𝒞𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝟷𝟸
Flower & Bee - Oh Jun Sung
Cotton Candy - Oh Jun Sung
Empty Place - Oh Jun Sung
━━━━━━━━━━
— C'est très bien Taehyung, nous en avons fini pour aujourd'hui.
Tandis que Seokjin commençait à ranger pinceaux et livres académiques, il fut surpris de voir que Taehyung restait encore assis là, devant lui. D'habitude, ce dernier dès lors qu'il le congédiait l'aidait, puis se levait et se courbait par respect avant de rejoindre son loyal serviteur qui l'attendait dans l'arrière cour.
Il fallait croire qu'aujourd'hui était un jour différent, et puis il fallait aussi dire que ces derniers temps, le jeune maître avait l'air d'avoir la tête ailleurs. Il était toujours aussi brillant et concentré durant son temps d'étude, mais la petite étincelle qui émanait de son adorable personnage paraissait presque éteinte.
En tant que professeur, Seokjin savait qu'il ne valait mieux pas se mêler des soucis (peut-être) un peu trop personnels de ses élèves. Après tout, il faisait cours à la fine jeunesse des futurs dirigeants ou combattants de demain. Autrement dit, fourrer son petit nez dans les affaires de riches familles l'importait peu puis il s'en gardait assez bien. Cela dit, en tant qu'ainé mais aussi en tant qu'humain, il ne pouvait résister à la moue boudeuse de ce jeune homme d'habitude si joyeux pour un rien.
Alors, Seokjin attendit. Il rangea ses affaires avec une lenteur nouvelle, prit le temps de finir sa délicieuse boisson aux plantes tout en jetant parfois des petits regards à Taehyung, qui lui, fixait le petit champs de fleurs au loin du manège où ils aimaient s'asseoir pour étudier.
Il se passa dix minutes, puis vingt, et alors que le professeur allait enfin se lever, la petite voix de Taehyung soupira presque :
— Sunbaenim ?
Seokjin ne put s'empêcher de sourire, sachant pertinemment que Taehyung avait dû attendre le bon moment pour l'apostropher. A vrai dire, il aurait pu lui demander bien plus tôt ce qui pouvait autant le tracasser, mais Seokjin le savait, Taehyung était un être sensible et réfléchi, et il lui fallait toujours du temps pour se décider à agir, afin d'être certain de prendre la bonne décision.
Ce n'était pas un petit casse-cou, comme pouvaient l'être certains de ses autres élèves, que Taehyung connaissait bien.
— Oui ?
— Pourrais-je...pourrais-je vous parler un moment ?
— Bien sûr, acquiesça le professeur en reprenant sa place initiale. Cette discussion nécessite t-elle de bonnes tasses de thé ?
Sans ajouter un mot, Taehyung hocha la tête muni d'un petit sourire, sachant à quel point son professeur et aîné appréciait la chaleur et la douceur de cette boisson. Ainsi, il fallut quelques minutes afin qu'on leur apporte une nouvelle théière chaude qui laissait émaner une douce odeur de jasmin. Sans se faire prier, Taehyung attrapa cette dernière et, tout en retenant la longue manche de son durumagi, servit d'abord son professeur et ami, avant de laisser couler un peu de thé dans sa propre tasse.
Chose faite, tous deux apprécièrent le goût réconfortant du jasmin embaumant leur narine à chaque gorgée, puis, Seokjin déposa sa tasse et croisa les bras contre son torse, la tête haute.
— Bien, je t'écoute ?
— Et bien...je suis désolé de voler votre temps, j'avais besoin de vous poser ces questions qui me traversent l'esprit depuis un moment et...
— Taehyung, je t'en prie, l'arrêta le plus vieux. Je ne serais pas rester si j'avais plus important à faire. Si je peux me permettre, j'ai remarqué que tu avais la tête ailleurs ces derniers temps, et si je peux t'aider à y voir plus clair, j'en serais d'autant plus fier. Alors tu peux parler sans crainte, si ce sont des questions, je saurais y répondre. Du moins, je ferais mon possible.
Rassuré par les paroles de son professeur, Taehyung hocha la tête, toujours habillé de cette petite moue adorable qui faisait fondre quiconque le croisait sur son chemin, puis il prit une grande inspiration, les yeux clos. Cela lui permit, en quelque sorte, de remettre de l'ordre dans ses pensées, et c'est en levant les yeux à ce ciel bleu azur que lui vint sa première question.
— Sunbaenim, croyez vous aux étoiles ?
— Aux étoiles dis-tu ?
— Oui, dit Taehyung en hochant la tête, les yeux toujours fixés au ciel.
— Et bien je dirais que certains pensent que ce n'est pas une science, mais l'astronomie peut être un domaine assez intéressant...Disons que je me sens plus concerné envers les sciences que nous apprend la nature, l'art, toutes ces choses que l'on vous apprend à notre tour.
— Hm...
— Pourquoi ? Serais-tu intéressé par ce genre de domaine ?
— J'aime tout ce qui peut être compris, je crois que...j'aime le ciel, j'aime les étoiles comme j'aime les papillons ou les oiseaux.
— Je vois...Est-ce donc cela qui te travaille autant ?
— Non, répondit assez vite le plus jeune.
Seokjin se contenta de hocher la tête, les sourcils froncés.
— Sunbaenim, croyez vous au destin ?
— Le destin...C'est une puissance supérieure à notre volonté humaine. Certains aiment dire que c'est rassurant ou presque évident de croire que l'histoire à venir d'un individu, d'une société ou même de l'humanité tout entière serait déjà écrite sans pouvoir être modifiée. Je suis plutôt partisan du concept de réincarnation où toute action que l'on nomme karma conduit à des effets censés se répercuter sur les différentes vies d'un individu.
— Je vois...alors Sunbaenim, vous croyez en la réincarnation ? Comme celles des papillons ?
Nombreuses avaient été les fois où Taehyung avait parlé de ces beaux insectes à son précepteur. A chaque fois, Seokjin l'avait écouté avec attention, puisque sans s'en rendre compte, Taehyung établissait une réelle construction de pensée fascinante. Il arrivait à relier ce qu'on lui apprenait à ce qui le passionnait sans problème.
— Dans un sens, oui.
— Alors vous croyez vous aussi aux âmes sœurs Sunbaenim ? demanda soudainement Taehyung.
Seokjin le toisa d'un air curieux, mais pas moins intéressé, puis il réfléchit un instant avant de répondre :
— Les âmes se réincarnent au fur et à mesure des vies, Taehyung. Dans ce cas, nous sommes souvent confrontés à des personnes que nous avons connues dans des vies antérieures...Les âmes sœurs en font partie. Leur connexion est très forte, c'est vrai. Ressentirais tu ce genre de chose envers autrui ?
Pressant ses lèvres l'une contre l'autre, Taehyung hocha la tête de gauche à droite, mimant un non. Au fond, il aurait aimé dire qu'il l'espérait, qu'un jour, son âme d'aujourd'hui puisse toujours aimer son âme sœur de demain.
— Et bien, me voilà confus, se mit à rire doucement Seokjin. Ou veux tu en venir avec toutes ces questions ?
— Je...
— Ton esprit semble être totalement embrouillé jeune homme, le taquina son précepteur. Il y aurait-il une chose, un événement qui t'aurait poussé à penser à tout cela ?
— ...Oui, je...je crois...
— Veux-tu en parler ?
Il fallut quelques minutes à Taehyung pour réfléchir, peser le pour et le contre, avant qu'il ne se mette à rougir sans raison. Son professeur ne pouvait comprendre pourquoi, seul Taehyung était sujet aux souvenirs qui le reliait à Jungkook, mais voilà que ce nom revenait encore hanter ses pensées, lui rendant l'esprit totalement flou.
— L'a...l'amour, Sunbaenim...
— L'amour ?
— Vous y croyez ?
— L'Amour existe bel et bien dans ce monde, oui. Et toi Taehyung, qu'en penses tu ?
— Ou-oui...j'y crois...
— Mais ?
— Je ne crois pas que nous en ayons tous et toutes la même...définition ?
— Je te l'accorde, mon jeune ami. Serait-ce donc l'Amour qui te tracasse ?
— Hm, acquiesça Taehyung en baissant les yeux sur ses mains.
— Je vois, sourit le plus vieux.
— Sunbaenim, vous...avez-vous déjà...? Enfin, avez-vous déjà fait...été...
— Expérimenter l'Amour ? Oui, si telle est ta question.
— Mais...
— Sous toutes ses formes, si c'est ce que tu allais demander.
— Alors Sunbaebim vous...Vous avez déjà fait...Enfin, comment...? Vous avez déjà donner...
— Cette conversation deviendrait presque gênante Taehyung, se mit de nouveau à rire Seokjin.
Cependant, il fut le seul à en rire et remarqua que Taehyung se sentait presque honteux de l'avoir poussé à se révéler ainsi. Après tout, il était tout de même son aîné, son professeur, peut-être un ami, certes, mais Taehyung était lui-même très à cheval sur le respect de la hiérarchie sociale ou peu importe ce qu'elle pouvait être.
— Rassure-toi, je ne voulais pas t'offenser. Tu es jeune, c'est tout à fait normal de se poser des questions. Pour les jeunes seigneurs, il est coutume de s'expérimenter et de connaître ses premières expériences dans les maisons Kisaeng, non ?
Soudain, l'expression de Taehyung changea. Lui qui était aussi rouge qu'une tomate était maintenant vert de colère. Ses souvenirs lors de sa visite à la maison Kiseang n'étaient pas mauvais, et il remerciait encore le ciel parfois de sa rencontre avec Yoo-jin. Mais le simple fait de se rappeler que son père l'y avait emmené pour lui faire perdre sa virginité à laquelle il tenait tant le rendait presque malade.
— Je n'aime pas ça, dit-il froidement.
— Quoi dont ?
— Ce n'est pas expérimenter l'Amour, que d'aller gâcher cette expérience auprès de jeunes femmes que l'on n'aime pas.
— Pourtant, si cela t'angoisse tant, c'est la seule façon d'apprendre, non ?
Les paroles de Seokjin pouvaient paraître brutes mais ne l'étaient pas. Comme à son habitude, il était calme et serein, et essayait toujours de comprendre ce qui l'entourait. C'est pourquoi Taehyung aimait tant lui parler, se confier aussi parfois sur d'autres sujets.
— Je ne pense pas.
— Alors que veux tu, toi ?
— Moi...? Moi...Moi je veux la pureté de ce qu'on appelle l'Amour. J'aimerais que toutes ces questions qui bourdonnent dans ma tête ne deviennent plus qu'évidence lorsque je me donnerais à la personne qui aura su voler mon cœur. J'aimerais...enfin, j'aimerais que cette personne puisse voler dans mon cœur comme vole un papillon dans les airs.
— De quel genre de personne veux tu parler ?
— Peu importe...souffla timidement Taehyung. Mon...Mon âme sœur est un papillon, c'est ce que je crois. Il ou elle vole ici et là, a d'abord été emprisonné dans son cocon avant d'être libéré et un jour saura se poser sur la fleur qui me représente. Il éblouira le ciel avec ses ailes et à deux, nous ferons qu'un. Puis, comme tout papillon, il se laissera mourir pour se réincarner encore et encore...Peut-être que je suis moi aussi un papillon, je ne sais pas.
Bien que ces discours n'avaient ni queue, ni tête, Seokjin se laissa bercer par la perception parabolique du concept de l'Amour aux yeux de son élève, essaya tant bien que mal de le rassurer également après que ce dernier lui ai parlé de sa visite forcée à la maison Kisaeng. Il n'avait pas vraiment son mot à dire, il n'était que son professeur, pas son parent, sans parler du fait que la famille Kim était dignement respectée de par la fonction du père. Ainsi, il finit enfin par accompagner Taehyung à l'arrière cour, ce dernier le remercia de l'avoir écouter si longtemps, aussi de l'avoir conseillé, puis il repartit avec ce sourire qui le caractérisait tant.
— Vous souriez, Monseigneur, lui dit Yoongi lorsque Taehyung arriva près de lui.
— Oui, je me suis souvenu que je devais voir un ami.
— Un ami ? Maître Jung ?
— Non, pas Hoseok, il est certainement très occupé ces temps ci.
— Maitre Namjoon ?
— Ah, non, Yoongi. Je suis sûr que ce grand amoureux court après ma sœur, se moqua Taehyung.
— Mais alors...
— Je vais rendre visite au maître Park, j'ai quelques questions à lui poser. Peut-être que lui aussi, pourra me conseiller.
*
Jusqu'alors, Taehyung ne s'était jamais rendu à la maison Park. C'était toujours Jimin qui avait fait le détour pour lui rendre visite, et donc, muni d'un courage nouveau et d'une détermination sans faille, c'est heureux et joyeux que Taehyung se présenta devant ses portes.
Cependant, lorsqu'on vint lui ouvrir, il se rendit compte qu'il n'avait pas pensé à amener de présent. Il voulut s'échapper alors, courir se cacher par honte de penser qu'il était un jeune homme mal élevé, mais contre toute attente, ce ne fut pas un quelconque serviteur de maison qui se présenta à lui.
— Bonjour, tu dois être Taehyung n'est-ce pas ? lui demanda son interlocutrice.
Elle était très belle, munie d'un visage fin et de cheveux très noirs soigneusement coiffés sur sa tête. Deux petites tresses épousaient la forme de son visage rond et fin à la foi, ne pouvant qu'attirer tout regard sur son beau sourire, et surtout, sur ses lèvres rosées pulpeuses à souhait.
Tout en continuant de l'observer, Taehyung comprit qu'elle devait être la sœur de son ami. Sans nul doute. C'était peut-être de famille que de posséder de si jolies lèvres, et que dire de ces sourires charmeurs...
— Alors, tu n'as plus de langue ?
— Oh, par-pardon Noona ! s'excusa immédiatement Taehyung en se courbant en avant, les mains jointes dans le dos. Je...je n'ai pas pu le prévenir mais j-je voulais rendre vi-visite à Jimin et comme je passais par-là j'ai pensé que j-je pou-pouvais...Enfin, que je pouvais peut-être...
La jeune femme devant lui fit les gros yeux, puis se mit à rire derrière sa main, laissant un doux son courir jusqu'aux oreilles du jeune homme qui ne savait même plus quoi dire, ni quoi faire.
— Les rumeurs sont vraies, tu es vraiment très beau, dit-elle derrière son sourire. Mais je ne savais pas que tu étais si amusant.
— Oh, je...Me-merci Noona...
— Tu peux te relever, tu vas finir par être bloqué si tu restes plus longtemps comme ça. Je t'en prie, soit le bienvenue.
Les joues rougies, Taehyung finit tout de même par se relever puis, accompagné de son serviteur qui ne le quittait jamais, pénétra dans la demeure. Il ne fut pas étonné de la superficie de cette dernière, étant donné que sa maison était tout à fait la même si ce n'était que les pavillons restaient distinctifs les uns des autres. Comme son père, le père de Jimin travaillait pour l'Etat et étant proche du Roi, leurs familles à chacun étaient également privilégiées dans ce sens.
Ceci dit, en tournant les yeux à sa droite, Yoongi revint dans son champ de vision et Taehyung eut mal au cœur. L'idée même de ne pas être surpris de la richesse des autres (car lui-même l'était) le rendait presque malade, parfois. Il repensait alors à l'injustice de la vie, au fait que d'autres ne jouissait pas des mêmes privilèges, à tous ces systèmes qui faisaient de lui et de ses amis des "OS sacrés" et tout ce genre de choses qu'il trouvait tellement futile et...
— Je ne me suis pas présentée, je me nomme Yun. Je suis la plus jeune des sœurs de Jimin, et je suis ravie de pouvoir te rencontrer.
— Ra-ravi Noona moi...Taehyung, c'est Kim Taehyung, lui répondit-il en se courbant une nouvelle fois.
— Je le savais déjà, dit Yun en souriant. C'est donc lui ce fameux serviteur qui ne te quitte jamais, dit-elle en désignant Yoongi du regard.
Ce dernier se courba par respect, bien qu'il restait tout de même méfiant. Il n'aimait pas Jimin, et tout son être lui hurlait de se méfier de cette famille. Mais peut-être bien qu'il s'était trompé, puisqu'en voyant la tendresse avec laquelle Yun s'adressait à son jeune maître, Yoongi semblait perturbé.
Peut-être que tous les Park n'étaient pas des petites vipères comme Jimin.
— Oui, voici Yoongi, le présenta Taehyung, fier. Puis-je savoir ou faudrait-il qu'il attende lors de ma rencontre avec votre frère ? Je...Je n'aime pas vraiment le savoir seul, alors...
— Tu es adorable, souffla-t-elle encore en riant. Il pourra attendre à mes côtés s'il le faut. Je vais moi-même te mener à mon petit frère, il doit être en pleine conversation avec notre aîné, Yu. Avant que je ne vienne dans la cour, ils se disputaient encore tous les deux. Ça arrive tout le temps, tu as une sœur toi aussi, non ?
— Oui, Noona, se contenta de dire Taehyung tout en hochant la tête.
Ils se mirent en chemin, et il la suivit à travers les pavillons qui bientôt les mena à un beau jardin, malgré tout plus petit que le sien. Au loin, il pouvait entendre une voix féminine presque beugler comme si elle ne pouvait contrôler sa colère, mais pas de signe de Jimin.
— Je n'ai pu croiser ta sœur qu'une fois, il me semble. Elle ne se rend pas au rendez-vous des couturières ?
Mon Dieu non, pensa Taehyung. Il ne put répondre ainsi, mais il voulut presque rire à cette question. Saehee n'avait jamais été du genre fifille et l'imaginer se rendre à un regroupement de jeunes filles avec des aiguilles en mains trois heures durant lui donnait envie de mourir de rire. Sa sœur était plutôt du genre combattante, n'avait peur de rien, mais cela ne l'empêchait pas d'être aussi belle que la rosée du matin. Une fois, Namjoon lui avait même dit que ce l'avait fait tomber amoureux, était toute la force qui émanait de son regard.
Il avait trouvé ça romantique.
— Oh...On dirait bien que Jimin se fait encore disputé. Je vais l'appeler, pardonne moi.
Soudain, Yun se courba légèrement et accouru presque jusqu'au petit manège où son autre sœur, Yu paraissait il, se trouvait là, assise et dans une danse de gestes interminable, hurlait sur Jimin, juste devant elle.
Quelque peu surpris par ce spectacle, Taehyung se sentit presque mal à l'aise d'y assister, même de loin. Il pouvait maigrement entendre ce que reprochait Yu à son frère mais elle semblait assez enragée, tandis que Jimin, lui, restait là, presque ennuyé de devoir l'écouter encore et encore. Selon les dires de Yun, cela arrivait très souvent et ne voulait rien dire. D'après elle, Jimin et Yu étaient de véritables âmes jumelles, s'aimaient à n'en plus pouvoir, tout autant qu'ils se détestaient.
En si peu de temps, Taehyung avait pu en savoir un peu plus sur la vie de son ami. Jimin était donc entouré de trois sœurs et d'un grand frère, il était le petit dernier, comme lui. Lui aussi avait la chance d'entretenir de bonnes relations avec ses proches, mais il semblait que la pression familiale était moins importante dans ce foyer que dans le sien.
Sans trop savoir pourquoi, Taehyung appréciait cette maison et s'y sentait plus ou moins bien. Il n'avait pas vu les parents de son ami, mais le visage de Yun l'avait réconforté, adouci, mis en confiance. Comme son frère, elle avait ce don.
Bien trop pris dans ses pensées, Taehyung ne fit pas attention au loin à Yun qui arriva enfin près de ses frères et sœurs. Elle sembla se pencher pour annoncer quelque chose à Jimin qui, dès qu'il reçut l'information, leva la tête tel un petit suricate et se leva aussitôt, ignorant totalement les brouhaha de Yu afin de rejoindre Taehyung.
Ou plutôt, il profita de la venue de Taehyung pour échapper aux reproches interminables de sa sœur aînée.
— Tiens, bonjour Taehyung, je ne m'attendais pas à ta visite. Quelle joie de te voir, vraiment. Tout va bien ? Et si nous allions au petit salon plutôt ? Il fait assez frais je trouve ici, allons y.
Sans plus attendre, Jimin, comme à son habitude, ne salua pas Yoongi et l'ignora presque, attrapa le bras de son cadet et sous sa surprise, le tira avec lui jusqu'à la cour intérieure. Maintenant bien loin des hurlements de Yu, Jimin souffla presque de soulagement. Cela faisait des heures qu'elle lui hurlait les mêmes choses, juste parce qu'ils n'étaient pas du même avis et encore une fois, le sujet de Jungkook était revenu remuer le couteau dans la plaie.
Mais comme il l'avait toujours pensé, Jimin était béni, et on lui avait envoyé la meilleure distraction du monde pour qu'il puisse s'en échapper, il avait nommé : Kim Taehyung.
Il ne l'avait pas croisé depuis un bon bout de temps. Il avait entendu dire par des bruits de couloirs au marché qu'il ne sortait plus vraiment de sa chambre pendant un temps, avant de ne faire que de simples allées et venues de la maison des précepteurs à la sienne. Après ce que Jungkook lui avait annoncé, il était évident que ces événements l'avaient perturbé.
Alors, le revoir aujourd'hui avec cette mine toujours aussi mignonne et ce petit sourire maladroit comme s'il était fragile comme de la porcelaine lui donnait envie de rire. D'éclater de rire même. Franchement, comment Jungkook pouvait il autant vouloir faire quelque chose de lui ?
— Ca faisait un moment Taehyung, n'est-ce pas ? Tout va bien ?
A vrai dire, Jimin était faussement intéressé par sa réponse mais il fallait bien reprendre les choses à petit pas.
— Oui, Hyung je...Pardon, je ne me sentais pas très bien après notre soirée à Gatak et je...Je vais mieux, maintenant.
— C'est super Taehyung, vraiment. J'en suis ravie, dit-il avec un faux sourire.
— A vrai dire je...
— Suis moi, nous allons nous installer dans le petit salon, ici. Toi là, dit Jimin en s'adressant à Yoongi. Tu peux attendre devant la porte ou sur le perron, tant que tu ne salis rien. Taehyung, entrons.
Pressant sa langue contre ses lèvres, Yoongi dut se contenir de toutes ses forces pour ne pas réagir. Voilà que le jeune maître Park recommençait ses manèges, et le pire était qu'il ne pouvait rien dire à Taehyung puisque ce dernier était persuadé qu'il était son ami. Il pouvait essayer de le lui faire comprendre, oui, mais Taehyung vivait dans un monde particulier qui était le sien où tout était beau, parfait, où tout le monde était gentil et sans mauvaise intention.
Autrement dit, Yoongi pensait parfois que Taehyung vivait dans un monde venu d'ailleurs, pas même du ciel.
Alors, contraint à attendre, seul, Yoongi ne se fit pas prier et prit place sur le petit perron dès que la porte fut refermée sous ses yeux.
De l'autre côté, dans le petit salon où l'on avait fait apporter thé et collations, Jimin écoutait Taehyung lui conter ses jours malheureux. A vrai dire, il n'écoutait que d'une oreille, déjà ennuyé de toutes ces choses futiles auxquelles Taehyung s'attachait.
— Je vois, je vois, ça a dû être difficile, oui. Mais dis-moi, tu ne t'étais pas amusé à Gatak ? Je t'ai vu partir avec Jungkook à un moment, vous semblez bien vous entendre tous les deux.
Dès qu'il prononça son nom, Jimin vit les joues de Taehyung se transformer. S'il avait pu se liquéfier sur place, il serait devenu un véritable petit ruisseau. Quoique, une simple flaque peut-être. Oui, voilà.
— Jung...Jungkook ?
— Oui ? Toi qui voulais tant le voir, tu étais heureux à cette soirée non ?
— Ah...Ou-oui...je...
— Quelque chose ne va pas, Taehyung ? Je te sens tout chancelant ? ajouta Jimin, sa tasse dans la main.
Face à lui, Taehyung ne savait plus quoi dire. Lui revenait encore et encore les souvenirs de cette soirée à Gatak. Il ne savait plus quoi en penser. Il avait adoré ça, oui. Il lui arrivait même d'en rêver de nouveau ces dernières nuits. Mais l'idée de parler de Jungkook le rendait timide, tout à propos de lui le rendait timide.
— Taehyung ?
— Hyung, je...Je peux te parler ?
— Bien sûr, dit Jimin avec assurance. Nous sommes amis, non ?
Relevant les yeux vers son aîné, Taehyung fit la moue puis il sourit, faiblement. Après tout, il était venu jusqu'ici pour tout raconter à Jimin, pour avoir son avis, ses retours, pour lui demander des conseils...Alors, c'est ce qu'il fit. Il lui fallut beaucoup de temps pour trouver ses mots, pour ne pas bégayer à chacune de ses phrases, pour que tout ce qu'il avait ressenti soit compréhensible aux oreilles de Jimin.
Ce qu'il ne savait pas, c'était que ce dernier savait déjà absolument tout. En fait, il avait même participé au fait qu'il se retrouve seul afin que Jungkook puisse l'approcher. Il savait tout, puisque Jungkook lui-même lui avait conter ce qu'il s'était passé, peut-être en omettant le fait de l'avoir raccompagné et tout ce qu'il avait lui-même ressenti ensuite. Mais Jimin n'était pas idiot, au contraire. Il était une bonne tête pensante, et il avait compris que Taehyung avait réussi haut à la main à dénicher l'intérêt de son ami.
Cet intérêt était presque devenu une réelle obsession pour Jungkook qui s'était alors donné le défi d'avoir Taehyung dans son lit, poussé par les arguments d'un Jimin un peu vicieux et tentateur.
Aujourd'hui, après avoir entendu la version à l'eau de rose du pauvre petit Taehyung en détresse, Jimin souriait.
Il souriait puisqu'il savait que Jungkook l'avait dans la poche.
Cela dit, Taehyung restait une proie difficile et réfléchie qui demandait à être travailler avec patience et douceur.
— Si j'ai bien compris, Jungkook te plait ?
N'osant pas répondre à voix haute, Taehyung se contenta de hocher la tête, les joues rouges et sans relever les yeux vers son ami.
— Je vois, c'est un bon départ, non ? Bon. Je t'ai déjà dit que Jungkook aimait tout ce qui est beau, pas vrai ?
— Ou-oui...
— Tu sais, je vais te confier un secret, dit Jimin à voix basse, comme si on pouvait les entendre. Jungkook m'a dit que tu lui plaisais beaucoup. Je le connais depuis toujours et jamais je ne l'avais vu autant s'investir auprès de quelqu'un, vraiment. Tu sais, Jungkook a vraiment beaucoup de prétendants.
— Beau-beaucoup de...prétendants ? On m'a dit qu-que tous les jeunes hommes de notre âge passaient par la mai-maison Kisaeng mais une amie là-bas m'a confié que...Que Jungkook ne fréquentait pas ce genre d'endroit...attendrait il au-aussi le grand amour ? Serait-il romantique ?
— Oh oui, le plus grand romantique que je n'ai jamais connu, dit Jimin en secouant la tête, les yeux clos.
— Alors il ne fré-fréquente pas la maison Kiseang ?
— Jungkook est plus poétique, il fréquente des maisons où l'intellect et l'art domine. Il passe beaucoup de ces soirées à y étudier, je sais qu'il apprécie énormément l'anatomie, en peinture, évidemment.
— Il cherche lui aussi le grand Amour ? demanda Taehyung, les yeux ronds ?
— Évidemment, conclut Jimin.
— Alors...Alors toutes ces ru-rumeurs sont réellement infondées ?
— Je n'ai jamais aimé toutes ces rumeurs qui court à son sujet. Crois-moi, les personnes qui parlent sur son dos sont seulement jalouses de ne pas être à ses côtés ou bien encore de la situation de sa famille, dit Jimin, presque féroce.
— Hyung...Jun-Jungkook...connait il déjà le plaisir de la chair ?
— Taehyung, mon cher...Jungkook est un amoureux de l'art, il connaît absolument tout sur les corps parce qu'il les étudie avec acharnement. De ce fait, je pense qu'il a déjà entretenu une relation...presque philosophique avec la chair, parce que Jungkook est comme ça, tu comprends ?
Une nouvelle fois, Taehyung hocha la tête, muni de cette petite bouille adorable et de ces yeux brillants qui le rendait aussi précieux qu'une poupée. Tout ce que lui disait Jimin maintenant le rassurait tant, qu'il se trouvait presque idiot d'avoir ignoré Jungkook tout ce temps.
— Alors, Taehyung, si Jungkook te plait tant, il faut le séduire !
— Je...je n-ne peux pas, je n'oserais jamais faire ça et...
— Je suis son meilleur ami, non ? Qui d'autre que moi peut le connaître mieux que sa propre poche ? Alors, dit-il en claquant ses mains l'une contre l'autre, laisse moi te donner mes conseils les plus avisés !
Prêt à recevoir les dignes conseils de son ami et aîné, Taehyung sentit lui-même une confiance venu d'ailleurs prendre place dans ses poumons lorsqu'il inspira, la tête haute. Jimin, lui, s'était levé, et marchait dans la petite pièce en énumérant les choses une à une.
— Premièrement, continue d'être joli. Tu as un charme envoûtant Taehyung, et je sais que Jungkook ne peut y être insensible.
Taehyung hocha la tête.
— Deuxièmement, laisse toi aller. Je ressens toute cette rigidité en toi, celle qui t'encombre, qui t'empêche de suivre ce que tu veux réellement. Jungkook est du genre à aimer le contrôle. Laisse toi envoûter par ce qui t'anime à ses côtés.
A ces mots, Taehyung redevint lui-même et se mit à paniquer. On lui avait toujours appris à bien se tenir, à faire bonne figure, à réfléchir avant d'agir. Alors ce conseil que venait de lui confier Jimin lui paraissait tout bonnement irréalisable.
— Je...j-je...
— Tu vois, une fois encore, la panique te submerge. Il faut savoir lâcher prise pour goûter au plaisir Taehyung.
Le plus jeune releva les yeux vers son ami, ses yeux brillants comme s'ils étaient prêts à déverser de petites larmes, mais il n'en fit rien et hocha seulement la tête.
— Bien, reprit Jimin. Le dernier conseil que je peux te donner est d'apprendre à connaître ton corps. Comprendre les signaux qu'il t'envoie. Ainsi, ce sera plus facile pour toi de les laisser t'envahir jusqu'à en être submergé. Crois moi, avec ça, tu auras l'impression d'être aussi léger qu'un...qu'un...qu'un papillon, tiens ! Toi qui les aime tant !
La référence à son totem fit sourire Taehyung de bon cœur. Enfin, il avait compris. Avec tous ces précieux conseils, il était certain de pouvoir contrôler toutes les émotions si fortes qui l'envahissaient lorsque Jungkook se tenait prêt de lui. Il en était sûr, grâce à Jimin, il réussirait à conquérir toute l'attention de Jungkook.
Peut-être même qu'il aurait le courage de lui demander de reprendre ce qu'ils avaient entrepris à Gatak...qui sait.
Alors, se levant presque en faisant un bond et la tête haute, Taehyung partagea ce sourire si communicatif qui lui était propre, celui qui le faisait ressembler à une petite brioche dorée tout droit sortie d'un four.
— Merci, Hyung !
Satisfait de sa réaction, Jimin haussa les épaules et avec un sourire charmeur lui dit que ce n'était presque rien, que comme ils étaient amis, c'était tout à fait normal de vouloir l'aider dans sa quête.
Lorsque Taehyung fut parti, Jimin rejoignit son pavillon, se laissa retomber sur son futon, un sourire mesquin collés aux lèvres.
Comme toujours, il se trouvait incroyablement intelligent. Il lui était si facile de manipuler à sa guise, et bien que Taehyung puisse être têtu, il l'avait deviné, il n'en restait pas moins aussi naïf que tous ces autres jeunes hommes qu'il avait fini par convaincre.
— Ah...souffla t-il pour lui-même. L'amour, si désolant.
*
Sur le chemin qui le menait au palais, Taehyung traversait les rues tout comme s'il volait. Il se sentait extrêmement léger, vidé de tous ses tracas. D'abord, sa rencontre avec Yoo-jin l'avait convaincu. L'amour existait et il était propre à chacun. Peut-être qu'elle n'y portait pas de grandes attentions, mais elle ne l'avait pas traité de fou ni de sot lorsqu'il l'avait évoqué. Aussi, sa discussion avec Seokjin l'avait apaisée. Il existait bel et bien des âmes sœurs. Alors, maintenant, il en était certain, il rencontrerait la sienne un jour. Cette simple pensée le fit rire dans le vide, ne se doutant pas que derrière lui, Yoongi le regardait, amusé.
Le serviteur était heureux d'avoir retrouvé son jeune maître. Cela dit, il se demandait bien ce que Jimin avait pu lui dire pour le rendre si joyeux.
A ce propos, Taehyung se sentait véritablement reconnaissant envers lui. Oui, après tout, il était l'unique personne à connaître aussi bien Jungkook. Sans nul doute que tout ce qui lui avait partagé l'aiderait à mieux le comprendre...pas vrai ?
Arrivé aux portes du palais, Taehyung fit tout comme sa mère lui avait conseillé. Il s'était présenté convenablement, avait attendu sagement jusqu'à ce qu'une servante vienne le trouver puis il l'avait suivi jusqu'au pavillon où se trouvait la chamane qu'il devait rencontrer.
A vrai dire, Taehyung ne savait pas vraiment pourquoi on l'avait envoyé ici. Comme toujours, il s'était simplement contenté d'écouter les ordres de son père, qui d'après sa mère, s'était entretenu avec le Roi avant de lui prévoir cette visite.
Il ne se sentait pas en mauvaise santé, mais peut-être que finalement, son père avait pu s'inquiéter de son état dernièrement ? Cela lui paraissait peu plausible, alors peut-être était ce sa mère qui avait demandé à ce qu'on s'occupe de lui pour être certaine que tout allait bien.
Maintenant, Taehyung était seule dans une petite pièce soigneusement décorée. Elle était douce, certainement à l'image de la femme qui devait y travailler. Il avait toujours pensé que les médecins et les chamanes mettaient un point d'honneur à ce que leurs visiteurs se sentent à l'aise. C'est pourquoi il n'était pas anxieux à l'idée de rencontrer celle du palais.
D'après les dires, la femme médecin et chamane du palais était la meilleure du pays. Elle travaillait beaucoup avec les gens de la cour, et surtout avec la famille royale. Elle était appréciée et adulée par la plupart des habitants.
Impatient, Taehyung jouait avec ses mains, s'interdisant de toucher à tous les instruments qui étaient sous ses yeux lorsque la porte s'ouvrit. Une délicieuse odeur vint embaumer ses narines.
C'était une odeur agréable et fleurie, lui rappelant les douces senteurs de son enfance.
— Bonjour, Taehyung.
Une femme au visage incroyablement beau prit place face à lui. Elle était grande, portait un vêtement soigné aux couleurs pâles. Son maquillage était parfait, à un tel point que son teint paraissait angélique. Elle avait de jolis yeux noirs en amande, un petit nez adorable et des lèvres charnues. D'ailleurs, Taehyung fronça les sourcils lorsqu'il se mit à penser que cela lui rappelait quelqu'un.
— Bonjour Seonsaengnim, répondit il en se courbant légèrement, même de sa position assise.
— Je t'en prie, tu peux te redresser. Alors, dis-moi...Comment te sens-tu ?
— Bien, merci. Vous avez une magnifique officine. Vous êtes la première femme que je rencontre qui porte aussi le titre de médecin.
— Je te remercie, dit-elle en acquiesçant. Ce savoir-faire se transmet chez les femmes de ma famille depuis des générations. Je te l'accorde, c'est plutôt particulier.
Elle se mit à sourire.
— Après tout, ma propre famille est bien particulière.
Taehyung n'ajouta que peu de choses, se contenta de rire avec elle. Puis, le médecin prit une petite feuille qui se trouvait devant elle et se redressa sur son petit coussin, avant de reprendre plus sérieusement :
— Voyons, voyons...Il est dit ici d'après les informations de tes parents que tu as vingt-deux ans et une santé plutôt fragile. Que pourrais tu m'en dire ?
— Et bien...je ne dirais pas une santé fragile mais plutôt sensible à tout ce qui l'entoure. C'est vrai que...depuis ma naissance, je ne suis pas, d'après mon père, un jeune homme comme les autres. Moi, je n'aime pas toutes ces choses que les garçons de mon âge disent aimer. C'est parce que je suis très sensible au monde qui m'entoure que ma santé paraît si fragile ?
— Je vois que tu as passé plus de la moitié de ta petite enfance alitée. Tu as eu la coqueluche, la rougeole, la rubéole, la roséole, la scarlatine, la varicelle, les oreillons, la jaunisse...Incroyable, dit-elle en levant les yeux vers lui.
Gêné, Taehyung passa la main sur sa joue, ne sachant pas quoi répondre à tout cela, ayant lui-même oublié avoir traversé tout cela. Parfois, sa jeunesse lui paraissait si loin, et pourtant, lorsqu'on le lui rappelait, Taehyung avait de nouveau cette impression d'être faible et impuissant.
— Pourtant, plus rien à partir de ton adolescence, conclut elle. Sache Taehyung, que je ne pense pas que tu sois fragile, bien au contraire. J'ai pour croyance que les enfants comme toi, qui ont résisté à autant de souffrances sont les plus forts d'entre nous dit-elle en souriant sincèrement. Aujourd'hui, ton corps est paré et plus fort que jamais.
— Pl-plus fort...?
— Oui, pourquoi ?
Baissant les yeux sur ses deux petites mains qui se triturait entre elles, Taehyung murmura presque, peiné et gêné :
— Je ne suis pas f-fort...J'ai beau suivre toutes mes leçons et mes exercices physiques, mais rien à faire...Mon corps reste fin et frêle. Mon...Mon père dit même que j'ai plus le corps d'une femme que d'un homme...Que même ma sœur aînée parait plus vaillante que mo-moi...
Le médecin fut touché par ses révélations. Elle trouvait ce jeune homme attendrissant.
— Voyons cela, Taehyung. Je te prie de retirer ton durumagi et ta chemise.
Pris de panique, Taehyung eut l'impression de se gélifier sur place. Comme lorsqu'il avait été en présence de Yoo-jin à la maison Kisaeng, il eut de nouveau cet horrible sentiment de vide, comme si on lui demandait la pire chose qui soit.
Mais qu'est-ce qu'ils leur arrivaient à tous ces derniers temps à tant vouloir le voir nu ?
— Me-mes vête-vevtêments ? J-je dois...
— Taehyung, je suis médecin. J'en vois tous les jours tu sais, sache même que j'ai déjà dû recoudre et soigner des plaies très peu plaisantes. L'anatomie n'a pas de secret pour moi, et c'est avec ce regard de médecin que je t'osculterais.
Peu confiant, Taehyung accepta tout de même de jouer le jeu. Après tout, cette femme ne faisait que son travail, et il sentait qu'elle n'était pas malveillante. Alors, il fit ce qu'elle lui avait demander et s'allongea sur une sorte de petit futon prévu à cet effet. Ainsi, le médecin pu s'approcher de lui et commença à observer son corps. Elle ne le trouvait pas si maigre que ça, Taehyung était plutôt bien dessiné. Il n'était pas aussi musclé que l'étaient ses fils, mais il avait une peau très belle, plus mate que toutes celles qu'on croisait dans les rues de la capitale. C'était assez particulier par ailleurs, puisqu'ici, la plupart de la haute société ne jurait que par les peau claires. Ceci dit, celle de Taehyung était très bien entretenue, sans nul doute qu'il devait prendre extrêmement soin de lui, tout comme de son visage qui ne présentait aucun défaut. Tout en appuyant doucement sur son ventre, puis en tâtant ses bras et son cou, le médecin se mit à penser qu'il devait être un jeune homme assez précieux.
Cela la fit sourire, puisqu'elle ne pouvait s'empêcher de le trouver attendrissant.
— Bien, je dois maintenant vérifier que tout fonctionne plutôt bien dans la partie basse de ton corps.
— La...l-la par-partie...basse ?! bégaya Taehyung en se relevant à peine.
— Ne t'inquiète pas, je ne te demanderais pas d'enlever tes vêtements. Je dois seulement m'assurer que tu n'as rien, je serais douce et je ferai vite. Tu me fais confiance ?
Acquiesçant doucement, Taehyung se rallongea et souffla un bon coup. Il était quelque peu anxieux à cette idée, mais il se sentait tout de même plus en sécurité entre les mains d'une femme aussi bienveillante qu'elle. Ceci dit, il ferma les yeux et les cacha même de ses deux mains lorsque le médecin approcha ses mains de ses jambes toujours habillées, de ses cuisses se rapprochant doucement de son intimité.
Alors, le jeune homme essaya de penser à des choses plus sympathiques, à des moments qui lui feraient oublier ce moment de gêne et la première chose qui lui vint à l'esprit fut la tendre voix de Jungkook lors de leur moment privilégié à Gatak.
— Dis-moi Taehyung, est-ce que lors de tes rapports tu aurais déjà ressenti des douleurs ? Ou bien peut-être quelque chose qui puisse déranger ton intimité ? Lors de ces rapports, prends tu tes précautions ?
Taehyung venait à peine de se détendre quand il eut l'impression de bouillir. Le voilà qu'il était devenu rouge écarlate, ne sachant plus quoi dire ou quoi faire, et puis, il n'y connaissait rien lui, à tout ça.
— Tu sais, bien que le plaisir de la chair soit quelque chose de commun, il est tout de même important pour un jeune homme de ton rang d'être attentif à ce qu'il ressent.
De nouveau, la panique s'empara de son esprit, c'est à peine s'il osait encore respirer, tandis que de son côté, le médecin se mit à penser que peut-être, elle s'était trompé.
— Oh...Je vois, peut-être que je me trompe Taehyung et que ce n'est pas cette partie de toi que je devrais contrôler ? Sache que lorsque les personnes de même sexe s'accorde sur ce point, les précautions sont plus coriaces.
Maintenant, Taehyung était presque contrôlé par l'angoisse, la gêne et la panique incessante, il avait l'impression de pouvoir pleurer à chaque instant. Il ne voulait pas parler de tout cela, il n'en parlait presque à personne d'ailleurs. Puisque pour lui ces choses étaient bien trop concrètes. Pour lui, les cœur des relations résidaient surtout dans ce qu'on pouvait éprouver pour l'autre, toutes ces conversations qui avaient su apaiser son esprit paraissaient maintenant bien loin. Il se leva tout à coup, les yeux larmoyants, surprenant quelque peu le médecin qui s'était retiré.
— Excuse-moi Taehyung, je ne voulais pas t'offenser. Je ne suis pas là pour te juger, ces relations sont les tiennes et cela restera entre nous.
Le jeune homme ne lui répondit pas, dos à elle, il se rongeait maintenant les ongles et tentait tant bien que mal de se reprendre. Comprenant que la situation était pesante pour son patient, le médecin se dit qu'il était plus important maintenant de le rassurer sur ces points. Quelque part, elle sentait qu'elle ne s'était pas trompé, et que quelque chose au fond du coeur de ce jeune le tiraillait.
— Tu sais, Taehyung...Notre société paraît bien avancée mais je crois parfois qu'elle se fait de fausses idées. Savais tu qu'il y a longtemps, dans la civilisation de ce qu'on appelait la Grèce Antique, le fait que deux hommes couchent entre eux faisait partie de leur éducation sexuelle. De nombreux poèmes traitent d'ailleurs de ces relations, qui parfois pouvaient durer bien plus longtemps bien que par la suite, leur relation n'était plus considérée comme légitime...
— J-je ne com-comprends pas...S'il...S'il vous plait, pour-pourquoi devons-nous parler de...de tout ça..., prononça Taehyung à voix basse, faisant les gros yeux.
— Ce que j'essaye de te dire Taehyung, c'est que cette visite consiste seulement à m'assurer que tu sois en bonne santé. Si je me permet de te dire toutes ces choses, c'est aussi pour te rassurer, dit-elle en s'éloignant un peu afin de laisser un espace à Taehyung. Tu es une personne à part entière et tu n'as pas à te sentir plus faible qu'un autre. Tu te portes très bien, et ton corps t'appartient. Tu n'as pas à te sentir différent, puisqu'il n'y pas de loi en ce qui concerne la personne que nous sommes. Nous avons tous et toutes des devoirs, et je suis certaine que tu rempliras les tiens à merveille. Si je te parle de toutes ces choses, c'est également parce qu'il en mon devoir en tant que médecin de t'en instruire. Mais je n'en parlerais pas plus, si cela te dérange, d'accord ?
— Vous...commença faiblement Taehyung. Vous...vous dites que...que l'amour entre personnes du même sexe peut exister, c'est ça ?
Il était toujours dos à elle, mais le médecin qui avait maintenant plus l'impression de jouer un rôle plus important se mit à sourire tendrement.
— Ce n'est pas moi qui le dis, mais l'Histoire.
— Et...et que dit...qu-que dit l'Histoire à propos de l'Amour ? reprit le jeune homme.
— Je n'en sais rien, admit la femme. Je suis médecin, pas professeur, dit-elle en riant de bon cœur. Mais je crois que chacun de nous en à une définition propre, et qu'on ne peut le contrôler. Où résiderait le plaisir et le bonheur de l'Amour s'il était contraint ?
Touché par ces mots, Taehyung se retourna enfin, oubliant même qu'il se tenait toujours debout, là, le torse dévoilé.
— Vous...vous avez des enfants, Seonsaengnim ?
— Oui, acquiesça-t-elle. Trois fils.
— Oh...
— Ils sont tous différents les uns des autres, mon enfant. C'est d'ailleurs grâce à eux que ma vision des choses qui nous entoure évolue chaque jour qui passe. Le dernier devrait avoir à peu près ton âge, je pense que vous devez même vous connaître. Lui aussi est passé par ces visites médicales, tu sais. C'est important à vos âges...
— Je comprends...
— Je sais que ce n'est jamais très facile, mais cela fait aussi partie de vos devoirs. Celui d'être en bonne santé et de prendre soin de votre âme, tout comme de votre corps, dit-elle en lui faisant signe de se rasseoir.
Presque timide, Taehyung suivit ses demandes et fut même touchée lorsqu'elle lui tendit son durumagi pour se couvrir. Ensuite, elle prépara une tisane aux plantes, conçue pour apaiser les cœurs avait elle dit, et c'est autour de cette douce boisson aux bienfaits médicinaux qu'ils se mirent à discuter paisiblement.
Taehyung ne pouvait se douter de la réelle raison de sa visite au palais, ni auprès de cette femme chaleureuse, et bien qu'il avait vécu un moment particulièrement étrange et gênant, il appréciait maintenant leur discussion qui était aussi calme que l'eau qui s'écoule dans un ruisseau.
Elle l'avait rassuré, lui avait dit qu'il avait une forme incroyable. Aussi, elle avait tenu à insister sur le fait qu'il n'avait pas à se sentir aussi faible que son père lui laissait croire. Il n'était peut-être pas fait pour se battre, mais il serait l'espoir demain, c'est ce que la femme lui avait dit. Il la trouvait très cultivée, extrêmement ouverte sur tous les sujets, encore plus en ce qui concernait l'Amour et toutes ces choses plus intimes que quelque part, Taehyung redoutait plus qu'il les idéalisait.
Ainsi, il se mit à rire lorsque le médecin lui partagea quelques anecdotes concernant ses enfants et leur santé, surtout lorsqu'elle lui compta que son dernier enfant avait attrapé une petite fièvre une fois et qu'il lui avait fallu au moins trois semaines pour s'en remettre, alors qu'aujourd'hui, il paraissait grand, fort, presque indomptable.
Peu à peu, leur discussion devint plus philosophique, plus profonde, et ainsi, Taehyung se laissa emporter dans ses idéaux qu'il fut obligé de partager. Il avait eu envie de parler de tout ce qui l'animait à cette femme qui l'écoutait avec affection, et se jura même de revenir la voir au plus vite, même s'il devait mimer un quelconque mal être afin de la rencontrer.
Après lui avoir appris tout ce qu'il savait sur ses animaux totem qui n'étaient autre que les papillons, Taehyung fut enfin raccompagné à la sortie et retrouva son serviteur, avec lequel il prit le chemin de sa demeure.
Cette journée avait été particulière mais aussi étrangement enrichissante pour lui, et c'est avec l'idée que bientôt il retrouverait Jungkook qu'il rentra chez lui, espérant le voir bientôt.
De son côté, à la porte du palais, entourée de deux de ses dames, le médecin le regardait partir, un sourire aux lèvres. Elle lui avait aussi fait un petit signe de la main lorsque Taehyung lui en avait adressé un avec ce magnifique sourire qui en faisait tomber plus d'une. Puis, lorsqu'elle le vit assez loin, elle retourna à son officine afin de prendre ses affaires, avant d'aller visiter le Roi, puis elle n'aurait plus qu'à rentrer jusqu'à chez elle.
Ceci dit, tout en rangeant cette petite malle dans laquelle elle rangeait ses nombreuses plantes et instruments, elle ne pouvait s'empêcher de rire, étouffant parfois les sons par sa main.
Oui, elle riait, non pas parce qu'elle se moquait, mais plutôt parce qu'elle venait de comprendre. Elle venait de comprendre pourquoi son fils était si perturbé ces derniers temps, pourquoi il paraissait si préoccupé et pris dans ses pensées. Maintenant, elle était certaine que ce jeune Taehyung était la source des ces émois.
Mais, c'est avec le cœur léger et un sourire aux lèvres qu'elle rentra ensuite, se disant qu'il était peut-être temps d'ouvrir les yeux de son chenapan de fils, avant qu'il ne passe à côté de quelque chose qui pourrait bien le rendre réellement heureux et le faire grandir, pour la première fois de sa vie.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro