XXI
"- Faut trop que je vous raconte !"
Sept heures cinquante et des brouettes, Emilie venait d'arriver comme une fusée jusqu'à sa place à côté du brunet qui avait sursauté, encore un peu endormi sur sa chaise, il s'était couché tard à cause de Jay. Cassandra avait sûrement du courir pour maintenir la vitesse derrière leur amie puisque son poignet était encore dans sa main. Surpris, Jungwon s'était tourné vers elle, les yeux bien grand ouverts et les épaules maintenant tendues. La jeune fille, habillée chaudement de sa grosse veste et de son écharpe noire, avait maladroitement posé son sac sur la table. Heureusement que Julie et son groupe de râleurs n'étaient pas arrivé, parce qu'elle lui aurait fait une bonne dizaine de remarques désobligeantes qui auraient potentiellement ruiné sa bonne humeur. Bonne humeur suspecte pour un tel jour de rentrée. En temps normal, elle trainait la patte jusqu'au lycée avant de s'écrouler sur la table en s'apitoyant sur son sort, commençant par marquer l'injustice d'être réveillé si tôt, de devoir débuter la journée avec maths ou philo, que le lycée allait finir par avoir sa peau et que son lit lui manquait plus que la vue quotidienne de Jay. Néanmoins, c'était une ambiance complètement opposée qu'elle leur présentait ce matin. Perdu, il regardait la blonde qui roulait des yeux en haussant les épaules.
"- Elle m'a pas dit bonjour non plus, d'exaspération en s'asseyant à sa chaise derrière eux.
- Non mais concentrez-vous !, en claquant des doigts devant leurs yeux."
Jungwon était trop peu réveillé pour réagir à son comportement enfantin et presque insolent. Un "comment ça va" lui arracherait la voix ? Manifestement oui, puisqu'elle continua malgré le fait que Cassandra lui ait donné un coup pour la réprimander silencieusement de son comportement.
"- J'ai passé des bêtes de vacances !
- Mieux que celles des grandes vacances d'été ?, raillait la blondinette qui sortait ses affaires de son sac.
- T'as pas idée."
Piqué d'une certaine curiosité, mais surtout obligé de l'écouter sous peine d'un scandal à l'hurlante, il se rassit plus confortablement sur son siège, posant ses coudes sur la table et le dos de sa chaise. Il se craqua la nuque pour se dégourdir avant de tendre l'oreille.
"- J'ai rencontré quelqu'un !, d'une joie inexplicable."
Quelqu'un ? Et Jay dans l'histoire ? Après si elle enlevait la grappe qu'elle avait sur lui, ça l'arrangeait, ça serait plus simple de lui annoncer.
"- Bah voyons, il va vite disparaitre celui-là, pas le moins du monde impressionné."
Il était vrai que généralement elle repérait un gars, lui parlait quelques temps avant de se lasser et de revenir au sujet Jay. Elle aimait bien mâter mais ça n'allait pas plus loin. Deux jours c'était bouclé. Acquiesçant ses propos, Jungwon haussa les sourcils alors qu'Emilie protestait.
"- De ouf pas ! Il est trop incroyable pour ça, dit-elle en dégageant des cheveux volants de son épaule, ça fait deux semaines qu'on parle."
Les deux autres s'étaient figé. Quelque chose était étrange chez elle. Elle parlait à quelqu'un, treize jours de plus que la normale, elle le trouvait incroyable au point de leurs courir dessus à la rentrée pour leur annoncer cela. Avaient-ils cligné des yeux depuis qu'elle avait lâché ça ? Aucune idée, ils étaient trop sous le choc pour se rendre compte de quoi que ce soit.
"- Quoi ?, réussi à oraliser Cassandra, trousse à la main, le corps immobile et les yeux fixés sur elle.
- Je vous jure, ça se passe trop bien !"
Puis elle se mit à leurs déblatérer tout ce qui s'était passé. Rencontré dans un café alors qu'Emilie attendait sa soeur qui était parti chercher les cafés au rez-de-chaussé, il était venu vers elle un peu timide, "à cause de ma beauté" avait-elle précisé, il lui avait demandé si elle attendait quelqu'un. Paraissait-il qu'il avait été un peu embarrassé de constater qu'il la dérangeait alors qu'elle attendait quelqu'un, elle avait quand même voulu savoir la raison de sa venue. Après nombres de compliments, elle lui avait passé ses réseaux sociaux, plus pour vérifier si c'était quelqu'un de respectable ou un crève-dalle qui avait plus repéré sa poitrine que ses beaux yeux. Elle s'était quand même tenté au jeu et ils avaient commencé à parler le soir même, fais une insomnie à ne pas regarde l'heure passer à converser de tout et de rien, se racontant plus leurs vies qu'autre chose. C'était apparement un australien qui avait déménagé il y a quelques années et qui étudiait dans la grande ville d'à côté, il était donc plus vieux qu'eux mais ça ne dérangeait en rien Emilie qui avait passé sa majorité en décembre, pendant les vacances. Ils étaient sorti deux trois fois à aller boire un café, manger un bout dans le restaurant sympa du coin de son quartier, ou bien était parti en soirée avec ses potes à lui. Elle avait reconnu des gens qu'ils avaient croisé aux visites d'université et qu'ils étaient "grave" adorable. Connaissant Emilie, ils n'étaient pas juste resté à se tenir la main. Les précisions après n'étaient pas nécessaires mais elle voulait les partager avec eux. Il embrassait tout aussi bien qu'il avait de l'énergie au lit, que c'était l'extase quand ils baisaient et qu'il lui manquait déjà. Ils ne s'étaient pas revu depuis le vendredi soir, tard, mais ils s'étaient promit de se rencontrer dans peu de temps. Si les détails de sa libido et de celle du mec n'avaient pas intéressé les deux autres, le fait qu'elle parle de lui comme si c'était son mec les avait laissé perplexe.
"- Attends, attends, l'arrêtait Cassandra, t'a dit qu'il s'appelait comment ?
- Jake, c'est pas trop beau comme nom ?, en s'émerveillant dessus."
Ah oui, donc elle était vraiment à fond. Mais comment de personnes portaient le même nom dans les grandes villes ? Le gars de la fête d'avant-hier avait le même.
"- Mais vous êtes ensemble ?
- Aucune idée, mais il peut bien que me baiser que je dirais oui direct."
Le fait qu'elle ne cherche pas forcément du sentimental intriguait le garçon qui haussait un sourcil, amusé de son retournement de veste.
"- Mais du coup ses potes savent que t'existe ?
- Ils savent aussi qu'on est plus proche que ça, gloussant comme une fille amoureuse qui balançait des potins sur ladite personne.
- Et Jay dans l'histoire ?, demandait Jungwon, un peu sur le c*l.
- De l'histoire ancienne, avec un signe de main comme si ce n'était pas grave, de tout façon il est en couple. En plus, vu toutes les stories qu'il met sur sa meuf mystère là, il est trop à fond c'est mort."
Toutes les stories ? Jungwon n'en avait vu qu'une sur lui, il avait loupé combien d'épisodes ? Feignant l'ignorance, il hocha la tête, pas trop convaincu de ce qu'elle venait de dire. Elle abandonnait si facilement un béguin pour un mec de trois ans au profit d'un autre qu'elle venait à peine de rencontrer et avec qui sa libido était comblée ? Suspect un peu. Ce n'était certes pas la première fois qu'elle s'emballait mais là c'était un poil trop excessif.
"- Mystère ? T'a toujours pas trouvé son nom ?, s'enquit Cassandra, non sans un regard de côté à Jungwon.
- Il efface trop bien les traces, en roulant des yeux, je commence à vraiment penser que c'est Julie.
- Tu crois qu'il jouerait la comédie devant les autres ?, demandait Jungwon."
Son haussement d'épaules confirmant qu'elle se persuadait que c'était le cas, les deux autres échangèrent un regard. Jungwon appréciait la prudence dont faisait preuve le garçon alors qu'il lui avait émit son envie d'en parler à tout le monde. Hier, après qu'il soit parti en fin d'après-midi, il lui avait passé la vidéo qu'il avait d'eux devant le feux d'artifices et Jungwon s'était fort retenu de ne pas mettre la fameuse photo en fond d'écran. Il avait trop peur que quelqu'un qui ne soit pas au courant ne la voit. Il la gardait bien au chaud dans sa galerie photo où personne n'allait jamais. Il serra les lèvres avant de détourner le regard lorsque la sonnerie retenti dans l'établissement. Malheur, il tomba sur Julie qui rentrait dans la classe. Ça aurait très bien pu être normal comme entrée si elle ne tenait pas le main du blond à l'allure de zombi à côté d'elle, les doigts serrés contre les mous du garçon, il ne lui rendit pas son étreinte mais ne la dégageait pas pour autant. Si un crack s'était fait entendre dans la pièce, c'était son coeur qui venait de se prendre un coup de couteau bien placé. C'était une blague, n'est-ce pas ? Elle n'était pas vraiment collé comme une sangsue à s'afficher comme s'ils étaient ensemble, c'était un cauchemar pas vrai ? Une vaste boutade de mauvais goût après ces deux jours qu'ils avaient passé ensemble, ce qu'il lui avait dit et les efforts qu'avaient le brunet pour s'ouvrir plus au garçon. Si en temps normal, il prenait sur le fait qu'elle faisait exprès de le coller de trop près, là c'était la goutte d'eau qui faisait débordée le vase. C'était une image bien malheureuse, introduite par les paroles d'Emilie qu'il entendait rigoler à côté de lui.
"- Quand on parle du loup."
Une forte envie de déguerpir d'ici lui prit les tripes, il ne sut trop comment il ne se levait pas pour s'en aller. Le pire fût quand il lutta contre ses larmes lorsqu'il croisa le regard noisette du garçon qui affichait une mine bien sérieuse devant lui. Peu importait sa raison, il n'avait pas à faire ça après tout ce qu'il s'était passé. Des murmures d'incompréhension s'étaient levé dans la classe, à moins que c'était sa petite voix dans sa tête qui se moquait. À bout de souffle, il détourna les yeux vers ses cahiers en se frottant les yeux. Il avait senti la main de son amie se poser sur son épaule alors qu'Emilie lui demandait ce qu'il avait soudainement. "Une poussière dans l'oeil" avait-il prétexté d'une voix étonnement stable.
"- Un poil de chat tu veux dire, t'a croisé Grenade sur le chemin ce matin ?, demandait Emilie, sans prêter plus d'attention à son état."
Il avait confirmé ses dires. Et hop, un mensonge de plus. Mais vu ce qui se présentait à lui en relevant les yeux, ce n'était que le retour de bâton qui lui arrivait en pleine tronche, au pire moment.
***********
À la pause de midi, complètement sonné et absent, il avait demandé aux filles de partir devant lui, qu'il les rejoindraient dans pas longtemps. Il ne pourrait pas justifié son absence d'appétit s'il manquait un repas dès le premier jour de cours du dernier trimestre. Il avait donc prétexté partir aux toilettes avant que ce ne soit bondé de monde à la pause déjeuner. Le regard que lui avait lancé Cassandra avant de se retourner voulait tout dire. Elle savait, elle aussi avait vu, et sa poussière dans l'oeil avait été bancale comme explication. Mais il avait un urgent besoin de s'isoler. Et son endroit favori semblait être la meilleure place pour se retrouver seul maintenant, de toute façon il ne viendrait pas le voir, Julie l'en empêcherait. C'était tout bénéf. D'un pas déterminé, il se dirigeait vers la porte à l'opposé du self, là où des élèves externes passaient pour partir manger chez eux. Il se fondait dans la masse, les terminales sortant en grands groupes, il restait assez proche d'eux pour après tourné à gauche enfin dehors. Il marchait vite pour ne croiser aucun surveillant un peu relou qui l'empêcherait de rester dehors si l'envie l'en prenait, il surveillait régulièrement derrière lui avant d'enfin trouver son escalier presque abandonné de tout passage. Main sur la rambarde pour l'aider à monter, il se gelait les doigts à grimper les marches sans être protéger du léger vent qui s'engouffrait dans les marches. Enfin en haut, il inspira un grand coup avant d'expiré longuement en observant la vue blanche et morose devant lui, même les courageux volatiles dans le ciel s'effaçaient dans l'épais amas de nuages bas et opaques. C'était bien l'état de son esprit maintenant : embrumé. Il avait pourtant passé deux beaux jours avec lui, même s'il avait remis en question pas mal de choses, il avait apprécié les moments partagés avec Jay. Il se rappelait avec une chaleur au coeur la dernière nuit qu'ils avaient passé à deux, chez le brunet, toutes ces choses qu'il avait ressenti, qu'il lui avait fait découvrir. Balayé telle une poussière par la simple vision de ce matin. Il reniflait en baissant les yeux vers le pierre grisâtre dont l'escalier était fait. Ses chaussures lui paraissaient bien ternes.
"- Woonie..., soufflait une voix à côté de lui, provenant des marches."
Plus par surprise que par envie, il tourna le regard vers la provenance du son, se sentant se refermer comme huitre devant la personne qui se présentait à lui. Le surnom n'avait pas trompé, il essayait de l'amadouer. Il l'aurait bine repris sur cette appellation mais il n'avait en aucun cas envie de lui parler. Il serra les mâchoires en le regardant de travers, parce qu'il venait le déranger au même endroit, encore une fois. Il voulait qu'il parte, maintenant. Il n'était pas d'humeur à parler avec lui, plus à présent.
"- Ce n'est pas ce que tu crois, essayait-il alors que le brunet détournait le regard en sortant ses écouteurs de sa poche."
Il n'y avait pas pire phrase au monde. Elle voulait toujours dire le contraire de ce qu'elle signifiait. Jungwon secoua la tête sans pour autant délier ses lèvres, il préférait son silence à tous les mots qu'il lui avait dit. La solitude ne l'avait jamais trompé ou mené par le bout du nez, elle. Il brancha le fil à son portable alors que le blond l'avait rejoint. Jungwon l'esquiva d'un pas sur le côté quand il essaya de le toucher. Il ne voulait pas qu'il repose ses mains sur lui, c'était mort.
"- S'il te plaît, écoute-moi au moins, le suppliait-il en gardant sa main à porter."
Jay était aussi borné que lui, qui se ressemble s'assemble comme dit le dicton. Il ne le lâcherait pas tant qu'il n'aurait pas craché le morceau. Il lui donna juste un regard sans mot, juste ses yeux croisant les siens.
"- Elle sait, soufflait-il après un long silence."
Comme quoi dans leurs conversations de groupe, il se disait tout. Qu'est-ce qu'il avait dit ? Qu'ils avaient presque couché ensemble mais que Jungwon était un dégonflé et qu'il avait pas réussi, alors il s'était tourné vers Julie ? Ou bien qu'il s'était finalement lassé et qu'il avait besoin de s'amuser un peu ? Et si elle savait, c'était parce qu'il lui avait dit, hein ? En tout cas, si les fissures dans son palpitant étaient superficielles auparavant, il avait bien conscience qu'elles s'étaient approfondies.
"- Je ne lui ai rien dit, je te le jure, mais..., laissant tomber sa main contre sa cuisse, elle a comprit."
Mensonge ? Vérité ? Bonne question ça. Il pencherait plus pour le premier choix là. Il le regardait toujours dans un silence de mort, il ne voulait même pas essayer de comprendre ce qu'il essayait de dire discrètement. Il avait rompu le secret, une troisième fois, ça faisait beaucoup, non ? D'abord sa mère, ensuite celle de Jungwon alors qu'il savait pertinemment qu'il ne voulait pas lui dire tout de suite, et maintenant sa pimbêche de pote qui faisait tout pour l'avoir pour lui.
"- Elle a menacé de te pourrir la vie si on ne retrouvait pas la relation qu'on avait avant."
Paye ta pote en carton. Qui faisait ça ? Pourquoi ? Elle cherchait quoi, à les faire rompre ? Génial, ça ruinait tout ce qu'ils avaient essayé de construire. C'était certes moindre mais Jungwon y tenait, c'était de bons souvenirs.
"- Et toi, tu as accepté, dépité que ce soit la vérité.
- Évidemment que j'ai accepté, se précipitait-il en se rapprochant de lui."
Effet aimant, Jungwon s'était reculé.
"- Les potes avant les p*tes, reprenant une expression qu'il avait entendu de la part de certains garçons de leur établissement."
Jungwon hocha la tête, pas déçu de Jay mais déçu de lui-même. Il aurait dû s'écouter au lieu de lutter contre lui-même.
"- Quoi ? Non, bien-sûr que non, en se rapprochant de nouveau alors que Jungwon se retrouvait bloqué."
Il détestait se sentir tirailler entre l'envie de le croire et l'envie de lui pleurer son saoul dans ses bras, sa peine contre son épaule et laisser son coeur s'exprimer à ses oreilles. Mais l'envie de le fuir était plus forte.
"- Tu sais bien que non, en venant attraper son visage en coupe dans ses mains."
Il esquivait rapidement ses yeux pour ne pas y voir la moindre émotion qui lui donnerait une raison d'essayer de l'excuser, de tenter de comprendre.
"- Tu passes avant tout, tu passeras toujours avant tout."
Il avait entendu le bracelet se cogner doucement contre son poignet. Il le portait pour se moquer de lui, il le trouvait moche de toute façon, tout le monde le trouvait de mauvais goût.
"- J'ai accepté seulement pour que tu aies la paix, parce que tu m'as justement demandé de ne rien dire, puis elle ne fait rien de mal, elle est juste très tactile c'est tout. Je te le promets sur tout ce que j'ai de plus cher."
Le début d'une confiance inébranlable dont il lui avait laissé accès avait cette envie hurlante et douloureuse de le croire. C'était si proche d'être probable qu'il failli se détendre. Si son regard n'était pas tombé sur quelque chose d'étrange. Même si c'était faible, presque invisible, à y voir plus précisément ça ne trompait pas.
"- J'avais finalement assez confiance en toi, commençait Jungwon qui ravalait ses larmes avant de lever la main.
- Avais ?, tiltait-il.
- Ce n'est pas à moi ça, en pointant son index contre son cou."
Contre un suçon qu'il ne connaissait pas puisqu'il ne lui en avait pas fait, jamais. Il n'y avait que Jay qui s'était affairé à faire ça. Jay lui attrapa le poignet avec vivacité alors que le brunet relevait les yeux vers ceux paniqué du blondinet. Chopé la main dans le sac.
"- C'est ce que je crois.
- Comment ça "pas à toi" ?"
S'il tentait un autre subterfuge pour essayer de mettre en doute les évidences, c'était loupé. Combien de mensonges lui avait-il raconté depuis le début ? Jungwon retira son poignet avec force alors que le blondinet ne clignait même plus des paupières, ne sachant plus quoi dire. Dégoûté et blessé, Jungwon se faufila pour s'en aller, récupérant son sac qu'il avait laissé tomber par terre, rangeant son téléphone dans sa poche avant de partir en direction des escaliers. Il avait déjà posé son pied sur la première marche quand Jay l'appelait mais il ne se retourna pas, il ne se retournerait plus. Objectif premier non atteint, il voulait partir se réfugier aux toilettes, il serait au calme là-bas au moins. Il traversait la cour avec le coeur ensanglanté, le souffle court et les yeux picotant, à tout moment il pouvait s'effondrer. Malheureusement pour lui, les toilettes étaient fermé car hors service. C'était toujours comme ça pour ceux d'en bas et aujourd'hui, ça tombait mal. Tant pis, à l'heure qu'il était, il ne devait y avoir personne dans les couloirs, il attendrait ses copines là-bas, il n'avait pas envie de recevoir des questions sur le pourquoi il avait disparu de la circulation lorsqu'elles iraient en cours. Puis au moins Jay ne viendrait pas le chercher ici, personne ne venait en pleine pause repas.
Ce fut donc avec soulagement qu'il retrouva le couloir sombre et vide de présence. Ni une ni deux, il se dirigea vers le fin du corridor avant de poser son sac au sol et de se mettre en boule. Il avait froid, il gelait de l'intérieur. Sa veste n'avait pas été fermé mais ce n'était pas l'hiver qui avait un tel effet sur lui. Il tentait quand même de souffler sur ses mains pour les réchauffer, tentative rapidement avortée lorsque son souffle s'était saccadé et qu'un premier sanglot lui étouffa la gorge. Il était trop épuisé mentalement pour retenir jusqu'à ce soir ce qui lui déchirait le coeur. Il avait vécu beaucoup de nouvelles expériences récemment, mais celle-ci, il n'arrivait pas à l'assimiler, tout simplement parce qu'il ne la connaissait pas. C'était quoi cette sensation de trou qui se formait dans sa poitrine, ce fourmillement au bout des doigts et la tête remplie de bourdonnements ? Pourquoi il ne parvenait pas à relativiser ? Il avait pourtant tant prier en début d'année pour que ça se finisse et qu'il n'ait plus rien à voir ensemble. Lui qui était si dégoûté à l'idée d'être approché, touché, embrassé par un homme, ça lui paraissait si loin maintenant qu'il y pensait. Le garçon qui se fichait pas mal d'avoir quelque chose de différent en dernière année, qui voulait juste se concentré sur ses études pour obtenir les meilleures notes, où était-il passé ? Que pensait le garçon renfermé qui restait dans son coin à s'imaginer un relation aussi belle que dans les romans alors qu'il n'avait vécu qu'une sorte de tissu de mensonges ? En fait, ce qui faisait le plus mal, c'était de se dire qu'il avait si durement travaillé sur lui-même pour lui faire confiance, qu'il l'avait laissé ses défauts se montrer à quelqu'un alors que tout son être avait peur. Pourquoi ? Pourquoi c'était tombé sur lui ? Pourquoi pour lui ? Il sentait le roussi depuis le seconde alors pourquoi, diable, l'avait-il laissé rentré dans son intimité, dans quelque chose qu'il n'avait jamais montré à personne ? Et pourquoi est-ce que bon dieu il pleurait ? Et pourquoi ça faisait mal ? Il devrait passer à autre chose, pourtant il se retrouvait à poser sa tête contre le mur froid du couloir non éclairé devant sa salle de français vide et fermée. Il n'y avait pas beaucoup de perles salées qui s'échappaient de ses cils, il sanglotait juste mais chaque larme qui s'écrasait sur sa joue était douloureuse. Ce matin, il aurait déversé des flots d'eaux dans ses mains, sur le pull d'une de ses amies. Là, il se retrouvait à juste regarder le vide comme seule consolation parce qu'il s'était mit en mode veille, parce qu'il ne réussissait pas à évacuer le début de peine qu'il lui épinait la gorge. Comme lorsqu'il avait douter de lui-même avant de commencer quelque chose de plutôt sérieux avec Jay. Il était dans le même état, mais les doutes en moins. Il était plus certain qu'autre chose. Au fond tout était lié, il avait senti anguille sous roche et il s'apitoyait sur son sort de l'avoir si durement ignoré.
Il n'entendit même pas les pas de courses qui se dirigeaient vers lui, ni même la voix qui semblait affolée. Et si tout ça n'était qu'un rêve ? Ça faisait beaucoup d'un coup, non ? En une semaine Jay lui avait fait mille et une promesse, et en cinq heures il avait démonté tout ce qu'il s'était si durement acharné à lui faire avalé. Il se doutait bien que la voix féminine lui criait quelque chose, parce qu'il entendait une voix au loin, un visage apparaître devant le sien, celui d'Emilie qui se tut lorsque son regard croisa le sien. Il reniflait. Elle ne savait pas elle, de toute façon, qu'est-ce que ça pouvait faire ? Il n'aurait plus à s'inquiéter qu'elle sache ou non, c'était réglé maintenant. Rien ne s'était passé qu'elle ne soit pas au courant. Hein ? Pas vrai ?
"- Jungwon, ayant remonté sa main sur son poing alors qu'elle essuyait une larme sur son cerne, pourquoi tu pleures ?
- Vous avez déjà fini ?, demandait-il comme si de rien était, où est Cassandra ?"
Elle fronçait les sourcils d'incompréhension, et il y avait de quoi. Il parlait comme un robot, sans émotion et juste en débitant des mots qui formaient une phrase.
"- En bas, elle m'a envoyé te chercher.
- J'ai pas très faim, mentit à moitié Jungwon, son appétit avait disparu sans jamais apparaître.
- Jungwon, qu'est-ce qui t'arrive ?, le débit de parole trop élevé pour être normal, et qu'est-ce qui arrive à tout le monde d'un coup ?!
- Le monde tourne rond, dit-il seulement, en renfilant."
Mais pas dans son sens à lui.
"- Tu crois pas si bien dire, aller lève-toi, l'incitait-elle en tirant sur ses bras.
- Pourquoi ?, d'une petite voix."
Il était bien là, il pouvait attendre tranquillement ici, c'était si calme et reposant.
"- Cass m'a engueulé pour venir te chercher.
- Mais je peux vous attendre ici.
- Tu comprends pas, en tirant plus fort jusqu'à ce que les fesses du garçon ne touche plus le sol, Jay est en train de frapper violemment Julie.
- Il ferait jamais ça, en souriant légèrement, sûr de lui parce qu'il n'arrivait même pas à atteindre une mouche atrophié.
- Tu crois que j'ai arrêté de manger pour le plaisir ?"
C'était vrai ça, ils avaient à peine commencé à bouffer. Et comment ça Jay était en train de violenter quelqu'un, sa meilleure amie qui plus est ? Il ouvrit grand les yeux en regardant son amie. Cassandra, elle, était au courant. Et si elle avait demandé à Emilie précisément au lieu de venir, c'était parce que c'était urgent.
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[PAS RELU]
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