Alex et Catherine étaient assis dans la salle. La même salle que la dernière fois, mais plus lumineuse. Des cadres contenant des unes et diverses photos étaient visibles. Le bruit incessant des téléphones et des discutions se faisait entendre de partout. Le vide avait laissé place à la vie.

Assis, ils attendaient M.Olivier.

Alex passa la main sur son crâne, fatigué. Il semblait avoir un mal de tête, et celui ci lui faisait ressentir chaque battement de son cœur de manière douloureuse. Sa mère, à coté, tenait fermement son collier argenté et avait les yeux fermés. L'anxiété l'avait envahie, le visage terrorisé d'Alex hantait sa mémoire.

La porte s'ouvrit brutalement. Le journaliste entra dans la salle, accompagné de deux cameramans.

-Bonjour à vous ! Je vois qu'on vous a déjà conduit à ma salle, dit-il, tout en se dirigeant vers son siège, de l'autre coté de la table.

-Oui, répondit froidement Catherine, les lèvres contre son pendentif en forme d'étoile.

Mr.Olivier s'installa et sortit son dossier. Il se mit à le lire, tout en passant la main sur sa fine barbe. Les deux cameramans s'installèrent à ses cotés, et commencèrent à tourner.

-Bien. Comme vous le savez, j'ai dû interrompre la séance de la dernière fois pour quelques hum..différents, mais j'espère que nous repartirons du bon pied aujourd'hui et que nous ferons du bon travail, dit-il en cherchant l'attention d'Alex, qui lui ne le regardait pas, les yeux couverts par ses cheveux bruns.

Le journaliste se pencha en avant, les yeux vers Alex.

Pourrons nous coopérer ? Dit-il d'une voix calme.

Alex leva la tête et regarda Mr.Olivier, toujours aussi froid. Il ne voulait pas s'adonner à cet interview sans savoir comment ce journaliste avait trouvé le message de Jekki.

-Pas avant d'avoir su comment vous avez trouvé le message, lança t-il, le défiant presque.

Le journaliste esquissa un sourire.

-Pendant mes recherches. Je l'ai trouvé quelque part.

-Dites m'en plus, soutint Alex.

-Aux dernières nouvelles c'est moi qui pose les questions ici. C'est moi qui commande. Sûrement pas toi, envoya alors Mr.Olivier, d'un ton grave et autoritaire. Celui-ci ne supportait pas l'attitude d'Alex et n'aurait pas manqué de le faire savoir. Cependant, il se devait de rester le plus calme possible, afin d'éviter un quelconque accrochage de plus avec Alex, qu'il avait deviné très irritable.

Ce dernier s'était justement calmé, tout du moins verbalement. Il continuait de fixer le journaliste, douteux. Sa mère elle, semblait ailleurs, tenant toujours son pendentif.

Mr.Olivier déglutit, puis inspira un coup.

-Fort bien. Cet interview sera basé sur ta première rencontre avec Crystal-Neige, ou bien Jekki, suivant les prénoms. Je voudrais savoir comment tu l'as rencontrée, comment..tu as croisé son chemin.

Catherine posa sa main sur celle d'Alex, en le regardant. Pour la première fois depuis longtemps, il ne retira pas sa main.

Parler de sa première rencontre. Voici le premier défi auquel il se voyait exposé : Parler à cet homme intriguant de sa première rencontre avec l'Être qui avait illuminé sa vie, et sortir de sa carapace froide et austère avec laquelle il se protège depuis la disparition de Jekki. Il ne l'aurait jamais fait face à un journaliste normal, mais le dénommé M.Olivier dégageait quelque chose de différent. Il savait des choses et semblait être véritablement intéressé par l'affaire, selon lui. En clair, la meilleure personne à qui s'adresser..ou la pire. Néanmoins, il décida de se lancer. Il humecta ses lèvres et gratta ses cheveux. Le journaliste le regardait attentivement.

-Eh bien..c'était en novembre dernier. Il devait être environ 21h et je roulais à vélo sur une petite route de campagne, près des champs. J'étais sorti d'une soirée « entre amis » qui avait mal tournée. Il pleuvait, et la route était très humide. Personne ne circulait à cette heure là, et encore moins sur ce temps. Peu à peu, à la seule lumière du phare de mon vélo, j'aperçus une silhouette se tenir sur la clôture de bois qui délimitait la route et les champs. C'était Jekki. Elle se tenait fébrilement, était toute pâle et blessée. Elle était seulement vêtue d'une longue tunique blanche toute trempée. Je me suis arrêté. Elle ne disait pas un mot malgré toutes mes questions. Son visage fin et pâle était recouvert de cheveux mouillés, et elle tremblait. Malgré la température assez basse qu'il faisait cette nuit, son corps était étonnamment chaud, elle suait. J'ai donc décidé de l'emporter avec moi sur mon vélo pour la loger chez moi, estimant qu'elle avait besoin d'aide. Son état s'était rétabli pendant les jours qui ont suivi. Voilà comment ça a commencé.

M.Olivier, qui avait sorti son ordinateur, pianotait sur son clavier, puis il s'arrêta. Il leva les yeux de son écran, et sortit un stylo qu'il fit pivoter avec les doigts de sa main gauche. Il lança froidement :

-Tu ne m'en dis pas assez.

Alex regarda le journaliste avec confusion. Son récit ne lui avait pas suffit. Son ouverture, bien que charitable, et tout à fait étonnante aux yeux de sa mère ne suffisait pas au mystérieux journaliste.

-Comment ça ? Interrogea-t-il d'une voix dubitative, je vous ai pourtant dit tout ce que vous m'avez demandé. 

Le visage du journaliste se referma. Il prit une légère inspiration, en relevant la tête d'un air dédaigneux. Son stylo pivotait toujours plus frénétiquement. 

-Tu ne m'as rien dit. Tu n'a pas détaillé, ou alors tu as donné des détails dont je me fiche éperdument. Sorti d'une fête entre amis..mais qu'est-ce que j'en ai à faire.., dit il en lâchant un rire puis en reprenant immédiatement son sérieux. Montrait-elle des spécificités ? Quelles questions lui a tu posées ? N'avais tu pas peur de sa différence ? N'avais tu pas peur de ce dont elle pouvait être capable ? Dis moi !

Le véritable profil du journaliste semblait se dessiner.

Catherine, dans la panique, eut l'envie d'intervenir. Elle lâcha son pendantif et déglutit.

-Pour..pour parler de ce dont elle est capable, il s'est passé quelque chose de très étrange sur mon fils il y a 4 jours..c'était en rapport avec Jekki...

M.Olivier hocha de la tête pour lui dire de continuer.

-Allez-y.

Soudainement, quand Alex était prit de l'envie de hurler de toutes ses forces, son mal de crâne s'accentua violemment, au point d'être énormément douloureux. Il voyait flou. Il compressa ses mains sur son crâne, et serra ses dents.

-Je..je voulais..juste la..secourir..

A peine cette phrase lâchée, tout devint trouble. Il entendait sa mère s'écrier devant lui, en le secouant, mais il n'arrivait pas à comprendre ce qu'elle disait, tout était trop trouble.

Trop flou.

Il ne sentait plus rien.

Il sentit son corps lâcher.

Il tomba au sol.