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XIII-UN JEU A DOUBLE TRANCHANT

Je dévisage mon patient d'un œil inquiet. Le sourire qu'il affiche ne me dit rien qui vaille. C'est toutefois le seul moyen que j'ai trouvé pour l'inciter à s'ouvrir un peu. Les protocoles d'interrogatoires conventionnels n'auront aucun résultat sur un homme comme lui. C'est pourquoi j'ai pensé y ajouter un peu de"piment". Et cela semble fonctionner d'ailleurs, c'est la première fois qu'il se montre coopératif. Il va falloir la jouer fine toutefois, si je veux profiter pleinement de cette opportunité. J'espère aussi pouvoir briser définitivement la glace avec lui par le biais de cette expérience.

- Okay. Lâche-t-il après une minute de réflexion. Mais c'est moi qui pose une question en premier.

- Très bien. Je concède. Je vous écoute.

- Pourquoi une charmante jeune femme comme vous a-t-elle choisi ce métier barbant de psychiatre ? Vous aimez voir s'étaler devant vous toute la misère du monde ?

- Ca fait deux questions, pas une ... J'objecte.

- Elles sont liées. Et puis vous êtes si "brillante", vous n'aurez aucune peine à vous sortir de deux questions à la fois.

Matthew m'observe d'un air goguenard. Il m'a sciemment dispensé la même flatterie que moi tout à l'heure à son égard.

- Eh bien je suppose que c'est en partie parce que depuis toute petite, j'ai toujours aimé les enquêtes. Analyser, recouper les événements pour découvrir peu à peu les dessous d'un mystère. C'est en quelque sorte ce que fait le psychiatre avec l'insconscient des patients. Et je n'apprécie pas plus que vous de faire rejaillir les blessures enfouies des personnes dont je m'occupe. Ce qui me motive au contraire, c'est de parvenir à les en libérer. C'est un sentiment exaltant, j'ai vraiment l'impression d'être utile en ce monde lorsque cela arrive.

- Et ça marche à chaque fois ? Vous avez libéré chacun de vos patients de leur fardeau jusqu'à aujourd'hui ?

Le chanteur m'observe avec intérêt. Toute trace de moquerie a disparu dans ses paroles. Il s'est penché vers moi, visiblement très intéressé par mes propos. Sans doute la souffrance qu'il s'évertue à refouler devient elle aussi un bien lourd fardeau à la longue.

- Je ne vais pas vous mentir. Ca ne fonctionne pas à tous les coups. Mais en ce qui vous concerne, je suis persuadée que nous y parviendrons. Vous avez toutes les ressources en vous pour guérir de vos douleurs et rebondir, j'en suis certaine.

En dépit de l'énoncé de mes convictions, je remarque que ma réponse le déçoit terriblement. Son visage se crispe et son corps s'affaisse légèrement. Mon cœur se serre. J'aimerais tellement pouvoir le soulager de ses démons qui l'oppressent. Mais ce n'est pas en me laissant aller à mes émotions que je peux lui venir en aide. Je dois me reprendre et conserver ma neutralité. Rester concentrée sur l'entretien.

- C'est à moi de vous poser une question, j'énonce doucement.

Je temporise un instant en m'humectant les lèvres. Comment va-t-il prendre cette demande ? Je me décide enfin.

- Pouvez-vous m'éclairer sur la nature exacte du lien qui vous unit, Dominic et vous ?

Matthew lève les yeux sur moi, surpris. J'ai conscience qu'une telle requête lâchée de but en blanc peut paraître brutale, mais je tiens à sortir mon patient de sa "zone de confort", le bousculer un peu. Et j'ai l'intuition qu'il y a quelque chose à creuser de ce côté-là.

- Qu'entendez-vous par là ? Rétorque-t-il d'un ton glacial.

Ses yeux se sont plissés et il me fixe sévèrement.

- Rien d'autre que ce que je vous demande. Votre relation avec lui est si ... fusionnelle. J'aimerais comprendre, c'est tout.

- Vous voulez vous repaître d'histoires sordides, comme tous ces gens qui se ruent sur les tabloïdes regorgeant d'anecdotes aussi sulfureuses que mensongères ?

- Pas du tout, Matthew. Fais-je en posant instinctivement une main sur ma chemise cartonnée, dans laquelle se trouve justement l'une de ces revues. J'ai besoin d'en savoir plus sur vous et votre entourage. Et je vois que votre amitié avec Dominic est très importante à vos yeux. Peut-être se substitue-t-elle à quelque chose qui vous manque par ailleurs ...

Je remarque avec soulagement qu'il se détend un peu. Je devrais être plus prudente à l'avenir dans mes propos, si je ne veux pas le braquer pour de bon.

- De plus, j'ai répondu sincèrement à vos premières questions, donc c'est à votre tour.

- Dom est mon meilleur ami. Marmonne-t-il entre ses dents.

- Oui, je sais. Mais quelle est la nature de la relation que vous entretenez avec lui ? Est-ce-

- Vous voulez dire, est-ce qu'on couche ensemble ? Me coupe-t-il d'un ton railleur. Employez les termes adequats, cher docteur ...

- Si vous préférez l'entendre ainsi.

- Je vais sans doute vous décevoir, mais non. Et ça n'est jamais arrivé. Les gestes affectueux en public sont juste un jeu entre nous. Ça amuse nos fans. Et puis Dom est fiancé.

- Ah oui ?

- Oui. Murmure-t-il en grimaçant légèrement, les yeux dans le vague. Avec la merveilleuse Chiara.

Je reste silencieuse. Il affiche un tel dédain à l'évocation de la compagne de Dom. Sa jalousie est manifeste. Pourrait-il s'agir d'un élément à l'origine de son mal-être ? Sans parler de ce prénom, Chiara. Aux sonorités très proches de celui de la femme dont il se prétend fiancé ... Serait-il envieux de l'existence que mène son ami au point de se fabriquer inconsciemment la même vie ? J'ai le sentiment que la relation entre les deux hommes est plus complexe qu'il ne veut bien l'admettre, et je note dans un coin de ma tête de revenir ultérieurement sur cet aspect.

- A mon tour, maintenant.

Perdue dans mes conjectures, je pivote la tête vers lui sans comprendre. Sans me laisser le temps de réagir, il embraye aussitôt :

- Vous avez fini vos études dans cet hôpital ? J'imagine que vous avez effectué de nombreux stages, avant l'obtention de votre diplôme.

- Heu ... Oui bien sûr. Bredouillé-je, me demandant où il veut en venir.

- Alors je suppose que vous connaissez bien cet endroit. La bâtisse ressemble à un vrai labyrinthe, elle doit foisonner de salles étranges, n'est-ce pas ? Peut-être même avez-vous flirté avec de séduisants docteurs dans certaines de ces pièces ...

- Mais pourquoi ce genre de question ? Je rétorque vivement, fâchée.

- Vous me demandez bien si j'ai une relation amoureuse avec mon meilleur ami ...

Je l'observe en gardant le silence. Il n'a pas tort.

- Oui, je connais l'hôpital comme ma poche depuis quatre ans que j'y travaille. Et non, je n'ai pas flirté avec qui que ce soit ici, puisque j'étais déjà en couple lorsque j'ai effectué mon internat. Et ça n'a pas changé aujourd'hui, d'ailleurs.

- L'un n'empêche pas l'autre. Je l'entends murmurer. Puis il reprend d'une voix plus forte. Votre petit ami ne travaille donc pas ici ? J'aurais cru pourtant. Je vous imaginais bien pérorer avec lui sur tous les cinglés que vous avez reçu dans la journée, entre le fromage et le dessert ...

- Vous vous trompez, il travaille dans la banque. J'objecte sèchement. Et je n'ai pas pour habitude de divulguer des détails d'ordre médical en dehors de l'hôpital, sachez-le. Même à mon compagnon. Je suis tenue au secret professionnel.

Matthew me fixe avec un petit air triomphant. Manifestement, il se félicite intérieurement d'avoir pris le contrôle de la conversation à mes dépens, et d'être parvenu à me mettre hors de moi. Ce jeu l'amuse beaucoup, mais il semblerait malgré tout qu'il ait une idée bien précise en tête en me tirant ainsi les vers du nez.

- Je vous rappelle que c'est vous qui êtes censé répondre aux questions ici, Matthew.

- C'est vrai. Admet-il. Mais vous êtes tellement ... captivante.

Je sens la raillerie sous-jacente dans le propos. Toutefois, il me lorgne avec une telle expression de convoitise apparente que je ne peux m'empêcher de me sentir gênée. Décidément, cet homme sait manier l'art de brouiller les pistes.

- Parlez-moi plutôt de ce que vous écrivez. Je remarque que nombre de vos chansons ont un caractère très sombre, et elles évoquent de manière récurrente la notion de perte de contrôle de l'esprit ou du corps, par des interventions extérieures. Est-ce quelque chose qui vous hante ?

- Vous avez écouté mes chansons alors ? Fait-il, ignorant ma question. Qu'en pensez-vous, la musique de Muse vous a-t-elle séduite malgré son caractère peu conventionnel ?

- Oh ... Oui, c'était intéressant. Je murmure pour toute réponse.

J'évite le regard perçant de mon interlocuteur. Je préfère ne pas lui dire toute la vérité, même s'il est vrai que j'ai adoré l'album du groupe, Origin of Symmetry, et en particulier la voix du chanteur, si émotionnelle, si envoûtante. Si bien que j'ai écouté en boucle le disque pendant des heures, fascinée ... Mais ce serait lui donner une occasion supplémentaire de prendre l'ascendant sur la discussion que lui confier cela. Quand j'y songe, la situation est plutôt ironique. Matthew semble obsédé par cette peur de perdre le contrôle et pourtant aujourd'hui, c'est moi-même qui lutte en vain pour le récupérer contre sa volonté.

- C'est en effet un sujet qui me passionne. Déclare Matthew, daignant enfin me répondre. Il se perd peu à peu dans ses explications, le regard dans le vide. J'ai toujours eu cette image d'une société qui nous déshumanise et nous prive entièrement de notre libre-arbitre. C'est ce qui se passe d'ailleurs aujourd'hui. Elle efface nos particularités qui font de nous des êtres uniques, et façonne notre image extérieure et nos pensées. Et tout ça en nous faisant croire que c'est nous qui le souhaitons et que cela correspond à un idéal de vie. J'ai même vu une émission scientifique un jour, qui montrait des sujets dont on arrivait à manipuler le cerveau à l'aide d'impulsions électriques.

- Et vous même, vous pensez avoir subi cette manipulation de votre pensée ?

L'homme me fixe sans répondre. Même s'il ne le confie pas, je vois que cette question l'oppresse. Pense-t-il vraiment qu'on puisse lui avoir trituré le cerveau pour le rendre amnésique ? Modifier ses souvenirs ? Le diagnostic de délire paranoïde évoqué par Edward semblerait plausible dans ce cas. Un trouble dont le socle originel pourrait se trouver dans sa jeunesse, et qui se serait construit année après année, jusqu'à devenir insurmontable. C'est une hypothèse à envisager.

- Certainement en partie oui. Déclare-t-il enfin. Personne ne peut échapper totalement à la pression du monde qui nous entoure. Mais pas au point de penser avoir le cerveau raccordé à une machine, bien sûr.

Il lâche un petit rire pour souligner l'incongruité d'une telle idée. J'acquiesce avec un sourire. Toutefois, je ne sais pas pourquoi, mais j'ai la sensation que ses propos sonnent faux.

- C'est à moi de poser une question à présent ! S'écrie-t-il.

Matthew a retrouvé tout son aplomb et affiche à nouveau sa désinvolture coutumière. Je fronce les sourcils, redoutant ce qui va suivre. Il paraît avoir sa petite idée sur ce qu'il va me demander depuis un moment déjà et ce n'est pas bon signe. Un sourire taquin flotte sur ses lèvres et ses yeux pétillent de malice lorsqu'il lâche enfin :

- Vous avez l'air tellement propre sur vous, je doute que vous ayez ce genre de conversation avec votre petit ami banquier... Alors dites moi, quel est le fantasme le plus intime que vous aimeriez assouvir et que vous n'avez jamais osé avouer à votre compagnon ?

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