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Les deux filles arrivèrent calmement dans la salle où Aya devait recevoir son tout premier cours, dans ce tout nouveau lycée et ce tout nouveau monde. Shoko la fit rentrer en première, et elle eut alors la surprise de voir quelqu'un qu'elle connaissait déjà, assis derrière le bureau du professeur.
Un homme à la taille imposante, presque autant que ce Gojo Satoru, avec des cheveux noirs, la peau mate et des lunettes de soleil. Comme Satoru, encore une fois.
Mine de rien, ce jeune garçon aux cheveux blancs de tantôt devait l'avoir marquée, assez pour qu'elle se mette à comparer tous ceux qu'elle croisait avec lui. Que ce soit pas sa beauté surnaturelle, sa taille gigantesque ou la rudesse de ses propos, elle ne savait pas vraiment pour l'instant.
-Bonjour, pile à l'heure les filles, installez-vous. Shoko, je suppose que tu veux rester pour tenir compagnie à notre nouvelle recrue?
A la question de leur professeur, répondant au nom de Yaga Masamichi si Aya s'en souvenait bien, son amie brune hocha la tête de haut en bas, avant de la pousser en direction des sièges de devant, où elles prirent place.
Encore une fois, si Shoko n'avait pas été là, Aya se serait sans nul doute retrouvée plantée comme un piquet encore longtemps, tellement elle était apeurée. Leur professeur faisait légèrement peur de par son apparence, mais elle se souvenait aussi que c'était grâce à lui qu'elle était là aujourd'hui.
C'était grâce à Yaga qu'elle était finalement sortie de cet hôpital abominable. Et, juste pour cela, elle avait envie de lui donner une chance. Il était certainement très gentil à l'intérieur, elle ne devait pas juger les personnes juste par leur apparence.
-Bien, on va donc pouvoir commencer, reprit Yaga après que ses élèves se soient installées. Comme tu es nouvelle dans ce domaine, Aya, on va tout reprendre depuis le début lentement, histoire que tu comprennes bien tout. Si tu es perdue n'hésite pas à poser des questions, moi et Shoko pourrons t'aider avec plaisir.
Qu'est-ce qu'elle disait? Son professeur était quelqu'un de tout à fait aimable, et elle se sentait d'ores et déjà en confiance. Et le fait que Shoko soit juste à côté d'elle y était à coup sûr pour quelque chose.
Très lentement, Aya appris ainsi que les "monstres" qu'elle côtoyait depuis son enfance étaient en réalité des fléaux, aussi appelés malédictions. Seul un pourcentage tout à fait restreint de personnes étaient capables de les voir, et elle en faisait manifestement partie.
Lorsqu'elle posa la question de savoir quelle était leur origine, Yaga lui répondit qu'ils étaient créés à partir des émotions négatives des différentes personnes, et que leur prolifération était d'autant plus exacerbée dans les lieux bondés et naturellement propices à de tels sentiments. Comme les cimetières, les écoles ou les hôpitaux. Là où elle avait l'habitude de passer le plus clair de son temps, en d'autres termes.
Lorsqu'elle apprit que ces fléaux pouvaient être combattus, elle eut l'espace d'un moment énormément de mal à y croire. Pourquoi personne n'était encore venu faire le ménage dans son école et son hôpital, dans ce cas?
Tout simplement car ces malédictions n'étaient pas assez puissantes pour causer du tord aux personnes alentours, lui répondit Shoko sur un ton bienveillant. Les personnes comme eux, les exorcistes, n'intervenaient que si la menace des fléaux était trop grande, principalement à cause du nombre restreint de leurs effectifs.
Un schéma dessiné au tableau lui exposa les différentes classes que pouvaient avoir les malédictions, de la classe quatre à la classe S ; à côté se trouvèrent inscrites les correspondances avec celles des exorcistes.
-Et moi, de quelle classe je suis du coup?
-Pour l'instant on ne sait pas encore, la renseigna Yaga. Nous n'avons pas encore pu déterminer si tu avais ou non une technique innée en toi. Si oui, nous pourrons te la faire travailler autant que possible pour que tu puisses la maîtriser ; si non, nous pourrons t'apprendre comment manier des barrières ou des armes, au choix.
Manier des armes?
Ces quelques mots firent écarquiller les yeux d'Aya, tellement elle ne s'y attendait pas. Elle apprit alors que l'énergie maudite qui circulait en elle pouvait servir à alimenter une technique en particulier, si tant soit peu elle en possédait une, mais aussi des barrières, ou bien à être insufflée dans une arme afin qu'elle se batte avec.
Avec son corps tout faible, elle n'avait cependant pas grand espoir d'un jour pouvoir manier une arme, quelle qu'elle soit.
-Tu as une énorme quantité d'énergie maudite en toi, reprit Yaga en regardant Aya dans les yeux. Ce serait étonnant qu'avec autant d'énergie tu n'aies pas de technique innée ou même héritée sait-on jamais, mais nous devons considérer toutes les possibilités. Pour l'instant, nous allons concentrer nos efforts sur la maîtrise de ton énergie maudite ; le reste viendra plus tard, en temps voulu.
Elle s'apprêtait à demander des précisions sur l'éveil de sa potentielle technique lorsque la porte s'ouvrit d'un seul coup, lui arrachant un grand bond sur sa chaise, craintive comme elle l'était. C'était d'ailleurs ce qui amusait tellement sa petite sœur, de voir son aînée sursauter comme une dératée au moindre petit bruit. Bien que l'aspect marrant de la chose échappe à Aya, si elle devait être honnête.
Un silence plana sur la salle quelques instants, avant qu'Aya ne voit le visage de son professeur se renfrogner à la simple vue du nouveau venu. Un garçon d'une taille gigantesque, aux cheveux blancs et aux yeux cachés par une paire de lunettes noires, qui avait les mains bien enfoncées dans les poches de son pantalon d'uniforme.
-Satoru. Qu'est-ce que tu fais ici? Tu n'es pas censé être en mission, à l'heure actuelle?
La voix de leur professeur n'avait rien à voir avec celle qu'il avait avant, toute trace de gentillesse et de bienveillance s'étant envolé en l'espace de quelques instants seulement.
-Si, mais j'ai terminé et je m'ennuie maintenant... Du coup j'ai pensé que je pourrai passer le temps ici, répondit Satoru en soupirant, comme si cette nouvelle était la pire qu'il ait obtenue de ces dix derniers jours.
Un excellent comédien, si Aya pouvait se permettre. Dans la catégorie tragédie bien entendu.
Il n'attendit même pas une réponse de la part de Yaga, qu'elle soit positive ou négative, et s'avança plutôt dans la salle à la recherche d'un bureau vide, ce qui ne manquait pas. Ce ne fut que lorsqu'il fut assis (ou plutôt affalé sur sa chaise), ignorant les regards désaprobateurs ou même blasés qu'il récoltait, qu'il remarqua que quelqu'un d'autre était présent.
En tournant la tête dans le but d'envoyer un sourire narquois à Shoko, qui lui lançait très certainement une expression hilarante à ses dépens, il croisa un regard qu'il n'avait pas prévu. Deux yeux cuivrés imprimés sur une peau d'une blancheur presque maladive, avec des cheveux bruns foncés attachés et qui encadraient un petit visage innocent.
Il était sur le point de demander qui était cette jeune fille et d'où venait-elle, avant qu'une imposante vague d'énergie étrange ne vienne le frapper en plein visage. Ce fut à cet instant qu'il se souvint avoir rencontré cette fille peu de temps auparavant. Celle qui était bourrée d'énergie bizarre et qui n'en avait même pas conscience.
Impossible pour lui de se souvenir de son nom, cependant.
-Aaaaah, t'es la gamine de tout à l'heure, déclara-t-il d'une voix forte, inconscient des regards désapprobateurs qui planaient sur lui depuis tout à l'heure.
-Oui, bonjour à nouveau Satoru Gojo, marmonna Aya d'une voix mêlée de sarcasme et d'innocence qui le déstabilisa un instant.
C'était bien la même que plus tôt, pensa-t-il en se remémorant son malaise d'il y a quelques temps. C'était cette même fille qui ressemblait à une enfant et qui était presque impossible à lire.
-Vous faisiez quoi? reprit Satoru en changeant de sujet.
Yaga poussa un soupir, mais lui répondit tout de même.
-Comme Aya est nouvelle, nous étions en train de revoir les bases de l'exorcisme avec elle. Du moins jusqu'à ce que tu nous interrompes, acheva-t-il en espérant que sa pique ait un quelconque effet sur son élève indiscipliné.
Il pouvait toujours rêver, comme on dit.
-Depuis le début! Waaahou, ça doit être tellement chiant! Le truc c'est que la théorie c'est bien un instant, mais sans pratique on va pas loin... Faudrait pas plutôt lui expliquer comment faire pour contrôler son énergie maudite? A ce stade elle va finir par nous étouffer vivants avec.
L'énergie qui s'échappait de cette Aya était telle qu'il avait l'impression de suffoquer, lui faisant s'interroger sur comment il ne l'avait pas remarquée avant d'entrer dans la salle.
Satoru n'avait pas vraiment tord dans ses propos, bien que ceux-ci soient dénués de formules de politesses pourtant essentielles lorsque l'on s'adressait non seulement à une inconnue, dans une salle de classe, mais également à son professeur directement.
Ce fut ce décalage entre les relations professeur-élève qu'Aya avait connues depuis toute petite qui vint la prendre au dépourvu. Elle avait cru à de nombreuses reprises que Yaga allait reprendre Satoru voire même le punir, mais non. A part des regards noirs, le jeune homme aux cheveux couleur neige ne récoltait rien qui ressemblait, de près ou de loin, à une quelconque remontrance.
-Si je puis me permettre, Monsieur, Satoru n'a pas vraiment tord pour une fois, intervint alors Shoko en brisant le silence. Je pense qu'on a beaucoup expliqué comment l'exorcisme fonctionnait et qu'à présent il serait préférable de passer au niveau supérieur.
Ces quelques mots ne rassurèrent pas Aya, loin de là. Allaient-ils la jeter face à un fléau et lui dire de se débrouiller, en appliquant ce qu'elle venait d'apprendre? Elle avait certes prit des notes sur un cahier de la leçon qu'elle venait d'avoir, en bonne élève qu'elle était, mais elle n'était absolument pas prête à se battre contre l'un de ces monstres.
L'information prit quelques instants pour être traitée par leur professeur, qui sembla peser le pour et le contre mentalement. Il posa un œil sur Aya, ratatinée sur sa chaise comme si elle espérait qu'on ne puisse plus la voir ainsi, et prit finalement sa décision.
-C'est d'accord, on va faire un petit test en conditions presque réelles pour voir où Mademoiselle Nishida en est personnellement, et comment elle réagit.
Et cette fameuse Mademoiselle Nishida ne pouvait pas être plus terrifiée qu'à l'heure actuelle. Elle en serait presque venue à regretter sa chambre d'hôpital.
Presque.
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