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𝒞𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝟷𝟽


Epiphany - Trent Reznor and Atticus Ross

I can reach you - Lee Ji Yong



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– Mon fils, as-tu entendu ton père ?

Le regard vide, et surtout, totalement absent et déconnecté de la conversation, Taehyung reprit ses esprits à la mention de son père, qui par ailleurs, le toisait avec un regard noir.

– Pardon, Eomeoni.

– Ce n'est pas à ta mère que tu dois des excuses. Veux-tu de nouveau jouer avec mes nerfs, Taehyung ?

– Non, Abeoji, répondit Taehyung en baissant les yeux.

Il savait que regarder son père serait perçu comme un affront, et à côté de lui, sa sœur déposa sa main sur la sienne sous la table, comme pour ne pas qu'il oublie qu'elle était là.

– Ton précepteur m'a fait part de ton évolution. Il pense que tu t'améliores, mais ce n'est pas ce que je souhaitais entendre, Taehyung. Tu dois exceller, tu dois faire mieux encore.

– Oui, Abeoji.

– N'oublie pas ton rang, et le sang qui coule dans tes veines, accentua son père de sa voix grave et autoritaire. Tu es voué à un grand destin, et je refuse que tu puisses trouver quelconque divertissement qui t'éloignerait de ce chemin.

– Oui, Aboeji.

– Tu retrouveras donc ton précepteur deux fois plus, il est temps que tu grandisses, pour faire face à tes futures responsabilités.

Taehyung savait à quel point son père était sévère, parfois cruel et sans coeur. A sa manière, il voulait voir sa famille briller, et quand bien même on pouvait penser que cela était pour pouvoir s'en vanter auprès du cercle rapproché du roi, il n'était qu'un père voulant la réussite de ses enfants, mais à quel prix... Taehyung connaissait ses exigences, en avait toujours fait les frais au dépens de ses propres plaisirs et de sa vie de jeune homme. Il n'avait jamais contredit son père, ni même pensé à agir contre sa volonté. Pour autant, il avait son caractère et s'il y a encore quelques temps, il aurait fini par perdre tout espoir de pouvoir Vivre avec un grand "v", il l'écoutait ce soir comme si son autorité ne pesait pas au-dessus de sa tête, telle une épée de Damoclès.

Il était loin, très loin de tout ça, et planait au-dessus des nuages, si haut, que personne, ni même son père, qu'il craignait plus que tout, ne pouvait l'atteindre. Le reste du repas se déroula dans le silence le plus complet, et même Saehee fut étonnée de voir son petit frère les quitter sans même verser une larme. Taehyung entendit son père, presque fier d'avouer à sa mère qu'il pensait que son fils trouvait enfin le chemin pour devenir un homme, mais lui seul connaissait la raison de ce comportement.

Il alla retrouver sa chambre, mais peinant à trouver le sommeil, attrapa de quoi se couvrir et alla se promener dans les jardins. A cette heure, il savait qu'il pouvait être seul, et profiter de ses pensées sans que personne ne vienne l'en empêcher. Yoongi, qui n'était jamais très loin, vit son jeune maître déambuler en dehors de ses quartiers, alors il ne tarda pas à le rejoindre, restant tout de même assez en retrait pour ne pas envahir son intimité.

Taehyung devina sa présence, et comme il adorait plus que tout sa compagnie, lui fit signe d'approcher, toujours avec ce grand sourire béat collé sur le visage. Le serviteur suivit ses ordres, et l'observa du coin de l'œil.

Depuis que Taehyung échangeait avec Jungkook en secret, il n'avait jamais été aussi heureux, mais depuis sa dernière visite chez les Jeon, Yoongi le trouvait changé. Il émanait de lui quelque chose de plus mature, de plus défini, quelque chose qui le différenciait du jeune homme qu'il avait toujours été jusqu'alors.

– Vous semblez heureux, partagea Yoongi.

Assis dans l'herbe, les bras entourant ses genoux, Taehyung se berçait, semblant apprécier chaque seconde, chaque minute que lui apportait la douceur de la nuit.

– Je le suis.

– Loin de moi l'envie de vous tirer les vers du nez, mais cela n'aurait-il pas de lien avec...

– Jungkook, bien sûr que c'est lui.

Yoongi avait tellement entendu son jeune maître compter ces histoires d'amour à l'eau de rose qu'il pouvait aisément en conclure que Taehyung était aujourd'hui comme ces personnages qu'il admirait tant : plongé dans un amour transit, sans limite et assez puissant pour lui faire croire que le monde était à ses pieds. Cela pouvait paraître niais, mais jamais encore le serviteur n'avait vu cette étincelante sérénité qui habillait le visage de son jeune maître. Quand il l'avait connu, il était si jeune... Il se souviendrait toujours de sa petite bouille adorable et de cette petite voix le suppliant de le porter sur son dos. Taehyung avait bien grandi depuis, et parfois, lorsqu'il le regardait comme à cet instant, Yoongi se disait que le temps était une notion bien étrange, et surtout, fugace. A vrai dire, il l'appréciait, l'aimait non pas comme un serviteur envers son maître, mais plutôt comme un frère. Après tout, ils étaient nés sous la même étoile, mais le destin en avait décidé autrement pour Yoongi, qui n'avait jamais regretté de devoir le servir.

Alors, ce soir-là, il fut extrêmement touché de voir son plus cher ami accéder à ce qu'il avait toujours cherché en vain, et pourtant... Il y avait cette petite voix dans le creux le plus profond de sa tête qui lui ordonnait de le mettre en garde. Même s'il devenait un homme à chaque jour qui passait, Taehyung n'en restait pas moins l'être le plus adorable et vulnérable sur Terre, de par sa trop grande bonté et son cœur pur.

Taehyung était un utopiste, un être qui était certainement né à la mauvaise époque, car s'il y avait bien une chose que Yoongi savait, c'était que le monde n'offrait jamais de véritable cadeau, ou bien, lorsqu'il le faisait, il attendait toujours un sacrifice en retour. Faire partie d'une aussi grande famille, de cette caste privilégiée apportait beaucoup d'avantages, mais c'était aussi une chance empoisonnée, qui ne pouvait laisser place à la liberté. La notion même de choix n'était que mensonge, et Taehyung, lui, était de ceux qui rêvait à un futur meilleur. Autrement, un véritable outsider.

Là, sous le ciel étoilé, dans son vêtement doré, Taehyung avait l'air d'un véritable prince venu d'ailleurs. Sa peau brillait sous les faibles rayons de lune, et lui fixait le ciel avec espoir.

– Je m'en doutais, souffla Yoongi, de façon plus solennelle.

Taehyung ne lui répondit pas de suite, et respira l'air frais, appréciant le son des feuillages s'entrechoquer entre eux. Il y avait cet étang non loin, et s'il se concentrait un peu, il pouvait entendre les grenouilles chanter leurs amours, faisant écho à cette exquise mélodie qui fait vibrer son cœur.

– Puis-je te demander une chose, Yoongi ?

– Hm ?

– Pourrais-je parler de vive voix à mon ami, ce soir ? Non pas au serviteur, c'est à Yoongi que j'aimerais me confier.

Bien qu'il était difficile pour lui d'accepter ce genre de demande, Yoongi laissa de côté les manières et se repositionna aux côtés non pas de son maître, mais de son ami, indiquant qu'il était près à lui offrir cela, pour quelques minutes. Taehyung ne lui dit pas, mais il se contenta de sourire, satisfait.

– Il y a peu, j'ai parlé de l'Amour, avec Seokjin sunbaenim, reprit-il. Je ne l'ai toujours connu qu'à travers la poésie ou les histoires de ces conteuses. Sais-tu pourquoi je les ai toujours aimées ?

– Pas vraiment. Voulez-vous le partager ?

– Et bien... À bien y réfléchir, j'ai toujours pensé que l'Amour était avant tout la plus belle chose qu'on puisse trouver au monde. C'est un mot bien chaleureux, l'Amour, ne trouves-tu pas ?

N'en pensant pas moins, Yoongi haussa les épaules.

– Au fur et à mesure de mes découvertes, j'ai compris qu'à partir de l'instant où une personne décide de se lancer une histoire d'amour, elle se prépare à vivre le plus grand défi de sa vie. Parce que l'Amour est une aventure, où il ne faut pas craindre les blessures, les fragilités qu'entraîne la passion et la possibilité de la perte de l'autre, qui peut subvenir à chaque instant. Les poèmes ne mentent pas, je pense réellement que lorsqu'on aime, on oublie tout. La notion du temps, les troubles dans nos âmes... Je crois sincèrement que l'Amour offre à qui veut bien l'entendre la chance de pouvoir se connaître au plus profond de soi, de colorer le silence de nos rêves, de pouvoir les partager avec un sourire. Tout devient soudainement plus facile, lorsque l'Amour vient. On a l'impression... On a l'impression de toucher la lumière des étoiles, souffla t-il en fixant les lumières scintillantes du ciel étoilé.

– Est-ce donc cela que vous ressentez ?

Entourant son propre corps comme dans un cocon, Taehyung continua de se bercer, inspirant le calme environnant.

– Ce que je ressens ne pourrait même pas être décrit, mon ami. C'est à la fois nouveau, et mon cœur jurerait de l'avoir toujours su, toujours connu. Comme s'il avait retrouvé la part qui lui était manquante jusqu'à présent.

En l'écoutant, Yoongi ne put se raviser à faire diversion des images du délicieux visage de la princesse Ha-rin. Néanmoins, quand bien même il pensait pouvoir le comprendre, tout comme lui, Taehyung devait se faire une raison, et ne pas se laisser emporter par la passion. Elle était précieuse, mais aussi destructrice.

Autrement dit, bien qu'il aurait aimé pouvoir pousser Taehyung dans cette voie qui ne pouvait que le mener au bonheur auquel il avait toujours aspiré, il se devait d'être avant tout un ami franc et sincère, et cela aurait été lui mentir que de dire que tout était parfait dans cette vie qu'il s'imaginait. Dans ce monde, aussi magique que perfide, Taehyung se devait de suivre le chemin qu'on lui avait tracé. De plus, loin de lui l'idée de vouloir dénigrer l'image des bras de celui dans lequel il l'avait poussé sans réfléchir, Jungkook restait un personnage bien différent de l'image que Taehyung se faisait de lui.

Taehyung n'était attentif qu'à ce qu'il voulait bien voir ou entendre, il voyait toujours le meilleur chez les autres, et ce, même lorsque les âmes étaient aussi pourries qu'une récolte de pleine sécheresse. Yoongi faisait partie de ceux qui entendaient sans cesse les bruits de couloir, et même s'il avait eu plusieurs occasions de le voir sous un autre jour, Jungkook restait à ses yeux un jeune homme qui défiait les valeurs et les mœurs de leur époque et de leur société.

– Je vois que tu penses à quelque chose, notifia alors le brun. Tu peux tout me dire ici, Yoongi.

– Je ne voudrais pas gâcher ce moment qui vous est cher.

– Il ne le sera que d'autant plus si tu veux bien me partager la sincérité de ton cœur, crois-moi. Nous sommes amis, non ?

Ils l'étaient, ils l'avaient toujours été. Depuis le premier jour. Pour Yoongi, être un ami était aussi une tâche importante bien que périlleuse, car il fallait parfois prendre sur soi pour faire la part de choses parfois inavouables, inacceptables. Il savait qu'il prendrait le risque de le blesser, ou bien de troubler son état d'esprit si serein, mais il le devait. Car il était son ami.

– Permettez moi alors d'être le plus sincère avec vous, dit-il. Je ne serais qu'un piètre ami si je ne me chargeais pas de cette tâche difficile, mais vous savez que vous êtes important à mes yeux, confia t-il dans un murmure. Je voudrais... Je voudrais tout de même vous faire part de mes inquiétudes, au sujet du maître Jeon. Je sais qu'il est un... Ami, que vous portez grandement dans votre cœur. Taehyung, votre cœur est d'une pureté si éclatante que même les dieux en seraient envieux. Il ne mérite pas d'être piétiné et meurtri, et bien que cette aventure grandiose vous paraît alléchante... Elle est aussi semés d'embûches, et je ne crois pas que le bout du chemin en vaille la peine.

Soudain, l'expression de Taehyung changea. Lui qui paraissait encore apaisé, exprima doute et peine.

– Qu'entends-tu par là ?

– Ce que j'essaye de vous dire, c'est que beaucoup de gens parlent. Bien que ce ne soit que des bruits de couloirs, ceux-ci se répètent sans cesse et font l'unanimité au sein de la haute société. Même les serviteurs de toutes bonnes familles le font courir sur leurs lèvres avides de ragots. Je ne souhaite pas faire barrière à votre lien qui vous unit au maître Jeon, mais Taehyung... Il reste comme un rêve inatteignable.

– Tu te trompes, rétorqua ce dernier, sur un ton différent.

– J'aimerais tout autant que vous faire fausse route, mais... S'il vous plaît, prenez en considération mes propos. Je ne veux que votre bien.

– Alors dans ce cas, pourquoi cherches-tu à tromper ma joie ?

– Je ne veux pas... ! Non, je ne...

Vexé, Taehyung tourna la tête, et se mordit les lèvres.

– Taehyung, s'il vous plaît...

– Toute ma vie, on m'a demandé de suivre un chemin que je n'ai jamais voulu entreprendre. J'ai toujours fait ce qu'on m'a demandé, je pensais que toutes ces belles choses qui me faisaient rêver n'étaient que mirages, et voilà qu'enfin je peux vivre et découvrir le sens même de ce mot, et pourtant, même toi, mon plus précieux ami, tu cherches à m'en détourner.

– Ce n'est pas ce que je voulais vous faire entendre, pardonnez-moi de ma maladresse.

Les mains jointes, Yoongi hésita à déposer l'une d'elle sur l'épaule de son jeune maître pour le rassurer, mais il se ravisa, pensant que cela serait inconvenu.

– Ce que j'essaye éperdument de vous dire, c'est que votre cœur mérite d'être protégé. Nous pouvons avoir et acquérir tant de choses dans une vie, mais un cœur, nous n'en avons qu'un. Je ne souhaite pas voir le vôtre briser, car d'expérience, je sais que cela inflige une peine et une charge bien trop lourde, pour vous qui devez déjà tant porter sur vos épaules.

– Penses-tu réellement que Jungkook pourrait me faire du mal ? demanda timidement Taehyung, bien que sa voix ne traduisît pas la même émotion.

– Il serait bien déplacé de ma part de juger une personne dont je ne connais que le nom. Ceci dit, je pense que le maître Jeon, même s'il est un homme, est une personne bien différente de vous. Vous partagez certainement le même titre, mais vos destins sont voués à être séparés, et...

– Nous ne nous quitterons jamais, trancha alors Taehyung.

– Je vous en prie, Monseigneur.

– Ah ! Voilà que tu recommences à reprendre ton rôle, je suppose que cette tâche t'importe plus que celle d'être mon ami.

Voilà maintenant que Taehyung était vexé. Yoongi pouvait aisément le saisir à travers sa façon de parler et son comportement. Il s'était relevé désormais, et sans demander son reste, ses pieds glissaient sur la verdure en direction de sa chambre. Les lèvres pincées, Yoongi l'imita, et trottina afin d'arriver à sa hauteur.

– Je ne voulais pas vous blesser.

– Je ne le suis pas.

– Je vous connais depuis bien trop longtemps pour croire à ce mensonge, vous savez.

Taehyung lui fit face, et il essaya alors de gonfler le torse pour lui faire croire le contraire, mais la faible lumière de la lune pouvait facilement réduire ses efforts à néant. Il semblait vouloir paraître sûr de lui, mais son visage était bien trop délicat pour exprimer autre chose que son désarroi.

– Je...

Sa voix se fana dans la légère brise qui vint caresser ses cheveux lâchés au vent, et, les poings serrés, il se mordit les lèvres et apaisa ses joues rouges par le toucher glacé de ses mains. Après avoir repris contenance, il fixa Yoongi avec une détermination peu certaine, mais il semblait y avoir assez de volonté dans son regard pour pouvoir être convaincant.

– Je n'ai encore jamais vécu pour moi. Pour la première fois de ma vie... Je découvre non seulement le monde, mais aussi la vie, ma propre personne, mon corps et ce qui se cache derrière mon coeur. Je sais que quoi qu'il advienne, je n'aurais d'autre choix que de suivre la volonté de ma famille, et c'est pour cela que je souhaite par dessus pouvoir profiter de ce qui m'est offert. Le temps sera certainement le pire de mes ennemis, mais en sa compagnie, je partage l'éternité. Je veux... Je veux pouvoir y croire, comme le papillon découvrant qu'il peut voler. Et si cela doit être éphémère, alors j'en tirerais le meilleur parti pour que toute ma vie, cela soit mon plus beau souvenir.

S'il y avait bien une chose pour laquelle Taehyung était doué, c'était de pouvoir convaincre quiconque se trouvait face à lui. Même sans le vouloir, il était un orateur né, un futur sage qui saurait guider un peuple tout entier si cela lui était demandé. Devant tant de détermination, et derrière ce vœu tiraillé par ses propres devoirs, Yoongi entendit et comprit son souhait, tout comme il se ravisa à bien vouloir le raisonner. Quoi qu'il fasse, Taehyung devait apprendre en faisant ses propres erreurs, et si Jeon Jungkook devait en être une, il espérait qu'il soit la meilleure.

– Bien... Dans ce cas, je vous demanderais seulement de bien vouloir considérer mes propos. Ils vous appartiennent désormais et je sais que vous saurez en faire bon usage. Je ne souhaite que votre bonheur, et je veux aussi que vous sachiez une chose...

Essuyant la légère larme qui coulait sur la joue de son jeune maître comme un écho à sa propre délivrance, il tapota ses joues rebondies comme il l'aurait fait avec un enfant, et recula de deux pas.

– S'il y a bien une personne dont vous ne pourrez jamais vous débarrasser, c'est bien moi. J'ai promis sur ma vie que je vous serais à jamais loyal et fidèle. N'oubliez pas que vous pourrez toujours compter sur moi, il en va de mes responsabilités, autant celle de mon devoir, que celles provenant même de la définition même d'un ami.

Taehyung renifla, se sentant un peu honteux de s'être mis dans cet état pour si peu, mais il se sentit ainsi plus léger. Entendre que Yoongi lui serait à jamais le plus précieux de ses proches lui fit le plus grand bien, et en silence, il marcha jusqu'à sa chambre, sous son escorte. Avant de disparaître derrière ses murs, il se retourna et lorsque le regard de Yoongi lui échappa quand ce dernier s'abaissa, il lui chuchota, la voix tremblante mais sincère :

– Merci, mon ami.


*


Quelques jours plus tard, alors qu'il sortait d'un cours passionnant aux côtés de Seokjin, Taehyung croisa Hoseok au détour d'un couloir, en pleine conversation animée avec Jimin.

Il ne pouvait pas voir Jungkook aujourd'hui car ce dernier passait la journée avec son frère aîné pour s'entraîner à l'épée, et bientôt, il passerait les premiers tests qui lui permettront d'accéder à la célèbre formation donnée aux futurs soldats de l'armée royale. Dans sa dernière missive, Taehyung l'avait encouragé de tout son cœur, lui promettant de lui rendre visite dès lors qu'il le pourrait, lui-même devant se concentrer dans ses enseignements afin de tromper plus aisément la vigilance de son père.

— Ah, le voilà ! Taehyung-ah, approche !

Souriant à son aîné, Taehyung accéléra la marche et les salua tous les deux.

– Jimin te cherchais, je suis ravie de te voir mais je vais devoir te laisser. Je dois encore me présenter à quelques cours avant d'être libéré. On pourrait peut-être se retrouver plus tard ?

– Avec plaisir, Hyung.

Sans plus attendre, Hoseok fila après lui avoir donné un accolade. Taehyung se retrouva seul devant Jimin, qui aujourd'hui, était totalement resplendissant. Le tissu de son hanbok était neuf, étincelant et ses cheveux étaient tressés à l'avant, dégageant son front de ses mèches rebelles.

– Et bien, aurais-tu perdu ta langue ?

– Oh ? No-non, Hyung. Je... A vrai dire, j'admirais ton vêtement. Tu es vraiment gracieux.

Le sourire qui étira les lèvres de Jimin en dit long, et c'est la tête haute qu'il passa la main sous le bras de Taehyung, l'attirant contre son flanc.

– Que dis-tu d'une promenade ? Cela fait une éternité que nous n'avons pas passé de temps ensemble. Aurais-tu un moment à accorder à ton ami, hm ?

Taehyung n'eut pas le temps de répondre que Jimin prit ça pour un oui, et ensemble, ils quittèrent le bâtiment des enseignements, se dirigeant vers Gatak. Taehyung le trouvait bien plus joyeux que la dernière fois qu'il l'avait vu. Certainement avait-il passé une mauvaise journée, il pouvait le comprendre, lui aussi parfois était bougon, après tout.

– Alors, mon petit protégé, qu'as-tu de nouveau à me partager ?

– Oh, hm... Et bien, j-je...

Pleins de choses, en réalité. Sa vie tournait autour d'une seule et même personne désormais, et quelque part, Jimin y avait contribué. Il savait que Taehyung en pinçait pour son ami, et il ne l'avait jamais jugé pour ça. Il l'avait même poussé à trouver le courage qui lui manquait pour attirer l'attention du beau Jungkook. Néanmoins, Taehyung se demandait s'il devait lui faire part de tous les détails. Et par tous les détails, il entendait bien sur ce moment délicieux et intime qu'ils avaient partagé ensemble... Oh non, il ne pouvait pas parler de ça, encore moins en public. Il en était incapable, et bientôt, ses joues devinrent si rouge qu'il se maudit en pensant que s'il ne trouvait pas quelque chose à dire, Jimin percerait tout ses secrets à jour.

– Me cacherais-tu des choses... ? demanda un Jimin curieux, les sourcils froncés par la malice.

– Non ! Enfin, je veux dire... Non, je ne pourrais pas. Je... Je n'ai pas l'habitude, c'est tout.

– De quelle habitude parles-tu ? Nous sommes seuls, et si tu parles tout bas, personne d'autre que moi ne pourra l'entendre, souffla Jimin en s'approchant de son oreille.

Comme si une abeille l'avait piqué, Taehyung eut un mouvement de recul qui fit sourire Jimin, bien qu'il ne pouvait pas se douter que ce dernier se délectait de ses réactions. Le blond n'en manquait jamais une pour pouvoir se moquer de lui, mais Taehyung, lui, agissait de la façon la plus honnête et vraie qui soit, contrairement à lui qui excellait dans l'art de jouer derrière un masque.

– Alors, rien ?

– Je... Je passe beaucoup de temps à étudier, alors je n'aurais rien d-de... D'amusant à te raconter. Peut-être que toi, si ?

– Oh ! Mon petit, ma vie est certainement la plus trépidante de toutes, je l'admets. Vivre avec trois sœurs demande beaucoup de rigueur et de patience, mais crois moi, c'est comme être aux premières loges d'un théâtre vivant à chaque jour qui passe. Je ne m'en lasse pas.

– Ou-oui... J'imagine.

– D'ailleurs, comment va Saehee ? Elle et Namjoon semblent avoir totalement disparu de la population. Dis-moi, ces deux-là feraient-ils des choses dans le dos de vos parents...?

Le sourire de Jimin s'étira encore plus lorsqu'il vit les grands yeux de Taehyung réagir comme dans un état de choc. C'était si facile de le rendre mal à l'aise, et puis, il était si innocent qu'imaginer sa propre sœur s'adonner à de telles pratiques devait le gêner au plus haut point. Pathétique, pensa Jimin.

– Saehee Noona, elle... Jamais elle n'oserait faire de telles choses, encore moins mentir, Hyung. Elle... Elle doit être très occupée, moi aussi, je ne la vois plus beaucoup ces derniers temps.

– Oui, il me semble l'avoir compris, avoua Jimin, sifflant comme un serpent. Laisse-moi deviner, hm...

Il fit mine de réfléchir, le petit doigt posé sur le bout de ses lèvres.

– C'est à cause de Jungkook, n'est-ce pas ?

Aussitôt, le corps tout entier de Taehyung se mit à trembler, non pas de malaise, mais plutôt d'envie. Il pria du plus profond de son âme que cela passe inaperçu, bien qu'il ne pouvait cacher les traits de son visage, ni même ce rouge qui, bon sang, ne semblait jamais le quitter.

– Ne me dis rien ! le surprit Jimin. Je suis certain que tes charmes ont enfin réussi à le convaincre, pas vrai ? Après tout, qui ne tomberait pas pour un charme aussi envoûtant que le tiens, petit veinard.

– Hyung, voyons... No-nous ne sommes pas seuls.

– Je t'en prie Taehyung, tous ces gens se fichent bien de notre vie. Ce ne sont que des serviteurs en course, je remarquai justement que le tiens n'est pas présent ?

– Il... Yoongi ne devrait plus tarder, je lui ai demandé de me rejoindre à Gatak après mes enseignements.

– Parfait, voilà que nous y sommes !

Les deux jeunes hommes pénétrèrent dans l'enceinte de l'auberge, là d'où émanait une agréable musique et où tous les jeunes de bon parti se retrouvaient. Il y avait essentiellement des jeunes femmes à cette heure-ci, les jeunes hommes devant suivre leurs cours ou bien leurs entraînements. Jimin tira Taehyung jusqu'à une table en plein centre de l'auberge, saluant quelque personne à droite à gauche, puis il arrêta la première serveuse.

– Vous, apportez nous de quoi nous rafraîchir.

La jeune femme répondit avec une révérence, et s'en alla répondre à sa requête. Taehyung ne manqua pas de remarquer les traits fatigués de son visage, et se sentit peiné.

– Hyung... Tu devrais être plus doux, elle travaille beaucoup.

– C'est bien pour cela que nous la payons, soit, coupa court le plus vieux. Où en étions-nous... Ah ! Notre cher et admirable Jungkook, pas vrai ? Je n'ai pas eu l'occasion de profiter de sa présence dernièrement, s'il n'était pas avec moi, alors peut-être était-il avec toi.

Taehyung n'osa pas le regarder droit dans le yeux, et fit de son mieux pour ne pas paraître idiot.

– Ou-oui...

– Alors, raconte moi tout !

– Nous... Nous nous sommes promenés, récemment.

– C'est tout ? s'étonna Jimin, prenant ses aises sur sa chaise.

– Et bi-bien, no-nous...

– Loin de moi l'idée de vouloir te vexer, mais si tu n'articules pas un peu mieux, je serais bien obligé de te tirer les vers du nez.

Jimin lui offrit un faux sourire, bien qu'au fond, il faisait de son mieux pour ne pas laisser paraître son agacement. C'était vraiment pénible à la fin de voir Taehyung perdre ses mots dès qu'il lui posait une question. A vrai dire, il commençait à croire que ce jeune homme n'avait que sa beauté pour plaire.

– Le temps... Le temps n'était pas des plus favorable, alors nous avons dû faire escale pour un temps avant de pouvoir rentrer.

– Mais quel cachotier ! s'amusa Jimin, passant la langue sur ses lèvres pulpeuses. Que s'est-il passé ?

– Ri-rien, je le jure...

Taehyung avait toujours été un piètre menteur.

– Rien, vraiment ?

– Mes seigneurs, voici votre commande.

Sauvé par le gong, Taehyung remercia la serveuse et lui donna une pièce de plus, la laissant repartir avec une lueur bien plus joyeuse dans les yeux. Jimin, lui, s'était contenté de la payer comme convenu, ne lui prêtant aucune attention particulière.

– Nous avons aussi parlé de nos hobbies...

– J'imagine que ce cher Jungkook a dû te parler pendant des heures de cet amour étrange qu'il porte à l'art. Il adore se tâcher lorsqu'il peint, c'est à croire qu'il oublie où sont ses manières.

– A vrai dire, chuchota presque Taehyung, je pense que c'est la meilleure façon de... La meilleure façon de pouvoir faire parler sa créativité.

– Taehyung, reprit Jimin en soufflant, ce ne sont pas des activités destinées à des nobles tel que nous. La poésie, la lecture et l'écriture sont des arts nobles et réfléchis, ça, ce n'est que...

– Mais... Jungkook, il est votre ami, il... Vous devriez reconnaître qu'il est doué et qu'il sait au travers de cet art faire ressortir le meilleur de moi, enfin... De nous même, tenta timidement Taehyung.

Jimin le regarda quelques instants sans rien dire, comprenant que Jungkook avait sorti le grand jeu, celui-là même qui l'avait si souvent fait craquer. Il était doué, c'était une évidence, mais comment avait-il pu se servir de cet atout pour séduire ce garçon si insignifiant à ses yeux. Cette activité intime ne lui était-elle pas réservée ? La jalousie s'empara alors de sa personne, laissant renaître en lui toute la perfidie. Il avait devant lui l'être le plus ignorant et le plus innocent qui soit et il allait jouer de cette ignorance des choses de l'amour pour semer le doute en lui.

– Ah oui... finit-il par lâcher en le fixant avec ses yeux perçants.

– Ou-oui, je... Il... Vous...

– Tu trouves que cet art est noble ?

– Et bien... Il l'est, oui. Jungkook à le don de l'anoblir encore plus.

– Donc il t'a sorti son grand jeu, rien de plus ? sourit malicieusement Jimin.

– Que veux-tu dire ?

Jimin se cala au fond de son siège, ravi de l'intérêt qu'il venait de susciter chez Taehyung.

– Je pensais juste qu'il te traiterait de façon différente, c'est tout.

– De... De façon différente ?

Jimin le sentait, il venait de l'atteindre avec toute cette fragilité qui le caractérisait.

– Pour être honnête avec toi, Jungkook utilise cette technique de séduction avec ses conquêtes, celles d'un soir ou de quelques heures et...

– Mais, il m'a dit que... souffla un Taehyung fébrile, alors que Jimin lui coupa à nouveau la parole.

– Que t'a-t-il raconté ? Qu'il trouvait en l'art de la peinture l'essence même de l'amour, de la sensualité ?

– Je... Peut-être que...

– Quel séducteur incroyable et quel grand fabulateur.

Taehyung baissa les yeux et Jimin se sentit pousser des ailes. A lui de jouer, se dit-il au plus profond de lui.

– Taehyung...

– Hm... souffla ce dernier en tombant dans le regard de son ami.

– Il faut que je te le dise, sinon, je ne serai pas honnête avec toi. Vois-tu, la peinture n'est rien d'autre qu'un jeu de séduction pour Jungkook, tout comme moi, il considère cet art, enfin, que dis-je, cette activité légère comme étant sans intérêt.

– Mais il peint si bien, tenta de se justifier le plus jeune, tant ce que lui disait Jimin le blessait.

– Tu trouves ?

– Il... Il en parle si bien et...

– Très bien, alors je n'ai plus le choix. Il faut que je te dise ce qu'il pense de tout ça.

– Je...je...

Jimin leva la main pour l'intimer de se taire, ce qui fit immédiatement Taehyung.

– Comme moi, Jungkook est convaincu que la peinture, comparée à la lecture, la poésie ou l'écriture, revêt un voile d'insignifiance. Ses couleurs éphémères et ses formes figées ne peuvent rivaliser avec la profondeur des mots gravés dans les pages d'un livre ou la musicalité des vers poétiques. La peinture, art de l'éphémère et de la superficialité, semble se contenter de capturer des instants sans vie, figés dans un cadre, dénués de sens profond ou de réflexion intellectuelle.

– Vraiment...?

–Véritablement oui, et je dirai mieux encore.

Il laissa un petit silence s'installer afin de s'assurer que Taehyung avait bien toute son attention et reprit avec ce ton léger qui le caractérisait.

– Son aspect purement visuel, dépourvu de la richesse des mots ou des idées, en fait un art superficiel, destiné uniquement à flatter les sens sans élever l'âme. Oui, la peinture, avec ses couleurs criardes et ses formes abstraites, ne peut prétendre à la noblesse de la littérature ou de la poésie, qui nourrissent l'esprit et l'imagination de ceux qui s'y plongent. Quel noble digne de ce nom pourrait y céder... Enfin, s' il pourrait y céder vulgairement pour atteindre des âmes de basse condition et les mettre dans son lit, pour y faire son affaire, rien de plus.

– Ri-rien de plus ? répéta Taehyung, le cœur au bord des lèvres.

– Rien, rien du tout mon ami.

– Pourtant...

– Il n'y a rien à en dire de plus. Peut-être est-ce là la raison de sa popularité, sa facilité d'accès et sa capacité à séduire les sens sans demander d'effort intellectuel. C'est triste que Jungkook ait utilisé cela avec toi, tu mérites beaucoup mieux.

– Peu d'effort intellectuel... continua-t-il, les yeux pleins de larmes, bien qu'il avait essayé de se retenir.

Jimin se réjouissait intérieurement, il avait réussi à le déstabiliser. Ne restait maintenant plus qu'à porter le coup final.

– Oui, la peinture n'est rien d'autre que l'art des apparences et de la superficialité, un manque de substance et de profondeur certain que l'on ne propose pas à l'être aimé. C'est assez amusant quand on y pense, non ?

– Mais...

– Pardon, je pars dans mes élucubrations. Mais il est fort possible que Jungkook ai été sincère pour une fois, tu n'es pas comme tous ces garçons qu'il a l'habitude de fréquenter.

Taehyung, bien qu'encore perturbé par la tirade de Jimin, se sentit apaisé par la dernière réflexion de ce dernier. Il avait vécu un moment fort, comme jamais auparavant et rien n'avait été prémédité, non. Tout c'était fait de façon naturelle, ce qui avait rendu le moment magique. Il allait enfin se lâcher sur le sujet avec Jimin pour le rassurer et se rassurer lui-même quand la jeune serveuse revint vers eux, s'abaissant une nouvelle fois avant de s'adresser à Taehyung.

– Jeune maître, votre serviteur vous attend devant l'entrée de l'auberge. Il dit que votre mère vous demande.

Le doux visage de Taehyung attendrit alors la jeune femme, et il la remercia plus que de raison sous le regard inquisiteur de Jimin.

– Laisse nous, maintenant.

Elle partit aussitôt, et cette fois-ci, Taehyung, qui ne voulait pas faire attendre sa mère, but d'une traite son thé, quitte à se brûler la gorge pour ne pas déshonorer le travail de cette jeune femme, avant de se lever.

– Pardonne-moi d'écourter ce moment, peut-être que l'on pourrait se revoir bientôt.

– Evidemment, je pourrais passer te rendre visite, si tu le souhaites, proposa Jimin avant de tremper ses lèvres dans sa boisson chaude.

– Oh... Je ne crois pas que cela serait une bonne idée, en ce moment, il m'est difficile de pouvoir inviter quiconque. Mon père souhaite que je me concentre sur mes enseignements, alors...

Et voilà qu'il mentait, une fois encore. A vrai dire, Taehyung ne souhaitait partager son temps qu'avec Jungkook, et si Jimin lui rendait visite par surprise, cela pourrait gâcher un moment opportun pour... Bon sang, il rougissait encore. Et puis, personne ne pourrait s'en douter, pas vrai ? Au fond, il ne mentait qu'à moitié...

– Bien, comme tu voudras.

Ce n'est que lorsque Taehyung quitta l'établissement que Jimin souffla, laissant retomber ce poids bien trop lourd de ses épaules. Il n'était pas satisfait du tout, lui qui pensait pouvoir soutirer des informations à Taehyung de ce qu'il se passait derrière son dos, avait échoué. Néanmoins, il savait maintenant que son meilleur ami et ce fichu être parfait semblaient partager bien plus de temps qu'ils ne laissaient paraître, et cela suffit pour le rendre tout à fait aigri. Tant, que lorsque la musicienne sur scène loupa une note, il hurla au scandale avant de se retirer dans les couloirs privés de l'auberge.

Il devait trouver un moyen d'intervenir à nouveau entre Taehyung et Jungkook, et s'il lui était difficile d'amadouer son ami, alors il trouverait le moyen de se rapprocher de Taehyung. En fait, il avait déjà sa petite idée derrière la tête, et quoi de mieux que de faire ami-ami avec ce serviteur qui le suivait partout comme un chien pour attirer son attention. Au moins, il trouverait une occupation assez satisfaisante, le temps que l'orage éclate.


*


– On dirait que tu t'améliores, petit frère.

Des gouttes de sueur tombaient sur le front de Jungkook lorsqu'il déposa son arme factice au sol, afin d'aller s'abreuver après un entraînement acharné. Cela faisait maintenant plus de deux heures qu'ils battaient le bois, et Jungkang ne semblait pas en avoir fini avec lui.

Aussitôt que Jungkook retrouva quelques couleurs, il lui fit signe et d'un regard, lui désigna l'arme rangée dans un fourreau. Beaucoup auraient été hésitants face à une telle invitation, mais Jungkook, lui, n'attendait plus que ça. Cela faisait plusieurs mois maintenant que leurs entraînements s'étaient intensifiés, et il se sentait d'aplomb de battre le fer avec le meilleure soldat de l'armée royale.

– En position, jeune pousse de la maison Jeon, se moqua son aîné.

Jungkook lui fit la grimace, et vint reprendre sa place, présentant sa garde. Il fut le premier à se lancer au top de son frère, mais n'attaqua pas de front. Cela lui valut un compliment, mais il ne put se réjouir plus longtemps, Jungkang l'avait déjà désarmé avant qu'il ne puisse dire ouf.

– Serais-tu déjà fatigué ?

– Moi ? Jamais, souffla Jungkook avec certitude, passant le bras sur son front.

– Revoyons ta parade de défense, prêt ?

Jungkook acquiesça, et cette fois, Jungkang ne lui fit aucun cadeau. Peut-être était-ce parce qu'ils se battaient avec de vraies épées qu'il s'efforça d'éviter chaque coups, réussissant même à maintenir l'arme sauvage de son frère au-dessus de leurs têtes.

– Chercherais-tu à m'épater, petit frère ? sourit l'aîné.

– Est-ce le cas ? répondit le cadet.

– Sache que tant que je vivrais, tu ne trouveras jamais de meilleur adversaire.

Sur ces mots, Jungkang envoya balada l'arme de Jungkook qui se retrouva désarmé, le menton sous la pointe de l'épée étincelante de son aîné.

– J'admets devoir m'avouer vaincu, encore...

– Ne considère jamais une défaite comme un échec, Jungkook, répondit son frère en s'éloignant. Chaque pas, qu'il soit progressif ou régressif, est une victoire en soi. Je dois avouer que tu as merveilleusement bien travaillé ces derniers temps, pour une fois, tu n'avais pas la tête ailleurs.

– C'est parce que ta présence est la plus grande de mes motivations, Hyung.

– Je suis sérieux, Jungkook. Tes techniques de défenses sont meilleures, tes attaques aussi mais sur ce point, j'imagine que mes conseils ne sont plus suffisants.

– Serais-tu déjà dépassé ?

Cette légèreté entre les deux frères était agréable, d'ailleurs, cela était bien rare, car Jungkook était si admiratif envers son frère aîné qu'il n'avait jamais osé lui parler ainsi. Cependant, ils avaient passé tant de temps ensemble ces dernières semaines que leurs liens s'étaient renforcés, et maintenant, Jungkook regrettait de devoir le laisser partir.

– Viens voir par là, que je te prouve le contraire.

S'avouant vaincu, et surtout, à bout de souffle, Jungkook leva les mains en signe de paix et alla s'asseoir sur le perron. Le soleil commençait à se coucher, et le ciel était parsemé de lueurs orangées. C'était un pur spectacle, et il se demanda si Taehyung l'observait, de sa chambre en ce moment-même.

Jungkang finit par abandonner son épée, et prit place aux côtés de son jeune frère, donnant deux tapes dans son dos.

– Tu deviens un jeune homme aguerri, petit frère. Même ta posture semble différente.

– C'est parce que je ne veux plus jamais porter ces sceaux maintenu à cette barre de bois pendant des heures. Crois-moi, mes épaules s'en souviennent encore.

Ils rièrent, et alors qu'on ne l'attendait plus, l'avaient-ils même presque oublié, leur autre frère, Jungwan, passa par là. Il tenait un nouveau livre entre ses mains, et ne regardait même pas où il marchait. Pourtant, Jungkook était certain qu'il avait dû les remarquer en venant par ici.

Lorsqu'il arriva vers eux, Jungwan le regarda de haut, comme s'il n'était qu'un malpropre.

– C'est fou comme tu peux être si... sale, lorsque tu t'entraines. Mais j'imagine qu'être trempé de sueur n'est pas tâche difficile pour toi, jeune frère.

– Jungwan, c'est fou, j'ai cru que tu avais disparu, lui répondit Jungkook avec sarcasme. Entre nous, tu ne m'aurais même pas manqué.

– Je n'ai pas le temps d'écouter tes piètres moqueries Jungkook, le coupa son aîné. Je suis venu vous dire que père nous a demandé de l'accompagner, lui et maman, chez la famille Park, ce soir.

– Maman ne m'en a jamais fait part, laisse moi hésiter.

– Alors même ton cher Jimin aurait oublié de te le dire ? Ou bien est-ce parce que tu trouves de meilleures occupations ? Comme flairer les...

– Ca suffit, tous les deux, les scanda Jungkang. Si telle est la demande de père, alors nous devrions nous hâter.

Il décampa le premier, laissant à Jungkook le soin de ranger la cour intérieure. Ce dernier ignora la présence nuisante de son frère aîné qui le toisait comme s'il n'était qu'un pauvre à la recherche d'or.

– N'as-tu pas mieux à faire que de me regarder ? Comme par exemple, continuer de t'exercer dans l'art de lécher les bottes de ton prochain ?

– Si tu crois que tu peux m'atteindre avec ça, tu te trompes.

– Ah oui ? Alors si ce n'est pas assez, tu devrais essayer ça, dit Jungkook en attrapant un bout de terre qu'il envoya en plein sur le visage de Jungwan.

Ce dernier, qui ne le vit pas venir, en fit tomber son livre et fit une grimace horrible, crachant le peu de terre qu'il avait dû avaler. En colère, il maudit Jungkook de tous les noms et s'éclipsa non sans lui jurer qu'il trouverait le moyen de se venger. De son côté, le jeune homme retrouva ses quartiers et prit un bain bien mérité, se préparant comme convenu.

Cependant, c'est avec peu d'entrain qu'il foula les terres de la famille Park. Il était heureux de pouvoir passer un peu de temps avec Jimin, mais il regrettait que ce dernier ne puisse pas échanger sa place avec Taehyung. Il savait aussi que ces visites étaient régulières, non seulement parce que leurs pères étaient ami, mais aussi car d'une façon ou d'une autre, il finirait par prendre la main de fille aînée de la famille, et bien que jusqu'alors, il avait toujours trouvé le moyen d'en rire, les choses étaient quelque peu différentes désormais.

Jungkang ne s'était pas trompé, lui-même se sentait différent depuis quelque temps. Était-ce dû à ces lettres échangées dans le secret ? Ou bien, à ce que lui et Taehyung avaient partagé dernièrement ? Il lui tardait de le revoir, et en même temps, quand il y pensait, il pouvait sentir son coeur se serrer.

Il ne fallait pas croire que Jungkook était fou, il se souvenait bien que tout cela avait commencé dans le simple but de pouvoir faire de Taehyung un trophée de plus dans le grand harem que lui et Jimin avait construit, mais celui-là, il ne le voulait que pour lui. Il refusait de l'humilier, et ne trouvait même plus cela amusant.

Alors, quand il passa la porte de la famille Park, il enfila son plus beau masque. S'il voulait garder ce petit quelque chose qui se construisait entre lui et Taehyung, il devait être assez malin pour tromper Jimin, afin que celui-ci ne le considère pas comme un dégonflé. Parce qu'il allait le faire, il comptait bien aller jusqu'au bout avec Taehyung, et il profiterait de chaque instant, et serait le seul à y mettre un terme. Du moins, le seul à pouvoir en décider.

– Ah, vous voilà, chers amis !

C'est le père de Jimin en personne qui vint les accueillir, fier et heureux de pouvoir également inviter à sa table une personne aussi importante que Jungkang. Il l'avait vu grandir, et admirait son parcours. Mais il était bien plus proche de Jungwan, qui était nul autre que l'un de ses apprentis. Parfois, Jungkook se demandait comment cet homme, pourtant assez vieux et mature, pouvait supporter une personne aussi vile que son propre frère.

Tandis que Sun-Hwa, la mère de Jimin, s'accaparait déjà toute l'attention de sa mère, Jungkook vit arriver les trois sœurs, Yu, Yun et Yuri. Ces dernières les saluèrent, et Yu s'éclipsa un peu plus loin avec Jungkang, qui était l'un de ses plus anciens amis. Il était rare de voir fleurir une réelle amitié entre une femme et un homme dans cette société, sans que cela ne soit vu comme un amour naissant. Mais tout le monde ici savait que ces deux-là étaient comme chien et chat, et s'entendait comme frère et sœur. Yun était à leur côté, et devait faire part des dernières nouvelles à son frère aîné, quand Yuri s'approcha timidement de Jungkook.

– Bonsoir...

– Yuri, s'inclina Jungkook en portant le dos de sa main à ses lèvres. Ravi de vous revoir.

– Moi d-de même...

Le silence s'installa entre eux, et même s'il était habitué à cela venant de la part de sa future promise, Jungkook se sentit assez mal à l'aise, et s'excusa pour aller saluer son frère, Jae, un peu plus loin. Jimin ne tarda pas à tous les rejoindre, sous le regard observateur de son père qu'il préféra ignorer. Il sourit lorsque Mi-ri, la mère de Jungkook, lui fit quelques compliments, et alla rejoindre son ami, les mains rangées dans les longues manches de son durumagi.

– Tu ne m'avais pas parlé de ce repas, lança Jungkook en suivant la cadence de leurs parents.

– J'ai pensé que tu ne pourrais pas décliner si la nouvelle te parvenait d'une autre personne que moi.

Depuis la dernière fois qu'ils s'étaient vu, il était évident qu'un climat étrange s'était installé entre lui et son ami, et Jungkook ne supportait pas l'idée que cela puisse durer. Alors, avant qu'ils ne rejoignent leur famille autour du repas, il lui fit signe de ralentir pour qu'ils soient seuls.

– Comment vas-tu ? Tu ne me parles presque plus, Jimin...

– Moi ? répéta le noireaud, faisant mine d'être surpris. J'espère que c'est une vaine tentative pour me faire rire, Jungkook. Tu es celui qui t'es absenté ces dernières semaines.

Jungkook n'était pas dupe et il se doutait que Jimin lui en voulait d'avoir donné tant d'attention à Taehyung, quitte à le mettre quelque peu de côté. L'arrivée du jeune brun avait chamboulé sa vie et ses habitudes, et il commençait à comprendre que ses envies égoïstes à son propos risquaient de lui faire perdre bien plus qu'un nouvel amant dans sa couche. Alors, il prit sur lui, envoya balader coeur et sentiments et retrouva cet air malin qui autrefois, avait toujours habité son visage.

– Je n'ai fait que mettre en œuvre notre pari, c'est ce que tu voulais, pas vrai ? Que je trouve le moyen de mériter sa confiance.

– Est-ce toujours un jeu, pour toi ?

Jimin le défia du regard, le toisant du coin de l'œil.

– Crois-tu sincèrement que je prendrais le risque de te perdre toi, mon plus cher ami depuis toujours ?

– Je crois surtout que tu commences à y prendre goût.

– C'est que tu as toujours eu l'œil pour me dégoter les perles les plus rares, le taquina Jungkook, lui offrant son plus beau sourire.

Jimin parut d'abord hésitant, puis il comprit que Jungkook ne cherchait qu'à entretenir leur lien, alors il se détendit et agit telle une actrice de théâtre, passant la main dans sa longue chevelure tressée.

– Je commençais à croire que tu avais changé.

– Moi ? Changer ? rétorqua un Jungkook malicieux.

– Oh je t'en prie, ne me fais pas cette tête Jungkook. Je suis peut-être un peu sentimental ces temps-ci, mais je n'ai pas encore perdu la tête. Toi, par contre, il faut croire que tu commences à réfléchir avec autre chose que ce qui se trouve entre tes jambes.

– C'est que tu ne diras plus la même chose, lorsque cet attribut que tu chéri tant maltraitera de nouveau ton derrière.

– Es-tu fou ?! s'écria Jimin en riant.

C'est avec un meilleur état d'esprit que Jungkook et son ami retrouvèrent leurs parents, qui n'avaient presque pas remarqué leur absence. Pendant le repas, les deux jeunes hommes renouèrent avec leurs malins subterfuges, se lançant quelques regards tendancieux, des bouts de riz lorsque les adultes avaient la tête ailleurs, ou bien s'attisant l'un l'autre sous la table à l'abri des regards.

Jimin ne pouvait pas être plus heureux, et surtout, il semblait avoir retrouvé une once de paix maintenant qu'il était certain que jamais Jungkook n'oserait lui planter un couteau dans le dos. Pourtant, il ne pouvait pas faire l'impasse sur ses réactions lorsqu'il essayait de lancer le sujet de son futur mariage, ou bien encore lorsqu'il essayait d'attirer son attention en baladant son pied qu'il faisait glisser le long de ses jambes.

A la fin du repas, il s'efforça de se tenir à l'écart quand Yuri tenta tant bien que mal d'attirer une nouvelle fois l'attention de son promis, mais leur conversation fut brève, cette dernière s'éclipsant pour aller prier avant de retrouver son lit. Jimin pensa que Jungkook finirait lui aussi par partir lorsque sa famille se décida à rentrer, mais à sa plus grande surprise, Jungkook le suivit jusqu'à ses quartiers, emportant avec lui une bouteille de vin qu'il avait réussi à voler dans la réserve à la demande de son ami.

Seuls, ils échangèrent quelques verres, et bientôt, Jungkook commença à se détendre. Il avait retiré son durumagi, était étalé sur le lit avec aisance, et dégustait quelques collations avec le cœur léger. Jimin, qui était dans le même état, se mit à rire à leurs blagues pourries et s'installa face à lui, servant une nouvelle fois leurs coupes.

– Maintenant que nous sommes seuls et à la limite d'être saoule, dis-moi, où en es-tu avec Taehyung ?

– Crois-moi, j'ai bien cru que jamais je n'arriverais à accéder à autre chose qu'à ses tirades sur l'amour, la nature et la science !

– Est-il si ennuyeux que je le pensais ?

– Non, en fait, il est bien plus intéressant qu'on ne le croyait. Je dirais même, plus facile à vivre que toi.

Jimin attrapa la première chose qui lui vint sous la main et la lança dans la figure de son ami, qui se mit à rire de plus belle.

– Quoi ? N'avons nous même plus le droit de rire ?

– Tu es bien plus amusant lorsque tu te tais et que tu me prends, alors tais-toi.

– Alors si tu es si aigri, c'est parce que ma queue te manque, Park ?

– Ne t'avais-je pas dit que plus jamais tu ne verrais ce beau petit cul jusqu'à ce que tu t'empares de l'innocence de ce fichu Kim Taehyung ?

– Hm... fit mine de réfléchir Jungkook, passa la langue contre l'intérieur de sa joue. Tu crois ?

– Ce que je crois, c'est que tu dois être tellement plein que cela t'empêche de réfléchir correctement !

– Parle pour toi, lui lança Jungkook, un sourire au coin des lèvres. Tu vas finir par perdre ton éclat si tu deviens aussi chaste que ta sœur.

– C'est toi qu'on enverra prier, tu deviendras même eunuque avant de pouvoir trouver la délivrance.

– Oh, tu crois ?

Devant l'affront malin de son ami, Jungkook fut sur pied en un rien de temps et l'obligea à se tenir debout, posant une main dans le bas de son dos pour coller son torse au sien.

– C'est toi qui devrais prier, Park. Tu ressembles à ces filles de joie en chaleur à qui on refuse un service.

– Crois ce que tu veux, Jeon, le défia t-il en planta son regard dans le sien. Je n'ai pas besoin de payer pour obtenir ce que je veux.

Alors qu'il essayait de lui faire face, le corps de Jimin parla pour lui quand le regard de Jungkook se transforma en celui d'une bête trop longtemps enchaînée. D'ailleurs, cette réaction inattendue fit sourire ce dernier, conscient de l'effet qu'il pouvait produire.

– Je pourrais partir, maintenant, dit-il en commençant à délasser sa chemise. Je pourrais te laisser là, seul, avec cette bouteille presque vide, te faisant regretter d'avoir pu penser que je commençais à faiblir.

– Je ne te retiendrais pas, dans ce cas.

– Alors dis-le.

Un bref silence s'installa entre eux, avant que Jimin ne fonde tel un sauvage sur les lèvres de Jungkook, l'entrainant dans un échange bestial. Ce n'est pas son amour qu'il cherchait à acquérir, seulement sa présence et ce qu'il savait faire de mieux, à part être le meilleur des amis. Jungkook, lui, se laissa porter par cette enivrance, bien que pour la première fois de sa vie, son cœur ne fut pas du même avis que son corps.

Comme à leurs vieilles habitudes, ils n'échangèrent pas plus de sensualité et passèrent aux choses sérieuses, faisant résonner les bruits de claquement de peau contre peau dans la chambre. Les gémissements de Jimin furent plus rauques cette fois, traduisant ô combien il avait attendu de le retrouver. Pourtant, même si son corps se réjouissait d'une telle délivrance, Jungkook eut l'impression de devoir mettre de côté sa raison.

Peut-être parce qu'il savait, au fond, que ce qu'il faisait était mal, et qu'il finirait certainement par le regretter.

Parce que pour la première fois de sa vie, le sexe n'avait jamais eu autant le gout de l'amertume. 

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