Chapitre 10 : Urgence
Le plan était théoriquement simple. Interdire l'accès à toute l'aile est, le rayon de la bombe n'étant connu par personne. Aider les blessés à évacuer jusqu'à une nouvelle infirmerie de fortune connue et accessible par un nombre réduit de personne. Essayer de chercher et désamorcer la bombe.
« Tout se passera bien tu verras, murmura Rordian à Lidonna. Si ça se trouve il n'y a même pas de bombe et nous allons juste perdre du temps.
— Ce serait embêtant, mais qu'est-ce que j'aimerais que Nick nous ait menti...
— Et moi donc. »
Rordian soupira. La situation était stressante, d'autant plus que, s'il s'avérait que Nick les a menés en bateau, ses parents le leur reprocheraient, à lui et Lidonna. La jeune femme n'en avait pas conscience, mais Rordian, lui, en était persuadé. Et si ses parents le détestaient et le mettaient à l'écart ce n'était pas grave, mais ils ne devaient pas évinder Lidonna. Cela pouvait s'avérer dangereux pour tout le monde bien qu'ils refusent de l'admettre ou même de le comprendre. Il commençait à se demander d'ailleurs s'il ne valait pas mieux qu'il désobéisse à ses parents et qu'il lui révèle tout ce qu'il savait. Mais il avait peur que ce soit sur elle que ça retombe...
Ils étaient onze à connaître le plan. Le Conseil, Lidonna, les deux Soigneurs assignés à l'infirmerie et Eléano. Ils avaient choisi le frère de Firân et Loïs parce qu'il était le coordinateur de leur armée, qu'il était donc respecté et digne de confiance. Il avait chargé deux de ses gens pour qu'ils barrent les entrées intérieures et lui se chargeait de la porte extérieure. Tous les Papillons avaient été prévenu de l'interdiction de se rendre dans ce bâtiment, mais mieux valait être certain.
Le Conseil et Lidonna attendaient devant l'infirmerie qu'Eléano confirme que le bâtiment était vide et la voie libre. Personne ne parlait. Soit par simple mésentente avec les autres, soit par stress. La situation était vraiment loin d'être évidente, d'autant plus que temps qu'ils ne se penchaient pas sur qui était la taupe parmi eux, ce genre de situation pourrait se reproduire encore et encore...
« Nous avons fait le tour deux, fois il n'y a plus personne, vous pouvez y aller. »
Careil et Gia rentrèrent les premiers pour annoncer aux blessés qu'ils allaient devoir être déplacés. Ils avaient tenu à ce qu'ils ne soient pas informés pour être certains qu'ils ne laisseraient rien échapper sans faire exprès.
« Bonjour à tous ! Désolée de vous réveiller à une heure si précoce. Mais il va falloir vous lever parce que nous devons vous changer de pièce. Nous avons évacué le bâtiment, vous êtes les derniers. Ne posez pas de question, pour votre sécurité nous n'y répondrons pas.
— Certains d'entre nous ne peuvent pas marcher ! s'éleva une voix fatiguée.
— Ne vous inquiétez pas, nous serons là pour vous aider et vous guider. »
Lidonna arrêta d'écouter. Elle n'était jamais venue ici, Loïs étant dans l'infirmerie de base. Cette pièce avait été créée spécialement pour l'attaque. Les Papillons savaient qu'ils allaient avoir des dizaines de blessés, mais comme ce n'était jamais arrivé auparavant, leur infirmerie n'avait absolument pas la capacité d'accueillir tout le monde. Surtout que ceux qui restaient encore là n'étaient qu'une infime partie, des blessés réels qu'il y avait eu. Beaucoup avaient déjà pu sortir, ou partir, comme Calyopé. La jeune femme n'avait pas pu supporter ce qu'il s'était passé elle avait préféré repartir chez elle, dans sa famille. Lidonna avait beau ne pas particulièrement l'apprécier, elle était réellement triste pour Loïs...
Dans la pièce, des dizaines de lits se suivaient en rang, extrêmement proches les uns des autres. Ils avaient essayé d'en mettre le plus possible, histoire de mettre tout le monde dans la même pièce. Chaque lit était séparé par un petit paravent vert d'eau. Mais aujourd'hui, l'occupation avait réduit quasiment de moitié, il n'y avait donc qu'une place sur deux occupée. Pour l'intimité ça devait plus agréable.
Le soleil commençait doucement à s'infiltrer par les grandes fenêtres présentes le long des murs. S'ils n'étaient pas venus, les blessés n'auraient pas tardé à se réveiller de toute façon. Donc personne n'était réellement ronchon pour cette raison. Mais ils n'appréciaient pas qu'on les fasse déplacer sans leur expliquer. Leur situation était déjà assez difficile comme ça. Pourtant ils obéissaient. Parce qu'ils n'avaient pas le choix, parce qu'ils respectaient Gia et Careil.
Méréla ouvrait la marche avec ceux qui pouvaient se déplacer seuls. Ils n'attendaient pas, elle les guidait sans attendre ceux derrière parce qu'il n'y avait pas une seconde à perdre. En devant tenir le rythme sans leurs amis, les premiers blessés protestèrent quelques instants. Mais son aura de Charmeuse lui permit d'obtenir plus facilement des blessés qu'ils la suivent dans le calme et sans question.
Le reste du groupe commença à soutenir ceux qui en avaient besoin en respectant scrupuleusement ce que leur ordonnaient les Soigneurs. Lidonna était devenue la béquille d'une jeune femme qui devait avoir à peine plus de son âge. Elle était l'une des plus jeunes à être encore à l'infirmerie.
« Waouw, je suis aidée par la célèbre Lidonna. Je me sens honorée de votre aide. » souffla-t-elle sincère.
Mais la remarque ne toucha pas la rouquine, bien au contraire. Elle savait que ce n'était pas possible mais elle voulait être comme tout le monde. Si au moins ils la tutoyaient...
« Je m'appelle Cyn ! continua la jeune femme aux cheveux blancs. Je suis censée bientôt sortir de l'infirmerie, je ne devrais à avoir besoin de votre aide !
— Ce n'est pas ce que Ninya a dit.
— Mais vous savez...
— Non, tutoie-moi s'il te plaît, la coupa Lidonna.
— Je pourrais très bien marcher seule ! répliqua Cyn en ignorant la rousse.
— Je pense que si la Soigneuse qui s'occupe de toi à réclamer que tu sois soutenue c'est pour ne pas aggraver ce qui est en train de guérir.
— Ouais je sais, bougonna la blessée. C'est nul d'être limité et dépendant. »
Lidonna ne répondit pas. Elle ne pouvait que comprendre. Elle avait toujours été au dépend des autres, et même si ce n'était jamais physiquement, elle n'avait jamais pu vivre comme elle l'entendait...
« Mais je ne regrette pas d'être allée me battre ! Les Ombres veulent renverser le pouvoir pour instaurer leurs propres règles, des règles liberticides et tyranniques, et je résisterai toujours à ça !
— Tu sais plus de choses que moi, remarqua Lidonna en soupirant.
— C'est normal ! J'ai grandi et vécu ici ! Je me suis imprégnée de tout ça, expliqua-t-elle de manière extrêmement très bienveillante.
— Est-ce que tu as été une tentative de Kilidohana ? questionna la rouquine.
— Vu mon âge oui, mais pas de chance, je suis née avec les yeux blancs. »
Lidonna n'avait pas pris le temps d'observer la femme, elle n'était pas là pour ça. Il fallait aller vite, être efficace tout en étant précautionneux, elle avait eu autre chose à faire que détailler Cyn.
« N'empêche, même si j'ai grandi ici, je suis étonnée que le Conseil ne t'ai rien dit sur les Ombres.
— J'ai plus appris sur Elles quand j'ai été enlevée que depuis le mois où je suis ici.
— C'est vrai que tu as été enlevée... C'était pas trop affreux ? »
Des images terrifiantes lui revinrent en tête. Dæxor essayant de l'embrasser contre son gré, alors qu'elle était sous son charme, les cachots, la trahison de Nick, Leeham et ses tortures...
Lidonna ne put retenir un frisson... Elle n'avait plus mal, mais elle avait toujours deux cicatrices énormes le long des côtes. Personne n'avait réussi à les faire disparaître...
« Désolée, je ne voulais pas faire remonter de mauvais souvenir, c'était idiot de ma part. Viens on accélère, que tu puisses aider les autres. »
Cyn se sentait vraiment mal à l'aise d'avoir posé sa question, mais Lidonna ne lui en voulait pas. Ce n'est pas comme si les souvenirs disparaissaient. C'était impossible temps que les Ombres rythmeraient son quotidien. C'était peut-être même impossible tout court.
Mais accélérer n'était pas une si mauvaise idée. Elle se mit alors à suivre Cyn qui donnait le rythme. Il ne fallait pas qu'en cherchant à l'aider, Lidonna la blesse.
La nouvelle infirmerie de fortune n'était pas très loin dans le bâtiment qu'ils avaient choisi. Ils avaient voulu que l'évacuation se fasse le plus rapidement possible.
« Ça va aller ? demanda Lidonna, en aidant Cyn à s'installer sur un lit.
— Oui, va aider quelqu'un d'autre. Je ne sais pas pourquoi vous nous faites évacuer, mais si vous le faites, c'est que ça doit être important. »
Lidonna hocha la tête et sourit à la jolie jeune femme. Puis elle repartit. Le petit groupe réussit à évacuer tout le monde en une dizaine de minutes. Ils furent efficaces et donc ils commencèrent rapidement à chercher une potentielle bombe. Le Conseil avait décidé de faire des recherches parce que Méréla était, en plus d'une Charmeuse, une Bloqueuse. Elle pouvait créer un Bouclier autour d'elle et de ses compagnons, qui les épargneraient, au moins partiellement, de la bombe si cette dernière venait à exploser. Alors ils fouillèrent de fond en comble la pièce. Mais après avoir regardé sous tous les lits, dans les meubles, et tous les coins, ils se retrouvèrent vite démunis. L'infirmerie n'avait aucun recoin, ni cachette. Si une bombe devait se trouver là ils l'auraient trouvé !
« Sauf si un pouvoir a été utilisé, fit remarquer Rordian.
— Non, tout ce que je remarque c'est que Nick vous a roulé et que nous avons été trop stupides pour vous écouter, grogna Careil.
— Mieux vaut ça que l'inverse, essaya de tempérer Méréla.
— Elle n'a pas tort. On savait ce que l'on risquait. »
Careil leva la main d'un air excédé puis quitta la pièce.
Ils n'avaient rien trouvé, certes, mais quelque chose n'était pas logique. Nick était sincère, Lidonna en était persuadé, et visiblement Rordian était de son avis parce qu'elle le voyait continuer à fouiller. Ils leur manquaient une information pour résoudre ce mystère. Il y avait un trou dans ce que lui avait révélé Nick et c'est ce trou qui les empêchait de trouver cette bombe !
« Rordian, souffla Méréla. Je vais partir.
— Ok, qu'est-ce que ça peut me faire ? Pardon, se reprit-il. C'est mes parents qui me tendent.
— Je ne peux pas te laisser ici sans protection. On ne sait jamais. »
Il hocha la tête, compréhensif. De toute façon il ne trouvait rien. Alors, ils évacuèrent tous le bâtiment. A ses côtés, les pensées de Lidonna fusaient entre incompréhension et frustration.
...Nick était sincère...
Si Lidonna en était persuadé, il ne pouvait que la croire. Et puis surtout, il ne comprenait pas, pourquoi leur révéler ça, si c'était une fausse information. Elle ne faisait sens que si elle était vraie. Et pourtant ils n'avaient rien trouvé et il n'y avait aucune cachette viable dans cette pièce !
...Peut-être que la bombe n'est pas encore prête et n'apparaîtra qu'à ce moment là...
« Pas encore prête ? Comment ça ? s'étonna Rordian.
— Je ne sais pas. Nick n'a pas pu me donner plus d'information. Il m'a simplement dit qu'elle n'était pas prête.
— C'est réellement étrange.
— Je ne te le fais pas dire, confirma Lidonna. Mais au moins, l'infirmerie principale sera à l'abri quoi qu'il arrive. »
L'infirmerie principale. Ils avaient une deuxième infirmerie. Lidonna et Rordian venaient d'avoir la même pensée et se regardèrent les yeux écarquillés d'horreur. D'un même mouvement, les deux jeunes gens se mirent à courir en direction de la petite infirmerie où se trouvait Loïs et les trois autres personnes qui occupaient les quatre chambres. Rordian préférerait avoir tort. En fait, le mieux serait qu'il n'y ait pas de bombe du tout.
L'infirmerie originelle se trouvait dans le bâtiment en face. Le plus court pour eux était de traverser le jardin, puis de remonter les quelques étages qui les séparaient. Rordian était plus grand et plus entraîné, il allait plus vite que Lidonna. Pas le temps de l'attendre, il fallait évacuer en catastrophe cette infirmerie aussi. Le jeune homme arriva devant la porte qui menait aux chambres, entra, prêt à hurler de sortir d'ici, mais il fut projeté sur le mur par le souffle d'une explosion.
Rordian était au sol, sonné. Il se sentait un peu perdu. Il avait la tête qui tournait et des acouphènes ce qui accentuait la sensation. Il se releva, difficilement. Il avait mal, au dos, à la tête, partout... Il amena sa main à son front et observa ses doigts rouges. Il saignait...
« Ça va ? »
La voix sourde de Lidonna lui parvenait à peine. Il se rendit compte que c'était à lui qu'elle parlait quand elle lui reposa la question face à lui. Où était-il ? Que s'était-il passé ? Il regarda autour de lui. L'infirmerie, la bombe lui revinrent en tête. Face à lui, une arête de mur avait explosé et laissait l'entrée à deux chambres, sans besoin d'ouvrir les portes. Seul ce mur avait été touché. L'explosion était soit ratée soit ciblée contre une personne. Loïs ou Uda, puisque c'étaient leurs chambres qui étaient touchées.
Rordian retrouva un peu son audition et ses esprits. Il se précipita vers l'impact pour pouvoir observer les deux chambres. Uda était recroquevillé dans son lit, les débris du mur répartis en majorité dans sa chambre.
« Ça va ? » lui demanda Rordian de loin.
L'homme releva la tête. Ses yeux étaient rouges de larmes. La peur se lisait sur tout son visage.
« Tout va bien, tenta de le rassurer le Liseur. C'est fini maintenant. »
Rordian réussit à avoir un timide hochement de tête, alors il laissa les Soigneurs, qui venaient de débarquer en trombe, s'occuper de lui. Il se tourna alors rapidement vers Loïs.
« Loïs ! Loïs comment tu vas ? » s'inquiéta-t-il.
Le passage jusqu'à elle était plus dégagé alors il s'approcha de son amie.
« Doucement jeune homme ! pesta Camaé. Elle a quatre flèches dans le corps. Loïs ne bouge surtout pas ! »
Les cris et gémissements de douleurs de l'Empathe fusaient dans le chaos ambiant. Les Papillons commençaient à affluer, avertit par le bruit de l'explosion. Les Soigneurs mirent tout le monde dehors, ils avaient tous besoin de calme, d'intimité et certainement pas de curieux.
Rordian avait la rage. Il en voulait à ses parents de ne pas avoir pris la menace au sérieux. Peut-être qu'ils auraient pensé à cette infirmerie aussi s'ils n'avaient pas été persuadés qu'ils étaient en train de faire quelque chose de ridicule.
Lorsqu'il les croisa, accourant vers le lieu de l'explosion, il donna un coup d'épaule à son père.
« Heureusement que Nick nous a roulé, crache-t-il. S'il arrive quelque chose de grave à une personne qui était dans cette infirmerie, vous ne pourrez vous en prendre qu'à vous-même.»
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Fin de chapitre 🥰
Eh bien Nick ne mentait pas 🤭 mais les Papillons ont mal interprété son message 🙄 oups 😮
Espérons que cette petite incompréhension ne coûte la vie de personne 🤭
D'après vous, quel est le but des Ombres, attaquer une seule personne au lieu de tenter d'en blesser de dizaines ?
Et je suis curieuse, que pensez vous de l'attitude des parents de Rordian ?
Voilà c'est tout pour ce chapitre
Hâte de vous retrouver la semaine prochaine 🥰
Bisouilles :* 🦋
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