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La Tour Blanche - 5

— Dim nous a parlé de magie venue d'humains, la magie des rêves.

Elle fronça les sourcils. Personne ne lui avait parlé de ce point-là ? Ça semblait aberrant.

— Cette magie existe, il me semble, mais je ne connais personne qui la pratique. Elle semble extrêmement délicate. Pourquoi venir jusqu'à Kenjara, au milieu des dragons, pour un praticien des rêves ? C'est comme être un boucher qui décide de pratiquer son art au milieu des lions, et ça se terminera sans doute de la même manière.

— Vous ne seriez pas capable de l'utiliser ?

— Pas plus que de jouer de la flûte sous une chute d'eau !

— Et vous ne sauriez pas la capter ? La stocker d'une manière ou d'une autre ?

— Je sais qu'on parle d'eau, mais là vous confondez la magie avec une rivière ! Non, bien sûr que non. Comme je vous l'ai dit, la magie vient du mage. Je ne saurais pas manipuler une magie dont la source est extérieure à moi, surtout quelque chose aussi ténu qu'un rêve.

— Même chose pour Faraä, j'imagine...

— Exact. Son élément semble plus subtil que le mien, mais il reste un manipulateur du vent et de la foudre, et parvient à faire quelques belles tempêtes. Rien à voir avec les rêves.

— Et votre apprenti ?

— Jilom est... C'est assez différent pour lui.

— Il n'est pas mage ?

— Oh, si, bien sûr. Nous ne l'aurions pas accepté s'il n'avait pas le talent. Mais son premier maître n'avait pas... il a été entrainé à mal utiliser son don. Il a appris de nombreuses arcanes occultes qu'il aurait mieux fait d'ignorer, surtout à un âge aussi jeune. Tout ça aurait pu très mal finir s'il n'avait pas été vaincu par un chevalier, dans le royaume des Sept-Esprits justement. Son maître l'a alors abandonné. Il aurait pu être lourdement condamné si nous n'avions pas accepté de le prendre sous notre aile, en promettant de le remettre dans le droit chemin, et surtout de le garder à Kenjara, quasiment à l'autre bout du monde. Il était très jeune, très prometteur et visiblement manipulé. Ce n'est pas un mauvais garçon. La justice des Sept-Esprits a accepté ce marché.

— Pouvez-vous me dire ce qu'il a fait ?

— Vous connaissez le principe d'amnistie de Kenjara. Jilom a prêté serment en arrivant. Donc non.

Étant moi-même amnistié par Kenjara, je pouvais comprendre ses réticences. Cependant, puisque nous cherchions un voleur et que les deux héros d'Assembra n'en avaient pas le profil, ce Jilom pouvait constituer une piste intéressante... J'insistai :

— Il va falloir que nous puissions le voir et l'interroger également. Vous dites qu'il a utilisé la sorcellerie, mais vous l'avez pris comme apprenti car il avait déjà un talent de mage, non ? Quelle est sa spécialité ? Est-il pyromancien ou aermestre comme vous et Faraäd ?

— Non, pas du tout... Et il devra tôt ou tard nous quitter pour développer ses propres talents, une fois qu'il aura appris à se contrôler correctement. Son don concerne les Ombres.

— Il... sait effacer la lumière ?

Merrohé s'exclama, visiblement fière de son protégé :

— Oh, pas que la lumière ! Il parvient à effacer la matière et le temps, jusqu'à la réalité elle-même ! Ce petit a un énorme potentiel, rien qu'en quelques mois il a fait des progrès fulgurants !

— Depuis combien de temps est-il votre apprenti, exactement ?

— Il est arrivé au dernier jour du printemps, trois jours après la prise de Yorinthe.

Je calculai rapidement huit mois et dix jours. Intéressant.

— J'ai du mal à comprendre pourquoi vous refusez l'entrée de votre Tour à tout artefact magique, et même à notre enquêtrice alchimiste, mais vous avez pu accueillir un apprenti mage aussi puissant.

— Tout est une question d'équilibre, comme toujours... Je vais vous montrer, ça vous aidera à comprendre.

Merrohé frappa dans ses mains et une servante-sirène arriva en portant une lourde pyramide de pierre, un fin disque d'or gravé de motifs élégants et plusieurs palets de pierre de différentes tailles. Elle posa la pyramide sur la table, le disque sur sa pointe, et le fit tourner d'un geste expert. Impossible de dire si son doigté avait suffi ou si elle usait de magie pour l'aider, mais le disque resta en équilibre parfait.

Elle prit un palet de pierre, un petit disque plat parfaitement régulier, et expliqua :

— En temps normal, une Tour fonctionne grâce à un mage. Il en est le cœur et le centre, lié à l'amma, l'âme de la Tour.

Elle posa son palet au centre du disque, qui continua de tourner.

— Dans notre cas, c'est différent puisque nous sommes deux. Nous devons respecter l'équilibre et ne pas trop nous approcher l'un de l'autre.

Elle reprit son premier palet et en posa deux autres, parfaitement opposés, aux deux extrémités du disque. Ijja demanda :

— Mais il n'y a toujours qu'une seule amma, c'est bien ça ? Au centre.

— C'est bien ça. Nous partageons l'âme de cette Tour.

— Et Jilom ? Il est au centre aussi ?

— Exactement. Mais il est instable lui aussi. Il est jeune.

Elle plaça une bille de pierre au centre. Elle resta immobile, ou plutôt elle fut entrainée par le mouvement à tourner sur elle-même, ce qui l'empêchait de quitter sa place.

— Mais il suffit d'une légère perturbation...

Elle tapota de l'ongle un côté du disque en rotation. Le léger déséquilibre suffit à faire glisser la petite bille, qui accentua le déséquilibre, le disque se mit à osciller jusqu'à se renverser, entraînant les deux palets avec lui.

Je hochais la tête :

— Je comprends mieux vos craintes, mais chacun de vous trois peut sortir de la Tour, non ? Et la laisser être examinée par des personnes qui peuvent réellement retrouver des traces de magie. Votre refus reste une attitude suspecte.

— Qui aurais-je pu laisser entrer ici ? Dim et ses...

Sa grimace de dégoût laissa place à expression plus composée, tandis qu'elle inspirait lentement et se reprenait :

— Je sais qu'il a beaucoup fait pour Kenjara, et l'Alliance, je ne doute ni de ses capacités ni de sa loyauté. Jamais, en tant que mage, je ne voudrais insulter un autre praticien de l'art. Cependant sa magie me met profondément mal à l'aise, tout comme la mienne le met mal à l'aise. Nous sommes comme des animaux domestiqués qui sentent, au fond d'eux, que leur nature les pousse à s'entredéchirer ; nous résistons à notre instinct, mais il nous est difficile de nous faire confiance. Où qu'il aille, il reste suivi par cette... chose immonde. Comment pourrais-je le laisser toucher mon âme ?

— Et Jilom doit rester ici car... ?

— Il maîtrise mal ses pouvoirs. Ce n'est pas gênant ici, nous avons une... salle d'entraînement spéciale. Mais il n'est pas encore prêt à sortir à l'extérieur. Son expérience l'a profondément blessé et il n'a pas repris le contrôle de ses émotions. C'est quelque chose qu'il aurait dû maîtriser enfant... Je ne sais pas s'il pourra facilement sortir un jour. Mais après tout, il est encore tôt !

— Je vois. Quand pourrons-nous le voir ?

— J'allais de toute manière l'appeler pour le dîner. Puis-je compter sur vous pour ne pas entamer un interrogatoire à table ? Il sera tout à vous ensuite, et vous parlera sans doute plus librement si je ne suis pas là. Il n'aura d'ailleurs pas grand-chose à vous dire, mais vous semblez très curieux du fonctionnement de notre art, aussi vous risquez de l'occuper un certain temps...

Je jetai un coup d'œil à Ijja et nous acquiesçâmes en chœur. Nous étions déjà dans le noir, commencer les questions seuls avec notre suspect principal était la meilleure option.

Merrohé agita une cloche venue de nulle part, qui émit un grelot aussi cristallin que son rire. Au bout de quelques instants, un recoin de la grande salle à manger sembla s'assombrir, les ombres s'épaissirent de plus en plus à chaque souffle, devenant d'un noir impénétrable aux regards, trop sombre même pour qu'on puisse lui donner une masse, comme si quelqu'un avait effacé l'existence même de cet emplacement... Puis tout revint à la normale, laissant dans la pièce un jeune homme à peine sorti de l'adolescence, grand et dégingandé. Il n'avait visiblement pas la maîtrise de magie des illusions de ses maîtres et son visage était ordinaire, sa peau très sombre gardait les traces de boutons plus anciens et il affichait une moue de vague ennui.

— Vous m'avez appelé, maîtresse ? demanda-t-il dans un arcien parfait.

— Tout à fait. Jilom, mon enfant, je te présente nos visiteurs, Ijja de Cherbier et Loc Reyis, qui sont des enquêteurs de l'Alliance. Ils voudront discuter avec toi après le dîner.

Il nous dévisagea avec la morgue d'un aristocrate qui se trouve trop près d'un palefrenier. Ses manières commençaient déjà à m'agacer, ce qui était encore renforcé par sa taille : Merrohé, Ijja et lui faisaient tous plus d'une tête de plus que moi, et si la conversation s'éternisait sans que nous puissions nous asseoir, j'allais finir par me faire mal au cou à force de me dévisser la nuque pour les regarder. Autant Merrohé nous avait parlé avec tant de naturel que ce détail ne m'avait pas effleuré, autant ce gamin - de quatre ou cinq ans plus jeune que moi - me donnait envie de ne jamais lui laisser une occasion de me regarder de haut.

Nous nous sommes assis et laissé servir un délicieux repas par les servantes sirènes. J'ignorais si les mets servis étaient réels ou non, ou s'ils étaient des plats ordinaires rehaussés par magie. Ils étaient si délicieux que ça ne paraissait pas avoir la moindre importance. Je comprenais de plus en plus pourquoi les trois mages sortaient si peu de la Tour. Tout était si parfait et confortable, loin du tumulte des humains fourmillant pour gagner et construire leur vie, une douce parenthèse hors du temps et des contraintes de ce monde. Merrohé veilla à garder une conversation légère et agréable, qu'Ijja et moi n'avions aucun mal à entretenir sans lever le nez de nos assiettes. Jilom quant à lui resta sur la défensive, répondant par un mot ou deux quand on l'interrogeait directement.

Lorsque le repas se termina, j'avais davantage envie de tester le moelleux du lit qu'on m'avait attribué que de me remettre au travail, mais mieux valait ne pas laisser les choses trainer. Dim attendait mon rapport pour le lendemain et à défaut de lui donner le coupable, j'aurai voulu avoir au moins une piste solide.

Jilom n'avait visiblement pas plus envie que moi d'y passer, mais il lâcha avec un soupir :

— Très bien. Puisqu'il faut qu'on discute, autant que vous veniez dans mes appartements, nous y serons plus à l'aise.

L'espace commença à s'assombrir autour de lui. Il nous fit un signe de la main impérieux, comme pour nous demander de nous approcher. Une fois à sa portée il nous mit à chacun une main sur l'épaule et ordonna :

— Laissez-vous faire, ne raidissez pas vos muscles et surtout ne respirez pas pendant le voyage.

— Quel voy...

Je n'eus pas le temps de venir à bout de ma question. Dans un bruit de déchirement, l'obscurité nous avait engloutis tous les trois et je perdis toute sensation. Je n'étais pas seulement aveugle, mais aussi sourd, privé de la sensibilité de ma peau, du poids de mon propre corps. Affolé, je faillis prendre une grande goulée d'air pour crier, quand je sentis sur mon épaule la main de Jilom qui me poussait en avant. Me rappelant ses recommandations je retins mon souffle et marchai, ou du moins je tentai de marcher, dans la direction qu'il m'indiquait.

Tout revint en même temps, la lumière, le sol, mon corps, la grisante sensation d'être vivant. Nous avions changé de pièce et Jilom nous lâcha comme si de rien n'était.

Ijja lutta pour inspirer et lâcha, à bout de souffle :

— Hors de question que je refasse ça un jour ! J'ai cru que...

— Que vous étiez morte ? Ça fait toujours ça. Mais on s'habitue, à force. Et puis, je vous avais prévenu de ne pas respirer.

Ils'installa dans un fauteuil et saisit ostensiblement une pipe qu'il était sansdoute trop jeune pour fumer réellement.

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