𝒞𝒽𝒶𝓅𝒾𝓉𝓇𝑒 𝟷𝟷
Sea of crying - Oh Jun Sung
Fly butterfly - Oh Jun Sung
The Person I Cannot Forget - Jung Sae-Rin
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Les jours passèrent, les semaines aussi, peut-être deux entières, où chaque minute fut un réel calvaire pour Taehyung. Oui, un calvaire, car il avait fini par se remémorer tout ce qui avait pu se passer à Gatak.
Le lendemain de sa sortie, le jeune maître s'était réveillé avec de terribles maux de têtes. Yoongi n'avait pu quitter son chevet deux jours durant, supportant toutes ses plaintes où Taehyung avait maintes fois pensé dépérir, ce qui l'avait fait doucement rire dans son coin. Seule sa sœur aînée s'était quelque peu préoccupée de son état, sa mère restant toujours distante face à ce qu'il avait dû surmonter. Ce ne fut pas nouveau pour Taehyung, qui avait l'habitude de se retrouver seul face à ses maux de nombreuses fois durant son enfance.
Cela dit, le troisième jour, il s'était réveillé après avoir fait un étrange rêve. Dès qu'il fut capable de se lever, il s'était précipité aux pieds de Yoongi et l'avait supplié de l'aider à retrouver la mémoire. Le serviteur n'avait pas fait grand-chose si ce n'était lui conter tout ce qui avait pu se passer avant qu'il ne le perdre de vue à l'intérieur de l'auberge.
Mais lorsque Taehyung lui demanda comment il avait pu rentrer jusqu'à sa maison, Yoongi lui avait alors parlé de Namjoon, qui les avait escortés aux côtés de Jungkook qui l'avait porté. Quel malheur ! La mention seule de Jungkook eut un effet dévastateur chez Taehyung, et tout lui revint aussi clair que de l'eau de roche.
Alors, depuis ce matin-là, il s'était enfermé dans sa chambre, ne souhaitant recevoir personne. Il avait refusé toute compagnie, même celle de sa sœur qui avait pourtant plusieurs fois essayé de lui rendre visite pour prendre de ses nouvelles.
Yoongi avait veillé près de sa porte sans cesse, faisant part au chef de famille que son fils avait insisté pour se retrouver seul avec lui-même.
Pendant tout ce temps, Taehyung n'avait que très peu quitté son lit si ce n'était pour manger ou faire sa toilette, et à chaque fois, il était resté aussi silencieux qu'une tombe, les yeux hagards, comme plongé dans ses plus profondes pensées.
Les souvenirs de sa soirée s'éclaircirent avec le temps, et à chaque fois qu'il regagnait son pavillon, le jeune maître se laissait retomber contre sa porte, la main moite posée sur ses lèvres.
Ses lèvres...
Ses lèvres avaient goûté au fruit défendu. Ses fines lippes n'avaient fait qu'un avec celle d'un autre.
Cette simple pensée l'avait complètement chamboulée. Lui qui avait toujours clamé vouloir offrir son premier baiser à celui ou celle dont il tomberait amoureux, avait chaviré. Cela dit, à chaque fois qu'il fermait les yeux, Taehyung se souvenait de la douceur avec laquelle les lèvres de Jungkook avaient cueilli les siennes.
Il ne le dirait pas, mais c'était un souvenir extrêmement délicieux. Plus il y pensait, et plus il avait l'impression de devenir fou. Il n'arrivait pas à y croire, et en même temps, il espérait que cette soirée ne se soit jamais terminée.
A chaque nouvel épisode dans sa mémoire, le jeune maître tremblait de malaise et rougissait comme une tomate fraîche. Comment avait-il pu être si niais devant Jungkook ? N'avait-il pas été trop loin ? Comment avait-il pu se laisser aller à l'alcool avec autant d'aisance ?
Mais à chaque fois que toutes ces questions se bousculaient dans sa tête, Taehyung finissait par sentir son cœur battre la chamade dans sa poitrine. Lui qui n'avait pas compris, avait finit par déduire que tout ce qu'il avait ressenti envers Jungkook n'était pas que de la simple amitié.
Cela pouvait-il être de l'amour ?
Lui qui ne l'avait jamais connu qu'à travers les lignes de ces romans ou à travers les vers de ces poèmes, était-il légitime d'appeler cela de l'amour ?
Les souvenirs du visage de Jungkook ce soir-là le hantaient tant, qu'il n'arrivait même plus à se tenir. Il lui était impossible de lire sans se sentir tout émoustillé, et pire encore, il n'arrivait pas à dessiner ne serait-ce qu'une esquisse.
A chaque fois qu'il le faisait, c'était les traits du visage de Jungkook, ou plutôt, les lignes de ses lèvres et de sa mâchoire qui lui venait en tête.
Taehyung en fut totalement renversé, qu'il pensait devenir fou.
Mais à chaque fois, lorsqu'il osait caresser ses lèvres, ou bien encore lorsqu'il passait la main dans ses cheveux ou sur ses bras, il fermait les yeux, et imaginait Jungkook à ses côtés. Personne d'autre que lui ne pouvait le voir ou l'imaginer, alors cela le rendait encore plus avide de curiosité. Il ne l'avouerait pas, mais il désirait plus que tout revivre ce sentiment de plénitude qui l'avait envahi.
Il se surprenait parfois à sourire, plongé dans ses songes, mais lorsque cela arrivait, il reprenait conscience et rougissait à nouveau jusqu'à en avoir si chaud, que même l'air frais du dehors ne lui suffisait plus.
Tout ce temps, Yoongi garda un œil sur son jeune maître, le voyant s'éprendre de ce sentiment pour la première fois. Il se contentait d'écouter ses ordres, plus ou moins autoritaires pour une fois, lui amenant ses repas ou l'accompagnant faire sa toilette, sans demander son reste. Il l'entendait parfois, derrière la porte, sangloter ou bien s'agacer contre sa propre personne. Une fois, il l'avait même quelque peu espionner, le voyant assis sur son lit, les doigts hésitant sur ses lèvres qu'il caressait lentement.
En tout bon ami qu'il était, Yoongi se doutait bien que son jeune maître commençait à tomber amoureux. Mais comment pouvait-il le lui dire ? Comment pouvait-il seulement lui expliquer, lui qui n'était au final qu'un serviteur ? Taehyung le considérait comme son ami, le plus proche, mais il était aussi celui qui glorifiait l'Amour dans tous ses termes. Il était même son premier mécène. Alors, si Yoongi tentait de lui dire qu'il s'éprenait lentement mais sûrement du jeune maître Jeon, sans nul doute que Taehyung lui ferait une scène digne d'une comédie.
Alors, Yoongi préférait se taire et attendre. Pendant ce temps, il continua de vivre sa vie comme il l'avait toujours fait, s'occupant du mieux qu'il le pouvait de son jeune maître et ami, espérant qu'un beau matin, il se lèverait avec l'envie d'affronter ce qui le rongeait depuis bientôt trois semaines.
Le moment tant attendu arriva enfin, un beau matin où le ciel bleu s'étendait déjà jusqu'à l'infini. Ce matin-là, Yoongi vint comme toujours à la porte de son maître pour lui apporter son déjeuner, et il fut surpris de l'entendre dire de rentrer.
Pas moins heureux, Yoongi acquiesça d'un mouvement de tête que son maître ne pourrait voir, et fit coulisser la porte pour entrer.
Taehyung avait retrouvé ses belles couleurs, ses yeux n'étaient plus emplis de larmes ou encore perdus dans le vide. Il avait retrouvé goût à son bien-être, et s'était habillé d'un bel habok aux couleurs vertes et aux détails dorés.
— Votre déjeuner, Monseigneur.
Cette fois-ci, Taehyung ne lui fit aucune remarque sur son appellation et le laissa lui déposer son plateau sur cette petite table qui se trouvait devant ses genoux pliés. Il mangea en silence, en présence de Yoongi qui l'attendait sagement debout, devant sa porte. Quand il eut terminé, Taehyung vint le rejoindre, et coiffé de nouveau comme il en avait l'habitude hors de la capitale, autrement dit, avec un chignon serré sur la tête, il croisa les mains dans son dos et leva la tête en direction du ciel.
— Comment vous sentez-vous ?
— Très bien, je te remercie.
Pas moins surpris par le ton qu'il avait utilisé, Yoongi se courba seulement à sa réponse, et s'apprêtait à le guider jusqu'au salon où son père l'attendait, quand il fut retenu par la manche.
Taehyung le tenait fermement, et lorsqu'il releva la tête, Yoongi retrouva ses doux petits yeux de chiot battu.
— Pardonne moi, je...
— Ce n'est rien, Monseigneur, le rassura Yoongi. Je suis heureux de vous retrouver enfin, lui dit-il en posant ses mains sur la sienne.
Comprenant qu'il devait être angoissé à l'idée de confronter son paternel, Yoongi fut ravie de voir que ses mots suffirent à faire naître un petit sourire chez son jeune maître, et ensemble, ils marchèrent jusqu'au grand salon.
Arrivé devant la porte, Taehyung croisa les mains derrière son dos et pris un profonde inspiration, prêt à accueillir toutes les futures reproches de son père à son sujet lorsqu'un serviteur le présenta. A sa plus grande surprise lorsqu'il entra, son père n'était pas assis sur ce fauteuil qui lui hérissait toujours le poil, mais plutôt debout, s'adressant à un script avec sérieux.
Lorsqu'il remarqua la présence de son fils, son père congédia l'homme et s'avança vers lui.
— Te voilà enfin.
— Abeoji, le salua Taehyung en se courbant.
— J'ai bien cru que tu nous faisais toutes ces scènes dignes de tes supercheries d'enfant. Ta mère s'inquiétait mais il me fallait lui dire que le temps serait le meilleur de tes remèdes, et comme je l'avais pensé, te voilà de nouveau en bonne santé.
Taehyung ne répondit rien, sachant très bien que quoi qu'il en soit, son propre père n'éprouverait aucune peine face à ce qui avait pu le tourmenter si longtemps. Qui plus est, il ne pouvait lui avouer être sorti sans son accord pour boire et s'amuser sans prendre conscience des risques qui pouvaient entacher leur nom. Pire encore, il ne pouvait lui avouer avoir ordonné d'être seul dans le but d'effacer les souvenirs des moments qu'il avait partagé avec un homme.
— Nous avons à faire aujourd'hui. Après le repas, je t'accompagnerais à la maison Kisaeng.
— Ki...Kisaeng ?
— Ne me fais pas répéter, et tiens toi prêt. Pense à faire une toilette complète, et habille-toi convenablement. Ta mère s'est démenée pour se rapprocher de cette maison, elle a même été jusqu'à obtenir une recommandation du palais.
Ne souhaitant pas mettre son père en colère, Taehyung abdiqua et attendit son geste pour s'éclipser.
En sortant, il rejoignit Yoongi qui l'attendait dans la cour, sous les yeux de ses autres serviteurs de maisons qui le regardaient avec tendresse. Mais il marchait les yeux froncés, les mains croisées et rangées dans les poches de son durumagi.
— Yoongi ?
— Oui, Monseigneur ?
— Que sais-tu de la maison Kisaeng ?
Le serviteur sembla étonné de sa question, puisqu'il fit la grimace, et ses joues commencèrent à rougir.
— Qui a-t-il ? Est-ce une mauvaise chose ? Je t'en prie, dis moi tout ce que tu sais.
— Monseigneur, vous...vous ne connaissez vraiment rien de telles maisons ?
Toujours avec cet air de chien battu, Taehyung fut presque vexé de se trouver inculte, et fit un "non" de la tête.
— Monseigneur, je...je ne...
— Tu n'en sais rien, c'est ça ?
Alors qu'il attendait encore une réponse de son serviteur et ami, Taehyung vit passer sa sœur au loin dans les couloirs du pavillon, et voulut alors se précipiter à ses pieds pour lui poser la question. Cependant, Yoongi le rattrapa avant qu'il ne s'élance.
— Ne voulez-vous pas prendre un thé au manège ? Je...je vous en dirais plus là-bas, si vous le souhaitez tant.
Ne comprenant pas pourquoi son serviteur semblait si perturbé, Taehyung finit par accepter et le suivit alors jusqu'au jardin. Quelques minutes plus tard, il était assis devant une tasse fumante de thé au gingembre, sirotant doucement sa boisson qui lui fit un bien fou. Devant lui, il avait fait asseoir son serviteur, qui ne savait plus comment se tenir et qui n'osait pas le regarder en face.
— Alors, que sais-tu de cette maison ?
Pressant ses lèvres l'une contre l'autre, Yoongi hésita encore un peu, mais fut contraint de parler. Il savait que son jeune maître ne lâcherait pas le morceau, et il lui fallait lui expliquer, de peur qu'il ne finisse trop surpris en l'apprenant sur le tas.
— Monseigneur...
— Taehyung.
— Tae...Taehyung...connaissez-vous les maisons closes ?
Les jours rouges et presque gêné d'en entendre parler, Taehyung reposa sa tasse avec précaution sur la table qui les séparait.
— Bien...bien sûr, dit-il avec peu d'assurance. Je ne suis pas idiot, tu sais.
— Savez-vous quel est le principe de ces maisons ?
— Je...j'en ai entendu parler, oui.
— Les maisons des Kisaengs leurs sont proches. A vrai dire...n'avez vous jamais vu d'hommes de haut rang s'y rendre ou en vanter les mérites ?
— J'ai...j'ai déjà entendu mon père en parler, mais...en quoi cela peut m'éclairer sur la chose ?
— Ce sont des courtisanes, Monseigneur. Leurs maisons sont un lieu de fête et de rencontres. Souvent, les plus jolies et appréciées d'entre elles sont présentes à la cour.
Voyant que son jeune maître n'en saisissait toujours pas la définition, Yoongi poussa un soupir.
— Monseigneur, ces femmes sont des femmes de joie. On leur a donné un nom, car quand bien même elles sont difficiles à classer dans nos castes, elles sont reconnues pour être de belles femmes aux belles parures et leurs richesses les rendent différentes du peuple. J'ai entendu dire que la maison Kiseang de la capitale est l'une des plus réputées du pays.
Soudain, le visage de Taehyung prit une expression effarée, presque choquée, et il se mit à rougir à en devenir paralysé tout entier.
— Ra...rassurez-vous, Monseigneur ! Ces femmes ne s'adonnent pas toutes au commerce du...du sexe mais elles...elles sont aussi reconnus dans les arts, la musique, même la poésie ou encore les technique de conversations !
Ne sachant plus quoi dire pour retrouver l'attention perdue de son jeune maître, Yoongi jurait dans sa barbe et se releva aussitôt pour revenir afin de lui resservir de la tisane.
— Monseigneur, je...
— Pour...Pourquoi mon père voudrait-il m'emmener dans un tel endroit ? demande Taehyung, les lèvres tremblantes d'angoisse et les yeux larmoyants.
— Pardonnez ma négligence, je ne voulais pas vous faire peur, Monseig...Taehyung. Peut-être a-t-il pour but de vous enseigner quelque chose à leurs côtés, ou bien...Peut-être a-t-il pensé que fréquenter ces dames vous serait utile et...
— Ne serait-ce pas ces dames qui sont aussi à l'origine de toutes les rumeurs qui rôdent dans nos rues ? questionna Taehyung, relevant ses yeux peinés vers son serviteur.
— Elles...Les Kisaengs fréquentent tous les plus hauts partis de la capitale, Monseigneur. Nul doute que leurs connaissances sont les plus riches de toute la ville, n'est-ce pas ?
— J'ai...j'ai entendu dire qu'elles préparaient aussi les mariages Yoongi et...et si mon père prévoyait déjà de...de...
— Mon...Taehyung, le reprit Yoongi. S'il vous plaît, ne vous tracassez pas autant.
Que pouvait-il bien faire d'autre ?
A vrai dire, Yoongi lui-même s'inquiétait de cette visite à la maison Kisaeng. Il se doutait que le père Kim avait une idée derrière la tête, et celle-ci ne devait pas être désintéressée. Taehyung n'avait jamais fréquenté d'autres femmes que sa mère ou sa propre sœur, alors l'imaginer autour d'une de ses courtisanes l'effrayait un peu. Mais il ne pouvait rien faire de plus que rassurer son jeune maître pour le moment, afin qu'il ne soit pas pris dans un torrent de larmes d'inquiétude.
Le repas arriva, et après avoir terminé de manger, Taehyung se vit embarquer par d'autres serviteurs pour faire sa toilette. Jamais on n'avait autant pris soin de lui, jusqu'à lui faire porter ses plus beaux vêtements. Lorsqu'il fut fin prêt, il rejoignit son père et ensemble, ils se rendirent à la maison Kisaeng.
Sur le chemin, Taehyung n'eut d'autre choix que de trouver la paix sans ses souvenirs, pensant alors à Jungkook, à son visage et à sa voix. Il sourit parfois, se rappelant à quel point il avait pu être doux et attendrissant, mais alors, il se demanda aussitôt si lui aussi se souvenait de ce qu'ils avaient partagé.
Avant que l'angoisse ne le ronge, il fut accueilli à la maison Kisaeng. Son père semblait connaître les lieux et fut admis avec élégance et courtoisie. La demeure, puisque s'en était une, faisait quelque peu penser à l'architecture de l'auberge Gatak, bien qu'elle était plus grande et possédait aussi de beaux jardins. Suivant son père, et un peu perdu dans ses pensées, Taehyung ne suivit pas la conversation qu'il eut avec une dame qui semblait être la gérante, quand deux femmes vinrent le chercher.
Perturbé mais contraint de les suivre, il resta silencieux et il fut emmené à l'étage. L'une des deux femmes lui sourit et lui dit que tout allait bien se passer, qu'il ressortirait de cette pièce en tant qu'homme accompli et heureux.
Il ne comprit pas le sens de ce discours et se contenta de leur sourire, pour tenter de garder un peu de contenance. Mais au fond de lui, quelque chose lui disait que cela n'avait rien de bon.
Accompli et heureux, qu'est ce que cela voulait il dire ?
Désormais seul, Taehyung qui était assis sur un futon qui sentait délicieusement bon, commença à s'agiter, ne sachant pas quoi faire, ni ce qu'on attendait de lui. Le temps lui parut bien long, avant qu'enfin, la porte ne s'ouvre, laissant entrer une très jolie jeune femme.
Elle était habillée d'un hanbok merveilleux, tant qu'il aurait cru se retrouver en compagnie d'une dame de bonne famille. Mais il repensa alors aux paroles de Yoongi, qui lui avait avoué que les parures des Kisaengs pouvaient être trompeuses.
Jeune homme bien élevé qu'il était, Taehyung se leva de suite pour la saluer avec bienséance, ce qui fit rire la jeune fille qui s'approcha lentement de lui.
Elle avait un visage aux traits doux, ses longs cheveux noirs étaient tressés et décorés de jolies accessoires fantaisistes, mais aussi, son maquillage était assez fin et délicat.
— Bonjour, jeune maître Kim.
— Bon..bonjour...
— Je suis ravie d'avoir été choisie pour vous servir, dit la jeune femme en se courbant. Je vous promet d'être aussi parfaite qu'il vous le faudra, et sachez que mon corps tout entier vous appartient à partir de cet instant.
— Merci, je...Par-pardon ?
Effaré, Taehyung ne sut comment réagir lorsque la jeune femme commença à saisir le ruban qui entourait son hanbok pour le détacher. Il ne sut quoi faire, ni quoi dire, alors que son cœur lui hurlait de lui ordonner d'arrêter quand elle commença à se déshabiller un peu plus, devenant un peu maladroite et rougissant comme si c'était la première fois qu'elle agissait ainsi.
— Que...que fai-faites vous ?
— Ce qui doit être fait et ordonnée par votre père, répondit doucement la jeune femme.
— Je...
Bientôt, le hanbok de la jeune femme glissa sur son corps, et elle apparut en tenue plus intime au jeune maître, qui, gêné, se cacha la vue.
— S'il...s'il vous plaît, rhabillez vous...
— Mais je...
— Rhabillez vous par pitié.
— Mais...
— C'est un ordre ! cria presque Taehyung, surpris lui-même par son haussement de voix.
Déboussolée, mais aussi, surprise de l'attitude du jeune homme à la gueule d'ange qui lui faisait face, la jeune femme ne pu faire autrement qu'obéir. Elle réajusta donc son dessous, qui n'était autre qu'une petite chemisette blanche que l'on glissait sous les hanbok, et n'osa plus bouger. Enfin, ce n'était rien face à l'attitude du jeune maître devant elle, qui n'avait toujours pas bouger ses mains écrasées avec force devant ses yeux.
— Vous pouvez retirer vos mains vous savez.
— No-non je...je ne peux faire cela...
A la plus grande surprise de Taehyung, la jeune femme se mit à rire. Ce doux son mélodieux le rassura un peu, avant qu'il ne rougisse de honte.
— Pour-pourquoi vous moquez vous ?
— Loin de moi l'idée de vous vexer maître Kim, permettez moi seulement de vous dire à quel point votre réaction est adorable.
— Je...
— Je n'avais encore jamais rencontré d'homme aussi perturbé de se retrouver face au corps d'une femme, avant vous.
— Je...je ne m'attendais pas...
— Vous ne vous doutiez de rien ? questionna la jeune femme, les mains désormais croisées dans son dos et penchant un peu la tête sur le côté.
— Je...je co...connaissais pas...
— Vous ne saviez pas quel était le rôle de la maison Kisaeng ?
— Non...
La jeune femme se remit à rire, mais cette fois-ci, Taehyung ne le prit pas comme une moquerie. Elle semblait surtout être attendrie par sa naïveté.
— Voudriez vous un peu de thé, maître Kim ?
Sans dire un mot, Taehyung acquiesça d'un mouvement de tête, et la jeune femme avança jusqu'à une petite table devant laquelle elle se mit à genoux, avant de leur servir à tout deux, deux tasses de thé fumant.
— Je vous en prie, Monseigneur, dit-elle calmement.
Quelque peu hésitant, Taehyung laissa enfin ses mains retomber le long de son corps, mais toujours aussi gêné, n'osa pas la regarder dans les yeux tout en approchant la table. Lorsqu'il fut assis, il garda son regard fixé au plafond, ici et là dans ses recoins, tandis que ses doigts tapotaient maladroitement sa tasse.
Le silence prit place dans la pièce, et bientôt, Taehyung sentit les larmes lui monter, comprenant que son père avait voulu lui jouer un mauvais tour. Du moins, il l'avait vécu ainsi, alors que pour lui, cela devait être d'une extrême importance pour l'avoir accompagné en personne et confier à une jolie jeune femme. Il fut chamboulé de s'avouer que tout cela n'avait été qu'un coup monté de son propre père pour faire de lui un homme, alors que cet acte s'imposant à l'intimé même d'autrui lui était pourtant si important.
D'une part, il se sentait trahit. Il savait son père être dur et archaïque, mais jamais il ne l'aurait cru capable de le vendre ainsi aux plaisirs de la chair, sans même penser une seconde à son propre consentement. D'un autre, il ne pouvait que se sentir honteux d'avoir été pris de panique face à cette jolie jeune femme, qui avait certainement du accepté de faire ce pourquoi on la rémunérait. Il se demanda alors si elle était réellement heureuse d'agir ainsi, bien que souvent, les hommes qui fréquentaient ces lieux étaient riches et courtois. Il fallait être très égoïste selon Taehyung, pour venir jusqu'ici afin de se payer la présence d'une jolie dame alors qu'une femme devait attendre à sa maison, le retour de son mari.
— Auriez vous perdu votre langue, jeune maître ?
Osant à peine se racler la gorge, Taehyung fit mine de renifler pour cacher sa peine, et cligna plusieurs fois des yeux pour en faire s'échapper les prémisses de ses larmes naissantes.
— Pourquoi avez vous l'air si triste Monseigneur ? demanda la jeune femme.
— Pardonnez moi, je...commença Taehyung, la voix tremblante. Je ne pensais pas que mon père en arrivait jusque là, veuillez m'excuser de vous avoir vexé et aussi de vous avoir hurlé dessus. Je...je ne voulais pas et je...
— Je vous trouve vraiment adorable, dit la jeune femme en souriant.
Son sourire fut si chaleureux, que Taehyung baissa les yeux, encore peiné de l'avoir repoussée avec autant de rigueur.
— Vous n'avez pas à vous en vouloir, maître Kim. Vous savez, je n'ai peut-être pas eu le choix de vivre ainsi, mais ma condition me plaît et pour tout vous dire, vous êtes le premier jeune homme à me repousser ainsi. Je dirais presque que c'est...surprenant.
— Oh ! Je...vo-vous êtes très jo-jolie, je ne...
— Merci beaucoup, lui dit-elle pour enterrer son embarras. Vous êtes aussi beau que les rumeurs le disent, vous aussi.
— Les rumeurs...
— Nous sommes à la capitale, tout se sait ici, maître Kim. Les informations courent les couloirs de notre maison, rit la jeune femme.
— Quel...quel est votre prénom ?
La jeune femme eut l'air étonnée un instant, mais son sourire vint de nouveau habiller son visage, et bien qu'assisse, elle s'abaissa un minimum avec respect pour lui répondre.
— Je m'appelle Yoo-jin, Monseigneur.
— S'il vous plaît ne...ne m'appelez pas comme cela...
— Comment devrais-je vous appeler, dans ce cas ?
Se mordillant les lèvres, Taehyung voulut lui donner l'autorisation de l'appeler par son nom, mais il se ravisa.
— Maî...maître Kim suffira...ou jeune maître...
— Bien, jeune maître Kim, reprit la jeune femme avec enthousiasme.
— Vous...vous disiez ne pas avoir choisi, pour...pourquoi ?
— Quoi dont ?
— Votre...enfin...être Kisaeng...
— Oh, je vois, souffla la jeune femme avant de boire un peu de son thé. Et bien, ma mère était Kisaeng, c'était même la gérante de l'établissement à l'époque. Elle m'a donné naissance ici, alors je n'ai eu d'autre choix que d'en devenir une moi-même. C'est un statut héréditaire.
— Vous...vivez vous convenablement ici, Yoo-jin ?
Plus la conversation s'installa, plus Taehyung retrouva d'aisance. La jolie Kiseang du nom de Yoo-jin lui expliqua alors, selon ses demandes, sa vie au sein de cette grande maison. Elle lui dit ô combien elle vivait à sa convenance, mais aussi, quel statut les Kisaeng possédaient dans leur société. A vrai dire, Taehyung ne fut pas étonné d'apprendre qu'en fréquentant des membres du gouvernement ou étant même des employées de la cour, que les Kisaeng vivaient sans grand soucis. Il fut même agréablement surpris d'apprendre qu'elles maîtrisaient la poésie en vers, mais aussi en prose. Leur talent pouvait également s'étendre dans la musique, ce qui le fit sourire. Cela dit, Taehyung le perdit aussitôt en apprenant que l'on ne devenait pas seulement Kisaeng par hérédité.
Yoo-jin lui confia que souvent, il arrivait que des jeunes filles soient livrés par leurs familles ne pouvant plus les élever. Ces familles étaient très souvent, pour ne pas presque tout le temps, pauvres et nourrir une bouche de plus ou l'éduquer devenait un fardeau. Parfois, des familles de rang plus élevé se voyant endettés se trouvaient aussi dans l'obligation de vendre leur enfant. Devenir Kisaeng pouvait aussi être une punition, pour des femmes de sa propre caste ayant commis l'adultère.
Le gouvernement veillait à leur éducation, les éduquant dans des instituts qui leur étaient privilégiés afin de devenir habiles et douées dans leurs arts. Leur éducation se concentrait surtout sur la musique et la danse, avoua Yoo-jin.
La liberté n'était pas le maître mot de leur vie, car elles étaient toujours surveillées par des officiers qui étaient chargés de tenir un registre, en plus de les contraindre à fuir. Deux fois par mois, elles devaient se présenter à une inspection, aussi lorsqu'un nouveau fonctionnaire arrivait dans la région. Taehyung comprit alors pourquoi son père connaissait si bien cet endroit. La formation des Kisaeng était continue, et elles devenaient parfois médiatrice lorsque conflit il y avait.
— Vous..vous dites que certaines ont un...un mari Kisaeng ?
— Oui, jeune maître. Certaines d'entre nous en ont, et elles bénéficient de leur protection et aussi d'un soutien économique.
— Oh..je...je vois...
— Qui a t-il ? demanda Yoo-jin en penchant encore une fois la tête sur le côté, geste que Taehyung trouvait adorable.
— Je n'arrive pas à...à définir si cette vie est si agréable que vous le dites...je...j'ai l'impression que vous pouvez être aussi restreinte que je le suis, parfois.
— En quoi seriez vous restreint, jeune maître ? sourit-elle.
Taehyung médita un instant, hésitant à lui dévoiler le fond de sa pensée. Mais il se rappela alors à quel point elle avait été franche et honnête face à toutes ces questions, ne refusant pas à un seul instant de lui dire ce qu'il avait eu envie de savoir. Cela faisait maintenant une heure et demie qu'il était en sa compagnie, et aussi étrange que cela pouvait paraître, Taehyung ne trouvait pas le temps long. Au contraire, il aimait l'entendre parler et appréciait le son de sa douce voix. Sa présence était réconfortante, et très amicale envers lui.
— Yoo-jin...que savez...que savez vous à propos de l'amour ?
— Moi ? dit la jeune femme en posant une main sur sa poitrine. Je ne saurais quoi vous répondre, jeune maître. Attendez vous de moi que je réponde à toutes vos questions à ce propos ?
— Non ! Non, je...je sais ce qu'est l'amour, mais je...je...êtes vous libre d'aimer qui vous le souhaitez ?
— Aimer ou non ne fait pas partie de mon contrat, jeune maître Kim. Il m'est donné de rencontrer et de fréquenter un bon nombre de jeunes seigneur de la capitale, et la plupart du temps, ils sont assez beaux et courtois. Il m'arrive d'en apprécier plus certains que d'autres, j'aime parfois partager mon temps avec certains d'entre eux plutôt qu'avec d'autres. Je ne préfère pas m'enticher de l'un d'eux, mais peut-être cela arrivera un jour, qui sait ? Je ne suis pas à l'abri de l'amour, aucun de nous ne l'est, qu'en pensez-vous ?
— Je...je crois que je suis d'accord avec vous.
— Vous croyez ? Auriez vous déjà aimé, jeune maître ?
Soudainement, Taehyung se mit à rougir. La première de ses pensées fit apparaître le visage de Jungkook dans ses songes, et à un instant, il crut même que Yoo-jin avait pu le voir. Mais la jeune femme attendait seulement sa réponse, un petit sourire au coin des lèvres.
— Vous aimez quelqu'un, pas vrai ?
— J-je...je ne...
— Est-ce pour cette raison que vous avez refusé mes avances ?
Maintenant, Taehyung ne pouvait s'empêcher de jouer avec ses mains, ne sachant plus où les mettre. Il avait l'impression que les mots s'embrouillaient les un avec les autres dans sa tête jusqu'à ne former plus qu'une boule noir incohérente qui lui faisait ripper la langue dès qu'il essayait de parler.
— Jeune maître, me permettez vous de poser une question ?
Taehyung ne répondit pas, mais il releva lentement les yeux vers sa nouvelle amie, si l'on pouvait le dire ainsi, et hocha doucement la tête.
— Avez-vous déjà partagé quelque chose d'intime avec cette personne ?
Une nouvelle fois, Taehyung eut l'impression de devenir aussi bouillant que s'il se trouvait dans un marmite, sentant presque de la fumée sortir par ses deux oreilles. Il devait ressembler à une tomate aussi jour que sous les rayons du soleil maintenant. Les souvenirs aux côtés de Jungkook s'étant rejoués comme des flash dans sa mémoire.
— Vous avez vos secrets, et je le conçois, souffla Yoo-jin en riant derrière sa main. Voudriez vous quelques conseils, jeune maître ? Je n'aurais peut-être pas fait ce que votre père attendait de moi, mais j'aimerais vous aidez et vous apporter une chose qui aura pu vous servir. Puis-je ?
Tout en demandant cela, Yoo-jin fit comprendre à Taehyung qu'elle voulait s'approcher. Un peu étourdie, Taehyung accepta, et bientôt, elle fut assise à ses côtés. Elle se trouvait même juste en face de lui, et déposa ses deux mains sur ses joues. Yoo-jin put sentir à quel point Taehyung était brûlant, mais elle ne dit pas un mot à ce sujet, et se contenta de le fixer droit dans les yeux.
— Vous a-t-on déjà déposé un baiser, jeune maître ?
Ne pouvant plus répondre que par des signes, Taehyung eut peine à mentir en hochant la tête de droite à gauche hâtivement, et alors, Yoo-jin lui sourit et attendit. Taehyung ne sembla pas comprendre ce qu'elle voulait de lui, mais il lui donna alors son accord pour agir, et ainsi, les douces lèvres de la jeune femme vinrent épouser les siennes chastement.
Ce fut aussi rapide qu'un éclair finissant son chemin sur la terre, beaucoup moins appréciable que ceux que Jungkook lui avait partagé, mais aussi pour que Taehyung en reste bouche béante.
Yoo-jin se recula, et laissa ses mains reposer sur ses genoux. Elle souriait, et pencha la tête sur le côté, essayant d'attirer l'attention du jeune seigneur.
— Êtes-vous toujours avec moi, jeune maître ?
— Vous...tu...t-tu...vous me l'avez volé !
— Quoi ? Non ! Non non, dit la jeune femme en agitant les mains. Ce n'était pas mon intention, je...
L'attitude Taehyung changea brusquement, se rendant compte que finalement, Yoo-jin n'avait absolument pas voler son premier baiser. Elle lui avait peut-être laissé entendre ce que pouvait être un doux baiser chaste et aimable, mais celui qui avait volé ses premiers émois, l'avait fait avec beaucoup plus d'enthousiasme et...et d'envie ?
Et puis, Jungkook lui avait-il réellement volé ?
Se terrant dans le silence, Taehyung releva doucement une de ses mains et le bout de ses doigts vinrent caresser ses lippes. Le voilà qu'il s'était replongé dans ses souvenirs, dans ces moments qu'il rêvait déjà de retrouver un jour, sans même se l'avouer. En y réfléchissant bien, la chaleur que lui avait provoqué les gestes et les mots de Jungkook l'avaient tant bouleversé, qu'il pouvait presque encore sentir ses lèvres sur sa peau, et entendre les échos de sa voix dans ses oreilles.
— Maître Kim ?
— Ou-oui...? Oh, pardonnez moi, Yoo-jin, je...
— Tout va bien ? sembla s'inquiéter la jeune femme.
— Ou-oui je...Merci.
— Veuillez encore m'excuser si mon geste vous a bouleversé...
— Non, non je...c'était...grâce à vous, je me souviendrais de cette sensation douce que provoque un baiser.
Taehyung lui sourit, mais même son beau visage, lui, ne pouvait plus qu'imaginer les traits de celui qui lui manquait déjà tant.
— Par tout hasard...reprit il doucement, sau-sauriez vous si...si le jeune seigneur Jeon fréquente aussi cet établissement ?
Yoo-jin, étonnée par sa question, resta bouche bée. Comment un être aussi adorable que lui pouvait connaître un homme comme lui, d'après toutes les rumeurs qui couraient à son sujet.
— Vous connaissez le jeune maître Jeon ?
— Je...oui, c'est...c'est un ami, dit-il du bout des lèvres.
— Un ami, dit-elle étonnée.
— Oui...
— C'est étonnant, dit-elle.
Mais voyant qu'il attendait avec impatience sa réponse, pour elle ne savait quelle raison, elle lui sourit et lui répondit avec détachement.
— Le jeune maître Jeon ne fréquente pas ce genre d'établissement.
*
De son côté, très peu de choses avaient changé pour Jungkook.
Du moins, c'est ce dont il avait essayé de se convaincre.
Depuis la nuit où il avait ramené Taehyung jusqu'à sa maison, il n'était que très peu sorti de chez lui. Peut-être l'avait-il fait quelquefois pour se rendre à Gatak, afin d'y retrouver Jimin et ses autres conquêtes le temps d'une partie ou deux de jambes en l'air. D'autres fois, il s'y était rendu pour boire ou bien pour fumer cet opium que Jimin avait tant vanté, mais la plupart du temps, il aimait s'y réfugier pour aller demander les services de nul autre que Iseul.
Elle lui avait joué beaucoup de musique tandis que lui, prenait le temps de se détendre après de long entraînements avec son frère aîné. Il ne parlait pas ou peu, se contentant de lui demander de rejouer une musique ou deux, parfois, il s'endormait, mais souvent, il fixait le plafond et attendait seulement que le temps passe, ainsi que toutes ses pensées trépassent.
Oui, depuis tout ce temps, Jungkook n'avait pas recroisé Taehyung, et au fond de lui, la simple idée de le voir le travaillait. Il n'arrivait plus à penser à autre chose que le goût de ses lèvres lorsque son visage lui revenait en mémoire, et alors, comme ennuyé, il faisait la moue et cela en faisait même rire Iseul, qui ne rajoutait rien, de peur de miner encore plus le moral de son plus fidèle client.
Le matin où Taehyung s'était rendu à la maison Kiseang, Jungkook lui, s'était réveillé de bonne heure. Comme à son habitude, il s'était laissé porter par ses serviteurs, avant de se rendre dans la cour arrière de sa grande maison, là où son frère l'avait attendu pour sa énième leçon.
Ce matin-là, Jungkook qui pourtant adorait partager ces moments avec son frère aîné, s'était retrouvé à faire la tête, embêté par la présence ennuyante de son autre frère aîné. Alors que Jungkook répétait les mêmes mouvements que Jungkang, Jungwan était arrivé comme une petite fouine et s'était assis sur le petit perron, les bras croisés contre son torse. Il se contentait de les regarder, et si ses yeux brillaient parfois devant l'aisance de Jungkang à dégainer son épée, il n'en était rien devant les efforts concluants de Jungkook, qu'il toisait avec dédain.
De sa fratrie, Jungkang était le plus informé sur la condition de son frère cadet. Il le savait être une jeune homme brillant et prometteur, comme il connaissait ses vices et ses préférences. Il ne l'avait jamais jugé, mais comme sa mère, lui répétait quelle était l'importance de sa future descendance.
Pour Jungkang, le plus important était que Jungkook devienne encore plus fort qu'il ne l'était, car il le savait, Jungkook serait comme lui, un soldat. Il lui imaginait déjà un avenir encore plus brillant que le sien, et savait que Jungkook saurait dépasser ses espérances.
Étant lui-même un très bon élément de l'armée royale, il lui avait été confié par le roi lui-même l'éducation militaire de son frère. De ce fait, Jungkook suivait des cours hors de la demeure familiale, mais dès lors que son frère refaisait surface, ce dernier l'aidait à peaufiner ses techniques et le poussait dans ses retranchements.
Jungkook admirait Jungkang, il l'avait toujours trouvé courageux et fier, et aspirait à devenir un homme aussi talentueux que lui. Ceci dit, il le trouvait parfois beaucoup trop concentré sur ses devoirs, oubliant même qu'il était une personne à part entière et qu'il méritait aussi de connaître le plaisir qui pouvait être le sien.
C'est pourquoi même s'il n'avait rien dit, Jungkook avait été surpris à l'annonce du mariage prochain de son aîné. Il ne l'avait jamais vu avec une femme, ni ne l'avait entendu prononcer un nom. Jungkang s'était toujours démené et voué à sa profession, mais il fallait croire qu'il n'en avait pourtant pas oublié les devoirs d'un homme de son rang.
— Jungkook, ta défense n'est pas bonne, recommence.
— Oui, Hyung.
— Jungkook, tu ne dois pas lever ton bras si haut. Agir ainsi poussera ton adversaire à t'attaquer, tu lui donne la possibilité de t'atteindre. Recommence.
— Oui, Hyung.
— Jungkook, tu ne dois pas oublier de te tenir droit.
— Oui, Hyung.
Lorsque son frère lui accordait de son temps, Jungkook ne le contredisait jamais. On ne le voyait jamais rouspéter ou se plaindre. Il écoutait chacun de ses conseils et enregistrait chacune de ses remarques. Cela dit, Jungwan, lui, le trouvait ridicule à obéir ainsi, tel un petit chien devant son maître.
Il ne se cachait pas et riait à gorge déployée, mais quand Jungkook lui envoyait des regards dignes de le figer sur place, il faisait simplement mine de travailler sur ses registres, un petit sourire au coin des lèvres.
— Jungkook, je t'ai déjà dis de...
— Je n'en peux plus, souffla Jungkook en lâchant son arme et se dirigeant tout droit vers son intello de frère.
Il se figea devant lui, les sourcils froncés et les poings serrés. Quant à Jungwan, ce dernier se contenta de relever doucement les yeux à son visage, comme s'il avait été dérangé dans son occupation.
— Oui ?
— Si tu n'as rien d'autre à faire que te moquer continuellement de moi, je te propose d'aller faire le malin ailleurs, tu me déconcentres.
— Oh ? Moi ?
— Oui, toi, insista Jungkook.
— Ne vois-tu pas que tu me déconcentres, Jungkook.
Passant la langue contre sa joue, une fois, puis deux, Jungkook serra les poings et dut se faire violence pour ne pas agir bêtement. Autant dire que l'envie de refaire une petite beauté à son frère le démangeait, mais il ne pouvait se résoudre à agir ainsi devant leur aîné, qui les toisait un peu plus loin, les deux mains posées sur le socle de son arme.
Jungwan et Jungkook se dévisagèrent donc un moment, jusqu'à ce que Jungkang n'intervienne pour les séparer.
— Nous devrions faire une pause, jeune frère.
Sans dire un mot, Jungkook tourna la tête vers son aîné et acquiesça, lançant un dernier regard rempli de haine à son autre frère avant de s'éloigner.
Ce n'était pas seulement sa présence qui le dérangeait, après tout, Jungwan avait toujours agi ainsi avec lui et ce depuis leur enfance. Il était toujours là pour le taquiner, parfois un peu trop, dans on ne savait trop quel but. A vrai dire, Jungkook ne s'en était jamais préoccupé et trouvait toujours le moyen de lui faire fermer son clapet, mais ces jours-ci, bien qu'il se concentrait sur ses tâches et ses devoirs, il restait tout de même perturbé.
Dès qu'il se retrouvait seul et sans savoir quoi faire, les souvenirs de la dernière soirée qu'il avait passé en compagnie de Taehyung le hantaient. Il y pensait presque tout le temps, tellement, que cela le rongeait presque de l'intérieur. S'il avait d'abord pensé que c'était seulement le pari qu'il avait lancé avec Jimin qui le préoccupait, il en était venu à la conclusion qu'il y avait bien plus que cela.
— Eh, petit, lui lança son aîné en arrivant à sa hauteur.
Se retournant pour lui faire face, Jungkook tomba nez à nez avec la main tendue de son frère qui lui offrait de quoi se rafraîchir. Au loin, il vit une servante de la maison qui s'occupait de verser son thé favori à Jungwan, qui n'avait toujours pas déguerpi.
— Tout va bien ?
— Oui, souffla Jungkook, oui. Pardon, Hyung. Je n'ai pas su garder le contrôle.
— Ce n'est rien, tu t'es beaucoup amélioré depuis nos derniers entraînements. Je ne pensais pas que partir si loin de la maison pour un temps indéterminé t'aurait tant endurci.
Jungkook lui sourit.
— Je serais ta relève, pas vrai ?
— Bien sûr que tu le seras, admit Jungkang en lui donnant une frappe sur l'épaule.
Ce geste pouvait paraître anodin, mais pour Jungkook, il représentait tout l'amour que pouvait lui porter son aîné. Jungkang était un homme droit et loyal, il avait promis serment à son métier et s'y donnait corps et âme. C'était un soldat hors pair en plus d'être un homme aux louanges interminables. C'était aussi un beau garçon, qui bientôt, serait marié.
Quand il le regardait, Jungkook se demandait depuis quand son frère aîné portait une si petite once d'intérêt à tout cela. Le mariage, l'amour...Jungkook savait ce que ce c'était, pour preuve, ses parents les avaient élevés dans l'amour et le respect, aucun d'entre eux n'avaient jamais manqué de rien et encore moins de présence. Pourtant, Jungkang avait été élevé à la dure, peut-être était-ce parce qu'il avait été le premier et il arrivait à Jungkook de se demander s'il aurait été comme lui dans le cas contraire.
— Hyung ?
— Hm ? lui répondit son aîné en relevant la tête de son arme qu'il admirait.
— Tu vas vraiment te marier ?
— Oui Jungkook, je vais me marier. J'ai déjà trente ans, tu sais.
— Et alors ?
— Et alors il est temps pour moi de commencer à concevoir ma propre famille, tu ne crois pas ?
— La nôtre ne te suffit déjà plus ?
Jungkook vit son frère sourire, puis ranger son arme avant qu'il ne lui fasse signe de le suivre, et ensemble, ils se rapprochèrent de Jungwan, s'asseyant tout de même un peu plus à l'écart.
— Qu'est-ce que tu vas t'imaginer, petit frère ?
— Je disais juste ça...comme ça, avoua Jungkook en haussant les épaules. Je ne me souviens pas t'avoir entendu parler à nos parents d'une conquête qui aurait retenu ton attention.
— Et quand est-il de toi alors, toi qui est dans la fleur de l'âge ?
Son frère le taquinait, mais lorsque Jungkang le faisait, c'était toujours avec simplicité. Alors, Jungkook se mit à sourire, puis à rire.
— J'ai encore le temps, tu ne crois pas ?
— Si on en croit les paroles de Eomeoni, oui.
— Elles me suffisent.
— Jungkook, commença doucement son frère. Elle ne pourra peut-être pas toujours te protéger.
Avec toute la délicatesse qui était la sienne, Jungkook comprit à quoi son frère faisait allusion. Son attirance pour les jeunes hommes n'était pas un secret pour les membres de sa famille, et si Jungwan s'en moquait et trouvait cela indigne, Jungkang lui, n'avait vraiment jamais émis d'avis sur la question.
— Je m'amuse Hyung, je ne fais rien de mal.
— Si tu le dis alors...j'ai entendu Abeoji parler avec le père de la famille Park. Yuri est un très bon parti, et c'est une très belle femme.
— Hm...au moins, elle n'a pas le caractère de Yu.
— C'est vrai qu'elle a du caractère, rit son frère. Mais dis-moi, Yuri n'est-elle pas à ton goût ?
— Elle à ton âge, Hyung...
— Qu'est-ce que tu insinues, hein ? se moqua son frère en lui ébouriffant les cheveux. Essayes-tu de dire que ton vieux frère est déjà à l'aube de la mort ?
— Non, Hy...Hyung, arrête ! Non, je...
Jungkook se mit à rire à son tour, et repoussa gentiment son aîné. Il se redressa puis, après avoir expiré, haussa les épaules.
— Je ne suis pas encore décidé sur la question.
— C'était à prévoir pour un jeune homme qui se préoccupe plus de ce qui se trouve sous les pantalons que sous les jupes, se moqua Jungwan.
Jungkook essaya de l'ignorer, mais il ne put faire taire son rire enfantin qui le rendit nerveux.
— Pas vrai, Jungkook ? Ne sera t-il pas trop tard lorsque tu auras fait tout ce qui aura été en ton pouvoir pour déshonorer cette famille ? Les rumeurs ne te suffisent-elles déjà pas ? Ou bien va t-il falloir que tu ailles chercher plus loin que les remparts de la ville pour satisfaire tes env...
— Tu devrais te taire, Jungwan.
A l'annonce de la voix autoritaire de leur aîné, Jungwan perdit son rictus et baissa les yeux. Il avait toujours fait le malin devant Jungkook, mais devant Jungkang, il n'avait jamais pu garder la tête haute. Ils étaient frères, certes, Jungkang le respectait pour son travail et le statut qu'il commençait à se construire, mais en dehors des devoirs familiaux, il n'avait jamais construit de lien aussi fort que celui qu'il pouvait avoir avec son cadet.
— Je ne crois pas t'avoir invité dans notre conversation, et je croyais que tu avais encore beaucoup de travail, pas vrai ? N'as-tu déjà pas fait assez pour avoir interrompu notre entraînement, toi qui ne sais même pas tenir un sabre entre les mains ?
Jungkook se mit à sourire, fier de voir son grand frère prendre sa défense. Il ne savait pas si Jungkang acceptait son mode de vie, et à vrai dire, grand bien lui fasse si c'était le cas ou non. Néanmoins, il remerciait le ciel de pouvoir compter sur son autorité lors de moments comme celui-ci.
Vexé, Jungwan finit enfin par tirer sa révérence, faisant mine de devoir partir pour reprendre son travail dans un endroit plus calme, avait-il dit. Lorsqu'ils furent seuls, Jungkang fit venir une servante pour qu'on leur apporte de quoi boire, à la surprise de Jungkook qui ne s'attendait pas à toucher à une goutte de liqueur aussi tôt dans la journée.
Ils reprirent assez vite leur discussion, débattant sur les nouveaux exploits de Jungkook mais aussi discutant des nouvelles du front. Jungkang lui conta alors ses quêtes, il n'omit aucun détail pour le plus grand bonheur de son cadet, qui l'écouta avec des étoiles dans les yeux. A plusieurs reprises, une petite voix au fond de sa tête fit apparaître dans ses pensées les paroles qu'il avait échangées avec Taehyung au sujet de la guerre et du métier de soldat. C'était une vision des choses assez intéressante, peut-être, pour quelqu'un qui n'avait jamais pensé à se battre pour son pays.
Quoi qu'il en soit, Jungkook garda ces pensées pour lui et n'en fit pas cas à son aîné, qui avant de partir, le regarda avec fierté en lui rappelant qu'il était une bien meilleure version de lui-même et de Jungwan réunit, et qu'un jour, il accomplirait des exploits inoubliables, tant, que son nom serait à jamais une légende.
Après une longue discussion, Jungkang s'excusa auprès de son cadet, et s'en alla, faisant promettre à Jungkook que le prochain entraînement serait plus dur encore. Pas peu fier, Jungkook accepta le défi et le regarda s'en aller, avant que le devoir ne l'appelle.
Ainsi, Jungkook se rendit à la maison des précepteurs pour suivre ses cours particuliers en compagnie de Seokjin, qui à aucun moment ne lui évoqua le nom de Taehyung. Quelque part, Jungkook s'y était préparé, se disant que peut-être, le fait de partager le même précepteur lui apporterait un peu de ses nouvelles.
Il s'était trompé.
Après ses cours, Jungkook rejoignit Jimin et sa belle bande à Gatak. Une fois encore, une petite partie de lui espérait le voir assis à cette petite table dans le recoin de la salle, mais ce fut vain. Alors, Jungkook se contenta d'écouter les nouvelles histoires et plaintes de Jimin, avant qu'il ne le quitte en premier pour se rendre à sa maison.
En chemin, Jungkook croisa quelques gens du palais qu'il salua avec politesse. La plupart des personnes qui l'arrêtaient en route étaient des courtisanes de la cour, souvent, bien trop souvent éprises des bienfaits de sa mère. Cependant, Jungkook prenait le temps de leur faire la discussion, bien qu'il n'y comprenait pas toujours grand-chose et repartait toujours avec ce même sourire charmeur.
Arrivé chez lui, Jungkook eut à peine le temps de se rendre à son pavillon que l'on vint l'interpeller à la demande de son père. Surpris mais pas moins peureux à cette annonce, Jungkook se rendit donc au grand salon. Son père travaillait toujours beaucoup, il avait une place extrêmement importante au palais en plus d'être l'un des amis les plus proches du roi. Cette relation avait sûrement été une chance, depuis toujours. Jungkook ne s'en était jamais réellement préoccupé, mais il fallait dire que d'avoir des parents proches de la famille royale pouvait vous sauver de bien maintes situations.
C'était par ailleurs nul autre que sa mère, chamane du palais, ou autrement dit, médecin, qui avait réussi à convaincre leur bon Roi de ne pas marier sa fille à son fils. De ce fait, elle avait octroyé une immense liberté à son enfant, lui permettant ainsi de croquer la vie à pleine dent, comme il l'avait toujours souhaité.
— Ah, fils, tu es la !
— Abeoji, se courba Jungkook pour le saluer. Vous m'avez fait appeler ?
— Oui oui, je souhaitais que l'on discute, toi et moi. J'ai pu m'entretenir avec ton frère avant ton retour. Il m'a fait part de tes progrès, mon fils.
— Oui, Abeoji.
— Sans nul doute que tu seras un grand guerrier, Jungkook. Tu honoreras la dynastie des Jeon, n'est-ce pas ?
— Oui, Abeoji.
— A ce propos, Jungkook...je voulais te parler à propos de ces rumeurs...
Pas encore, pensa Jungkook.
Il voulut lever les yeux au ciel, mais par respect, dut se retenir.
— Tu sais que je n'ai jamais tenu compte de toutes ces paroles qui se propagent dans les airs de notre ville. J'ai toujours été fier de mes fils, et encore plus de l'homme que tu souhaites devenir. Je crois en toi Jungkook, je crois en tes capacités. Mon sang coule dans tes veines mon fils, et je sais que tu en feras bon usage. Cela dit, il est temps de nous interroger sur ton futur.
— Que voulez-vous dire, Abeoji ?
— Je te parle de ton avenir de soldat, mon fils. Je te parle aussi de ton avenir en tant qu'homme. Je...j'ai toujours fermé les yeux sur...comment dire, tes préférences, comme dirait ta mère. Je ne souhaite pas faire entrave à ta liberté, tu es un homme, et un Jeon. Nous avons la tête dure, mon fils. Mais en tant que père, je me dois de te rappeler tes devoirs.
— Sauf votre respect, Abeoji, je suis tout à fait conscient de ce qui doit l'être.
— Evidemment, c'est ainsi que nous t'avons élever, mon fils. Évidemment, reprit son père en croisant les mains dans son dos. Mais tu grandis à une vitesse folle Jungkook et...Il serait peut-être temps pour toi de faire des choix et de te concentrer sur cet avenir dont je te parle...
— Abeoji...
— Ne pense pas que j'essaye de convaincre d'une chose que tu ne voudrais pas, par tous les Dieux, ta mère me tuerait. Non, j'essaye seulement de...Jungkook...Je me fiche de qui tu peux t'éprendre ou bien de qui peut finir dans tes draps, mais tu es promis à l'aînée de la famille Park.
— Abeoji, si vous...
— Yuri est un très bon parti, c'est une femme pieuse et très belle, n'est-ce pas ? Ta mère et moi avons pensé qu'elle serait le choix parfait pour une homme comme toi, elle ne te causera jamais d'ennui et sera une femme digne de l'homme que tu es. J'y crois sincèrement. Mais Jungkook, à propos de...à propos de ces préférences...Tu vas devenir soldat, Jungkook.
— Si vous saviez le nombre de soldats que j'ai déjà séduit Abeoji, souffla Jungkook sans peine.
Son père ne fut pas surpris par sa franchise. Jungkook était son fils, et comme lui, il avait été un vrai petit garnement dans sa jeunesse. Il était bourreaux des coeurs et volage, ne tenait qu'à sa propre liberté, et le jour de sa rencontre avec sa femme, son coeur en prit un coup.
— Soit, mon fils, soit...Ce que j'essaye de te dire Jungkook, c'est que nous avons fait cette promesse, tu te souviens ? Ta mère s'est démenée pour t'éviter ce mariage avec la jeune fille du Roi, et bien que je n'étais pas entièrement pour, je n'ai pu contredire ta mère lorsqu'elle a avoué que c'était ton choix. Ceci dit, tu ne pourras pas finir seul et nous avons arrangé cette alliance avec la famille Park.
— J'en suis conscient, Abeoji.
— Jungkook, le Roi t'apprécie énormément, il t'a déjà vu à l'œuvre et me partage souvent sa hâte de te voir enfin dans les rangs de son armée. Oh, Jungkook...Tu seras même un grand guerrier, tu auras toutes les gloires que tu mérites, mon fils. Mais par pitié, Jungkook, il est grand temps que tu deviennes un peu plus sage...
— Suis-je sot, Abeoji ?
— Je t'interdis de dire cela, s'énerva presque son père. Tu es un Jeon, Jungkook. Ta mère te connait mon fils, elle sait que tes...penchants auraient pu être dangereux pour toi si tu avais fini enchaîné à la famille royale. Ne nous préoccupons plus de cela, désormais. Je refuse simplement que tu ne te fasses couper la tête, et t'avoir en tant que guerrier sera bien plus utile à notre pays.
Jungkook ne répondit pas, mais il eut envie de sourire. C'était presque amusant de voir son père hésiter dans ses paroles. Il avait cette chance d'entretenir une très bonne relation avec ce dernier, bien que l'amour qu'il portait à sa mère était encore plus fort. Jungkook savait que son père ne pourrait jamais rien lui imposer, tant que sa mère serait vivante. Il se demandait même parfois, si après sa mort, il continuerait d'être aussi dépendant de son avis et de ses décisions.
Alors, Jungkook resta muet et écouta son père débattre sur le sujet, acquiesçant parfois ici et là, et comme à chaque fois qu'il n'était pas occupé, toutes ses pensées se dirigèrent de nouveau vers Taehyung.
Il se demandait ce qu'il pouvait faire, maintenant qu'il se retrouvait démuni de ses passions. Cela lui faisait presque de la peine, et aussi, Jungkook se demanda quelle aurait été sa réaction lors d'une entrevue pareille avec son propre père. Dans ses souvenirs, il se rappelait avoir entendu Taehyung lui dire que ses relations avec son père étaient difficiles.
Taehyung aurait-il pu se battre contre un mariage demandé par la famille royale ? Aurait-il pu s'en sortir et se battre pour sa liberté ?
La réponse à la question fut presque évidente, quand soudain, un parfum qu'il pouvait reconnaître entre mille embauma les cœurs de la pièce.
— Voyons, voyons...N'essayes-tu pas de profiter de mon absence pour encore tenter de pousser ton fils vers un choix qui ne serait pas le sien ?
Voyant arrivé sa femme, le père du jeune homme se redressa et lui tendit la main.
— Mi-Ri, je n'aurais pu manquer votre arrivée.
— Cessez donc vos charmes, rit sa femme avant de jeter un doux regard sur son enfant. Jungkook, approche.
Sans se faire prier, Jungkook écouta sa mère et approcha à sa hauteur. Elle le regarda avec tendresse, passa une main sur sa joue tout en pensant ô combien elle était fière d'avoir pu hérité d'un enfant pareil. Au fond, Mi-Ri était une femme fière et honnête, elle n'avait jamais voulu choisir l'avenir de ses enfants à leur place, et même si Jungkook était le plus enjoué de sa fratrie, elle n'était pas moins heureuse de pouvoir l'appeller fils.
— Ce qu'essaye de te dire ton père est que le temps passe, Jungkook. La liberté dépend de nous, et bientôt viendra le moment de savoir faire les bons choix afin de pouvoir continuer de la chérir. Nous ne pouvons pas nous battre contre notre coeur, mais il faut parfois agir avec son ennemi, la raison, pour le garder en bon état.
— Le cœur à ses raisons que la raison ignore, vous me le dites déjà bien souvent, sourit Jungkook.
Sa mère le lui rendit, et l'attira dans ses bras.
— Quoi que tu fasses, tu seras toujours libre, je serai toujours fière et tu seras toujours mon fils. Mais Jungkook, mon fils...Il est temps de grandir et de penser aussi aux autres, avant de penser à soi.
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