de le protéger, je sais que tu es allée le voir. Et je sais qu'il a refusé de t'aider. »
Cette tendance qu'avait Harrgos à lui couper la parole, lui tapait sur le système.
« Et je n'aurais pas eu à lui demander de l'aide si vous n'aviez pas empoisonner Loïs !
— Mais à quoi est-ce que tu t'attendais ? C'est la guerre. Je ne suis pas là pour vous offrir le thé.»
Lidonna sentit le chaud lui monter aux joues. Elle se faisait balader par Harrgos, mais elle le méritait. Il avait raison, à quoi s'était-elle attendue ? Un peu de fair-play ? Mais ce n'est pas en étant fair-play que l'on gagne une guerre. Harrgos cherchait à fragiliser l'ennemi et il y arrivait à chaque fois. Il avait toujours une longueur d'avance alors Lidonna décida de ne pas perdre plus de temps, puisqu'il savait déjà pourquoi elle était venue :
« Vous vous attendiez à me voir, vous saviez que j'allais venir vous voir. Je veux juste l'antidote. Je vous en prie. Je suis prête à tout.
— Tu ne devrais pas. Ce n'est qu'une vie. Tu ne devrais pas y porter tant d'importance. Ça causera votre perte. Quel intérêt d'être prête à tout pour la sauver ?
— Mais parce que Loïs est mon amie ! s'écria-t-elle horrifiée à l'idée qu'elle puisse l'abandonner.
— Et c'est bien le problème. C'est ce qui vous fera perdre.
— Je n'ai aucune envie de gagner ! Je n'ai jamais voulu être embarquée dans cette guerre. Je voulais juste vivre en paix une vie normale.
— Alors pourquoi est-ce que tu te bats ? Parce qu'on t'a dit qu'il fallait le faire ? Parce qu'on t'a dit que j'étais le méchant ?
— Parce que les Papillons n'agissent pas pour eux mais pour Kayolina.
— Et qui te dis que ce n'est pas ce que je fais ?
— Parce que je ne sais pas pourquoi vous faites tout ça.
— Mes motivations ne regardent que moi.
— Alors je continuerais à me battre pour mes amis. Parce que je n'ai aucune raison de ne pas le faire. Parce qu'ils sont la chose la plus importante que j'ai dans ce monde. »
Harrgos sembla la jauger. Puis il hocha la tête et murmura :
« Peut-être que je suis arrivé à mes conclusions un peu vite... »
Il avait l'œil brillant d'intérêt et un sourire de défi sur le visage. Ce changement d'attitude inquiéta Lidonna. Qu'avait-il prévu ? Que comptait-il faire ? Il était dangereux d'autant plus qu'il n'avait aucune attache, personne qu'il avait peur de perdre, rien qui ne pourrait l'empêcher d'accomplir ce qu'il avait prévu...
« Je veux ce remède. J'en ai besoin. Je ne suis venu que pour ça Harrgos, vous le savez. Pourquoi éterniser cet échange ? Je n'ai pas envie d'être ici, je ne pense pas que vous n'ayez que ça à faire. Alors dites-moi ce que vous voulez contre cet antidote !
— Je veux te voir. En personne.
— Quoi ? »
Cette demande surpris grandement la rouquine. Ça ne pouvait pas être tout !
« J'ai besoin de te voir.
— Pourquoi ?
— Je t'en pose des questions ? siffla-t-il ironique.
— Mais je ne comprends pas !
— Je ne te demande pas de comprendre, très chère, simplement d'accepter.
— ça ne peut pas être si simple ! »
Il haussa les épaules et les sourcils, l'air de dire « à toi de voir ». Mais Lidonna l'avait dit : elle était prête à tout. Alors elle n'hésita pas longtemps.
« Où ? Quand ? » demanda-t-elle déterminée.
Le sourire satisfait sur les lèvres de l'Ombrage fit rater un battement au cœur de Lidonna. Néanmoins, elle garda la face.
Soudainement la pièce floue où ils se trouvaient se modifia laissant place à la façade d'une grande grange. Le bois des murs étaient vieux et commençaient à s'effriter par endroit. Le bâtiment semblait être un peu délabré et pourtant habiter parce qu'elle vit un garçon sortir des deux grandes portes coulissantes.
Nick... Il resta quelques instants la main sur la porte qu'il venait de fermer sans bouger. Puis il se tourna pour coller son dos sur le mur et se laisser glisser jusqu'à ce que ses fesses touchent le sol. Il paraissait plus en forme, moins fatigué. Pourtant ses traits étaient une fois de plus déformés, mais par une douleur vive. Les yeux fermés, plissés, sa peau était tirée par la souffrance. Il luttait. Il luttait contre ses propres émotions jusqu'à ce qu'il lâche et ce que son corps soit secoué de sanglots silencieux.
Lidonna voulut accourir vers lui, le prendre dans ses bras mais une voix coupa son élan :
« Il n'y a que les faibles qui pleurent, invectiva froidement Harrgos lui-même.
— Mais ma mère...
— Pleurnicher ne l'aidera. »
Nick se releva d'un coup, furibond.
« Elle est en train de mourir et je ne peux rien faire pour l'aider !
— Mais bien sûr que si, susurra-t-il mielleusement à l'oreille de son fils. Tu continues à m'obéir et tout ira bien. Pour toi. Pour elle. »
De colère, Nick attrapa le col de son père et le plaqua contre le mur. Immédiatement, le sourire habituel d'Harrgos disparut pour laisser place à une rage incontrôlable. Sa mâchoire se contracta, ses yeux s'assombrirent, sa peau pâlit et d'un coup il amena sa main au cou de son fils.
Il resserra ses doigts ce qui obligea Nick à défaire sa propre prise. A ce moment il le jeta au sol avec violence. Puis il s'accroupit pour se rapprocher de lui.
« Ici, je mène la danse. Et ce n'est pas mon merdeux de fils qui va changer quoi que ce soit. Tu fais partie intégrante de mon plan et je te promets que tu vas y participer. Sinon c'est ta mère qui en pâtira. Tu comprends ? »
Nick ne répondit rien. Alors Harrgos replaça sa main autour du cou du garçon.
« Tu comprends ? » cracha-t-il les dents serrées.
L'air coupé, Nick réussit vaguement à hocher la tête. Quand son père le lâcha, il amena immédiatement ses mains à sa gorge.
La rouquine s'approcha alors de son ami pour l'aider à se relever mais quand elle tenta de le toucher, elle passa à travers lui.
« C'est un souvenir, ma belle. » lui murmura alors Harrgos.
Elle se tourna vivement vers lui, les larmes aux yeux. Il se tenait penché vers elle, les bras dans le dos et indifférent face à la scène qui s'était joué devant eux.
« Ici, demain soir.
— Quoi ? Demain ? Mais comment je vais réussir à convaincre les Papillons de me laisser partir demain seule ?
— Débrouille-toi, ce n'est pas moi qui ait besoin de l'antidote. Oh ! tu n'es même pas obligée de venir seule. N'hésite pas à amener deux ou trois amis. On va bien s'amuser. »
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Fin de chapitre 🥰
Tout d'abord ! Joyeuses fêtes de fin d'année ! Joyeux Noël (en retard) à tous•tes celleux qui le fête 🥰
Je suis extrêmement heureuse de poster ce chapitre, parce que j'adore Harrgos ! Hehe
Que pensez vous de lui au fur et à mesure que vous le découvrez ? 😁
Pensez vous que Lidonna va réussir à obtenir l'antidote ? Et si oui... A quel prix ? 🥺
J'espère que ce chapitre vous aura plu ! On se retrouve comme d'hab la semaine prochaine 🥰
Bisouilles 😘🦋
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