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Sacrilège - 3

Nous sommes retournés au travail. Un dragon avait eu un problème, un dragon avait agit, tout cela semblait se régler entre dragons, nous n'avions donc plus à nous en mêler. Toute cette histoire fut bien sûr la source de nombreux commérages dans toute l'auberge, on énonça les hypothèses les plus folles et les banalités les plus évidentes. J'étais le centre d'attention général et de nombreux clients me proposèrent de l'or pour entendre le moindre détail de mon aventure, ce qui faisait bien mon affaire. Les rumeurs se répandirent hors de l'auberge et de nombreux visiteurs vinrent exprès pour les entendre à la source.

A la fin du jour, alors que mes poches pleines d'or teintaient à chacun de mes pas, je m'apprêtais à doubler encore leur poids grâce aux derniers arrivés. Je ne m'attendais vraiment pas à ce que l'un d'entre eux me demande de le suivre. Sur le coup, sans réfléchir, j'ai refusé.

Ce qui était stupide. Deux éléments auraient pourtant dû activer mon instinct de survie. Pour commencer, sa taille colossale, sa peau mate et son œil unique bridé indiquaient un guerrier kabilaï. Il était encore assez jeune, mais avait vu suffisamment de combats pour être borgne et avoir le torse orné de quelques cicatrices. J'avais donc envoyé paître un homme capable de me casser en deux d'une main et de me dépecer de l'autre en moins de temps que je ne pourrais faire subir ce sort à un malheureux lapin.

Et surtout, surtout, il portait au bras droit un large brassard de la couleur mauve, indiquant qu'il était un membre de l'Alliance. Et on ne dit pas non à un membre de l'Alliance. On ne dit pas non à l'un de ceux qui ont créé le pacte liant dragons et humains. On ne dit pas non à quelqu'un qui veille au quotidien à une bonne cohabitation entre les puissantes créatures surnaturelles et les ridicules petits envahisseurs que nous sommes. A moins d'être stupide. Ou ivre.

Dans mon cas, je dois préciser qu'en plus de l'or, on m'avait offert de nombreux verres en échange de mon histoire.

La vision du colosse dépliant ses bras massifs me fit instantanément dessoûler. Mais je n'eut même pas le temps de lui dire que j'avais changé d'avis : il m'attrapa et me jeta sur son épaule comme un sac de farine, et m'emmena avec lui sans y mettre plus de formes.

Comme il fallait s'y attendre, personne ne protesta contre cet enlèvement : à Kenjara, chacun se mêle de ce qui le regarde et personne ne contrarie un membre de l'Alliance, deux excellentes raisons de se détourner de la scène pour mieux la commenter, et se resservir une pinte au passage. Je criais tout de même au secours, à tout hasard. Je ne récoltais qu'un avertissement :

"Tu veux un bâillon ?

Il en semblait tout à fait capable. Je répondis donc que non, j'aimerai autant éviter ça, et que s'il pouvait me reposer à terre j'étais prêt à le suivre.

‒ Ça tombe bien, dit-il en me déposant devant un poney gris. Grimpe."

A Kenjara, les chevaux sont rares. Il faut un dressage très particulier pour qu'ils puissent supporter de vivre au milieu des dragons. En revanche, les poneys gris sont une race importée massivement car ils sont parfaitement indifférents aux dragons et à leur odeur. Mais même si la bête acceptait placidement de me porter, moi et mon odeur de servant-dragons, ça ne voulait pas dire que je savais comment me hisser sur son dos.

Devant mon regard paniqué, le borgne m'attrapa aux épaules, me souleva sans effort et me posa sur l'animal. Il installa mes pieds dans les étriers et prit les rênes, avant de grimper sur sa propre monture, un magnifique cheval faisant deux fois la taille de mon poney. Le tout sans dire un mot. Tout cela était forcément en rapport avec la mort de l'ailes-de-nuages, mais je ne comprenais absolument pas ce qu'il me voulait. Qu'est-ce que j'avais bien pu faire pour mériter ça ?

Nous avons chevauché deux heures vers le sud, un trajet ralenti par le fait que je tombais régulièrement de ma monture. Le colosse me remettait en selle avec une patience minérale. Sans savoir où nous allions, je désespérais d'arriver un jour où que ce soit.

Enfin, mon calvaire prit fin lorsque nous sommes arrivés à un point-relais. Je distinguais à la lueur des torches une centaine d'humains s'affairant autour de six dragons. Apparemment, nous étions dans un ancien parc décoratif, hâtivement reconverti. L'ambiance était très différente de celle de mon auberge et je compris rapidement qu'il s'agissait d'un camp temporaire utilisé par les soldats. Mon coeur se serra. Je savais que Kenjara était en guerre, comme d'habitude, mais pas que la ligne de front s'était autant rapprochée de nous.

Mon kidnappeur confia nos montures à un soldat et me poussa, en me tenant solidement par l'épaule, jusqu'à une tente surpeuplée par les soldats (en marron), les membres de l'Alliance (en costume militaire ou civil, reconnaissables aux bandeaux mauves indiquant leur fonction), les représentants de différentes communautés fraîchement immigrées (portant des insignes rouges), et tous les autres gens qui paraissaient parfaitement ordinaires. Sans hésiter, le colosse nous fit doubler tout le monde et franchir la cohue. Deux soldats gardaient une ouverture au fond de la tente. Ils nous laissèrent passer sous les vives protestations des représentants furieux.

Contrairement à ce que je pensais, l'ouverture ne donnait pas sur une autre tente, mais sur l'extérieur. La tente n'était qu'une antichambre permettant de regrouper et de faire patienter les gens qui voulaient qu'on leur accorde une audience. Une fois les portes de toiles franchies, nous nous sommes retrouvés dans un ancien jardin qui avait sans doute été splendide avant d'être piétiné par les soldats et les dragons. Sur une pelouse à peu près intacte, simplement assise dans l'herbe, se tenait Isadora.

Je ne l'avais vue qu'une fois, il y a deux ans, lorsque j'avais prononcé devant elle et quelques membres de l'Alliance le serment qui faisait de moi un citoyen de Kenjara. Je l'avais prise pour une fonctionnaire novice – comme tous ceux qui sont chargé d'organiser le chaos perpétuel qu'est l'administration naissante de Kenjara. Une femme entre deux âges, aux longs cheveux châtains tressés sur le côté, aux yeux noisettes, au visage doux. Une dame du sud typique, pour moi qui venait du nord. Je n'avais pas prêté attention à sa force de concentration, au coté perçant de son regard, à la résolution de sa mâchoire.

Personne ne m'avait expliqué qui elle était. Pour les kenjariens, Isadora est Isadora, ce simple prénom se passe de présentation. Elle n'a aucun titre officiel, elle n'est ni reine du pays, ni général de l'armée, ni dirigeante de l'Alliance. Et pourtant c'est elle qui a créé le pays, rassemblé l'armée, fait accepter l'Alliance. Tous les problèmes, d'une manière ou d'une autre, remontent jusqu'à elle. Et, l'un après l'autre, comme par magie, elle les résout.

Le colosse m'a fermement poussé jusqu'à elle. Isadora s'était installée à l'écart des troupes, une planche sur les genoux pour écrire, une montagne de documents en attente à ses côtés. Deux dragons l'encadraient, que j'évitais de regarder dans les yeux. Isadora a redressé la tête vers moi et je suis resté pétrifié à l'idée que je ne savais pas comment agir face à elle.

Elle était, comme à son habitude, vêtue très simplement : une tunique marron, un pantalon bleu, de solides bottes, un épais manteau de laine gris. Pas de brassard de l'Alliance pour Isadora. C'était inutile.

L'homme qui m'avait amené m'introduisit d'un bref :

‒ Voilà le garçon qui a trouvé Foudre. Il a déjà raconté son histoire à tout le monde, mais elle n'a pas trop variée, il a l'air d'un bon témoin.

Isadora m'a souri et m'a salué d'un "bonsoir" aimable bien que fatigué. Je remarquai alors ses cernes et ses traits tirés. Si la guerre s'était vraiment autant rapprochée de nous, notre dirigeante ne devait sans doute pas beaucoup dormir. Je tentai de bredouiller une réponse. Elle me dit :

‒ Alors, raconte-nous tout.

‒ Heu... Quoi ?

‒ Tu parles arcien ? Frem ? Autre chose ?

‒ Ah, heu, non, c'est bon, je parle arcien... et frem aussi, un peu... c'est juste que... je ne comprends pas... qu'est-ce que vous voulez que je raconte ?

Derrière moi, mon accompagnateur lâcha un bref éclat de rire. Isadora se fendit d'un bref sourire qui montrait ses dents sans masquer sa lassitude et lui demanda :

‒ Tu ne lui as rien dit ?

‒ Non. Ca paraissait évident.

‒ Bon, soupira-t-elle, on reprend depuis le début. Quel est ton nom ?

‒ Loc Reyis, Madame.

‒ Appelle-moi Isadora, comme tout le monde. Il parait que c'est toi qui a découvert le corps de Foudre, c'est exact ?

‒ J'ai trouvé un dragon mort, un ailes-de-nuages. Je ne connais pas son nom.

‒ Est-ce que c'est lui ?

D'un signe du menton, elle me désigna le grand Terre-Feu à quelques mètres d'elle, qui ressemblait furieusement à celui que j'avais vu à l'auberge. Je mis quelques instants à comprendre que ce n'était pas lui qu'elle désignait, mais le pauvre cadavre gisant sous la protection du dangereux dragon. Je m'approchais. Il semblait petit, en comparaison du Terre-Feu, mais oui, c'était bien lui. Je hochais la tête.

‒ Tu en es bien sûr ?

‒ Il a la même couleur, la même taille d'écailles. Et les mêmes blessures. Je l'avais bien regardé, la première fois. Pas parce que... enfin, ce n'était pas par manque de respect, vous savez. C'était juste que... Enfin, j'étais choqué. Je resté un moment à le regarder, rien que pour croire ce que je voyais.

‒ Ca ne peut pas être un autre dragon avec d'autres blessures ?

Une série de meurtres de dragons ? L'horreur de l'idée me glaça. Mais je regardais à nouveau la créature et me rassurai.

‒ J'en suis certain. Je travaille dans une auberge depuis deux ans, je sais reconnaitre le visage d'un dragon. On lui a fermé les yeux, mais c'est bien lui.

‒ Bien. Maintenant, raconte-nous tout ce que tu as vu, en détail.

Je m'exécutai de mon mieux, expliquant dans quelle position était l'ailes-de-nuages, comment étaient ses blessures. Malgré les nombreuses questions qui suivirent, je ne pus rien ajouter d'utile : je n'avais vu aucune trace ni empreinte de pas pouvant appartenir à l'agresseur, je n'avais pas vu ce dragon à l'auberge de son vivant, je n'avais entendu personne dire qu'il l'accompagnait. Pour finir, Isadora se redressa avec un soupir et me dit :

‒ Bien, maintenant qu'on a fait le tour de ce que tu as vu, donne-nous ton avis sur ce qui s'est passé. On ne sait jamais, ça peut nous faire avancer.

L'invitation me rendit plus nerveux encore. J'avais bien sûr réfléchi à la question, sans trouver la moindre certitude. Je secouai la tête en expliquant :

‒ Non, je ne sais pas... Foudre a été tué dans la forêt derrière l'auberge, c'est peu fréquenté mais tout le monde peut s'y rendre discrètement. Il y avait trop de mouvement dans l'auberge pour qu'on puisse voir qui manquait à l'appel. Je connais certains clients qui n'aimaient pas les dragons, mais ils ne savaient pas comment en tuer un, même en s'y mettant à plusieurs. Tous les autres, nous avons besoin des dragons pour vivre. Personne n'avait entendu parler de ce Foudre parmi les servants, que je sache, aucun d'entre nous n'avait de raison de lui faire du mal. Les blessures ont l'air de venir d'une arme humaine, mais un dragon avec une bonne lame-de-griffe pourrait faire des dégâts aussi nets. Dans les deux cas, ça me fait penser à un assassin professionnel. Et je n'ai aucune idée de qui pourrait l'avoir commandité. Je suis désolé.

Isadora échangea un bref regard avec le dragon à sa droite, un couronné ocre à peine plus grand que moi. Il me sembla voir les yeux du dragon briller légèrement, sans pouvoir en jurer. Cela suffit à Isadora qui, à ma grande surprise, me demanda :

‒ Pourquoi es-tu venu à Kenjara, Loc Reyis ?

‒ Quoi ?

‒ Tu n'es pas de Kenjara, n'est-ce pas ? Personne n'est de Kenjara, à part les dragonniers, et tu as encore un accent nordique à couper au couteau.

‒ Oui, mais je...

‒ Pourquoi es-tu venu ici, sur la terre des dragons ? Pour être libre ? Pour avoir ta propre terre ? Es-tu un ancien esclave ? Un condamné ? Que cherchais-tu en venant à Kenjara ?

‒ De l'or.

Isadora n'a pas parue choquée par ma franchise, au contraire :

‒ Alors je te propose un marché. Retourne à ton auberge, fouine discrètement, et aide Chance et Uchen à trouver le coupable.

‒ Quoi ?

‒ Pardon, on ne t'a pas présenté... Voici Chance – elle me désigna le dragon ocre à coté d'elle – et lui c'est Uchen – elle fit un geste en direction du colosse borgne. Ils enquêtent sur la mort de Foudre. Une poignée d'or pour toi si tu les aide. Deux si tu trouves le coupable ou une preuve qu'on peut directement utiliser.

‒ J'accepte." répondis-je sans hésiter.

Je ne comprenais pas ce qui se passait ni pourquoi Isadora s'était donné la peine de m'enlever pour m'offrir un travail, mais l'or c'est l'or. Kenjara en regorge mais n'a pas de monnaie, la valeur en or de chaque chose est déterminée au poids. Une poignée est une mesure grossière, correspondant à peu près à mon salaire en un mois à l'auberge. Ça suffirait, si je me décidais à rentrer chez moi, à vivre comme un prince pendant des années. Isadora hocha la tête et l'entente fut conclue. Uchen me prit une fois de plus par l'épaule et m'entraina à l'écart, tandis que les deux dragons emmenaient le corps de leur congénère et que les quémandeurs suivants sortaient de la tente-antichambre. Nous avons traversé tout le campement jusqu'à arriver à une tente discrète où le géant me fit entrer.

‒ Tu pourras dormir ici. Mais avant, je vais t'expliquer ce que tu devras faire, et pourquoi Isadora t'a engagé. Ah, non, avant toute chose...

Il fouilla dans ses affaires et en sorti un bandeau mauve, signalant une appartenance à l'Alliance, sans blason qui indiquerait à quelle unité appartient le porteur, qu'il m'offrit.

‒ Ça pourra te servir. Attache-la à ton bras, sous ta chemise. Tu devras cacher que tu as été recruté par l'Alliance, mais en cas de danger, montre que tu as de bons protecteurs, ça en fera réfléchir plus d'un.

J'attachai le bandeau avec la sensation étrange d'être un imposteur. Les membres de l'Alliance veillent à faire respecter la paix entre les deux espèces de Kenjara. Ils sont sensés être assez forts pour s'opposer à tous ceux tentant de violer le pacte, humains ou dragons. Je n'avais vraiment pas le gabarit adéquat. Uchen me fit signe de m'assoir et je me laissai lourdement tomber sur la paillasse. Il commença :

‒ Garde bien ça en tête : si Isadora t'a demandé de nous aider, ce n'est pas seulement pour ta place à l'auberge ou ton témoignage. Tu as su rester neutre et ne pas te laisser emporter par ton imagination. C'est important pour la suite. Quand nous saurons quel salopard a tué Foudre, il faudra le jurer devant les dragons, yeux dans les yeux. Donc parler uniquement si nous sommes parfaitement sûrs de nous.

‒ Mais pourquoi est-ce si important ? Les dragons ne peuvent pas régler cette histoire eux-mêmes ?

‒ Ce serait bien plus simple, c'est sûr. Malheureusement, il y a un risque. La situation pourrait complètement nous échapper.

‒ Comment ça ? Si le coupable est un humain, les dragons le puniront et ce sera réglé. Si c'est un dragon, ça ne nous concerne pas du tout.

‒ Sauf que les choses sont beaucoup plus compliquées que ça, malheureusement. Nous, les humains, commençons à être... trop nombreux, d'une certaine manière. Les premiers arrivés n'oublient pas l'ancien nom de Kenjara : le Pays libre des Dragons. Nous vivons dans un pays tout neuf, il a à peine dix ans. Avant, les seuls humains admis sur ce territoire étaient les dragonniers. Les autres n'y seraient toujours pas les bienvenus si les armées des royaumes voisins ne s'étaient pas réunies en coalition pour piller les trésors des dragons. Les seigneurs du ciel sont bien sûr les plus forts, et de loin. Mais face à des milliers d'hommes, même eux ont perdu des batailles. Quand Isadora a vu ça, elle a saisit cette opportunité pour proposer l'Alliance : les dragons nous acceptent sur leur territoire, nous cultivons leurs terres, nous élevons leur bétail, nous bâtissons des villes, nous nous adaptons à leurs lois, nous nous battons contre leurs ennemis. En échange nous avons le droit de vivre à Kenjara. Et aujourd'hui, certains humains trouvent ce pacte trop disproportionné.

‒ Mais... il y a toujours des gens pour avoir peur des dragons, bien sûr, mais ce n'est pas sérieux. Je veux dire, ils ne veulent pas réellement rompre l'Alliance. Ce serait complètement stupide !

‒ C'est assez utopique, bien sûr. Même si nous avons l'avantage du nombre à notre tour, nous ne sommes pas une armée prête à sacrifier mille soldats pour tuer un dragon, contrairement à ceux d'en face. Seulement ça n'empêche pas les gens de se monter la tête. Si jamais le tueur est humain, les dragons vont le trouver et le dévorer. Et ça renforcera la colère de ces imbéciles. On n'a pas besoin de ça.

» Kenjara est un pays fort grâce aux dragons, aucun de nos ennemis n'est jamais parvenu à s'en emparer. Mais il est faible de l'intérieur. Les gens viennent de dizaines de pays différents, ils ne parlent même pas tous la même langue. Il y a des anciens esclaves, des criminels en fuite, des gens persécutés pour leurs idées ou leur religion, des aventuriers, des exilés, des déserteurs... On est mal organisés, peu unis, effrayés à l'idée de déplaire à nos alliés aux grandes dents, déçus de ne pas trouver la vie dont nous rêvions en fuyant ici. Il suffirait d'une étincelle pour faire exploser ce baril de poudre.

» Isadora nous a confié une mission sans rapport avec Foudre. La justice est loin d'être sa priorité actuellement. Notre mission, c'est de montrer une enquête menée correctement, des preuves, et pour finir montrer que les dragons ne sont pas des seigneurs tout-puissants qui peuvent croquer qui ils veulent. Il faut que tout le monde voit que même eux obéissent à des lois, pour que nous puissions vivre tous ensemble à Kenjara. Donc, Chance va probablement trouver le coupable tout seul, mais il est d'accord avec Isadora pour attendre avant d'exécuter la sentence, le temps pour toi et moi de prouver ses accusations.

‒ D'accord.

J'étais un peu gêné. Je savais très bien tout ça à propos de mon pays d'adoption, de son fonctionnement et de ses origines. Pourtant, s'il ne m'avait pas mis les points sur les i, je n'aurais pas compris l'importance de mon rôle. Je n'avais pas imaginé une seconde l'impact politique de ce meurtre et j'avais accepté à la légère une lourde responsabilité. Heureusement, personne ne risquait de me punir si jamais j'échouais. J'avais bien l'intention pourtant de tout faire pour aider l'Alliance.

‒ Et Chance connait déjà des choses sur Foudre ? On sait s'il avait des ennemis ?

‒ Tous les dragons se connaissent ici, et tous ont des ennemis. Enfin, des rivalités seraient plus juste. En théorie, ils ne s'assassinent pas pour si peu, leurs luttes de clan ressemblent davantage à des parties d'échec évoluant sur plusieurs siècles. Les pions perdus ne sont pas sacrifiés, ils sont mis à l'écart par le gagnant de la partie en cours qui recherche leur valeur véritable en les mettant en jeu dans d'autres parties, jusqu'à ce que toutes s'emmêlent. Enfin, c'est ce qu'on m'a expliqué. Personnellement, je n'y comprend pas grand-chose... dans l'Alliance, nous travaillons souvent avec les dragons, mais ils ne nous disent que ce qu'ils ont envie de dire. Ou peut-être qu'ils ne nous disent que ce qu'on est capable de comprendre. D'après Chance, Foudre était un Nervis, descendant d'une branche adoptive des chasseurs de volcans. Il vivait seul avec un vieux dragonnier, dans une grotte du coté nord du Jystang. Ça te parle ?

J'ai pris le temps de bien réfléchir avant de répondre. En tant que servant, j'étais assez familiarisé avec les clans de dragon les plus importants. La principale difficulté, c'est que les dragons qui se donnent la peine de nous parler de leurs familles utilisent souvent des traductions différentes pour désigner les mêmes choses.

Ainsi, les chasseurs de volcans sont aussi appelés pour les humains les géants, les fils du Premier, la grande lignée, les créateurs de chaos. Leur influence est assez grande. Les Nervis représentent une branche moins puissante, comportant des dragons plus petits. J'étais assez surpris que l'un d'entre eux ai son propre dragonnier.

Lorsque le Pays libre a été attaqué par la coalition, les dragonniers ont défendus leurs maîtres de toutes leurs forces et beaucoup sont morts au combat. Ces fidèles serviteurs, esclaves volontaires, sont ainsi devenus très rares. Isadora a banni l'esclavage de Kenjara, mais a fait une exception pour les dragonniers : à condition que ce choix soit librement consenti par les deux, un humain peut continuer à appartenir à un dragon. Malgré toute mon expérience de servant, j'étais incapable de comprendre cette démarche.

‒ Et ce dragonnier ne sait rien ?

‒ Il est sous le choc. Il était en train de négocier le ravitaillement, pas très loin de l'auberge, et il croyait que Foudre était en train de chasser. Apparemment, il va être donné aux héritiers de Foudre.

‒ Il ne peut pas reprendre sa liberté ?

‒ Il ne veut pas. Sa famille sert la famille de Foudre depuis des générations. Après, on peut se demander ce qu'un dragon fera d'un dragonnier aussi vieux...

‒ Il a quel âge ?

‒ Une soixantaine d'années, dont quinze ans de guerre. C'est un coriace. Il s'appelle Brile. Je l'ai convoqué à l'auberge, avec les héritiers, pour faire le partage correctement.

‒ Et les héritiers, ça ne pourrait pas être eux ?

‒ Deux chasseurs de volcans tuant un Nervis ? Avec une lame ? Pour un trésor moins haut que moi ?

‒ Ah. Non, bien sûr. Et cette lame ? Vous avez pu trouver d'où elle provient ?

‒ Il y a la trace de deux lames. L'une d'entre elle a cassé dans la blessure du ventre, il en est resté un morceau dans le corps de Foudre. Ça devrait nous permettre de retrouver l'arme, si l'assassin ne s'en est pas débarrassée. Ensuite, il a continué avec une lame plus fine. C'est la première lame qui a tué. La deuxième n'a servi qu'à s'acharner sur son corps. L'assassin avait beaucoup de force physique... ou la lame était au bout d'une pique.

‒ Celle que vous avez retrouvée est en quelle matière ?

‒ De l'acier ordinaire.

‒ L'assassin doit être blessé, lui aussi. Foudre n'était peut-être pas d'une race de combattants, mais je vois mal un dragon se laisser transpercer sans réagir.

‒ Ou il était très rapide. N'oublie pas que Kenjara attire des aventuriers prêts à tout pour de l'or. Dans le lot, certains sont de grands guerriers.

‒ Il aurait attaqué Foudre dans sa caverne. Là, il n'avait rien à voler. D'ailleurs qu'est-ce qu'il faisait dans cette forêt ? C'est un mauvais terrain de chasse : avec tous les clients de l'auberge, le gibier a fuit depuis des années, même les pièges ne donnent rien.

‒ Ça, c'est ce que Chance cherche. Nous en saurons plus plus tard. D'autres questions ?

Je réfléchis encore un peu, tentant de trouver de nouvelles pistes, mais rien ne me vint.

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