Alors que la soirée tirait à sa fin, la foule commençait à se disperser. Les conversations s'estompaient, et le murmure des voix se mêlait aux sons feutrés de la musique d'ambiance. L'éclat des lumières semblait s'atténuer, créant une atmosphère de fin de fête où chacun se préparait à quitter les lieux.

Damien et moi étions sur le point de partir. Nous avions réussi à maintenir notre façade tout au long de la soirée, malgré les nombreux défis que nous avions rencontrés. Je m'étais efforcée de jouer mon rôle avec conviction, en espérant que tout le travail fourni pour préserver notre couverture n'était pas vain.

La semaine passa à une vitesse folle, rythmée par les obligations, les événements sociaux et les préparatifs pour le weekend à venir. Le souvenir de la soirée restait gravé dans mon esprit, mais ce qui m'obsédait le plus était l'absence de nouvelles de Lucas. Je m'attendais à ce qu'il tente de me contacter, mais rien. Pas un signe. Son silence ne faisait qu'accentuer mon inquiétude, comme une ombre grandissante au-dessus de la mission que je m'étais imposée.

Chaque jour, je me trouvais en proie à l'anxiété, essayant de trouver le bon moment pour aborder la question avec Sophia. Cependant, chaque tentative de conversation se soldait par un échec. Quelque chose en moi me retenait. Peut-être étais-je simplement terrifiée à l'idée de bouleverser davantage Sophia, de troubler son calme apparent avec des révélations qui risquaient de l'ébranler profondément. Peut-être aussi avais-je peur de ne pas pouvoir lui offrir de certitude. Sans preuve tangible, sans confirmation que Lucas était bel et bien le père de son enfant, que pouvais-je réellement dire ?

Je passais les jours suivants à me torturer l'esprit. Devais-je tout lui dire maintenant, sans avoir de preuves concrètes ? Ou devais-je attendre, fouiller davantage, essayer de découvrir si Lucas était vraiment celui qu'elle cherchait ? Cette décision me pesait, et je me retrouvais à douter de mes choix.

Sophia, de son côté, ne semblait pas se douter de mes hésitations. Elle continuait à vivre son quotidien avec cette douceur et cette sérénité que je lui connaissais, bien que je pouvais parfois discerner une lueur de tristesse dans ses yeux, comme si elle aussi portait un fardeau invisible.

Les seules informations que Sophia m'avait données concernaient la chambre d'hôtel où elle avait rencontré cet homme mystérieux. Elle se souvenait des moindres détails de cette pièce : le lit king size, les rideaux épais qui bloquaient la lumière, l'odeur boisée qui flottait dans l'air, et surtout, la vue imprenable sur la ville illuminée. Mais hormis ces détails, elle ne pouvait rien me dire de plus. Pas un nom, pas un indice sur l'identité de cet homme.

Je me retrouvais donc avec ces fragments d'informations, tentant de reconstituer un puzzle complexe dont il me manquait encore les pièces essentielles. Mon esprit travaillait sans relâche, envisageant chaque possibilité, chaque scénario où Lucas pourrait être le père de l'enfant. Mais rien n'était sûr. Rien n'était clair.

Pendant ce temps, Damien semblait concentré sur ses propres préoccupations. Son père continuait à exercer une pression palpable sur lui, et je pouvais sentir que quelque chose se tramait dans l'ombre, quelque chose que Damien ne me disait pas. Nous n'avions pas reparlé du weekend à venir, mais je savais que cela pesait sur lui autant que sur moi. Le calme apparent de la semaine cachait en réalité une tension sous-jacente, prête à exploser à tout moment.

Finalement, le vendredi arriva. Nous étions sur le point de partir pour ce fameux weekend familial, et je savais que cela marquerait un tournant dans notre histoire. La voiture qui devait nous conduire au domaine familial était prête, et Damien, vêtu avec son habituelle élégance, semblait calme en apparence, bien que je pouvais percevoir la même anxiété que je ressentais moi-même.

Alors que nous nous apprêtions à partir, je pris une grande inspiration. Ce weekend pourrait bien être l'occasion d'obtenir enfin des réponses, non seulement sur ce que cachait Damien, mais aussi sur ce que Lucas faisait dans cette soirée. Je savais que je devrais être sur mes gardes, prête à saisir la moindre information, le moindre indice.

Sophia était restée silencieuse ces derniers jours, et je n'avais pas osé lui parler de mes soupçons. Peut-être que le moment viendrait, mais pour l'instant, il était plus sage d'attendre. Attendre de voir ce que ce weekend allait révéler. Car, en plus de jouer mon rôle de fiancée, je devais aussi mener cette enquête discrète pour Sophia.

Le trajet jusqu'au domaine familial allait être long, et je savais que cela me laisserait amplement le temps de réfléchir. En fixant l'horizon par la fenêtre de la voiture, je me promis de rester vigilante. L'avenir de Sophia, et celui de son enfant, dépendaient peut-être de ce que j'allais découvrir.

Nous nous dirigions vers la sortie, Damien me tenant par la taille avec une assurance tranquille qui contrastait avec l'agitation intérieure que je ressentais. Chaque pas semblait me rapprocher du soulagement, lorsque soudain, la voix grave du père de Damien résonna dans le hall, perçant le bruit de la soirée.

— J'espère que tu n'as pas oublié ce weekend, Damien.

La voix était empreinte d'une froideur autoritaire, et je me sentis instantanément tendue. Damien, qui était déjà en train de se diriger vers la sortie, marqua un temps d'arrêt. Il tourna légèrement la tête vers son père sans le regarder directement, puis répondit d'une voix calme mais ferme.

— Non père, je ne l'ai pas oublié.

Puis, avec un geste discret mais déterminé, il me prit par la taille de manière plus protectrice et nous continua de nous avancer vers la sortie. Je pouvais sentir la tension dans son geste, comme s'il tentait de se détacher de l'emprise invisible mais tangible de son père.

Je jetai un coup d'œil en arrière vers l'homme âgé, qui nous regardait avec une expression inscrutable. Son regard glacial semblait peser lourdement sur l'atmosphère, et je sentais que la tension entre père et fils était loin d'être résolue. Damien, en revanche, évitait délibérément tout contact visuel avec son père, comme s'il cherchait à se défaire de l'influence oppressive qu'il exerçait.

Une fois arrivés à la sortie, Damien me guida avec une détermination tranquille à travers le hall et vers la voiture qui nous attendait. Je pouvais voir les lumières de la ville se refléter dans les fenêtres de l'hôtel de luxe, et chaque pas semblait nous éloigner de l'atmosphère tendue de la soirée.

Lorsque nous montâmes dans la voiture, Damien se laissa tomber dans le siège avec un soupir de soulagement. Je pris place à ses côtés, tentant de calmer mes propres nerfs après l'intensité de la soirée. Damien avait l'air préoccupé, et le silence qui régnait dans la voiture en était une preuve muette.

— Est-ce que tout va bien ? demandai-je doucement, brisant le silence.

Il tourna lentement la tête vers moi, ses yeux montrant une lueur fatiguée mais déterminée.

— Oui, ça va. C'était juste... un rappel que les choses ne sont pas encore totalement sous contrôle. Mon père a une manière de rappeler les choses qui est tout sauf subtile.

Je hochai la tête, comprenant que la soirée n'avait pas seulement été un test pour moi, mais également pour Damien. L'interaction avec son père semblait avoir laissé une empreinte plus profonde que ce qu'il avait montré.

— Et pour le weekend, que se passera-t-il ? demandai-je, essayant de digérer les implications de cette conversation.

— Nous aurons un événement familial. Mon père est très attaché à ces rassemblements, et il veut que je sois présent pour une raison ou une autre. Il a une manière bien à lui de gérer les choses.

— Je vois. Je suis prête à affronter ce que cela impliquera.

Il me lança un regard appréciatif, puis se détourna en regardant par la fenêtre, les lumières de la ville défilant lentement à mesure que nous roulions.

La voiture continua de serpentiner à travers la nuit, et je laissai mes pensées vagabonder alors que la réalité des défis à venir se profilait. Nous avions encore beaucoup à faire pour convaincre tout le monde de la véracité de notre relation, et l'épreuve du weekend serait une nouvelle étape cruciale dans notre plan.

Alors que la ville disparaissait progressivement derrière nous, ses lumières s'évanouissant dans l'obscurité, je ne pouvais m'empêcher de ressentir une montée d'angoisse. Le silence dans la voiture devenait oppressant, et chaque seconde qui passait semblait allonger la distance entre nous et le monde rassurant des immeubles et des rues familières.

Je me tournai légèrement vers Damien, décidée à obtenir quelques réponses avant d'arriver au domaine familial. Après tout, il me devait bien quelques explications. Je n'étais pas seulement une figurante dans cette histoire, et plus j'en savais, mieux je pourrais jouer mon rôle.

—Damien... Ma voix se fit hésitante, presque timide. Peux-tu me dire ce qui nous attend ce weekend ? J'aimerais savoir à quoi je dois m'attendre.

Son regard noisette, habituellement si impénétrable, se posa sur moi. Cette fois-ci, il y avait quelque chose de différent. Une ombre, plus sombre et plus lourde, semblait voiler ses yeux. Cette même ombre que j'avais remarquée, la première fois que je l'avais vu dans cette chambre d'hôtel, lorsque tout avait basculé pour moi.

Il garda le silence un instant, le regard rivé sur la route, comme s'il cherchait ses mots. Puis, sans me regarder, il répondit d'une voix basse, presque murmure.

—Ce weekend ne sera pas facile. Mon père... Il marqua une pause, visiblement en proie à un conflit intérieur. Il est très... exigeant. Il s'attend à ce que je lui prouve que tout ceci n'est pas qu'une mascarade.

—Une mascarade ? répétai-je, le cœur battant.
C'est-à-dire ?

Damien tourna finalement son regard vers moi, et je pus voir toute la gravité de la situation dans ses yeux.

—Il n'est pas dupe. Mon père sait que quelque chose cloche. Et il est déterminé à découvrir quoi. C'est pour cela que j'ai besoin que tu sois irréprochable ce weekend. Tu devras jouer le rôle de ma fiancée à la perfection, quoi qu'il arrive.

Un frisson glacé parcourut ma colonne vertébrale. La perspective de devoir affronter le père de Damien, avec son regard glacial et son aura écrasante, me terrifiait. Mais quelque chose dans le ton de Damien, dans cette urgence qu'il dissimulait à peine, me fit comprendre que l'enjeu dépassait largement ce que j'avais imaginé.

—Pourquoi est-il si... suspicieux ? demandai-je, essayant de comprendre la situation.

—Il a toujours été comme ça. Pour lui, tout est question de contrôle, de pouvoir. Il veut tout savoir, tout régir. Il n'a jamais vraiment eu confiance en moi, et encore moins en mes choix. Ce weekend est une sorte de test, pour lui prouver que je peux me conformer à ses attentes, que je peux être celui qu'il veut que je sois.

Je sentis mon estomac se nouer. Jouer le rôle de la fiancée parfaite dans un contexte si hostile, sous le regard scrutateur d'un père autoritaire, serait une tâche ardue. Mais ce qui me préoccupait le plus, c'était le secret que nous tentions de protéger. Si le père de Damien avait des doutes, il pourrait bien les transformer en certitudes, et tout pourrait s'effondrer.

—Et si... Je peinais à formuler ma question. Et si jamais il découvrait la vérité ?

Damien détourna les yeux, son expression devenant encore plus sombre, si cela était possible.

—Nous ne pouvons pas nous permettre cette option. Ce serait catastrophique pour moi, pour toi... et pour bien d'autres personnes.

Un silence lourd s'installa dans la voiture, et je compris que Damien ne dirait rien de plus. L'atmosphère dans l'habitacle était devenue presque irrespirable, chargée de non-dits et de tensions.

Je tournai à nouveau mon regard vers la route, le cœur battant à tout rompre. La ville avait complètement disparu à l'horizon, et la nuit s'étendait maintenant devant nous, obscure et insondable, tout comme le futur immédiat qui nous attendait. J'avais cette étrange sensation que ce weekend ne serait pas seulement un test pour Damien, mais aussi pour moi, pour nous deux.

Je me promis de rester sur mes gardes, d'observer chaque détail, chaque réaction. Il ne s'agissait plus seulement de jouer un rôle, mais de survivre à cette épreuve. Ce weekend allait être déterminant, et je devrais me montrer à la hauteur, coûte que coûte.