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Maudits - 8

Aïna testa un autre homme, qui semblait taillé dans le marbre. Ni frayeur au moment du contact, ni soulagement lorsqu'elle lui fit signe d'aller plus loin, un véritable golem de pierre brune. Les murmures des ragots se turent dès qu'il rejoignit le groupe des testés.

Eyr me chuchota qu'il s'agissait de Lerren, le veuf d'Uya. Je gravai son visage dans mon esprit, me promettant de trouver une occasion de discuter avec lui. Je demandai également au chef de me désigner la famille de Ten. Il m'indiqua une femme appelée Ona dont on ne pouvait distinguer le visage, caché par sa longue chevelure brune, penchée depuis le début sur l'un ou l'autre des nombreux enfants qui l'accompagnaient

"Ils sont tous à elle et Ten ?" demandai-je, surpris.

‒ Ils en avaient six, et élevaient également trois de leurs neveux, un peu plus âgés, qui se sont retrouvés orphelins lors du voyage vers Kenjara. La mère d'Ona et la tante de Ten vivaient aussi chez eux.

‒ C'est une grande famille...

‒ Une richesse et une chance. Lerren et Uya, malheureusement, ne la partageaient pas. Ils avaient adopté deux orphelines, des cousines d'Uya, mais l'une d'elle est morte pendant le voyage, et l'autre est mariée aujourd'hui. Lerren se retrouve seul. "

Evidemment, il était mal venu que je demande à un tzéran comment Ona allait pouvoir nourrir son immense famille après la mort de Ten. Je supposais que le village allait se montrer solidaire et leur faciliter la vie de leur mieux, sans jamais s'abaisser à quelque chose d'aussi vulgaire de prêter ou donner de l'argent.

En tout cas, tous les tzérans que j'avais connus étaient extrêmement pudiques sur le sujet, tout en étant profondément choqués de voir dans d'autres peuples que certaines personnes en laissaient d'autres souffrir de la faim. Les enfants de Ten seraient, sinon dans le confort, du moins à l'abri du besoin. Mais si je cherchais qui avait assassiné Ten, Ona était tout de même la dernière personne qui pourrait y trouver un intérêt. Son avenir s'annonçait difficile à présent qu'elle était veuve.

Il ne restait donc qu'une cinquantaine de suspects. Une broutille.

Je senti Eyr et les autres retenir leur souffle tandis qu'arrivait le tour de Drat, le premier des deux frères que le village entier, semblait-il, suspectait. Il était grand et large d'épaules, mais ses grands yeux naïfs et les quelques poils perdus ornant son menton indiquaient que son enfance ne datait pas de très longtemps. Aïna se comporta avec lui exactement comme avec tous les autres : la fiole posée sur le front, deux secondes d'observation, la fiole ôtée et un petit signe pour que le testé s'écarte. Ce qu'il fit prestement, comme troublé lui-même de ne pas avoir fait réagir l'étrange liquide.

Derrière, son frère attendait, faussement calme et l'air bravache. Il arrivait à l'épaule de Drat, mais ce n'était pas difficile de comprendre que c'était lui l'ainé. Lui avait un visage complètement mature, et toute trace d'innocence avait disparue de son regard. A part cette différence de taille, la ressemblance des deux frères était frappante, tant physiquement que dans leurs gestes nerveux et leurs mimiques, illustrant sans le vouloir le lien qui les unissait.

Je guettai les visages des autres villageois. Qui attendait un verdict positif ? Qui savait que l'alchimiste ne trouverait rien ? Qui serait troublé, anxieux, soulagé ?

Keret n'avait pas fait plus de magie noire que Drat. Il rejoignit les autres, qui reculèrent, laissant les deux frères à l'écart et murmurant de plus belle. Pour ma part, je n'avais pas observé grand-chose d'intéressant. Tout le monde avait retenu son souffle dans un bel ensemble.. Lerren n'avait montré aucune expression. Une jeune fille avait caché son visage derrière ses mains tremblantes. Une vieille femme avait semblée terrifiée, puis soulagée lorsque les jeunes hommes étaient venus, et les avait pris tous les deux par l'épaule dans un geste dérisoire de protection. J'en déduisis qu'il s'agissait de leur mère.

Aïna termina, les deux derniers villageois étaient eux aussi vierges de toute trace de magie noire. Elle s'avança directement vers Eyr. L'heure précédente, elle était paniquée à l'idée que ses talents ne parviennent pas à révéler l'assassin, mais à présent que c'était arrivé, devant tout le monde, elle se montrait calme et sûre d'elle, parfaitement maîtresse de ses émotions. Pourtant, face à elle, l'hostilité du groupe était palpable.

‒ C'est fait." dit-elle au chef, assez fort pour que tout le monde l'entende. "J'ai appliqué ma magie, et je peux vous affirmer qu'aucune de ces personne n'a pratiqué la magie noire, ou touché un objet utilisant la magie noire.

‒ Comment ça ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?

La colère de Eyr s'amassait depuis qu'il avait vu l'alchimiste laisser filer ses deux suspects. A présent sa voix furieuse tonnait, vibrante, et résonnait sur les roches environnantes.

A mon grand soulagement, Aïna ne se laissa pas impressionner. Au contraire, elle prit elle-même sa posture la plus imposante et d'une voix tout aussi forte répliqua :

‒ Qu'est-ce qu'il y a, mon tzéran n'est pas assez compréhensible ? Je vous dis qu'en tant que sorcière, j'ai vérifié si vous ou un de vos villageois avait pratiqué la magie noire, et je peux vous affirmer que ce n'est pas le cas ! Réjouissez-vous, au lieu de rester les bras ballants comme si je vous avais annoncé une catastrophe !

‒ Et Ten ? Et Uya ?

‒ Loc Reyis l'enquêteur et moi-même allons trouver les assassins. Mais ces morts n'ont rien à voir avec un sacrifice rituel. Vous n'êtes pas maudits, tranquillisez-vous.

Je savais que j'avais conseillé à Aïna de poser les choses avec assurance, mais là je sus qu'elle était allé trop loin. Sorcière ou non, elle ne pouvait pas balayer par sa seule expérience leur certitude collective. J'intervins :

‒ Ou le sorcier qui l'a accompli ne fait pas parti du village. Il reste un peu de temps avant la nuit. Chef Eyr, j'aimerai qu'Aïna vérifie votre barricade, pour que nous soyons sûrs qu'il n'existe pas de passage magique lui permettant d'entrer à sa guise. "

Il me foudroya du regard. Derrière nous les mécontents grondaient. Pas besoin de savoir parler tzéran pour comprendre, au ton et aux regards hostiles, qu'ils commençaient à se méfier de nous.

Je soutins son regard, affichant autant de confiance en moi que j'en étais capable. Heureusement, il finit par hocher la tête et confier à deux hommes la tâche d'accompagner Aïna.

Je reconnus en eux ceux qui gardaient les portes. Des hommes forts, aux sens affutés, à qui Eyr confiait la sécurité du village. Mais il n'y avait aucune raison qu'ils s'en prennent à l'alchimiste. Elle ne semblait d'ailleurs pas s'en faire et prépara avec une rapidité professionnelle le matériel nécessaire à cette tâche inutile.

Evidemment, je n'avais demandé cette vérification que pour détourner la colère d'Eyr le temps que j'en sache un peu plus. J'avais bien l'intention, d'ici au coucher du soleil, de découvrir quelque chose sur chacun des principaux protagonistes de cette histoire, et si tout allait bien de comprendre enfin ce qui s'était passé.

Ensuite, il me faudrait encore réunir des preuves... Mais chaque chose en son temps. Pour apaiser davantage Eyr et les reynardais, je choisi de commencer par interroger les frères Drat et Keret.

Ce qui m'amenait logiquement à cette seconde interrogation : par quoi commencer ?

Trop tard, j'y étais. Je les saluai donc, me présentai et leur demandai si nous pouvions parler un peu. Nous étions la cible de tous les regards et je leur proposai d'aller chez eux. Ils obtempérèrent sans se faire prier, suivi de la vieille femme qui était bien leur mère, Nech.

Leur maison était effectivement un peu à l'écart du village, perchée sur un rocher, et dominait une bonne partie de l'endroit. Du pas de leur porte je pouvais voir Aïna et ses gardes pousser les chèvres pour accéder à tous les lieux qu'elle inspectait. J'espérais qu'elle avait compris que je gagnais du temps et serait la plus longue possible - ce qui était un sacrifice appréciable de sa part, vu qu'elle pataugeait dans le crottin.

Ici aussi, quelques chèvres se baladaient, mais elles n'avaient rien à brouter autour de la maison et se contentaient de nous regarder passer avec curiosité, leurs pupilles horizontales fixées sur nous avec un sérieux à toute épreuve. Je n'étais pas très familier de ces bêtes, j'avais surtout appris à me méfier des boucs et à ne jamais laisser un papier trainer à portée de leur appétit. Ces trois chèvres-ci appartenaient sans doute à Drat et Keret qui les caressèrent distraitement en entrant dans leur cabane.

A mon grand désarroi, les bêtes nous suivirent. La cabane des deux frères était plutôt une étable et il semblait évident que tout le monde - chèvres comprises - dormait dans la paille accumulée dans un coin de la minuscule maison.

A part ça, le lieu était bâtit sur le même modèle que la cabane du chef, des planches posées sur une structure en cône, sans fenêtre, avec un trou central pour la fumée et un foyer de pierres. Mais la petite famille en avait fait quelque chose de chaleureux. Des plats de bronze brillants reflétaient la lumière de plusieurs lampes à huile , des peaux de chèvre étaient tendues sur de l'herbe sèche pour former des coussins, et tout un attirail était accroché au plafond : de quoi cuisiner, tanner, tisser, chasser, jouer de la musique, s'éventer... Un endroit où on vivait, même pauvrement.

Keret me fit assoir et me proposa un lait de chèvre. J'étais soulagé qu'il me traite en invité, même forcé, plutôt qu'en ennemi, et j'acceptai volontiers. Sa mère se précipita aussitôt et se mit à traire l'une des chèvres avant de me servir. Pendant ce temps, Drat était sorti et revenu avec une brassée de foin que les chèvres dévorèrent. Je leur demandai si c'était courant de garder ainsi ses bêtes à l'intérieur de la maison. Keret me répondit avec un hochement d'épaule :

"Elles tiennent chaud pendant l'hiver.

A moi d'en déduire ce que je voulais. J'avais de plus en plus l'impression que l'hiver et sa rudesse attendue jouait un rôle dans cette histoire. Du moins, que ce soit Eyr ou Keret, ceux qui en parlaient le faisaient avec une tension dans la voix et un visage grave dignes de l'évocation d'une catastrophe. Et Aïna les avait jugés ressemblant à des vétérans qui sauraient qu'ils ne s'en sortiraient pas vivants.

L'assassin aurait-il pu vouloir réaliser un sort de magie noire pour contrer cet hiver qu'il imaginait comme une menace ? Après tout, si Aïna n'avait trouvé aucune trace, ça pouvait simplement vouloir dire qu'il avait lamentablement raté son sort. En étant un parfait amateur en la matière. Comme n'importe quel villageois tzéran, peu versés dans les arts occultes.

Tout en gardant cette idée en tête, je revins à mon enquête :

‒ Vous savez que je suis chargé par l'Alliance de découvrir qui a tué Ten et Uya. Beaucoup de gens vous suspectent, alors autant établir ce qui s'est passé tout de suite : pouvez-vous me dire où vous étiez, le jour de la mort de Ten ?

‒ Pourquoi ? " me demanda Keret en ricanant. "Votre amie sorcière a prouvé que ce n'est pas nous qui l'avons tué, pas vrai ?

‒ Elle a simplement prouvé que vous n'aviez pas pratiqué de magie noire. Ça ne vous empêchait pas de le frapper avec une pierre.

‒ C'est vrai. Nous aurions pu. Si nous étions allés à la rivière, et pas allé vendre notre lait au point-relais de Tund.

‒ Vous êtes partis à quelle heure ? En passant par où ? Avec qui ?

‒ Vous cherchez vraiment à nous accuser de ce crime par tous les moyens ! Vous êtes bien comme...

‒ Je ne vais pas me justifier à chaque fois que je pose une question ! Aux dernières nouvelles, c'est moi l'enquêteur de l'Alliance ! Et je commence par chercher votre alibi, alors si vous voulez prouvez votre innocence, arrêtez de râler et répondez à mes questions !

Tous les trois - même les chèvres, j'avais l'impression - me regardèrent avec surprise. J'étais moi-même étonné de la brusque colère qui m'avait saisi.

J'avais l'impression de voir leur avenir se dérouler devant nous, tel que tracé par les certitudes des uns et des autres, les soupçons, les ragots, les accusations, et pour finir le châtiment, tout ça semblait inéluctable. Et alors que je faisais de mon mieux pour me dresser contre ce sinistre destin, pour me raccrocher aux faits au lieu de laisser libre court aux instincts de protection des villageois, ces deux espèces de bœufs renâclaient !

Comme si eux-mêmes avaient renoncé à toute possibilité de quitter leur rôle de bouc émissaire. Ils ne se rendaient donc pas compte que leur attitude de rébellion ne faisait que jouer le jeu du reste du village ? Plus ils protestaient, plus ils semblaient coupables.

Je pris une grande inspiration. Me fâcher maintenant semblait aussi stupide qu'inutile. J'étais déjà plus qu'à moitié convaincu de leur innocence, tout comme j'étais certain qu'il faudrait des preuves solides pour que les villageois l'admettent.

‒ S'il vous plait," ajoutai-je, "y a-t-il quelqu'un qui puisse certifier vos dires ?

‒ Oh oui, il y a quelqu'un. Qu'il ait le culot de venir nous le dire en face, que nous avons tué ce pauvre Ten !

‒ Qui ça ?

Keret me regarda bien en face, un rictus aux lèvres, comme si ce qu'il allait me dire était si désespérant que c'en était drôle.

‒ Le chef Eyr.




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