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Chapitre 6 - D'alcool et d'un sacrifice

/!\ trigger warning : feu /!|

Quelque part près d'un col montagneux, dans la Barrière de Mars.

*•*•*•*

— Tu ne p'ononce pas co'ectement, me reprit Eben.

Le jour allait se lever, bien que l'expression fût désormais obsolète. Le soleil ne se lèverait pas, aussi longtemps que nous l'attendrions. Une épaisse couche nuageuse empêchait toute vision du ciel et si ceux-ci venaient à disparaître, nous ne serions qu'éblouis par la Lune. L'énorme Lune qui avait mangé le ciel. Ajouté à cela, dans la forêt que nous gravissions, nous ne faisions que deviner le ciel tant les feuillages étaient denses.

Justement, Eben tentait de m'apprendre le mot Lune en krusivmi. Aohrla. Ces sonorités éveillaient en moi des sens, un monde et une culture qui me paraissaient inaccessibles. Mais après tout, je pouvais aussi bien me demander ce qui me paraissait accessible. Rien.

Nous avions décidé d'établir notre campement pour le jour dans une petite grotte. Le flanc de la montagne en regorgeait, c'était pratique et rassurant, tout ce dont nous avions besoin. Melwyn et Charly étaient partis récolter du petit bois pour faire du feu et pendant ce temps, Eben me partageait sa langue.

N'allez pas croire que je m'étais enhardie en deux semaines de marches et lui avais demandé moi-même de m'apprendre. Ç'aurait été trop simple.

Un jour que Charly et Eben conversaient en aonghasien, Eben avait surpris mon oreille attentive. Plus tard, il s'était approché de moi lors de notre marche et m'avait demandé si je voulais apprendre. J'avais hoché la tête et depuis, j'avais droit à des cours particuliers. J'étais chanceuse.

— A-oh-rla, répéta Eben. Tu dois fai'e pause entrre « oh » et « rla ».

— Aorla, tentai-je à nouveau.

Eben secoua la tête.

— Tu p'ononces à la f'ançaise, sourit-il. En krrusivmi il y a accents surr ce'taines lett'es.

— Oui, bah toi aussi t'as un accent, lui retournai-je en croisant les bras, dépitée par mes efforts infructueux.

Le rire rocailleux d'Eben retentit et m'empêcha de me renfermer sur moi-même davantage. Son sourire spontané me poussa à persévérer.

— Bon, explique comment je dois le prononcer, alors.

— Tu mets accent surr « oh ». Comme ça : Aoh-rla.

Je fronçai les sourcils et me concentrai. J'avais si peur de me ridiculiser une fois de plus. Mais les yeux confiants d'Eben gommèrent mes doutes pour laisser place à une énième tentative.

— Aohrla, murmurai-je.

— Plus fort ? demanda Eben en fronçant les sourcils.

Presque tremblante d'appréhension, je répétai en tenant d'élever ma voix :

— Aohrla.

Le visage d'Eben s'illumina d'un sourire resplendissant.

— Tia ! C'est bon, tu as comprris, tu peux pa'ler krrusivmi.

Une cascade de soulagement déferla dans tout mon être, je souris. Sur ces entrefaites des voix nous parvinrent, Melwyn et Charly étaient de retour.

— Aïe ! Melwyn ! cria Charly. T'as fait tomber des branches sur mes pieds.

— Pauvre chou, lui répondit-elle en levant les yeux au ciel et déposant les branchages restant devant elle. Elles n'ont rien de grave j'espère ?

Eben explosa de rire, je souris à peine. Il faisait des progrès en français, il comprenait de mieux en mieux les subtilités du langage. Je soupirai en contemplant le vide en moi et en espérant un jour m'élever du puits d'incapacité et d'inutilité dans lequel le Néant m'avait plongée.

— Très drôle, se vexa Charly en déposant les siennes avec une délicatesse exagérée sur le tas.

Puis d'une main experte, il enflamma les branches. Quelques minutes plus tard, nous dégustions en silence du mulot cuit et des carottes sauvages. Ce matin-là, c'était la fête. Les jours où nous mangions à notre faim étaient rares et ceux où de la viande était au menu l'étaient encore plus.

Une grande partie du petit gibier n'avait pas survécu à l'arrivée de la nuit éternelle. Les plantes ne disposant pas suffisamment de flux magique s'étaient fanées, les insectes s'étaient évanouis dans l'air et c'était tout l'écosystème qui s'en trouvait chamboulé. En bout de chaîne, les sorciers étaient particulièrement en mauvaise posture. Chaque jour je me demandai combien de temps encore nous subsisterions. Parce que le jour où l'énergie magique du tapis de vie qui couvrait le Dashgaïh se serait épuisée... nous n'aurions plus rien à manger.

Lorsqu'il ne resta rien à avaler, Melwyn fit circuler le flacon de liqueur. Charly se léchait les babines et Eben baillait. Nous étions tous crevés et l'alcool de mélisse et de valériane nous aiderait à plonger dans un sommeil réparateur.

Blottis les uns contre les autres pour nous tenir chaud, les flammes nous couvaient tendrement tandis que nous nous abandonnions les uns après les autres aux bras de Morphée. Le ventre noué par mes éternelles angoisses, je priai mes Sages silencieux de bien vouloir m'accorder un sommeil paisible.

Nos nuits de marche nous éreintaient. Au milieu des ténèbres, après plusieurs heures passées sur le sentier escarpé que nous défrichions à chacun de nos pas, mes mollets souffraient plus que de raison dans notre illusoire ascension en quête d'un futur lumineux. Mon souffle se faisait court, mes vêtements m'étaient soudain de trop, j'avais chaud, mais bien trop apeurée par le vent glacial qui guettait la moindre occasion pour se faufiler sous une couche de tissu, je n'osais toucher à mes gants ou desserrer mon écharpe.

Finalement, bercés par le vacillement de nos ombres projetées sur les parois de la grotte par les flammes protectrices, mes paupières s'alourdirent, mes pensées se firent moins intrusives et, sans même que je m'en rende compte, le sommeil s'empara de mon esprit.

La voix de Charly me tira des limbes.

— Debout, les miss Jupiter, chuchota-t-il.

Melwyn grogna. Elle aimait autant les réveils que moi. Surtout que depuis l'événement, ils étaient synonymes de souffrance, autant physique que mentale.

Dans un entrelacs de murmures et de bruissements de tissus, nous nous préparâmes à affronter une nouvelle nuit de marche. Nos estomacs occupés avec des bâtons de réglisse que nous mastiquerions des heures pour calmer la sensation de faim – nous n'avions plus de provisions pour l'heure – nous effaçâmes toute trace de notre passage avant de reprendre la route vers la source miroir.

Au cœur de la forêt qui épousait la surface de la montagne, le peu de luminosité qui filtrait à travers les nuages ne nous parvenait pas, il faisait noir. Pour nous aider à suivre un semblant de direction, Charly allumait une flammèche dans ses mains et nous guidait à travers broussailles et rochers, ruisseaux et clairières.

Mais le feu épuisait Charly et ne vivait que tant qu'il était plus fort que le vent. Or, Charly n'était pas fort. En manque de vivres, en manque de chaleur, en manque de lumière, nous étions épuisés. Chaque nuit, inlassablement, le tournoi entre les deux éléments rivaux reprenait. C'était à celui qui tiendrait le plus longtemps. Mais toujours, le vent l'emportait. La flamme d'heure en heure de plus en plus vacillante s'éteignait alors au creux des paumes glacées du sorcier. À ce moment-là, Melwyn prenait souvent le relais, dans ses bons jours, et entamait un chant qui, à défaut de nous éclairer, éloignait les pensées sournoises qui, une fois encerclés par les ténèbres du Néant, s'immisçaient dans nos esprits.

Nous nous essoufflions vite dans ce froid implacable mais personne n'osait se plaindre. Ce voyage, nous l'avions voulu, souhaité, attendu. Pourtant, il était indéniable que nos forces nous lâchaient. Nous parlions de moins en moins, nous saluant à peine au réveil et au coucher, obnubilés par le vide de la disparition que l'air glacé gravait en nous à chaque inspiration.

~~~

Une nuit, alors que Charly nous avait répété que nous changerions bientôt de cap, signe de notre arrivée prochaine, la pente du sentier s'aplanit jusqu'à ce que, par miracle, nous nous tenions au cœur d'un col. En haut ? Nous étions en haut.

À découvert, la nuit tira sa révérence pour laisser place à un univers grisâtre dominé par des nuages peu accueillants. Nonobstant, la vue à trois-cent-soixante degrés qui s'offrit à nous nous permis de nous situer. Derrière nous, nous apercevions la plaine de la tribu de Salavenn, immense, qui léchait le pied des montagnes. Nos flancs étaient encadrés par deux monts dont les sommets se perdaient dans les nuages. Et devant, l'appel enchanté des montagnes et des vallées, un enchevêtrement de plaines pures et de forêts menaçantes qui n'attendait que notre venue.

— Où se trouve la source miroir ? cria Melwyn en bravant les rafales de vent qui, à cette altitude, me faisaient presque chanceler.

Charly fronça les sourcils, le regard perdu au loin. Le col était un mélange d'herbe rase et d'amas de pierres, quelques arbres gisaient çà et là tels des guerriers d'un autre temps n'ayant jamais abdiqué malgré la rudesse du climat.

— Plein sud, la direction de l'espoir. Nous y serons dans une petite dizaine de jours.

Les paupières de Melwyn abdiquèrent, ses yeux se fermèrent, elle expira et des volutes de vapeur gelée s'échappèrent d'entre ses lèvres.

— C'est trop long, articula-t-elle.

Enfin, c'était ce que je crus comprendre. Elle n'avait pas pris la peine d'élever la voix, elle semblait sur le point de s'effondrer. Charly dut lire dans ses pensées quelque chose d'alarmant puisqu'il se tourna d'un geste vif vers elle, les yeux écarquillés.

— Melwyn ? s'enquit-il. Tu veux t'asseoir ? Attends–

Elle heurta le sol comme une poupée de chiffon. Effarée, je restai pétrifiée devant le spectacle incohérent qui se déroulait sous mes yeux. Charly hurla quelque chose et tourna en tous sens comme si le paysage allait lui donner une solution pour sauver la sorcière inconsciente. Eben s'agenouilla près d'elle.

— Feu ! s'exclama-t-il. Du feu Charly ! Mel ai ala troch karvai !

Charly se figea une poignée de secondes puis courut vers l'arbre le plus proche. C'était aussi le plus rabougri. Estomaquée, je l'observai se transformer et apposer ses mains contre le tronc de l'arbre. Rien ne se produisit. Un nœud contracta mon estomac. Je jetai un coup d'œil à la sorcière. Mon amie. Une porteuse de Jupiter talentueuse. Épuisée. À bout de force.

Si elle ne mourait pas de fatigue, elle mourrait de froid.

Je devais faire quelque chose. Et vite. Sans prendre le temps de réfléchir plus longtemps, je courus rejoindre le pauvre arbre et Charly.

— Pousse-toi ! ordonnai-je.

Décontenancé, il s'exécuta sans rien dire. Je soufflai et mes doigts rencontrèrent l'écorce de l'arbre. Vivante. Je chancelai presque en inspirant profondément lorsqu'une décharge de sensations me traversa.

— Qu'est-ce que tu veux faire, Charly ? demandai-je les yeux fermés, à l'écoute de la vie intérieure de l'arbre.

Un silence accueillit mes paroles.

— Réponds ! m'irritai-je.

L'énergie était faible mais si vivante. Je saluai le végétal. Notre reconnaissance mutuelle raviva mon énergie et mes jambes s'ancrèrent dans le sol. Je regagnais des forces. Mes racines me soutenaient mais Melwyn, elle, perdait les siennes.

— Charly, réponds !

— Il faut sauver Melwyn, balbutia-t-il. Il faut la réchauffer...

Je compris soudain pourquoi il avait mis tant de temps à me répondre. Conscient de la symbiose entre l'arbre et moi, il n'avait pas réussi à avouer qu'il fallait brûler l'arbre. J'inspirai lentement, comptai jusqu'à cinq, expirai, comptai jusqu'à cinq de nouveau et réitérai l'opération sept fois. Rassérénée, je partageai mes intentions à l'arbre.

— Je peux essayer sur un autre Ethel, proposa le garçon, si c'est trop dur sur celui-là. Il n'a pas répondu la première fois que j'ai tenté de l'enflammer...

— C'est parce qu'il est trop humide, expliquai-je en focalisant ma concentration sur le lien énergétique entre la sève et mon sang. Sage... l'appelai-je en murmurant, j'ai besoin de toi. Accorde-moi ta vie pour sauver l'une des tiennes et son souffle sera un hommage à ta bravoure...

Je ne sentais plus l'air autour de moi. D'un geste mécanique, je décollai l'une de mes paumes pour me saisir de mon couteau que je rangeais sous mon châle et d'un geste sec, entaillai l'écorce de l'arbre. De la sève s'écoula lentement de la plaie, je réprimai une grimace. Avant qu'elle ne sèche, je m'entaillai le poignet droit et le collai contre la sève. La douleur irradia dans tout mon corps et je me crispai.

— Ethel ! s'affola Charly. Bon sang qu'est-ce que tu fais ! Arrête !

Le garçon tenta de s'emparer de mes épaules pour me dégager du contact de l'arbre mais une force le repoussa. Cela me rassura et je me détendis. Le lien était sacré, le rituel sur le point d'aboutir, la douleur s'estompa.

Vidée par cet effort et la présence de l'énergie de l'arbre dans mon corps, je m'écartais lentement. La plaie de l'arbre se referma d'elle-même, les pulsations de la sève dans ses veines ralentirent, jusqu'à ce que dans un souffle, elles disparaissent. Je crus entendre un « merci » lointain mais ce devait être une illusion du vent moqueur. Une larme s'échappa de mon œil, je reniflai.

— Tu peux y aller Charly, il nous a donné sa vie.

Le sorcier me détaillait, les yeux comme des soucoupes, abasourdi.

— Tu veux... Ça va, Ethel ? Est-ce que–

— C'est trois fois rien, lui promis-je. Maintenant que l'arbre s'est asséché, il brûlera plus facilement.

Le garçon hocha la tête, l'air grave. Il frotta ses mains, une expression déterminée sur le visage, s'avança vers le corps inerte du végétal, entra en contact avec lui. Le bois s'embrasa.

La chaleur ainsi dégagée me fit l'effet d'une gifle et les battements de mon cœur martelèrent ma poitrine. Du chaud, enfin ! Du vrai. Le brasier était impressionnant, il devait mesurer quatre bons mètres. Charly était presqu'à l'intérieur, l'alimentant avec ce qui lui restait de son pouvoir.

Eben m'appela pour l'aider à porter Melwyn près des flammes, près de la chaleur, de la vie. J'accourus et usai de mes dernières forces pour soulever les jambes de la sorcière tandis que le sorcier s'occupait de ses épaules. Une fois allongée dans l'herbe mouillée par la fonte soudaine du givre, je pus enfin souffler et m'affaler à mon tour dans l'herbe, tout contre la sorcière.

— Aohrla, Tenos, Yuien... psalmodia Eben, une main sur le cou de Melwyn pour vérifier son pouls. Fuea, fuea, fuea.

Melwyn était sauvée et nous pouvions nous endormir sans crainte au pied de l'arbre. Charly s'écarta des flammes qui léchaient ses vêtements, le feu était suffisamment puissant pour dissuader toute créature de faire de nous son festin et la chaleur nous tiendrait au chaud pendant que nous profiterions de notre première longue nuit de sommeil.

Un sommeil apaisé par les efforts fournis et le soulagement éprouvé lorsque notre amie fut réanimée.

— J'ai eu si peur, Melwyn, souffla Charly en s'agenouillant à côté d'Eben qui faisait avaler à la sorcière quelques gouttes de liqueur.

Melwyn déglutit, elle sourit.

— Je vais bien, assura-t-elle d'une voix tremblante, Fuea. Merci.

— Repose-toi, conclut Charly. Je crois que nous avons eu notre dose pour aujourd'hui.

Eben hocha la tête, adressa une nouvelle prière aux dieux et s'allongea à son tour. La main de Melwyn rencontra la mienne. D'une pression, elle me remercia. Je lui partageai un peu de l'énergie de l'arbre que j'avais emmagasiné lors de son sacrifice. Nos mains liées me brulèrent mais le souffle de Melwyn devint audible et se stabilisa.

Nous avions réussi.

Puisque l'espoir était de retour, le prochain défi serait de trouver de la nourriture et en quantité. Et nous trouverions la source miroir, j'en étais intimement persuadée.

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*publication le 11/05/19*

Dyha tout l'monde ! Comment vous portez-vous ?

Je vous gâte, ce chapitre est bien plus long que le précédent !

Comment l'avez-vous trouvé ? Des remarques concernant l'intrigue ? (Est-ce que c'est trop lent ?)

À la semaine prochaine si je parviens à être hyper efficace, à dans deux semaines au pire,

La sorcière qui va mieux et qui vous souhaite du soleil ☀️ 🧙🏻‍♀️

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